La Cité - article ; n°227 ; vol.40, pg 479-503
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Description

Annales de Géographie - Année 1931 - Volume 40 - Numéro 227 - Pages 479-503
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1931
Nombre de lectures 39
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Myriem Foncin
La Cité
In: Annales de Géographie. 1931, t. 40, n°227. pp. 479-503.
Citer ce document / Cite this document :
Foncin Myriem. La Cité. In: Annales de Géographie. 1931, t. 40, n°227. pp. 479-503.
doi : 10.3406/geo.1931.11155
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1931_num_40_227_11155479
LA GITE
(Pl. IX-XI.)
Vue du pont des Arts, la Cité apparaît comme un navire. Ce n'est
pas le lourd vaisseau marchand, aux flancs rebondis, qui charge les
armes de Paris, mais une nef de course, légère et rapide. Les vieilles
maisons du quai de l'Horloge et du quai des Orfèvres, le jardin du
Vert-Galant s'avancent en une proue si hardie qu'on se demande par
quel charme elle demeure immobile au milieu des flots et qu'on
cherche les amarres qui la retiennent au rivage.
De l'enclos où se cache Saint- Julien-le-Pauvre, par la trouée que
des démolitions récentes ont ouverte, on ne voit plus l'île. Au-dessus
de la grande place du Parvis et des arbres du square de l'Archevêché,
Notre-Dame se dresse, toute souveraine. Devant ce tranquille jailli
ssement de pierres, on suppose des fondations plongeant en la terre
la plus ferme ; on oublie la rivière qui l'enserre de ses deux bras noués.
La Cité n'est plus qu'une cathédrale.
Au pont de la Tournelle, l'impression est plus complexe, plus
vraie aussi. Le chevet de l'église métropolitaine, hanneton gigan
tesque posé dans la verdure, est encadré vers le Nord par de hautes
maisons modernes et laisse entrevoir au loin le Palais de Justice et
quelques bâtiments officiels, tous les éléments vitaux du quartier.
Mais surtout la Cité apparaît à sa vraie place, au centre de la ville dont
elle fut si longtemps le cœur. Sur les deux bords de la Seine, façades
grises et toits gris déferlent à perte de vue, couvrant le fond de la val
lée et ses versants, débordant même, on le devine, très loin sur les
plateaux. Au milieu du fleuve, l'île est plus qu'un trait d'union entre
les deux rives, c'est le noyau autour duquel la ville s'est formée et a
grandi.
L'Ile et ses ponts
Ce ne fut d'abord qu'une île, comme il y en a tant en la rivière de
Seine, une île longue et basse, presque à fleur d'eau, arrondie à l'avant,
terminée vers l'aval par une flèche effilée de sable clair, abritant sous
le couvert de grands arbres des herbes folles et des saules frisson
nants, toute bourdonnante d'insectes en été quand fleurissaient,
parmi les roseaux et les joncs, les touffes d'iris jaunes qui frangeaient
ses bords. Mais elle était plus large et plus stable que la plupart des
autres îles ; elle offrait un abri sûr et un site aisé à défendre. Surtout
elle semblait vouloir faciliter aux hommes en quête d'un passage la 480 ANNALES DE GÉOGRAPHIE
traversée du fleuve. N'était-elle pas placée un peu après le confluent
de la Marne, juste en face de la trouée que la plaine Saint-Denis
ouvre vers le Nord ? Elle attira une route ; de là vint sa fortune.
Quelques huttes se bâtirent près de la grève où accostèrent les
premières barques, et, protégée par la rivière, à la tête des ponts qui
furent jetés pour relier les deux rives, une bourgade gauloise s'éta
blit. Lorsque les Romains, maîtres de la Gaule, entreprirent d'ouvrir
un réseau de routes à travers les provinces conquises, elle devint
tout naturellement un nœud de voies importantes1. Quand le ver
sant Sud de la vallée se couvrit de villas et d'édifices publics, l'île eut,
elle aussi, ses maisons et ses palais. Aux époques de trouble, citadelle
naturelle, elle sert de refuge aux populations qui avaient cru pouvoir
s'installer en pays ouvert. Pendant les invasions barbares, elle
accueille les habitants du quartier qui s'était formé autour des
Thermes de Cluny2 et qui fut détruit. Les empereurs l'entourent de
fortifications et en font un centre militaire qu'ils visitent3.
