Un certain tracé dans le bestiaire musical français: quelques oiseaux - article ; n°1 ; vol.31, pg 73-86
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1979 - Volume 31 - Numéro 1 - Pages 73-86
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 76
Langue Français

Extrait

Liliane Maurice-Amour
Un certain tracé dans le bestiaire musical français: quelques
oiseaux
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1979, N°31. pp. 73-86.
Citer ce document / Cite this document :
Maurice-Amour Liliane. Un certain tracé dans le bestiaire musical français: quelques oiseaux. In: Cahiers de l'Association
internationale des études francaises, 1979, N°31. pp. 73-86.
doi : 10.3406/caief.1979.1185
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1979_num_31_1_1185CERTAIN TRACÉ UN
DANS LE BESTIAIRE MUSICAL FRANÇAIS
QUELQUES OISEAUX
Communication de Mmc L. Maurice AMOUR
(Paris)
au XXX* Congrès de V Association, le 24 juillet 1978.
Le bestiaire musical français est un immense domaine, en
core mal exploré. Aussi ai-je dû faire un choix : je me limiterai
ici au thème de l'oiseau, qui tient la dominante dans le bes
tiaire traité par les musiciens. M'autorisant des volucraires du
Moyen Age, je ne parlerai que d'un bestiaire ailé. C'est donc
une promenade dans notre volière musicale que je vais tenter.
Par son essence même, un bestiaire musical implique l'idée
de composition descriptive ou imitative. Truisme impossible à
rejeter, et qui vaut pour les deux véhicules — voix et instr
ument — empruntés par des artistes qui, jusqu'à une époque
relativement proche (en gros, jusqu'aux temps romantiques),
ne faisaient pas de discrimination de style entre musique
vocale et musique instrumentale, la seconde étant calquée le
plus souvent sur la première. Dans ces conditions, la musique
de bestiaire se soumet obligatoirement à des normes dont
l'esprit demeure stable. L'écueil, c'est la convention ; mais
les moyens dont dispose le dispensateur du phénomène sonore
sont d'une telle richesse, d'une telle malléabilité, qu'il échappe
plus que d'autres à la monotonie. La métamorphose des âges
joue avec plus d'imprévu dans le domaine musical que dans
les autres domaines du bestiaire. Il n'en faut pas moins envisager
deux constantes qui se sont maintenues durant sept siècles :
imitation, expression. Si les théoriciens du xvine siècle, en par
ticulier les Encyclopédistes, ont été parmi les premiers à les 74 L. MAURICE AMOUR
formuler, ils n'ont fait que reprendre une conception qui était
déjà celle des plus anciens auteurs de musique profane — et
de musique religieuse. « La musique doit exprimer et peindre...
La qui ne peint rien est une musique insipide... »,
dira Marmontel reprenant les Réflexions de d'Alembert (1),
tandis qu'une vingtaine d'années auparavant l'abbé Pluche
déclarait : « La musique pure est une marionnette qui voltige
inutilement » (2). Pour Rameau, « l'expression est l'unique
objet du musicien » (3). Quant à d'Alembert, le texte capital
qu'on lui attribue {Réflexions sur la musique en général, et sur
la musique française en particulier, 1754) est une illustration de
de la puissance évocatrice de la musique imitative : « Les sons
peuvent peindre tout ce qui est capable de faire du bruit : le
tonnerre, les vents, les mugissements de la mer, le des
armes, le chant mélodieux des oiseaux, les cris des animaux... »
Ainsi surgiront les analogies, par le lien des idées entre elles,
« toutes les fois qu'elles seront bien rendues ». Le musicien
atteint son but si l'imagination peut recréer le « tableau musi
cal » : par exemple, un berger aux pieds de sa bergère et leurs
troupeaux s'ébattant sur l'herbe d'une prairie émaillée de
fleurs dès qu'apparaissent les sons de la musette, ou encore
l'image d'un « aimable réduit champêtre » caressé par « un
léger zéphyr » grâce à « l'imitation du chant des oiseaux »,
etc..
La poésie chantée n'est pas exclue de cet univers idyllique.
Si le principe qui vient d'être énoncé vaut pour la musique
instrumentale, il s'applique encore mieux à la musique du chant,
