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GAGNANT DU TROISIME PRIX

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LAURÉATE DU DEUXIÈME PRIX DU CONCOURS DE RÉDACTION 2006 L’IMPACT DU TERRORISME SUR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE INTERNATIONAL Par : Nadine Khoury, Université de Sherbrooke e Dans l’histoire guerrière jusqu’au XX siècle, les États avaient la mainmise sur le potentiel de destruction à grande échelle. Encore lors des grands conflits mondiaux et de la 1 guerre froide, la menace d’une attaque de grande envergure provenait d’acteurs étatiques . Or, les attentats terroristes récents perpétrés à New York, Bali, Madrid, Berlin, Londres et Charm elcheikh sont le résultat de l’émergence de groupes organisés en dehors de cadres étatiques, qui détiennent aujourd’hui une puissance destructrice colossale. Le terrorisme seraitil le fléau du XXIe siècle? Alors que l’on fait remonter l’utilisation de la terreur à des fins politiques à l’époque de la Révolution française, le concept de terrorisme a évolué et a pris plusieurs formes depuis le e XVIII siècle. On distingue ainsi plusieurs types de terrorisme selon les visées politiques de 2 l’acte : étatique , politique, religieux ou raciste. On peut néanmoins définir le terrorisme comme étant l’usage prémédité, ou l’intention d’utiliser, une violence extraordinaire pour atteindre un 3 objectif politique par intimidation ou en cherchant à susciter la peur au sein d’un groupe . e La seconde moitié du XX siècle a connu l’émergence d’un terrorisme d’une nouvelle envergure. En effet, lorsqu’un incident terroriste implique des victimes, des cibles, des institutions, des gouvernements ou des citoyens d’un pays autre que celui dans lequel il survient, 4 on lui reconnaît alors une dimension transnationale . Tout comme les actes terroristes, les répercussions des attentats sont désormais de portée transfrontalière, pouvant par conséquent causer préjudice au développement économique international. 1 DAVID, Dominique,Sécurité : l’après New York, Paris, Presses de sciences po. 2002, p. 18. 2 Notons que certains auteurs considèrent qu’on ne peut parler de terrorisme étatique, malgré l’origine du terme qui remonte au gouvernement de Robespierre et de la terreur, puisque le terrorisme serait une violence essentiellement tournée contre l’État. 3  SANDLER, Todd et Walter ENDERS, « An Economic Perspective on Transnational Terrorism »,European Journal of Political Economy, vol. 20 ,no 2, juin 2004, p. 301. 4 Loc. cit.
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Les impacts à court terme Les conséquences économiques les plus immédiates d’un attentat terroriste sont évidemment la perte de vies humaines et la destruction d’infrastructures. On estime les coûts 5 directs des attaques du 11 septembre 2001 aux ÉtatsUnis entre 25 et 60 milliards de dollars . Parfois, ce sont des biens de production qui sont directement visés par les terroristes, par exemples des oléoducs. La paralysie des capacités de production en aval entraîne alors des coûts 6 supplémentaires à l’économie nationale . Dans un tel cas, les échanges internationaux du pays risquent d’être perturbés pendant la reconstruction et la remise en fonction des moyens de production atteints. Par ailleurs, le terrorisme vise à créer un fort effet psychologique perturbateur au sein de la population, en créant un sentiment d’insécurité généralisé en son sein. L’économie souffre inévitablement de la perte de confiance ainsi créée. Les consommateurs limitent leurs déplacements, bouleversant par le fait même la consommation et la production nationale puis les échanges économiques internationaux. Une étude publiée dans leEuropean Journal of Political Economy, évalue qu’une augmentation de 10% du nombre d’attentats terroristes dans un pays entraîne une réduction de 4% des échanges bilatéraux dans la même année, toute chose étant égale par ailleurs. De même, les échanges entre deux pays seront réduits de près de 10% par rapport à une situation normale, lorsqu’un des deux États est la cible d’un premier incident terroriste. Les effets sur les échanges économiques internationaux auraient néanmoins tendance 7 à s’estomper avec les années . La situation de l’économie américaine fut attentivement étudiée suite aux attentats du 11 septembre 2001 contre les tours du World Trade Center à Manhattan. Au lendemain des attentats, des enquêtes ont révélé une baisse des indicateurs globaux de confiance des entreprises et des ménages américains. L’indice de confiance a aussi diminué en Europe et au Japon, quoique dans une moindre mesure. Cette insécurité des marchés, laissant présager une baisse de 5  FREY, Bruno S., Simon LUNCHINGER et Alois STUTZER, « L’impact économique du terrorisme »,La vie économique, novembre 2005, p.5. 6  NITSCH, Volker et Dieter SCHUMACHER, « Terrorism and International Trade: an Empirical Investigation», European Journal of Political Economy, vol. 20, no 2, juin 2004, p. 424. 7 Idem, p. 428
