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Paris, le 31 Juillet 2014 Monsieur Claude BARTOLONE Président de l’Assemblée Nationale 126 rue de l’Université 75007 PARIS Monsieur le Président, Malgré la trêve estivale, je me permets de vous adresser cette lettre ouverte car il me paraît indispensable que vous interveniez auprès du Président de la République et du Gouvernement pour défendre notre institution parlementaire. En effet, j’apprends que le dernier des Conseils des Ministres, en date du 30 Juillet, vient de décider que le Général Bertrand SOUBELET ne serait plus numéro 3 de la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale, mais muté à la direction de la Gendarmerie Outre-Mer. Cette décision est une véritable rétrogradation pour ce Général méritant dont la valeur et le sens du service de la Nation sont attestés par tous les membres de ce corps prestigieux. Contrairement à ce qu’affirme le Ministère de l’Intérieur, il s’agit bien d’une mise au placard, comme vous le confirmera n’importe quel militaire connaissant les carrières de la Gendarmerie - et vous en avez sous votre responsabilité directe. Ce mauvais coup porté à la Gendarmerie Nationale l’a bien évidemment été en plein cœur de l’été afin que cela ne puisse pas faire de vague auprès de l’opinion publique. Vous pourriez me répondre que cela concerne le pouvoir exécutif et pas directement le Parlement. Je ne le pense pas.

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Publié le 31 juillet 2014
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Langue Français

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Monsieur le Président,
Paris, le 31 Juillet 2014
Monsieur Claude BARTOLONE Président de l’Assemblée Nationale 126 rue de l’Université 75007 PARIS
Malgré la trêve estivale, je me permets de vous adresser cette lettre ouverte car il me paraît indispensable que vous interveniez auprès du Président de la République et du Gouvernement pour défendre notre institution parlementaire.
En effet, j’apprends que le dernier des Conseils des Ministres, en date du 30 Juillet, vient de décider que le Général Bertrand SOUBELET ne serait plus numéro 3 de la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale, mais muté à la direction de la Gendarmerie Outre-Mer. Cette décision est une véritable rétrogradation pour ce Général méritant dont la valeur et le sens du service de la Nation sont attestés par tous les membres de ce corps prestigieux.
Contrairement à ce qu’affirme le Ministère de l’Intérieur, il s’agit bien d’une mise au placard, comme vous le confirmera n’importe quel militaire connaissant les carrières de la Gendarmerie - et vous en avez sous votre responsabilité directe.
Ce mauvais coup porté à la Gendarmerie Nationale l’a bien évidemment été en plein cœur de l’été afin que cela ne puisse pas faire de vague auprès de l’opinion publique. Vous pourriez me répondre que cela concerne le pouvoir exécutif et pas directement le Parlement.
Je ne le pense pas. En effet, le 18 Décembre dernier, ce Général a été auditionné par la Commission Parlementaire de lutte contre l’insécurité, mandatée par l’Assemblée Nationale.
Interrogé par nos collègues, il leur avait notamment expliqué que la réponse pénale était en décalage avec les infractions constatées, indiquant par exemple que si les élucidations de délits étaient en progression pour 2013 de 4%, les incarcérations avaient diminué de 33%.
Ces déclarations, saluées par de nombreux gendarmes pour leur exactitude et parce qu’elles traduisaient le constat réalisé par ces militaires sur le terrain, avaient à l ‘époque fortement déplu au pouvoir exécutif, notamment au Ministre de l’Intérieur devenu Premier Ministre depuis. On voit aujourd’hui la traduction de cette ire à travers cette mise au placard.
Le principe même de ce type de mutation-sanction est choquant, et d’autant plus de la part d’un Gouvernement qui n’avait de cesse d’en dénoncer la pratique lorsque les Gouvernements de la précédente majorité s’y laissaient aller. Je suis sûr que vous partagerez mon sentiment, vous qui vous étiez ému avec moi du sort du Préfet Cordet, alors en poste en Seine-Saint-Denis qui avait été injustement « placardisé » suite à la publication d’une note confidentielle qu’il avait adressée au Gouvernement.
Mais ici, cette injustice me semble doublée d’un véritable danger pour les droits du Parlement. En effet, pour exercer notre rôle de législateur et de contrôle de l’exécutif, les parlementaires, que nous sommes, avons régulièrement besoin d’auditionner de très nombreux responsables publics, civils ou militaires.
Ces auditions, venant de la part de spécialistes des questions abordées, sont très riches d’enseignements, nourrissent nos rapports parlementaires, guident notre réflexion, nos débats et sont souvent sources de nos propositions de lois ou de nos amendements afin d’améliorer l’efficacité de l’Etat au service de nos concitoyens.
Désormais, sous le Gouvernement actuel, un responsable public désigné par son administration ou invité par les Parlementaires à venir éclairer nos travaux saura qu’il risque d’être sanctionné dans sa carrière s’il vient dire la vérité à la représentation nationale.
Ce Général n’a fait que répondre sincèrement, et au nom de son institution, aux questions de nos collègues ! Fallait-il qu’il se taise pour préserver ses intérêts personnels et sa carrière ?
Vous comprendrez, j’en suis sûr, qu’une telle dérive, si elle n’honore pas le pouvoir exécutif, attente par surcroit directement aux droits de notre institution et des parlementaires qui la composent. Si vous laissez faire sans réagir, à quoi serviront demain ces centaines d’auditions annuelles puisque les fonctionnaires ou les militaires n’y parleront que sous la crainte de l’épée de Damoclès que fera peser sur eux leur hiérarchie ?
A mes yeux, au contraire, le Parlement doit demeurer un lieu d’expression franc et sincère pour tout responsable public qui est invité à s’y exprimer et qui doit pouvoir le faire librement et sans crainte afin que la représentation nationale soit le mieux informée possible.
J’ajoute que dans le cas particulier que révèle de telles pratiques, les parlementaires risquent encore plus d’être victimes d’une information trop partielle pour être utile. En effet, si dans le domaine de la sécurité il est toujours possible d’entendre des responsables syndicaux de la police ou de la magistrature, une telle faculté n’existe ni pour la Gendarmerie, ni pour l’Armée. Devons nous nous résoudre à ignorer ces grands services publics, à ne pas tenter de les entendre, de les interroger, de les comprendre parce que l’exécutif a décidé de les museler face à la représentation nationale ? Devrons-nous désormais les entendre sous le sceau du secret pour espérer en apprendre quelque chose ?
Evidemment non, le débat public, la transparence dont le Chef de l’Etat vante si souvent les mérites, le rôle du Parlement dans notre démocratie en pâtiraient par trop.
C’est la raison pour laquelle, Monsieur le Président, j’attends de votre part, sous la forme qui vous paraîtra la plus adaptée, une réaction vigoureuse auprès du Président de la République et du Premier Ministre afin de défendre notre droit à être informés correctement par les responsables publics, ainsi que le droit de ces derniers à s’exprimer librement devant l’Assemblée Nationale.
Dans cette attente, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.
Jean-Christophe LAGARDE Député-Maire de Drancy Secrétaire Général de l’UDI
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