nous dit l'auteur du Traité du mélodrame (4). « Le chant surtout
est destiné à peindre la nature et à faire passer dans l'âme
toutes les impressions que les tableaux... de cette même nature
produisent sur les êtres sensibles ».
Enfin, il ne faut pas négliger l'idée de « plaisir », que le
même théoricien situe de la sorte : « La Musique a, comme tous
(1) Examen des Réflexions de M. d'Alembert..., 1759.
(2) Le Spectacle de la Nature, 1732.
(3) Code de Musique pratique, 1760.
(4) Publié en 1772 et attribué à L. Garcin. LES OISEAUX DANS LE BESTIAIRE MUSICAL FRANÇAIS 75
les arts d'imitation, pour objet la nature, et pour fin le plais
ir. » Imitation, expression, plaisir, tels seront les fils conduct
eurs de notre itinéraire.
De la lyrique médiévale à Olivier Messiaen, huit siècles de
musique offrent un « catalogue d'oiseaux » d'une impression
nante profusion. Commençons par ces poètes-musiciens que
sont troubadours et trouvères. L'un des plus grands du
xiie siècle, le Champenois Gace Brûlé (5), demi-frère de Marie
de France, croit entendre, en Bretagne, les oiseaux de son pays
natal, et du rêve nostalgique jaillit la chanson :
Les oisellons de mon pais
Ai oïz en Bretagne ;
A leur chant m'est-il bien avis
Qu'en la doulce Champagne
Les oï jadis,
Si g'i ai mespris,
Ils m'ont en si doux penser mis
Qu'a chanson fare me sui pris...
Le rôle du poète est ici aussi important que celui du musicien
(ils sont d'ailleurs un seul et même artiste), et la tendance
s'infléchit vers la recherche expressive. Voici cette chanson de
Gace Brûlé, une voix solo, puis trois, soutenues par la petite
harpe médiévale et rythmées par la percussion :
Gace Brulê, « Les Oisellons de mon pais... » (fin du XIIe s.).
Avec les musiciens de la Renaissance, le texte poétique s'e
stompe sous les richesses et les subtilités d'écriture d'une poly
phonie luxuriante. Selon la pratique du temps, le chant s'expr
ime par la collectivité vocale, et seules se détachent quelques
paroles désignées pour la production d'effets particuliers : telles
se présentent les compositions du maître de la chanson pari
sienne, Clément Janequin (6). Son Chant des Oiseaux^ dont
nous écouterons la partie centrale, sonne le rassemblement des
(5) Né vers 1159, mort après 1213.
(6) N6 1485, en 1558. 76 L. MAURICE AMOUR
petits personnages ailés désignés par leur nom et signalés par
des onomatopées précises. De là une abondance de « tu, tu,
tu... Tar, tar, tar..., Coqui, oy ti... », au détriment du sens géné
ral du poème :
Réveillez-vous, cœurs endormis,
Le dieu d'amours vous sonne...
L'intention imitative, l'ivresse du concert, la joie du son l'em
portent sur le mot. Nous sommes dans le plein jeu de la ten
dance descriptive :
Janequin, Chant des Oiseaux {première moitié du XVIe s.).
Dans le monde baroque du ballet de cour, l'oiseau s'inscrit
en double appartenance, chorégraphique et vocale. Le Ballet
de la Merlaison (1635), assemblage composite de sinfonies, de
récits et d'airs, dont le roi Louis XIII est l'auteur et où il danse
en personne, entouré des membres de sa maison, met en scène
bêtes et gens : faucons dressés et porte-cages, oiseaux sauvages,
émerillons et arbalétriers, dans un bizarre mélange d'apparat
et de rusticité célébrant les joies de la chasse au merle.
En cette époque de transformation de la musique vocale,
le chant polyphonique s'allège peu à peu de ses parties inter
médiaires. La voix principale se détache, tandis que les autres
se fondent dans l'harmonie, donnant naissance au chant mono-
dique accompagné, dont l'écriture va désormais s'imposer
pour près de deux siècles. Sous l'influence du style représentat
if des Italiens, le texte poétique, mis en valeur par une décla
mation calquée sur la parole, prend toute son importance. Il
se coule dans cette nouvelle forme nommée « Air de Cour »,
qui se chante au luth puis au clavecin, et qui va connaître une
faveur prolongée jusqu'à la maturité de Louis XIV. Les oiseaux
conservent alors tout leur prestige auprès des poètes et des
musiciens. Ainsi, Philippe

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