Scènes de chasse en Baviere de Fleischmann Peter

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Extrait

Scènes de chasse en Bavière
Jagdszenen aus Niederbayern
de Peter FleischmannF
FICHE FILM
fiche technique
Allemagne - 1969 - 1h20
Réalisateur :
Peter Fleishmann
Scénario :
Peter Fleishmann
d'après P. de Martin Sperr
Interprètes :
Martin Sperr
(Abram)
Angela Winkler
(Hannelore)
Else Quecke
(Barbara)
Michael Strixner
(Georg)
Maria Stradler Résumé Critique
(La bouchère)
Abram, jeune mécamicien de vingt ans, Œuvre importante des débuts du "jeune
Gunja Seiser
revient chez sa mère qui habite un village de cinéma" allemand. Sans chercher à plaire,
(Maria) Bavière. Tous deux sont étrangers au pays. sans aucun souci du rythme et du temps,
Bientôt les commérages empoisonnent l'at- rejetant également toute recherche forma-Hanna Schygulla
mosphère : on dit qu'Abram a été en prison liste, Fleischmann accumule sur un milieu
(Paula)
parce qu'il est homosexuel, on l'accuse donné une série de notations dont le carac-
Johann Fuchs d'avoir eu des rapports avec un jeune débile tère documentaire, voire ethnographique,
mental. Les persécutions commencent par fait totalement oublier l’origine théâtrale(Le maire)
des quolibets et des remarques perfides. du film. Trivialité, fermeture d’esprit, préju-
Hans Elwenpoek
Quand Abram veut fuir, il est déjà trop tard. gés, violence latente et contagieuse, débi-
(le curé) Hannelore, la fille de joie du village, l'accuse lité même : le tableau ici dressé suscite le
d'être le père de son enfant ; elle le provoque malaise chez le spectateur et engendreEva Berthold
- le jeune homme perd la tête et la tue. dans la réalité de l’intrigue, une tragédie
(L'institutrice)
Commence alors la chasse à l'homme. banale et sordide qui n’aura rien appris à
L E F R A N C E
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ses participants. Dans l’histoire du les méfaits du "racisme ordinaire". le monde sur les seuls mauvais
"jeune cinéma" allemand, le regard Rencontre du cinéma Allemands. Chacun accuse une minorité
froid de l’auteur et son pessimisme cli- Saint Etienne 1982 et personne ne veut admettre que tout
nique fournissent une sorte de matériau un peuple a été malade, et n’en cherche
de base dru et sans concession, à partir la cause.
duquel un Fassbinder par exemple bâtira Avant de parler de Scènes de chasse Immédiatement après la guerre, les
des arabesques beaucoup plus intellec- en Basse Bavière, il me semble indis- Américains chargèrent le professeur
tuelles et esthétisantes, mais à dire vrai pensable, pour tout spectateur eventuel, Eugène Kogan de faire un rapport sur les
beaucoup moins convaincantes. Apport de connaître le texte de Peter camps de concentration. Il désigna
essentiel de Martin Sperr, ici auteur de Fleischmann publié sous le titre "Du fas- comme une des pires atrocités du systè-
la pièce originale et acteur principal : cisme quotidien", qui constitue la me S.S. celui qui forçait les victimes à
c’est lui aussi qui écrivit le scénario de meilleure présentation du film, en préci- utiliser les mêmes méthodes que les
Mathias Kneissl (Reinhard Hauff, se le sens et la portée : persécuteurs.
1971), film qui n’est pas sans similitude "Je serais désolé que quelqu’un inter- On poussait les détenus à se voler et à
de contenu et de ton avec ces Scènes prète mon film de manière fataliste. se dénoncer les uns les autres afin de
de chasse. Autrefois, les hommes luttaient contre pouvoir affirmer qu’ils étaient des
Dictionnaire du cinéma la peste et la syphilis ; aujourd'hui il faut "sous-hommes". Ainsi, dans mon film, le
Jacques Lourcelles combattre un autre ennemi : la névrose vilage pousse la refugiée Barbara à reje-
et une de ses formes les plus fréquentes : ter son propre fils afin de mieux pouvoir
I’agressivité. Le monde est malade, donc le lui reprocher ensuite. C’est le système
Fatale, mais tout aussi bien provocante, il doit être guéri. L’Allemagne a eté spé- de défense typique des faibles, il faut se
est l’attitude fondamentale exprimée cialement atteinte, c’est pourquoi nous dépêcher d’accuser un plus faible que
dans Scènes de chasse en Bavière : pouvons servir d’exemple au monde si soi. afin d e ne pas être accusé soi-
I’hostilité envers les “provinciaux“ qui toutefois ce monde peut nous considérer même, il faut développer toutes sortes
n‘épargne que ceux que le village sans préjugés fanatiques. J’admets que d'astuces pour trouver les faiblesses du
lui-même refuse : Abram, un jeune c’est une tâche bien difficile. Mais il voisin, pour ne pas être persécuté soi-
mécanicien dont on apprend qu’il a été nous est tout aussi difficile de servir même.
