Trouble Every Day de Denis Claire
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
Site : abc-lefrance.com

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Langue Français

Extrait

FICHE FILM
Trouble every day
www.abc-lefrance.com
D O C U M E N T
solution. CorÈ n'en fait qu'‡ son instinct mettant au dÈfi l'opini‚tretÈ de LÈo ‡ l couvrir. A l'inverse, Shane refuse d cÈder ‡ cette Ètrange involution de l'es pËce qui le mÈtamorphose en bÍt fauve. Pour prÈserver June, il se castr et son couple ne tient qu'au prix de ce enfouissement du dÈsir. BeautÈ archaÔque. Dans la cartographi freudienne, la scËne primitive dÈsigne l reprÈsentation du rapport sexuel de parents par l'enfant, qui interprËte le signes du plaisir comme des signes d souffrance.Trouble Every Days'arti cule autour de deux grandes scËnes pri mitives, dont le terme s'entend dan toute sa violence originelle. Par deu fois, un homme et une femme s'accou plent et leurs gestes d'amour se prolon gent dans une orgie de violence carnivo re. Par leur beautÈ barbare, archaÔque ces deux passages Èvoquent le premie rapport sexuel, l'origine mÍme du dÈsi (dÈvorer son prochain). Loin de se rÈpÈ ter, les deux morceaux de bravoure s rÈpondent. Le premier est filmÈ du point de vue d la jouissance. L'assouvissement de l pulsion (les grognements voraces d BÈatrice Dalle, absolument gÈniale e femme des cavernes anthropophage l'emporte sur les r‚les de souffrance d son partenaire ‡ l'agonie. Le second, e revanche, privilÈgie le martyre de l proie sur le plaisir du bourreau. Dans le yeux dÈlavÈs de Vincent Gallo se lit l honte de n'Ítre pas plus fort que s faim. PrÈdateurs et proies. Quelque chose d profondÈment amphibie caractÈrise l cinÈma de Claire Denis. Il est ‡ la foi fait du point de vue des femmes et de hommes, des prÈdateurs et des proies d'ici (la France, ses pavillons de banlieu en pierre de taille, le Paris deFantÙma et deBelphÈgor) et d'ailleurs (l'interna tional, Abel Ferrara, Hong-kong). Il tra verse le genre (gore, horreur, fantas tique), les genres (homme/femme, ani mal/humain) et ne s'installe pas. So seul territoire, c'est l'affect, la sen
tion. Claire Denis est une cinÈaste propre ment sensationnelle. Elle seule peut fil mer le duvet sur la peau d'un jeun comÈdien, en confondant les aisselles e le pubis, tout le corps devenant un seule zone ÈrogËne. Et lorsque ce mÍm jeune comÈdien (Nicolas Duvauchelle dÈfait brutalement l'enclos qui le sÈpar de la femme qu'il dÈsire, le film retrouv la fougue et la sËve des premiers BuÒuel surrÈalistes,l'Age d'orouUn chie andalou, pur poËme d'amour fou. L symbole (la censure qui cËde sous l'effe du dÈsir) est pris de vitesse. L'image d la pulsion devient aussi puissante que l pulsion mÍme. Cette puissance figurati ve, ce sens incandescent de la poÈsie e de la mise en scËne font de Claire Deni une cinÈaste unique. Jean-Marc Lalann
LibÈration - 12 Juillet 200
(É) L'histoire, rÈduite ‡ une sibylline esquisse, tourne autour de deu couples. CorÈ (BÈatrice Dalle) est cloÓ trÈe par son mari LÈo (Alex Descas) dan un pavillon de banlieue. MÈdecin ancien chercheur, radiÈ de tous les hÙpi taux et laboratoires, ce dernier n connaÓt que trop les penchants canni bales de son Èpouse et s'efforce de l'e protÈger. Par ailleurs, on assiste ‡ l'arri vÈe ‡ Paris de deux jeunes AmÈricain en lune de miel. TrËs amoureux, san doute, sauf que, de la cabine de l'avio ‡ la chambre du palace, Shane (Vincen Gallo), scientifique lui aussi, semble lut ter de toutes ses forces contre l'irrÈsis tible envie de mordre la chair laiteus de sa ravissante conjointe June (Trici Vessey)... On comprend vite une chose : Shan l'AmÈricain cherche dÈsespÈrÈment LÈ le FranÁais, peut-Ítre dÈpositaire d secret de ses instincts sauvages - le mÍmes que ceux de CorÈ. On compren '