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la demande et de la production, a provoqué une forte révision à la baisse de la croissance du PIB réel des ÉtatsUnis de 0.5 point pour 2001 et 1.2 point pour 2002. Bien que l’on prévoyait à l’époque des pertes cumulées de 500 milliards de dollars pour 8 le revenu national jusqu’à la fin de 2003 , les effets économiques s’étaient largement estompés quelque six mois après les attentats terroristes. La demande s’est normalisée au dernier trimestre de 2001 et le PIB a augmenté. On peut donc conclure que « le choc subi par les marchés 9 financiers [fut] largement transitoire» . Les effets négatifs des attentats ont pu être évités, d’une part grâce à une gestion ingénieuse de la crise par la Réserve fédérale, le gouvernement et le Congrès américain, et de l’autre grâce à une coopération internationale efficace. Une étude de Chen et Siems conclut que les marchés de capitaux américains modernes sont plus souples que jamais et qu’ils ont donc la capacité de surmonter une attaque terroriste ou militaire plus rapidement que les autres marchés 10 de capitaux globaux . Le contrecoup pourrait donc être plus important pour d’autres économies. Aussi, si le choc provoqué par les attentats terroristes dans le cas à l’étude ne fut que passager, un rapport de l’OCDE sur les conséquences économiques du terrorisme met en garde 11 contre les retombées à moyen terme sur le développement économique international . Les secteurs économiques affectés à moyen terme Les effets à moyen terme du terrorisme se concentrent généralement dans des secteurs spécifiques, soit la sécurité, le militaire, l’assurance et le transport. La sécurité et le militaire connaissent généralement une croissance après un attentat. Dans le cas des ÉtatsUnis, on attribue la reprise de l’économie au quatrième trimestre de 2001 à la consommation soutenue et à
8 OCDE, « Les conséquences économiques du terrorisme »,Perspectives économiques de l’OCDE, [En ligne], 2002, http://www.oecd.org/dataoecd/12/19/1935306.pdf, (Page consultée le 17 novembre 2006). 9 Loc. cit. 10  CHEN, Andrew H et Thomas F SIEMS, « The Effects of Terrorism on Global Capital Markets »,European Journal of Political Economy, vol. 20, no 2, juin 2004, p. 360. 11 OCDE,op. cit.
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12 de fortes dépenses publiques. Les dépenses militaires ont ainsi augmenté de 9% en terme réel . Les gouvernements de l’OCDE ont eux aussi accru les dépenses relatives à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme. Néanmoins, si le financement de la sécurité et des dépenses militaires a permis à l’économie américaine de se maintenir à court terme, le rapport de l’OCDE avance que « le renforcement des capacité militaires aura probablement un effet négatif à long terme 13 [bien que faible] sur la croissance économique » . Ainsi, les impacts sur le développement économique international ne peuvent être que préjudiciables. L’assurance demeure le secteur le plus atteint suite à un attentat terroriste, en raison de l’importance des réclamations des assurés condensées dans une même période. À titre d’exemple, les pertes assumées par le secteur des assurances et de la réassurance après le 11 septembre se chiffrent entre $30 et $50 milliards US. Malgré l’importance de cette somme, il n’y aurait pas eu de grande faillite dans le secteur des assurances, entre autres en raison de 14 l’étalement du risque entre un certain nombre de compagnies et de pays . Néanmoins, il se peut que des compagnies réduisent la garantie assurée en cas d’actes terroristes afin d’absorber un tel coût. La méfiance des prêteurs pourrait à son tour nuire à l’investissement et, conséquemment, au développement économique à l’échelle nationale et internationale. En outre, le transport et le tourisme sont durement touchés par le terrorisme, vu les pressions pour renforcer la sécurité aux frontières. Les nouvelles mesures de sécurité enchérissent les coûts du transport en portant atteinte aux échanges internationaux et à la croissance des pays entretenant des relations économiques avec l’État touché. Aux ÉtatsUnis, par exemple, on estime que le coût total des mesures de sécurité équivaut entre 1% et 3% de la 15 valeur des marchandises . Ce coût additionnel peut défavoriser le commerce international au profit du commerce intérieur et ainsi nuire au développement des échanges économiques transfrontaliers. De plus, le secteur du tourisme souffre des conséquences du terrorisme. Par exemple, quand l’Espagne a connu 18 attentats terroristes en 1988 (contre une moyenne de 13
12  LENAIN, Patrick Lenain, Marcos BONTURI et Vincent KEON, « The fallout from terrorism: Security and the economy »,The OECD Observer, mai 2002, p. 9. 13 OCDE,op. cit. 14 LENAIN, Patrick Lenain, Marcos BONTURI et Vincent KEON,op. cit., p. 12. 15 Idem, p. 14.