en prison pour délit d’homosexualité, et d’exemple. Il s’agit donc d’une maladie contagieu-
Ernstl, un jeune débile mental. Abram Certains cercles Allemands de droite et se. La pire négligence de la politique de
est le seul a s’occuper de ce garçon et à curieusement aussi certains Français de l’après-guerre a été de ne pas essayer
la fin il est pourchassé par la police et le gauche qui, par commodité ou par de guérir cette maladie. On a laissé cou-
village fanatisé, et retrouvé dans une opportunisme, n’ont pas revisé leurs ver cette haine et l’intolérance fanatique
forêt. C’est le meilleur être du village, et conceptions de "résistants“ vis-à-vis de envers les Juifs a été détournée vers
peut-être aussi le plus faible qu’on accu- l’Allemagne veulent toujours nous faire d’autres minorités : par exemple les
se de meurtre et qu’on emmène. La croire que le Troisième Reich était com- communistes.
caméra montre une, dernière fois le vil- posé de Hitler et d’arrivistes vicieux et Les autres pays réagissent également
lage - dans un plan d’ensemble - qui d’un appareil policier infaillible qui gou- dans ce sens. Ils s’indignent lorsqu’un
retourne à sa fausse paix idyllique. vernaient contre la population. nouveau parti nationaliste est fondé.
Film in der Bundesrépublik Deutschland Pourtant, j’ai vu des actualités filmées ou des Lorsque d’anciens nazis ne sont pas tou-
Pflaum et Prinzler centaines de milliers d'Allemands levaient jours punis assez sévèrement après 25
le bras en criant "Heil" et pas tous par ans ou quand des touristes Allemands
crainte. J’ai vu des images de bons sol- pleins de complexes se comportent à
Fleischmann prend le contrepied du dats se laissant photographier en riant l’étranger comme si le monde devait
"Heimatfilm" traditionnel et montre un à côté de Juifs mourant de faim. J’ai vu être à leurs bottes. Mais, qui aide à gué-
milieu borné, étroit, qui n'accepte pas la également des documents de techni- rir ces complexes, qui voit le déséqui-
différence et se laisse entraîner par ciens honnêtes, calculant des poisons libre qui sévit dans notre pays et son
bêtise et conformisme dans l’engrenage plus rentables. Entre temps, ces faits incapacité de se détendre, la peur du
de la persécution et de la violence Dans ont été connus de tous. chaos en nous et autour de nous et qui
ce film, Fleischmann a reconstitué un Mais les anciens nazis rejetèrent tou- devient une recherche obstinée de
microcosme (la "province" allemande) jours les torts sur quelques-uns : Ies l’ordre ?
pour dénoncer la force des préiugés et Allemands sur les nazis uniquement et Si jamais une nouvelle catastrophe nous
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frappait telles en auraient été les repose sur deux oppositions qui vont tastique, comme s’il s’agissait, par
causes. s’accentuant au fur et à mesure que le l’intermédiaire des vertus animales, de
Mon film devrait aider à comprendre ces récit se déroule : aux habitants du villa- se retrouver plus fort qu’avant. Ce vers
faits. Je trouverais infantile que les ge le couple homosexuel - prostituée quoi tend la démonstration de
Allemands le jugent anti-bavarois ou les apparait comme le représentant du Mal, Fleischmann, c’est vers une vision mora-
étrangers comme anti-Allemand. Ce la cellule qu’il faut détruire. Abraham le des choses même si celle-ci n’exclut
serait la même chose si la corporation est dénoncé à la police et arrêté. De absolument pas une analyse écono-
des boulangers portait plainte parce même, les rapports qu