Les puissances et la politique turco-tatare - article ; n°3 ; vol.3, pg 236-249
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Description

Politique étrangère - Année 1938 - Volume 3 - Numéro 3 - Pages 236-249
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1938
Nombre de lectures 51
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

H. von Waldheim
Les puissances et la politique turco-tatare
In: Politique étrangère N°3 - 1938 - 3e année pp. 236-249.
Citer ce document / Cite this document :
von Waldheim H. Les puissances et la politique turco-tatare. In: Politique étrangère N°3 - 1938 - 3e année pp. 236-249.
doi : 10.3406/polit.1938.5663
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1938_num_3_3_5663LES PUISSANCES
ET LA POLITIQUE TURCO-TATARE
Les Turco-Tatars
II se trouve dans le Sud-Est de la Russie 20 millions d'hommes parlant
vingt-sept langues et dialectes principaux, se rattachant tous au groupe
linguistique turc. Ils représentent des minorités réparties dans autant de
républiques fédérées ou autonomes et de districts où elles sont fortement
mélangées à d'autres peuples. Ces minorités dispersées sont les Turco-
Tatars.
Leur situation politique se complique du fait que ces éléments peuplent
une surface considérable et qu'ils étendent des rameaux jusqu'en Iran
où ils sont 2 millions, en Afghanistan 300.000, dans le Turkestan chinois
(Sinkiang) 500.000 à 700.000. Une assez forte immigration en Turquie
s'est fondue dans la race; plusieurs autres, de moindre importance, 30.000
à 50.000 en tout, se sont répandues au Japon, au Manchoukouo, en All
emagne, en Pologne, en Roumanie et en France. Il ne faut pas oublier
les petites branches tatares de Pologne et de Lituanie, assimilées du moins
par la langue.
C'est leur situation géographique qui détermine l'avenir politique des
peuples turco-tatars. Ils sont disséminés sur un immense territoire qui
s'étend du 44° au 96° de longitude est (Mont Arrarat-Tienchan) et du
39° au 47° de latitude nord. Cette ligne est même dépassée, d'une part
au nord vers Kazan (56° latitude nord), et, d'autre part, au sud vers la
frontière du Sinkiang et du Kansou (35° latitude nord). Il existe encore
de petits îlots turco-tatars au fond de la Sibérie, jusqu'au 130° de longi
tude est.
Si l'on excepte la Crimée et le Caucase, ce cadre géographique présente
l'aspect de l'Asie centrale : steppes ou déserts avec quelques oasis, plateaux
et régions montagneuses et sauvages. Le climat aux étés torrides et aux
hivers glacials forme un type humain dur, sobre et endurant, perpétuel
lement en lutte contre la sécheresse. Nomades ou semi-nomades de la
steppe, guides ou chasseurs de fourrures, pêcheurs, petits commerçants, POLITIQUE TURCO-TATARE 237 LA
paysans, là seulement où la nature avec parcimonie le permet, fatalistes
puisque mahométans, ils voyagent, à dos de chameau ou à cheval, l'arme
pendue à l'épaule, soldats-nés, car les Turco-Tatars seront toujours des
soldats.
L'histoire des Tatars est écrite par la nature. Aux grandes périodes de
sécheresse a toujours correspondu une marche vers l'ouest, par le pont
naturel de l'Anatolie jusqu'au cœur de l'Europe, ou par la Volga jusqu'au
cœur des peuples slaves. Ils ont même pénétré en Chine et dans l'Inde.
Autrefois leur exode sur l'antique route de la soie ne connut pas de limite
territoriale. De grands rêves prennent corps et se reflètent dans leur
idéologie politique, dans leur religion. Les cavaliers chevauchent dans
la steppe infinie, et le soir, assis devant leur tente, ils fixent leur feu de
veille, ils songent... ils voient de grands empires, des ponts entre les con
tinents, des « Weltreligionen » dans lesquelles Bouddha, le Christ et Maho
met se fondent en une seule figure. Ils répètent des prophéties étranges,
citent des exemples de sombre et farouche solidarité, écoutent les chucho
tements qui circulent dans les medersas et entre les cercles d'émigrants
de Kaboul, de Moukden, de Kobe, du Caire, de Berlin, de Constanza
et de Varsovie.
Au cours des siècles, dans leurs émigrations, ils ont submergé entière
ment les groupes ethniques qui, à l'origine, ne partageaient ni leur langue
ni leur religion. Ces groupes sont assimilés aujourd'hui aux Turco-Tatars
