Le griffon dans l orfèvrerie gréco-scythe - article ; n°3 ; vol.119, pg 454-467
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Description

Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1975 - Volume 119 - Numéro 3 - Pages 454-467
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1975
Nombre de lectures 150
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Alain Pasquier
Le griffon dans l'orfèvrerie gréco-scythe
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 119e année, N. 3, 1975. pp. 454-
467.
Citer ce document / Cite this document :
Pasquier Alain. Le griffon dans l'orfèvrerie gréco-scythe. In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et
Belles-Lettres, 119e année, N. 3, 1975. pp. 454-467.
doi : 10.3406/crai.1975.13164
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1975_num_119_3_13164454 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
LE GRIFFON DANS L ORFEVRERIE GRECO-SCYTHE,
PAR M. ALAIN PASQUIER.
Les animaux fantastiques ne sont pas rares dans le décor des
bijoux exposés au Grand Palais1 ; et, parmi eux, le griffon, ce monstre
qui emprunte à la fois au lion et à l'aigle, prend une place très
importante. La composition d'un être fabuleux qui tient de l'animal
le plus fort sur la terre et de l'oiseau qui règne dans les airs ne
pouvait manquer de séduire les Scythes, chez qui l'art animalier
a l'importance que l'on sait. Or, à la différence de certains motifs,
comme celui du cerf couché, qui témoignent à deux siècles de di
stance d'une étonnante fidélité au même schéma2, la représentation
du griffon, dans les pièces d'orfèvrerie de l'exposition, n'est pas
uniforme. De ces variations ornées sur le thème du griffon, nous
ne voulons retenir ici que celles qui relèvent de l'art « gréco-scythe »,
et plus précisément encore celles qui reproduisent la forme du
griffon à tête d'aigle3. Encore ne pourrons-nous traiter le problème
dans son ensemble : c'est ici seulement une petite enquête sur
l'histoire du motif que l'on veut mener, enquête qui nous fera passer
des bords du Pont-Euxin aux rivages de l'Ionie, qui nous conduira
à Athènes et jusqu'en pays étrusque. Elle nous rendra plus sensible
encore, sur ce point d'iconographie, la complexité de cet art mélangé.
Disons tout de suite que le griffon qui nous occupe, dans l'orfè
vrerie gréco-scythe, revêt en gros deux aspects : le premier aspect,
c'est le miroir de Kelermès (fig. 1) qui le révèle, sur deux des huit
zones rayonnantes qui composent son décor4. Sur l'une d'entre elles,
la bête est représentée assise, autant qu'elle le peut dans le cadre
étroit qui lui est imparti. Elle a les deux pattes avant posées sur le
sol, en une attitude figée. L'aile est composée d'une charnière
1. Une partie de la documentation des communications de MUe Schiltz
(p. 443-453) et de M. Pasquier étant commune, on a adopté une numérotation
continue pour les illustrations des deux textes.
2. Ainsi le cerf de Kostromskaïa (Catalogue de l'Exposition, n° 17), et celui
de Koul-Oba (Catalogue, n° 92).
3. Les variations de l'image du griffon dans l'art de l'Orient comme dans
celui de la Grèce sont fort nombreuses. Pour un panorama de la question,
cf. l'article « Gryps » dans le Lexikon der griechische Mythologie de Ruscher
(A. Furtwàngler) ; A. M. Bisi, // Grifone, dans Studi Semitici, 13 ; Goldman,
The Development of Lion-Griffin, dans AJA, LXIV (1960), p. 319-328 ; enfin
les pages et les notes concernant les griffons des Plaques d'or de Delphes étudiées
par P. Amandry, Ath. Mitt, 11 (1962), p. 35-71, fournissent une ample moisson
de renseignements.
4. Catalogue, n° 20, p. 59 et p. 136. La publication la plus complète est celle
de I. Maximova, Serebriannoïe Zerkalo iz Kelermesskogo Kourgana, dans SA,
n° 21, 1959, p. 281 sq. LE GRIFFON DANS , L ORFEVRERIE GRECO-SCYTHE 455
vigoureusement soulignée et de deux rangées de plumes qui
s'incurvent vers l'intérieur en leur extrémité. Le pelage du monstre,
comme celui de presque toutes les figures du miroir, est noté au
moyen de petites incisions horizontales en réseau serré. Mais l'él
ément le plus important est la tête, avec son bec largement ouvert,
Fig. 7. — Pectoral de Tolstaïa mogila (détail).
recourbé en sa partie supérieure ; la langue est dardée et se détache
en formant une courbe ascendante qui répond harmonieusement à
celle du bec. L'oreille est droite et haute. L'œil écarquillé est abrité
sous une orbite qui saille du crâne : l'ensemble est couronné d'un
élément terminal, une sorte de pédoncule coiffé d'un bouton pointu5.
