Les difficultés du consociativisme - article ; n°30 ; vol.8, pg 91-112
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Politix - Année 1995 - Volume 8 - Numéro 30 - Pages 91-112
The Difflculties of Consociativism.
Alessandro Pizzorno [90-112].
From the seventies, Italian politics has been characterized by a fundamental dualism between «¦manifest» politics (ideological oppositions, conflicts between projects of society) and «hidden» politics (consociativism, agreements between government and opposition parties in order to define legislative decisions and share political ressources). The logics of the latter have progessively become more important than those of the former, generalizing a consumerist relationship to politics - for representatives as well as voters. It is certainly in this dualism that one has to look for the main reasons for parties' delegitimization and the institutionnal crisis in contemporary Italy.
Les difficultés du consociativisme.
Alessandro Pizzorno [90-112].
A partir des années soixante-dix, la vie politique italienne a été caractérisée par un dualisme fondamental entre la politique «manifeste» (oppositions idéologiques, conflits entre des projets de société) et la politique «cachée» (consociativisme, arrangements entre les partis de majorité et les partis d'opposition pour définir les décisions législatives et se partager les ressources publiques). Les logiques de la seconde ont progressivement pris le dessus sur celles de la première, généralisant un rapport consumériste à la politique, tant de la part des élus que des électeurs. C'est certainement dans un tel dualisme qu'il faut rechercher les causes principales de la délégitimation des partis et de la crise des institutions dans l'Italie contemporaine.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Alessandro Pizzorno
Les difficultés du consociativisme
In: Politix. Vol. 8, N°30. Deuxième trimestre 1995. pp. 91-112.
Abstract
The Difflculties of Consociativism.
Alessandro Pizzorno [90-112].
From the seventies, Italian politics has been characterized by a fundamental dualism between «¦manifest» politics (ideological
oppositions, conflicts between projects of society) and «hidden» politics (consociativism, agreements between government and
opposition parties in order to define legislative decisions and share political ressources). The logics of the latter have progessively
become more important than those of the former, generalizing a consumerist relationship to politics - for representatives as well
as voters. It is certainly in this dualism that one has to look for the main reasons for parties' delegitimization and the institutionnal
crisis in contemporary Italy.
Résumé
Les difficultés du consociativisme.
Alessandro Pizzorno [90-112].
A partir des années soixante-dix, la vie politique italienne a été caractérisée par un dualisme fondamental entre la politique
«manifeste» (oppositions idéologiques, conflits entre des projets de société) et la politique «cachée» (consociativisme,
arrangements entre les partis de majorité et les partis d'opposition pour définir les décisions législatives et se partager les
ressources publiques). Les logiques de la seconde ont progressivement pris le dessus sur celles de la première, généralisant un
rapport consumériste à la politique, tant de la part des élus que des électeurs. C'est certainement dans un tel dualisme qu'il faut
rechercher les causes principales de la délégitimation des partis et de la crise des institutions dans l'Italie contemporaine.
Citer ce document / Cite this document :
Pizzorno Alessandro. Les difficultés du consociativisme. In: Politix. Vol. 8, N°30. Deuxième trimestre 1995. pp. 91-112.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polix_0295-2319_1995_num_8_30_2062Les difficultés du consociativisme
Institut universitaire Alessandro européen de Pizzorno Florence
CEUX QUI, pendant des décennies, ont observé les acteurs qui occupaient
la scène politique italienne, leur présentation de soi et les appréciations
qu'ils portaient les uns sur les autres, n'auraient pas pu ne pas penser
que le destin de la première République italienne serait de se trouver
déchirée par des affrontements entre partis irréductiblement ennemis. Ce
n'est qu'aujourd'hui, sur la voie du déclin, que nous prenons conscience que
tous ses maux provenaient de l'étrange mais, nous le verrons, compréhensible
circonstance suivante : tous ces partis depuis longtemps déjà, et même presque
depuis l'origine, n'étaient pas vraiment ennemis, mais bien au contraire
entretenaient les uns avec les autres de très forts liens d'amitié et étaient
même capables de s'accorder sans trop de tergiversations. Même les modèles
analytiques, pourtant bien construits, comme celui de Sartori, qui nous avaient
présenté le système politique italien comme polarisé entre des partis
idéologiquement très distants les uns des autres, étaient tombés dans le piège
de considérer les acteurs politiques pour ce qu'ils disaient être et non pour ce
qu'ils faisaient vraiment. On a imaginé de la polarisation là où, au contraire, il
y avait du consociativisme, des adversaires farouches là où, au ils
étaient «cul et chemise» et même pire1.
