Prises de parole démocratiques et pouvoirs intermédiaires pendant la Révolution française - article ; n°26 ; vol.7, pg 86-107
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Description

Politix - Année 1994 - Volume 7 - Numéro 26 - Pages 86-107
Democratic utterances and Intermediary powers during the French Revolution.
Jacques Guilhaumou [86-107]
The purpose of this article is to describe schematically the fullness and the coherence of recent studies on the legitimate public utterances dating back to the very begining of the French Revolution. The advent of egalitarian procedures in the shaping of both opinion and will — under the cover of the people's sovereignty, together with varying and original intersubjective practices of deliberation and decision — greatly extends the legitimate political field, limited during the year 1789 to speeches in the national assembly. With the Declaration des droits de l'homme et du citoyen, a space of language-intercomprehension is progessively constructed by the multiplication of democratic utterances, outlining a new public space of reciprocity. The aim of this article is also to characterize the universalizing and rather aesthetic relation between these particular 'popular' utterances, in the form of addresses, and the new generai izing dynamic of the speech in the assembly, from and after the summer of 1792.
Prises de parole démocratiques et pouvoirs intermédiaires pendant la Révolution française.
Jacques Guilhaumou. [86-107]
Cet article a pour objectif de préciser à grands traits l'ampleur et la cohérence des travaux récents sur les prises de parole publique légitime, dès le début de la Révolution française. L'émergence, ensemble, de procédures égalitaires de formation de l'opinion et de la volonté, sous la catégorie de souveraineté du peuple et de pratiques intersubjectives diversifiées et inédites de délibération et de décision, élargit considérablement le champ politique légitime, limité pendant l'année 1789 au discours d'assemblée. A l'horizon de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, on voit se constituer progressivement, par la multiplication des prises de parole démocratiques, un espace d'intercompréhension langagière, configurant un nouvel espace public de réciprocité. Il s'est également agi de caractériser la relation universalisante, au fort potentiel esthétique, qui s'établit, à partir de l'été 1792, entre l'expression particulière sous forme d'adresses de telles paroles «populaires» et la nouvelle dynamique généralisante du discours d'assemblée.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 17
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jacques Guilhaumou
Prises de parole démocratiques et pouvoirs intermédiaires
pendant la Révolution française
In: Politix. Vol. 7, N°26. Deuxième trimestre 1994. pp. 86-107.
Citer ce document / Cite this document :
Guilhaumou Jacques. Prises de parole démocratiques et pouvoirs intermédiaires pendant la Révolution française. In: Politix.
Vol. 7, N°26. Deuxième trimestre 1994. pp. 86-107.
doi : 10.3406/polix.1994.1844
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polix_0295-2319_1994_num_7_26_1844Abstract
Democratic utterances and Intermediary powers during the French Revolution.
Jacques Guilhaumou [86-107]
The purpose of this article is to describe schematically the fullness and the coherence of recent studies
on the legitimate public utterances dating back to the very begining of the French Revolution. The
advent of egalitarian procedures in the shaping of both opinion and will — under the cover of the
people's sovereignty, together with varying and original intersubjective practices of deliberation and
decision — greatly extends the legitimate political field, limited during the year 1789 to speeches in the
national assembly. With the Declaration des droits de l'homme et du citoyen, a space of language-
intercomprehension is progessively constructed by the multiplication of democratic utterances, outlining
a new public space of reciprocity. The aim of this article is also to characterize the universalizing and
rather aesthetic relation between these particular 'popular' utterances, in the form of addresses, and the
new generai izing dynamic of the speech in the assembly, from and after the summer of 1792.
Résumé
Prises de parole démocratiques et pouvoirs intermédiaires pendant la Révolution française.
Jacques Guilhaumou. [86-107]
Cet article a pour objectif de préciser à grands traits l'ampleur et la cohérence des travaux récents sur
les prises de parole publique légitime, dès le début de la Révolution française. L'émergence, ensemble,
de procédures égalitaires de formation de l'opinion et de la volonté, sous la catégorie de souveraineté
du peuple et de pratiques intersubjectives diversifiées et inédites de délibération et de décision, élargit
considérablement le champ politique légitime, limité pendant l'année 1789 au discours d'assemblée. A
l'horizon de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, on voit se constituer progressivement,
par la multiplication des prises de parole démocratiques, un espace d'intercompréhension langagière,
configurant un nouvel espace public de réciprocité. Il s'est également agi de caractériser la relation
universalisante, au fort potentiel esthétique, qui s'établit, à partir de l'été 1792, entre l'expression
particulière sous forme d'adresses de telles paroles «populaires» et la nouvelle dynamique
généralisante du discours d'assemblée.Prises de parole démocratiques
et pouvoirs intermédiaires
pendant la Révolution française
Jacques Guilhaumou
CNRS, UMR «Telemme»
Université de Provence
DANS NOS RECHERCHES les plus récentes sur les langages de la Révolution
française, nous nous intéressons prioritairement à la dimension
discursive de l'espace public de réciprocité inscrit dès 1789 à l'horizon
de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen1. En attente de sa
réalisation, une modalité universelle d'intercompréhension est acquise avec la
déclaration solennelle de la légitimité du droit naturel, de tout droit à venir.