Dernier détail caractéristique : le col, en sa partie latérale, s'orne
de deux petites boucles qui enroulent leur volute côte à côte. Le
second griffon ne diffère que par l'attitude : il est représenté debout,
la tête retournée, entouré de deux personnages hirsutes et velus
qui semblent vouloir lui faire un mauvais parti.
Le deuxième aspect, c'est celui des monstres, du pectoral de
Tolstaïa mogila6 : nous y découvrons (fig. 7) une bête vivante et
puissante, qui se jette avec détermination dans l'action violente. De
grandes ailes naturelles s'attachent à un corps souple et élancé ; le
5. On a beaucoup écrit sur l'origine et le rôle de cet appendice. La stylisation
en est sûrement grecque, si est probablement orientale.
6. Catalogue, n° 70, p. 76-77, 154-155. COMPTES RENDUS DE L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 456
col allongé se renforce en sa partie postérieure d'une crête hérissée,
aux pointes drues et aiguës. Les oreilles courtes se penchent vers
l'avant ; enfin le bec est fermé, ou se referme sur les chairs du cheval
terrassé par les monstres.
En deux siècles, il est naturel que les formes artistiques évoluent ;
mais ici, l'évolution se présente comme une métamorphose. Peut-on
essayer de comprendre comment celle-ci s'est opérée ?
Le miroir de Kelermès n'a pas fini d'étonner les archéologues
par le caractère composite de sa décoration. Si elle a été attribuée
par beaucoup à un orfèvre hellène, on a récemment mis plutôt
l'accent sur tous les détails qui l'éloignent de la manière grecque.
M. P. Amandry, en particulier, estime l'attribution à un artiste
grec pour le moins contestable et rappelle, par exemple, que le
traitement du pelage en petites stries serrées que l'on rapprochait
d'images de l'art grec d'Asie, est déjà présent sur des pièces d'orfè
vrerie d'époque bien plus haute, provenant de l'Iran du Nord-
Ouest : « tel ou tel détail, dans l'art scythe », en conclut-il, « a pu
être attribué jusqu'à présent à une influence grecque par ignorance
de l'art transcaucasien »7. Mais le même savant reconnaît que la
déesse ailée tenant les lions « laisse supposer que l'artiste avait vu
des vases peints ou des bijoux ioniens, lydiens ou rhodiens »8. Dans
ces motifs d'expression grecque, aux côtés de la Maîtresse des
Fauves, nous placerions volontiers les deux griffons. Le griffon assis
donne l'impression d'un motif aux contours précis, comme si le
dessin en avait été « rodé » depuis longtemps, revêtant une apparence
plus décorative qu'apotropaïque. C'est le même équilibre, c'est
le même effet décoratif que présentent les griffons dans la céramique
de la Grèce de l'Est, dans le dernier tiers du vne siècle av. J.-C.
Ils y sont nombreux : tantôt en marche, tantôt assis, quelquefois
couchés, souvent tapis comme un chat qui s'étire9. Or, cette céra
mique, nous le savons par des témoignages archéologiques, a atteint
les bords de la mer Noire dès la seconde moitié du vne siècle. C'est
au griffon de la phase classique de ce style grec d'Asie, le griffon
de « Camiros », que les deux monstres du miroir de Kelermès
ressemblent le plus : même dessin de l'aile avec la charnière qui
déborde sur la poitrine et sur le train avant, même graphisme de la
tête avec les éléments décrits plus haut, avec aussi ce long bourrelet
qui prolonge l'oreille et sépare la tête du col10. Au fond, sur le miroir
comme sur les vases « rhodiens », le bec béant et la langue dardée
7. L'art scythe archaïque, dans Arch. Anz., Heft 4 (1965), col. 909-910.
8. Catalogue, p. 27.
9. Cf. Ch. Kardara, Vases peints de Rhodes, dans Bibliothèque de la Société

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