SALLE D'ART ET D'ESSAI C L A S S … ER E C H E R C H E 8 ,R U ED EL AV A L S E 42100 SAINTETIENNE 04.77.32.76.96 R…PONDEUR : 04.77.32.71.71 Fax : 04.77.32.07.09
et qu'on y accËde autrement que par la comprÈhension. Il suffit de se laisser faire. Non que l'intrigue de thriller scien-tifique soit un simple prÈtexte. MÍme lacunaire, elle inscrit harmonieusement le film dans son genre et donne de belles scËnes insolites, peuplÈes de seconds rÙles remarquables (dont ceux de JosÈ Garcia et d'HÈlËne Lapiower, tous deux en blouse blanche). Mais, comme toujours avec la cinÈaste, ce sont d'abord les images, les sons et leur agencement qui, mieux que le rÈcit et la parole (plutÙt rare), mËnent la danse et rÈpandent leurs sortilËges. Chaque plan du film ou presque distille ainsi naturellement sa dose de fÈbrilitÈ et d'effroi, mais aussi bien d'Èrotisme et de douceur. Comme si la camÈra de Claire Denis (et de sa chef op, AgnËs Godard) Ètait directement en cheville avec les profondeurs tourbillonnantes de notre inconscient. Cela peut partir des choses les plus ordinaires : le tendre voyage en avion de Shane et June atteint, sans le moindre ÈvÈnement objectif, des cimes d'inquiÈtante Ètran-getÈ. Et les dÈambulations nocturnes du jeune mariÈ dans les couloirs et les sous-sols de son hÙtel sur les pas d'une femme de chambre Ètablissent, ‡ force d'insistance, une torride atmosphËre de safari en huis clos, alors mÍme qu'il ne se passe ´rienª. A deux reprises au moins, la cinÈaste dÈroge pourtant aux leÁons d'Èpouvante de Jacques Tourneur et de saFÈline-en substance, montrer le moins pos-sible. Elle affronte sans oeillËres ni pin-cettes la folie concrËte de son sujet, libÈrant par l'image la pulsion impos-sible ‡ rÈprimer de ses personnages. Cette fois, c'est plutÙt ‡ Hitchcock que l'on songe, ou plutÙt ‡ la canonique for-mule de Truffaut ‡ son propos : ´Toutes les scËnes de meurtre sont filmÈes comme des scËnes d'amour et vice versa.ª Claire Denis applique cela littÈ-ralement. Plein cadre, les baisers de CorÈ se font morsures profondes, et son
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sous un geyser de sang, d bÍte de la jungle. C'est ‡ l lagement, une Èpreuve et se, ‡ mi-chemin entre l'est et un dessin de vampir Munch. L'occasion aussi d quel point BÈatrice Dalle quelle autre actrice aurai cela ? Reste le (faux) problËme d ce procËs du ´sensª qu'on plupart des films, en parti dits de divertissement, po tenter aux rares rÈalisatio gent. Qu'est-ce que Claire donc ‡ nous faire partage elliptique histoire de canni doute des choses t inavouables sur l'arriËre-dÈsir et de l'amour ´dÈv aussi sur ces sentiments u sont le manque ou la dÈp mise en scËne au scalpel chez le spectateur le poi l'horreur trouvera un Ècho simplement,Trouble ev peut-Ítre pas d'autre raiso le plaisir qu'il procure et l' qu'il suscite. PortÈ par une musique originale des T nourri ‡ la source des gr nord-amÈricains (Lynch, Ferrara), c'est un film ‡ voir ‡ ressentir pour ces rai rieuses mÍmes qui nous r jours vers les salles obscur te fÍte du cinÈma ‡ lui tout L TÈlÈrama - 1
Entretien avec la rÈ
Claire Denis,Trouble Eve sentÈ hors compÈtition a Cannes, en mai, est votre s mÈtrage, comment en Ítes ‡ rÈaliser un film d'horreur, l'on ne vous attendait pas ?