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16 attentats par an pour la période de 1970 à 1988), le tourisme a chuté de 30% au pays . De même, les attentats à Bali en janvier 2003 ont provoqué une baisse de la clientèle dans le secteur 17 du tourisme et entraîné quelque 100 000 personnes en chômage technique . Le contrecoup du terrorisme dans les secteurs du transport et du tourisme est particulièrement marqué dans les pays en voie de développement. D’abord, les exportations en provenance de ces États nécessitent des frais de transport plus élevésad valorem. Un accroissement de ces coûts défavorise les petites entreprises situées dans les pays en voie de développement par rapport aux grandes entreprises qui, elles, sont en mesure de supporter ces frais. Ensuite, une diminution du tourisme, causée par le sentiment d’insécurité des consommateurs des pays nordiques, bouleverse les économies fragiles pour lesquelles ce secteur 18 représente une part importante des activités économiques . Les effets économiques globaux Finalement, le terrorisme a des incidences économiques qui vont audelà des secteurs spécifiquement touchés. Dans un premier temps, le flux des capitaux étrangers peut souffrir des conséquences d’attaques terroristes puisque les investisseurs recherchent des endroits stables politiquement. Le volume des investissements directs aurait ainsi diminué en moyenne de 14% en Espagne de 1975/76 à 1991 en raison des attentats perpétrés par l’ETA. De même, il aurait reculé de 12% en Grèce pendant la même période en réaction aux nombreux attentats terroristes 19 dont le pays fut la victime . La formation de capital d’un pays atteint par le terrorisme est donc amoindrie par la régression des investissements directs étrangers, mais aussi par le recul du taux d’épargne. Les violences politiques en Israël auraient effectivement causé le déclin de celuici lors de la première Intifada de 1987. Le phénomène s’explique par une hausse de la consommation stimulée par le sentiment d’insécurité généralisé. Un règlement du conflit
16  FREY, Bruno S., Simon LUNCHINGER et Alois STUTZER, « L’impact économique du terrorisme »,La vie économique, novembre 2005, p.5. 17  MIGAUX, Philippe, « Panorama de la situation depuis 2004 », dans Gérard Chaliand et Arnaud Blin (sous la direction de),Histoire du terrorisme. De l’Antiquité à Al Qaida, Paris, Bayard,2006, p. 555. 18 OCDE,op. cit. 19 FREY, Bruno S., Simon LUNCHINGER et Alois STUTZER,op. cit., p. 5
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pourrait renverser la tendance en diminuant la consommation de 5% à 7% et en doublant le taux 20 d’épargne israélien . La croissance économique du pays visé est donc ébranlée par la régression des investissements directs et du taux d’épargne. Au surplus, les marchés boursiers peuvent être perturbés à long terme par le terrorisme. Des études estiment que le principal indice des actions en Israël aurait été supérieur en 2003 d’environ 30% à ce qu’il a véritablement été, si le pays n’avait pas connu les violences survenues au lendemain de l’échec du processus de paix de 21 2000 . Ces conséquences sur le développement économique affectent le revenu par habitant, 22 qui aurait décliné de quelque 10% au Pays basque espagnol à cause du terrorisme . Au surplus, les préjudices causés aux économies nationales risquent de se répercuter sur les échanges économiques internationaux, à l’ère du libreéchange et de la mondialisation des marchés. En définitive, les groupes terroristes détiennent aujourd’hui un capacité destructive à grande échelle dont les dommages s’évaluent bien audelà des dommages et des pertes de vie humaines directes, puisqu’ils s’attaquent au sentiment de sécurité de la population mondiale. D’un point de vue économique, les impacts de cette sécurité s’intensifient à moyen terme et se concentrent dans certains secteurs, principalement l’assurance, le transport et le tourisme. En portant atteinte aux économiques nationales, le terrorisme bouleverse les investissements directs étrangers et le commerce international et entrave le développement économique international. La lutte contre le terrorisme doit ainsi demeurer une priorité pour les États et la société civile, à travers une action concertée et soutenue qui surpasse les mesures strictement coercitives. Nous croyons que le développement économique international dépend d’une conjoncture harmonieuse de divers éléments parmi lesquels la sécurité internationale occupe une place importante. Néanmoins, la lutte au terrorisme doit s’abstenir de négliger d’autres facteurs inhérents au développement, dans une perspective plus globale du terme. À ce titre, l’ancien Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, affirmait dans son rapportDans une liberté plus grande, qu’ « […] il n’y a pas de développement sans sécurité, il n’y a pas de sécurité sans 20 Loc. cit. 21 Loc. cit. 22 Loc. cit.
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développement, et il ne peut y avoir ni sécurité, ni développement si les droits de l’homme ne 23 sont pas respectés » .
23  SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU,: développement, sécurité et respect desDans une liberté plus grande droits de l’homme pour tous, New York, Nations Unies, 24 mars 2005, A/59/2005, p. 6.
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SANDLER, Todd et Walter ENDERS, « An Economic Perspective on Transnational Terrorism »,European Journal of Political Economy, vol. 20, no 2, juin 2004, p. 301316. SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU,Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l’homme pour tousNew York, Nations Unies, 24 mars 2005, , A/59/2005, 72 p.
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