Politique manifeste et politique cachée
On pourrait répondre à ces observations que les acteurs politiques ne sont
rien d'autre que ce qu'ils disent et ce qu'ils apparaissent être aux yeux de la
population qui les choisit pour participer à leurs activités ou pour élire ses
représentants ; cela est également vrai mais ce n'est pas la seule chose qui
Ce texte est la traduction par Christophe Bouillaud et Isabelle Sommier du dernier chapitre de Le
radici délia polttica assoluta e altri saggi, Milan, Feltrinelli, 1994.
1. Le terme •consociativisme» risque d'entraîner des équivoques. •Consociatif» est un mode de
gouvernement dans lequel les représentants de partis qui se présentent comme irréductibles
s'accordent pour gouverner ensemble au lieu de laisser une majorité gouverner. Cela arrive en
général quand les partis opposés se distinguent selon des identités culturelles (ethniques,
linguistiques, religieuses ou autres) capables d'exiger de leurs membres une loyauté supérieure à
celle due à l'État. Cf. Lijpart (A.), Democracies, Patterns of Majoritarian and Consensus
Government in Twenty-One Countries, Londres, Yale University Press, 1984. Parfois les identités
opposées sont de nature idéologique (c'est le cas de l'Italie et de l'Autriche où toutefois
l'opposition est renforcée par la distinction cléricalisme/anticléricalisme). Dans ces cas, laisser
opérer le principe majoritaire pourrait conduire à la guerre civile. L. Cafagna, dans La grande
slavina, (Venise, Marsilio, 1993;, voit bien la nature intrinsèquement consociative du système
politique italien. Mais il ne réussit pas à la mettre en adéquation avec la polarisation qui lui paraît
également présente et même décisive. Aussi commet-il l'erreur de faire remonter la crise actuelle
à la polarisation plus qu'au consociativisme. Ce qui est paradoxal, car la mène à des
ruptures et à des scissions, non pas à la corruption et aux collusions ; elle amène à prendre le
fusil, non à aller main dans la main. Il suffisait de garder à l'esprit la distinction, que je verrai par
la suite, entre l'action politique manifeste et l'action politique cachée.
Pölitix, n°30 1995, pages 91 à 112 91 Alessandro Pizzorno
compte et même, cela compte souvent assez peu. Il en découle une règle de
méthode assez simple : en étudiant la politique, il faut toujours distinguer les
deux plans sur lesquels les acteurs agissent
L'un est celui des discours idéologiques, des déclarations de principe, de la
propagande, et des diverses formes de présentation de soi. Il sert justement, au
moins dans les intentions des acteurs eux-mêmes, à les identifier et à les
distinguer les uns des autres aux yeux de ceux qui veulent les choisir et les
suivre. Nous l'appellerons donc le plan de Y identification — qui est, aussi, par
définition, distinction — manifeste. Il inclut non seulement les discours, mais
aussi les actions démonstratives, votes au Parlement et par conséquent choix
des lois. Plus que la simple idéologie, on doit donc y inclure tout ce qui se
manifeste publiquement, au grand jour, chez un acteur politique.
Mais même en incluant tout cela, il y a autre chose, on le sait bien, dans
l'activité politique et c'est souvent le plus important. Surtout, au moins dans de
nombreux cas, c'est ce qui compte le plus pour les acteurs eux-mêmes, parce
que le plus directement lié à leurs intérêts. Il s'agit de l'activité quotidienne
des individus, membres du personnel politique ou liés à eux, qui passent les
uns avec les autres des accords, font des échanges, des transactions variées.
Dans cette activité, ils s'accordent des faveurs — que l'un ou l'autre individu
contrôle grâce à sa position dans le système des décisions politiques — en
échange d'autres faveurs, votes ou argent, pour l'individu lui-même ou pour
son groupe, sa fraction, son parti ou son mouvement. La nature même de ces
rapports fait que l'identité de celui qui y participe n'est ni immédiatement ni
facilement perceptible. Ce sont en grande partie des rapports qui restent
cachés au plus grand nombre. Moins il y a de gens qui le savent, mieux c'est.
Ils sont souvent, pour un aspect ou un autre, susceptibles d'être poursuivis
légalement, même si parfois la moralité politique courante les considère
comme faisant partie des usages. Il peut arriver que les individus s'engagent
dans ces rapports une seule fois et, s'ils le font de façon répétée, en dehors de
leurs rôles institutionnels. C'est comme si ces relations se déroulaient dans
une lumière incertaine et changeante où il est difficile de distinguer qui est qui,
et ce que les uns ou les autres visent. Seuls les initiés qui en comprennent les
langages et les signes reconnaissent au nom de qui un tel ou un tel parle. Aussi
pouvons-nous appeler ce plan d'activité le plan de Y identification occulte ou
cachée.

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