Ivanne Rialland UN LECTEUR SACHANT CHASSER. LA CHASSE AU MEROU DE ...
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Ivanne Rialland UN LECTEUR SACHANT CHASSER. LA CHASSE AU MEROU DE ...

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Ivánne Riállánd
UN LECTEUR SACHANT CHASSER. LA CHASSE AU MEROU DE GEORGES LIMBOUR
1 La Chasse au mérou, páru en 1963, est le dernier román de Georges Limbour, et constitue, à bien des titres, un texte-clé dáns cette œuvre que dominent quántitátivement les récits brefs et les chroniques ártistiques. Comme le souligne Mártine Colin-Picon, qui á consácréàLa Chasse au mérououvráge entier, unGeorges Limbour : lesonge 2 autobiographique, ce román est le texte de fiction où lá poétique de Georges Limbour sexprime pleinement et où le tráváil du poète et celui du critique dárt sont définitivement árticulés. Cette insertion de lá réflexion sur lá peinture dáns le román est cruciále : elle áutorise à áppliquer àLa Chasse au mérou, et pártánt à lensemble des textes fictifs, lesthétique éláborée pár Limbour áu fil de sá réflexion sur lá peinture, notámment à propos de lœuvre de son ámi 3 denfánce, Jeán Dubuffet. Si Mártine Colin-Picon á étudié dánsLe Songe autobiographiqueentre les lánálogie modálités de lá créátion des deux ártistes, je tenterái ici de montrer que cette ánálogie tient áu pártáge dune esthétique où lá priorité est donnée à luságe de lœuvre dárt, à sá réception pár un spectáteur ou un lecteur dont limáginátion est provoquée pár lámbiguïté voulue de lœuvre.
DánsLa Chasse au mérou, Georges Limbour met áinsi en pláce un véritáble piège destiné áu lecteur dont le mérou constitue láppât. Point focál du román, celui-ci se dérobe sáns cesse en cumulánt des significátions contrádictoires invitánt à une lecture symbolique globále du román et engágeánt le lecteur dáns un jeu sáns fin de tourniquet, qui devient le sens ultime de lœuvre. Jétudierái donc comment le román déconstruit le sens de lá quête mise en pláce dáns sá première moitié, puis comment cette áppárente pálinodie permet de considérer lefonctionnement contrádictoire du symbole comme le fondement dune esthétique explicitée dáns lá critique dárt et visánt à entráîner le lecteur dáns le mouvement sáns fin de limáginátion.
4  Páuvre étudiánt de Sálámánque», le nárráteur, Enrico, se rend en áuto-stop áu bord de lá Méditerránée áfin de chásser le mérou en compágnie de ses ámis José, Pépé, Amindá et Clindiá. Cette pártie de pêche est donnée dès lábord pár le nárráteur comme une quête initiátique :
Désirais-je tellement me guérir de ma maladie salmantine et couronnée ? Je ne savais pas encore, il est vrai, que je nétais quune ombre flamboyante, un revenant des temps passés enchanté dans son sommeil. Et ainsi, me croyant 5 vivre, invité par des amis, jallais à la chasse au mérou .
Le trájet en áuto-stop jusquáu villáge méditerránéen présente áinsi plusieurs cáráctéristiques des rites initiátiques, telles que lá mort symbolique, ici représentée pár lá perte du nom, ou le pásságe pár les enfers : à lá serveuse Nisé qui 6 à Cárthágène lui demánde son nom, Enrico répond quil  [lá] perdu sur lá route», et les montágnes tráversées 7 présentent une  succession de pláns désolés páreils áux décors dun vieux dráme qui áuráit représenté lenfer . » Une 8 fois árrivé áu villáge, Enrico est initié à lá chásse áu mérou pár José et finit pár tuer le  Seigneur de lá báie», quil dévore ensuite lors dun bánquet. Enrico á tué le monstre et lui á pris sá force, il est devenu un héros, célébré pár ses ámis, áimé des femmes : Nisé lui áccorde à son retour à Cárthágène lá nuit quelle lui áváit refusée à láller.
Máis párádoxálement, le festin rituel qui devráit constituer le couronnement de lá quête dEnrico déconstruit sá réálité et son efficáce. Mádáme Rámón, lá cuisinière, décláre áinsi :  Cest máintenánt que lá Chásse áu mérou commence ! 9 Trinquons à lá mort du sátrápe fessu, le tyrán cállipyge. Il recevrá sá flèche . » Le futur et lá májuscule du mot  Chásse » tendent à tránsformer ce qui áppáráissáit comme lá fin de lintrigue en un commencement, tout en invitánt à relire lá première moitié du román en privilégiánt les indices du cáráctère illusoire de linitiátion dEnrico, telles, notámment, les állusions insistántes à lá figure de Don Quichotte :  je ne sáis à quelles illusions je me seráis láissé 10 áller si, pár un villáge bien reblánchi, jétáis entré me monter lá tête dáns lá máison de Don Quichotte» ;  Je náváis jámáis vu lá Méditerránée et me fáisáis de ses poissons une idée de plus en plus fábuleuse quánd les moulins, páreils à 11 de vieilles gálères de chêne remuánt les eáux bleues de lá Mánche, dispersáient leurs báncs diáprés». Enrico áppáráît áinsi comme un Don Quichotte pour qui les moulins se seráient fáits mérou, tándis que lors de lá chásse victorieuse, Enrico exprime ávec netteté le cáráctère illusoire de celle-ci :
Sur la surface de la mer, ces objets sombres délimitaient une scène triangulaire parfaitement unie où semblait ne pouvoir se dérouler aucune histoire, et certes en ce lieu serein vraiment rien de réel ne se passa, sinon quelque 12 tromperie des apparences.
À lámbiguïté de lá quête, illusoire et efficáce  puisque Enrico á gágné lámour de Nisé , áchevée et à commencer, répond lámbiguïté du mérou. Le mérou est en effet, ávánt même le début du román, un symbole de lárt, váleur ácquise dáns lá préfáce dátée de 1961 du cátálogue de lexposition des peintures dYves Rouvre  à qui le román est dédié. Dáns cette préfáce, Limbour ráconte comment Yves Rouvre linitie à lá pêche sous-márine et conclut áinsi son introduction :  Nous návons jámáis rápporté de butin honoráble. Cest dáns un áutre domáine quil fáit ses cáptures,
1 Georges Limbour,La Chasse au mérou, Páris, Gállimárd, 1963. 2 Mártine Colin-Picon,Georges Limbour : le songe autobiographique, Páris, Láchenál & Ritter, Pleine Márge, 1994. 3 Op. cit. 4 La Chasse au mérou, p. 7. 5 Ibid., p. 9. 6 Ibid., p. 13. 7 Ibid., p. 20. 8 Ibid., p. 25. 9 Ibid., p. 80. 10 Ibid., p. 8. 11 Ibid., p. 10. 12 Ibid., p. 65.
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