La condition naturelle de l'homme, c'est-à-dire ses «qualités sociales»
(Mably), essentiellement la liberté et l'égalité, peut désormais se concrétiser
dans la société civile par la mise en acte de la réciprocité du droit naturel
déclaré2. Ainsi s'ouvre aux acteurs des événements de 1790-1793 un champ
infini d'expérimentations. L'émergence soudaine de procédures égalitaires de
formation de l'opinion et de la volonté, sous la catégorie de souveraineté du
peuple, et de son corollaire des pratiques intersubjectives diversifiées et
inédites de délibération et de décision, élargit considérablement le champ
politique légitime, un temps limité l'année 1789 au discours d'assemblée, en
configurant le nouvel espace républicain de réciprocité. Il s'agit bien
1. Actuellement, notre investigation discursive procède, dans une perspective synthétique, d'une
double échelle d'observation, le discours d'assemblée et le discours républicain en acte. Nous
avons privilégié, dans le cas présent, la seconde échelle, la plus vaste et la moins bien connue des
non-spécialistes. De fait, nous enquêtons sur les langages de la Révolution française depuis plus
d'une vingtaine d'années. Les étapes les plus significatives de cette enquête discursive, menée pour
une part collectivement au sein de l'équipe «XVIIIe-Révolution française- du Laboratoire de
lexicologie politique de l'ENS de Fontenay/Saint-Cloud, ont donné lieu aux publications
suivantes : «Sur la Révolution française» et «La rhétorique du discours, objet d'histoire», Bulletin
du centre d'analyse du discours de l'Université de Lille III , n°2, 1975, et n°5, 1981 ; Dictionnaire
des usages socio-politiques (1 770-1815), Paris, Klincksieck, cinq fascicules parus (1985-1990) ; «Les
langages de la Révolution française», Mots, nol6, 1988 ; La langue politique et la Révolution
française, Paris, Méridiens/Klincksieck, 1989- Un colloque, tenu en 1991 à l'ENS de Fontenay/Saint-
Cloud, permet de mesurer l'ampleur du chantier : Les langages de la Révolution, Paris, Klincksieck,
1994. Enfin, analyste de discours, les enjeux de notre méthode d'approche des textes sont précisés
dans «A propos de l'analyse de discours : les historiens et le "tournant linguistique"-, Langage et
société, n°65, 1993-
2. E. Balibar souligne que «la Déclaration dit en fait que l'égalité est identique à la liberté, est égale
à la liberté, et inversement» («Liberté, égalité, différences», Actuel Marx, n°8, 1990). Ainsi la
•proposition de droit» (la liberté de chacun limitée par la liberté de l'autre) a pour fondement -la
proposition de l'égaliberté». Dans cette perspective, la lecture jusnaturaliste de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen, qui met l'accent sur la puissance performative des acteurs
révolutionnaires parlant la langue des droits naturels, s'avère d'une grande importance du point
de vue de la parole démocratique. Voir sur ce point l'ouvrage fondamental de Gauthier (F.),
Triomphe et mort du droit naturel en Révolution. 1 789-1 795, Paris, PUF, 1992. Cf. aussi Guilhaumou
(J-), 'Les enjeux du débat autour de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen», in
Vovelle (M.), dir., Recherches sur la Révolution, Paris, La Découverte, 1991-
86 Politix, n°26, 1994, pages 86 à 107 Prises de parole démocratiques et pouvoirs intermédiaires
d'un espace d 'intercompréhension langagière mis en place progressivement
par la multiplication des prises de parole démocratiques.
1789 : les limites du discours d'assemblée
Nous savons, depuis les travaux de l'historiographie critique, que le moment
89 fait «table rase», il marque non seulement l'ouverture de la révolution, mais
aussi son «laboratoire»1. De fait, l'expérimentation révolutionnaire au
quotidien est rendue possible par l'instauration, avec la Déclaration des droits
de l'homme et du citoyen, d'un nouveau lien social, correspondant à
«l'ouverture d'un illimité»2 par la médiation de la loi. Une raison à la fois
constituante et délibérante fait son apparition sur la scène politique : elle est
la matrice de toutes les paroles légitimes de la citoyenneté nouvelle. Raison à
vocation universelle, elle procède de l'effectivité pratique des droits du
citoyen qui institue un horizon juridique contraignant pour la raison
constituante elle-même3, et favorise ainsi la prise de décision par délibération
et agrégation des choix, au nom de la «prononciation de droit» (Brissot).
Certes, les réalisations concrètes des premiers mois de la Révolution française
tend

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