La premiËre impulsion est venue ‡ la fi des annÈes 1980, lorsque j'ai rencontr Vincent Gallo, ‡ l'Èpoque totalement inconnu, avec qui j'ai tournÈ un cour mÈtrage ‡ New York. J'ai eu envi d'Ècrire pour lui un film inspirÈ par s prÈsence particuliËre, j'avais commenc ‡ travailler avec Jean-Pol Fargeau le coscÈnariste de tous les films de Claire Denis lorsque le responsable de la sociÈtÈ indÈpendante amÈricaineGoo Machine, James Sheamus, m'a propos de participer ‡ une sÈrie de six films d'horreur rÈalisÈs par des "auteurs". D'abord sÈduite par leur offre, j'ai ensui-te senti le risque d'un rapport ironique dans ce projet, une tendance au pas-tiche, ce que je dÈteste. Plus tard, j'en ai parlÈ avec Olivie Assayas, et nous avions conÁu un projet de film en trois parties, toutes situÈes dans un hÙtel. Il en aurait filmÈ une, Atom Egoyan la deuxiËme et moi la troi siËme. Bien que peu onÈreux, le proje n'a pas trouvÈ de production, l'idÈe d'Olivier est devenueIrma Vepet l mienneTrouble Every Day.
Comment avez-vous dÈveloppÈ cett idÈe ? Je suis partie de films que j'aimais, La Belle et la BÍtede Cocteau,Ca Peoplede Jacques Tourneur, et de l littÈrature fantastique, en particulier Sheridan le Fanu , des Ïuvres o˘ la pul-sion Èrotique est le moteur, mais o˘ elle se rÈsout autrement que par les mani festations habituelles de la sexualitÈ : dans cet Ècart, il y a la place pour le cinÈma.
Ni Dreyer, ni Tourneur, ni Cocteau n montrent de scËnes sanglantes, on n voit pas ‡ l'Ècran s'accomplir les actes qui suscitent l'inquiÈtude, ou la terreur. Pourquoi avez-vous choisi, vous, de mon-trer les situations les plus horribles ? Un tel film se joue nÈcessairement sur une limite, et sur la possibilitÈ qu'elle soit transgressÈe. Ces rÈalisateurs clas-˘
SALLE D'ART ET D'ESSAI C L A S S … ER E C H E R C H E 8 ,R U ED EL AV A L S E 42100 SAINTETIENNE 04.77.32.76.96 R…PONDEUR : 04.77.32.71.71 Fax : 04.77.32.07.09
cinÈma avait encore une forme d'inno-cence, qui laissait les frontiËres du dan-ger, du non-dit, du trouble, trËs proches du centre du rÈcit. Ils n'avaient pas besoin d'aller loin pour Ítre ‡ la limite. Mais, rÈalisantTrouble Every Day aujourd'hui, il m'a semblÈ nÈcessaire d'aller sur les franges qui sont celles de l'Èpoque actuelle : ne pas montrer les scËnes de dÈvoration est ce qui aurait ÈtÈ, pour moi, inadmissible. Je me suis refusÈ ce confort de l'ellipse ou de l'allu-sion exactement pour les mÍmes raisons qui m'ont fait fuir le pastiche. Si l'on raconte une telle histoire, il faut l'affron-ter, la prendre pour ce qu'elle est, accepter d'Ítre mis en danger par elle.
