Les mutations géographiques en Pologne - article ; n°346 ; vol.64, pg 438-456
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Description

Annales de Géographie - Année 1955 - Volume 64 - Numéro 346 - Pages 438-456
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 49
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Jean Labasse
Les mutations géographiques en Pologne
In: Annales de Géographie. 1955, t. 64, n°346. pp. 438-456.
Citer ce document / Cite this document :
Labasse Jean. Les mutations géographiques en Pologne. In: Annales de Géographie. 1955, t. 64, n°346. pp. 438-456.
doi : 10.3406/geo.1955.14604
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1955_num_64_346_14604438
LES MUTATIONS GÉOGRAPHIQUES EN POLOGNE
Les modifications territoriales survenues en Pologne dans les vingt
dernières années interdisent pratiquement les comparaisons statistiques
sur lesquelles baser une appréciation formelle des progrès de son économie.
S'agissant, de plus, d'un pays en pleine transformation révolutionnaire,
des interprétations contradictoires se font jour sans peine à travers la diver
sité des chiffres1; ceux qui cherchent dans, des indices statistiques la confi
rmation d'une thèse quelle qu'elle soit ont donc grande chance de l'y trouver.
Aussi les fondements de l'enquête géographique paraissent-ils plus
solides que ceux de l'analyse économique dans la mesure où l'on a recours
à des comptages directs, qu'il s'agisse de démographie, d'équipement ou
de transports. C'est sur eux et sur les notations personnelles prises sur le
vif que l'on s'appuiera pour présenter quelques notes auxquelles on se
gardé de vouloir conférer un caractère exhaustif. Car, si la permanence n'est
jamais, pour les géographes, qu'une illusion, l'ampleur et la rapidité des
transformations économiques et sociales dont la Pologne est aujourd'hui
l'objet limitent singulièrement la portée et la sécurité de l'observation.
I. — Les modifications structurales
Le déplacement des frontières et ses conséquences. — De tous les pays
touchés par la guerre — Allemagne exclue — la Pologne est celui qui a
connu par la suite les plus importants déplacements de frontières. A l'Est,
l'adoption de la ligne Gurzon de 1920 a laissé à l'U. R. S. S. plus de 45 p. 100
du territoire de 1939, soit 177 000 km3", peuplés à la même époque de
11 300 000 hab. En compensation, la Pologne a reçu à l'Ouest 101 000 km*
d'anciens territoires allemands, occupés en 1939 par 8 800 000 hab. Au
total, elle revient approximativement à ses frontières de l'an 1000, avec
311 000 km22. Si l'on ajoute à cela que la guerre et la persécution nazie se
sont soldées par environ 6 millions de morts et 1 600 000 personnes défin
itivement inaptes au travail8, on admettra que de tels bouleversements
étaient de nature à affecter de manière durable la vitalité de la nation.
Or il n'en est rien : de 23 millions d'hab. en 1945, la population a passé à
26 500 000 en 1954, avec un accroissement naturel d'environ 500 000 par
an. Bien mieux, la cohésion du corps social semble aujourd'hui plus forte
que par le passé, le pays ayant renforcé son homogénéité linguistique et
religieuse. En 1931, 69 p. 100 de la population déclaraient le polonais comme
1. Pour s'en tenir au seul domaine des publications scientifiques, comment ne pas être surpris,
par exemple, par là différence dans l'interprétation des mêmes données économiques que mani
feste la confrontation des documents recueillis sur place et de la récente publication de
Г1. N. S. E. E. (I. N. S. E. E., Collection des Mémentos économiques, La Pologne, 1 yol. in-8e,
263 pages, Paris, Presses Universitaires, 1954), à laquelle on s'est fréquemment référé.
2. I. N. S. E. E., ouvr. cité, p. 15.
3. Informations sur la Pologne, Rapport dactylographié remis à la délégation dee écono
mistes français (1954), p. 3. MUTATIONS GÉOGRAPHIQUES EN POLOGNE 439 LES
langue maternelle, et 75 p. 100 le catholicisme comme religion. Ces pour
centages doivent aujourd'hui dépasser 90 p. 1001.