dès qu'ils parlent un dialecte turc et qu'ils ont adopté la religion islamique,
même si par la race ils n'ont rien de commun avec eux. Il existe ainsi
d'importants groupes ethniques, tels que les Kazalcs (Kirghizes) et les
Azerbaïdjans ; ces derniers pourtant de race nettement iranienne sont
compris toutefois dans l'ensemble des peuples turco-tatars.
Le tableau ci-dessous indique les différentes races turco-tatares avec
leur importance numérique, classées en 3 groupes décroissants de culture :
(En millions)
Iraniens (Azerbaïdjans,
Tadjiks) 5.030 4.530 500 —
Tatars 4.000 3.558 417 25
Uzbeks 5.080 4.200 880 —
Finnois 2.180 — 2.180 —
Kirghizes 7.390 — 6.840 550
Total 23.680 12.288 10.817 575
On pourrait donc définir les Turco-Tatars comme des peuples parlant
le turc, de religion islamique (la plupart sunnites de rite hanéfite), et O r*
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^^^V Tu rco- Ta ^a^s Allemands de la Volga PO POLITIQUE TURCO-TATARE 239 LA
qui se groupent autour de la race turque bien que n'appartenant
pas à la Turquie. Ces trois caractères, langue, religion, race, sont
l'apanage de la moitié du groupe. L'autre moitié, pour la plus grande
partie, possède deux de ces caractères, langue et religion. Ensuite viennent
de petites tribus qui sont turco-tatares par la race et la langue seulement
(par exemple les Tatars chrétiens de la Volga, qui sont par ailleurs très
russifiés dans leur langue, et des tribus primitives chamanistes). De même,
on trouve de petits groupes qui ont maintenu la religion et la race, mais
qui sont rattachés à d'autres peuples par la langue (les Tatars de Pologne
et de Lituanie, une partie des mahométans chinois). Tant que la religion
et la race demeurent, les chefs se servent de l'écriture arabe; ils emploient
aussi le russe, le français, l'allemand et même le chinois comme langues
auxiliaires. Notre siècle aura vu l'introduction de l'écriture latine chez
les Turco-Tatars d'U. R. S. S., après de longues préparations (Congrès
de Bakou 1926), aussitôt suivie, en Turquie, de la réforme de la langue et
de l'écriture, depuis 1928.
L'avenir des Turco-Tatars repose sur la force de l'alliage de la langue
et de la race, ou de la langue et de la religion. Lequel l'emportera?
Le nationalisme des peuples où vivent ces minorités « brisera-t-il » (Staline)
les liens religieux? absorbera-t-il même la race? et les Turco-Tatars ne
seront-ils plus qu'un élément de population bilingue? Le problème sera
résolu par l'avenir politique de la Russie. Car, si l'histoire des
fut déterminée par des conditions climatiques et géographiques, son histoire
contemporaine sera la conséquence de la politique russe. Chaque affaibli
ssement de la Russie correspond à une résurrection du nationalisme turco-
tatar, la période la plus active et la plus favorable se plaçant au ving
tième siècle pendant les années 1904-1905, 1917-1921, et, dans une certaine
mesure, 1932-1937.
Au point de vue sociologique, les peuples chez lesquels la trilogie langue-
religion-race est évidente et de plus appuyée par une forte culture,
forment le noyau politique du nationalisme turco-tatar. Ce sont les Tatars
de la Volga (Kazan), les Uzbeks d'Asie centrale et les Iraniens d'Azerb
aïdjan. Ces populations sont en relation avec les milieux d'émigrants
de Paris, Berlin, Varsovie, Tokio et Moukden. Les Tatars islamisés depuis
l'an 900 s'enorgueillissent d'une intéressante littérature nationale et font
preuve de grandes qualités militaires et d'un remarquable don d'organis
ation. Les femmes tatares de Kazan sont à la tête de l'évolution féminine
islamique. Les « Fùhrer » de l'émigration sont Ajaz Ishaqui (Tatars),
Tchokai et Sultangali (Uzbeks) et Resul-zade (Azerbaïdjans), qui jouissent
à Berlin, Varsovie, Tokio et Moukden d'une forte influence. L'idéologie
d'Ishaqui est nettement nationale-socialiste et pro-islamique. Les idées 240 LA POLITIQUE TURCO-TATARE
de Sultangali, professeur à l'Académie Militaire de Tokio, portent la
marque du pan-asiatisme et du radicalisme.
Les Tatars de la Volga groupent autour d'eux les peuples de race
finnoise : Tchouvaches et Bachkires. Dans les milieux d'émigrants, on
situe entre l'Oural et la Volga l'Etat politique indépendant idéal (/Je/-
Oural). Il

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