Choisir de montrer oblige ensuite ‡ savoir comment montrer. Bien s˚r, mais cette question concerne toute la mise en scËne, pas seulement ces scËnes en particulier. La rÈponse consiste ‡ essayer de faire du cinÈma, pas du grand guignol.Good Machine rÈclamait des scÈnarios avec une scËne de terreur par bobine : on est dans la mÈcanique, dans une quÍte d'efficacitÈ du spectacle qui n'a rien ‡ voir avec ce que j'essaie de faire.Trouble Every Daycomporte deux scËnes effective-ment sanglantes, qui viennent ‡ leur heure dans le rÈcit, sans rien de forcÈ. On voit d'ailleurs en fait assez peu, le son joue davantage que l'image.
PrÈvoyez-vous les choix de mise en scËne ou sont-il dÈcidÈs sur le moment ? J'ai portÈ ce film durant des annÈes, je l'ai ruminÈ sans cesse, d'autres films rÈalisÈs entre-temps m'ont semblÈ des Ètapes pour y arriver, et pourtant il faut quand mÍme tout dÈcouvrir chaque jour. Faire un film pour chercher le cinÈma met en danger, on se sent mal, mais les rÈponses auxquelles on parvient ne fonctionnent que si elles sont des rÈponses de cinÈma. Ce qui n'a rien de commun avec l'exÈcution d'un cahier des charges, qu'il s'agisse du scÈnario ' '-
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rer au-devant d'une forme, qu'on n connaÓt pas : lorsqu'on s'en approche, l film lui-mÍme propose une sorte d plongÈe, ‡ travers une constructio esthÈtique, vers un domaine plus pro fond, plus mystÈrieux.
Quelles rÈgions explore ce film selo vous ? Selon moi, mais d'autres y verront j'es pËre autre chose, il approche le mystËr de cette violence qui hante le sexe fÈmi nin, et qu'on cherche ‡ conjurer de tan de maniËre. Il Èvoque en tout cas un violence intÈrieure, qui peut projeter su soi-mÍme ou sur les autres, et qu'o peut Èprouver dans les rapports passion nels. Il s'oppose en tout cas ‡ l'idÈe commune ‡ tant de films, que le mal serait extÈrieur, portÈ par d'autres, le "mÈchants".
Le tournage du film et les finitions on connu des difficultÈs. Ont-elles empÍch qu'il soit tel que vous l'auriez voulu ? C'est sans doute le contraire. Jean-Lu Godard remarquait un jour que, pendan les tournages, les gens se demanden les uns aux autres "Comment vas-tu ? au lieu de se demander comment va l film. Je n'ai pensÈ qu'‡ cela. Le fil allait mal, mais il vivait. J'avais cess de le concevoir comme une successio de plans fabriquÈs avec le concours d comÈdiens, de techniciens et de produc teurs, pour le percevoir comme un noya dur, autonome, ‡ dÈcouvrir chaque jour.
Cela signifie que vous vous sentie seule ‡ porter le projet ? Mais non, j'ai reÁu des dons extraordi naires des acteurs, ensuite j'avais l sentiment que BÈatrice Dalle, qui accompli un travail de comÈdienn exceptionnel, et Vincent Gallo m'avaient en quelque sorte passÈ com mande du film, sans rien dire. Ave Jean-Pol Fargeau, AgnËs Godard (direc trice de la photographie), Nelly Quettie (monteuse) et les Tindersticks, qui Ècrit la musique, s'est mise en place u
symbiose sans laquelle je n'aurai jamais trouvÈ le film.
On a le sentiment qu'un tel projet doi laisser ensuite ÈpuisÈ. Or vous vous Íte remise aussitÙt au travail. Oui, les difficultÈs de production d Trouble Every Daym'ont fait para doxalement avancer plus vite sur u autre projet, l'adaptation du roma d'EmmanuËle BernheimVendredi soir que j'ai tournÈe avec ValÈrie Lemercie et Vincent Lindon, et dont je termine l montage. Et je travaille au scÈnario d'u film inspirÈ de la rÈflexion autobiogra phique du philosophe Jean-Luc Nancy L'Intrus. Propos recueilli
par Jean-Michel Frodo Le Monde 11 Juillet 200
Filmographie
Chocolat SÕen fout la mort Le veilleur Boum boum US go home JÕai pas sommeil Nenette et Boni Beau travail Trouble every day
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