Un tel résultat n'était pas concevable sans d'amples mouvements migrat
oires ; environ 2 200 000 Polonais ont évacué, dans les années qui ont
suivi la fin des hostilités, les zones cédées à l'Est à l'U. R. S. S. pour venir
s'établir à l'Ouest dans les territoires recouvrés, que la population allemande
avait préalablement évacués, de gré ou de force. C'est dire que la carte des
densités incluse dans l'Atlas de E. Romer et J. Wasowicz de 1951 ne peut
plus être aujourd'hui considérée comme valable2, car elle s'appuie sur le
recensement de 1946. Il en ressort quatre zones de forte densité (plus de
100 hab. au km2), dont deux contiguës, la Haute-Silésie industrielle et
minière groupée autour de Katowice (depuis peu Stalinogrod) et la riche
plaine triangulaire de la Haute-Vistule qui se limite par Cracovie (Krakow),
Jaroslaw et Sandomierz, auxquelles s'ajoutent les régions industrielles de
Varsovie et de Lodz ; ces indications demeurent, en gros, exactes. Par
contre, les trois zones « creuses » (moins de 25 hab. au km2) de Mazurie, de
Poméranie et de la partie Ouest de la Grande Pologne le sont certainement
beaucoup moins aujourd'hui, tout au moins les deux dernières, du fait des
migrations.
L'incorporation des territoires recouvrés dans les nouvelles frontières
n'a pas seulement modifié les conditions de peuplement de la Pologne. Elle
en bouleverse également l'économie, en valorisant très sensiblement la
rubrique « industrie » dans le bilan des ressources nationales. « En 1947,
observe le professeur Oskar Lange8, la part de l'industrie des territoires
recouvrés dans la valeur de la production industrielle de tout le pays s'élevait
à 22 p. 100 ; en 1952, cette participation atteignait 24 p. 100. » Ces pour
centages seraient d'ailleurs trompeurs pour qui en userait sans discernement,
car la référence 1947 est spécialement défavorable en raison des difficultés
occasionnées par l'évacuation et la colonisation. Une base 1938 serait certa
inement plus instructive, s'il était possible de la dégager. L'héritage des
installations allemandes semble appréciable pour l'extraction houillère et
l'industrie chimique, plus avantageux encore pour l'infrastructure écono
mique (réseau ferré, routes — dont 350 km. d'autoroutes — logements).
L'apport des territoires recouvrés au développement de l'agriculture
est également loin d'être négligeable, et l'on en verra plus loin certains
aspects politiques ; 37 p. 100 de la récolte de céréales et 34 p. 100 de celle
de pommes de terre seraient de leur provenance en 1951-1952. Ce n'est pas
diminuer en quoi que ce soit le courage de la nation polonaise et la férocité
sans égale de l'occupation nazie que de voir dans certaines données positives
de la situation agricole actuelle les effets combinés de la planification socia^
liste et de l'avance technique des anciennes terres de colonisation allemande,
1. I. N. S. E. E., ouvr. cité, p. 56 ; nombreuses confirmations locales.
2. E. Romer et J. Wasowicz, Atlas Polski Wspolczesnej, Wroclaw, 1951.
3. Oskar Lange, Le développement économique de la Pologne populaire de 1945 à 1954, rapport
dactylographié remis aux économistes français, p. 31. ANNALES DE GÉOGRAPHIE 440
alors que le langage officiel tend à méconnaître ceux-ci au bénéfice exclusif
de ceux-là. Quoi qu'il en soit, l'annexion des territoires recouvrés a déplacé
vers l'Ouest le centre de gravité de la Pologne, topographiquement d'abord,
et économiquement bien davantage.
Mutations régionales et démographiques. — Ce qui précède se rapporte
en quelque sorte aux modifications structurales extrinsèques à la Révolution
marxiste. Leur portée serait cependant considérablement diminuée si elles
ne s'inscrivaient pas dans le cadre de la planification socialiste. Ce que celle-ci
doit à la géographie et attend d'elle, Mr Pierre George Га expliqué, notam
ment dans le cas particulier de la Pologne1. Nous n'avons pas l'intention
d'en débattre ici d'un point de vue doctrinal, qui nous échappe pour l'essent
iel, les échanges de vues auxquels nous avons participé à Varsovie ayant
mis en lumière le rôle des économistes dans la planification, et non celui des
géographes. Le recours à la géographie en matière de direction économique
n'est peut-être pas l'apanage exclusif des régimes marxistes2. Toujou

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