Les rois mérovingiens y fixent leur demeure. Plus tard elle r
epousse les invasions normandes. Avec les premiers Capétiens, elle
garde toute sa valeur stratégique. Trop à l'étroit au milieu de la
Seine, Paris1 peut déborder sur chaque rive; l'Université s'emparer,
sur la rive gauche, de la Montagne Sainte-Geneviève, la Ville envah
ir les marais de la rive droite : les quartiers nouveaux ne seront que
des faubourgs, et l'île demeure la Cité.
Pouvoir spirituel et pouvoir temporel s'y retrouvent, côte à côte.
C'est là que s'édifie l'église cathédrale. C'est là que les rois ont bâti
leur palais4. Avec le temps, ils l'abandonneront pour l'Hôtel
Saint-Pol, le Louvre ou les Tuileries. Mais, à certaines occasions
solennelles, ils y reviendront cependant en maîtres 6. Surtout ils
y laisseront les cours souveraines. Les grands corps constitués du
1. Voir F.-G. de Pachtère, Paris à l'époque, gallo-romaine (Collection de l'histoire
de Paris), Paris, Impr. Nationale, 1912, in-4°.
2. Probablement un palais.
3. Est-il besoin de rappeler ici le passage fameux où Julien parle de sa chère
Lutèce : « C'est une toute petite île enfermée dans les murs de son rempart, abordable
seulement par deux ponts de bois » (Misopogon, éd. Hertlem, t. II, p. 138).
4. A la pointe occidentale de l'île, il y avait déjà à l'époque romaine un grand bât
iment dont on a retrouvé les fondations. « C'était sans doute le palais militaire impér
ial. Julien dut y habiter à l'abri des murailles. Il devint sans doute la demeure des rois
mérovingiens.» (Pachtère, ouvr. cité, p. 152). En tout cas, c'est là qu'habite Philippe-
Auguste.
5. « C'est en ce lieu que se font tous les banquets solennels des roys auxnopçages et
entrées afin de toujours regarder de la possession de leur logis ancien » (Belleforest,
L'ancienne et grande cité de Paris, 1574, Collection des anciennes descriptions de Paris,
-par l'Abbé V. Dufour, 7e volume, p. 222 et 290). Des fêtes sont données au Palais
pour le sacre d'Isabeau de Bavière (23 août 1389), pour l'entrée de Louis XI à Paris
(31 août 1461), François Ier y reçoit Charles V (1er janvier 1540), etc. Voir H. Stein,
Le Palais de Justice et la Sainte-Chapelle de Paris..., Paris, D.-A. Longuet, 1912, in-8°,
p. 42-54. К LA CITÉ 481
royaume x ne cesseront d'y siéger, et, dépossédée de l'administration
municipale qui s'organise près du Grand Châtelet2, la Cité demeure
jusqu'à la Révolution la capitale judiciaire de la France.
Bien avant la fin du moyen âge, elle était déjà surpeuplée. Entre
Notre-Dame et le Palais, des commerces importants s'étaient local
isés, ainsi que les noms mêmes des rues l'indiquèrent longtemps (rue
de la Barillerie, de la Draperie, de la Pelletrie, de l'Herberie, du Mar
ché Palu, Pont-au-Change, etc.). Comment s'en étonner, puisque
c'était la partie la plus ancienne de la ville et un lieu de passage
obligé ? En effet, jusqu'en 1606, date à laquelle fut achevé le Pont
Neuf3, on ne pouvait se rendre d'une rive à l'autre de la Seine sans
traverser la Cité. Ce n'est qu'au début du xvue siècle que la cons
truction du pont Royal d'une part 4 et celle du pont Marie et du pont
de la Tournelle6 d'autre part détournèrent à l'Ouest et à l'Est une
partie du transit. Auparavant, de Corbeil à Sèvres, il n'y avait d'autre
voie que par l'île. Tous ceux qui voulaient se rendre d'un côté de la
Seine à l'autre, qu'ils aient pris les grandes routes de Rouen, Amiens,
Péronne, Senlis, Meaux, Dijon, Nevers. Orléans, Chartres ou Mont-
fort-l'Amaury, arrivant à Paris, étaient forcés d'emprunter les ponts
de la Cité6. Les armées appelées dans les Flandres, les pèlerinages
partant en Terre Sainte ou à Saint-Jacques-de-Compostelle, les cor
tèges et les émeutes, les courriers porteurs de grandes nouvelles, les
1. Le Parlement, la Chambre des Comptes, la Cour des Aides, la Cour des Monn
aies, la Connétablie et la Maréchaussée, l'Amirauté, la Maîtrise des eaux et forêts,
l'Élection de Paris, le Grenier à sel, la Chambre des marées, etc.
2. Au « parloir aux bourgeois », puis en 1357 à la « maison aux piliers

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