Textes spirituels d'Ibn Taymiyya XIII. Mongols et Mamlûks : l'état ...

Yahya Michot

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Textes spirituels d'Ibn Taymiyya XIII. Mongols et Mamlûks : l'état ...

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Textes spirituels dÕIbn Taymiyya

XIII. Mongols et Maml˚ks : lÕÈtat du monde musulman vers 709/1310 (fin)

Nous reprenons la traduction du textel‡ o˘ nous lÕavons laissÈe ‡ la fin de notreTextes spirituels XII. Les R‚fidites aiment les Tatarset leur empire. Gr‚ce ‡ lui en effet, il leur advient comme puissance quelque chose qui ne leur advient pas du fait de lÕempiredesMusulmans. Eux, les R‚fidites, sont des auxiliaires des associateurs, des Juifs et des NazarÈensdans leur combat contre les Musul- mans. Ils ont ÈtÈ parmi les raisons les plus importantes dela pÈnÈtration des Tatars,avant leur conversion ‡ lÕIslam, dans les terres delÕEst, au Khur‚s‚n, en Iraq et en Syrie. Ils ont ÈtÈ parmi les gens qui les ont le plus aidÈs ‡ prendrelespays de lÕIslam, ‡ tuer les Musulmans [528]  et‡ capturer leurs 1 femmes.LÕaffairedÕIbanl-ÔAlqamÓetdesessemblables  avec le calife, leur affaire ‡ Alep avec le maÓtre dÕAlep sont 2 cÈlËbres ; tout le monde les connaÓt. Et de mÍme pour les  guerres entre les Musulmans et les NazarÈens sur les cÙtesde 3 Syrie :les gens dÕexpÈrience savent que lesR‚fidites  Ètaient avec les NazarÈens contre les Musulmans etquÕils les aidËrent ‡ prendre leurspays quand vinrent les Tatars. La re- 4 conquÍte dÕAcre et dÕautres placesdescÙtes fut un coup dur  pour les R‚fidites. Lorsqueles Musulmans vainquent les NazarÈens et lesassociateurs, cÕest un choc pour les R‚fidites. Lorsque les associateurs et les NazarÈens vainquent les Musulmans, cÕest une occasionde fÍte et de rÈjouissance pour les R‚fidites.

1 . yydauMaÕÓDna-lmmadMuhamaÓl-(ÔAlbq.aob. 656/1258), vizir shÓÔite du dernier calife Ôabb‚side,- al MustaÔsim. Il correspondit avec les Mongols avant leurattaque de Baghd‚d et contribua,par sa trahison, ‡ la victoire de H˚l‚g˚ sur lÕarmÈe califale ; cf.J. A. O B YLE , art.Ibn al-ÔAlkam,ÓinEnc. de lÕIslam, Nouv. Èd., t. III, p. 724. 2 . Ibn Taymiyya fait sans doute allusion au rÙle jouÈ par un certainÈmirSayfal-DÓn´H‚fidiª(=al-R‚fidÓ?)danslapoli- tique hÈsitante delÕayy˚bide al-Malik al-N‚sir Sal‚h al-DÓn Ab˚ l-Muzaffar Y˚suf, maÓtre dÕAlep et de Damasf,ace‡ lÕinvasion de H˚l‚g˚, politique qui conduisitau sac mongol dÕAlep en 658/1260 : ´ SeÔf-eddin-H‚fidi, agissant auprËs de N‚ser,lui exagÈrait la puissance du monarque mongol,lui conseillait de ne pas tenter lesort des combats, mais de dÈsarmer son ennemi en se soumettant ‡ lui volontairement. LÕÈmirRokn-eddin-Bibar-s Bondokdari sÕemporta contrecetÈmir, jusquÕ‡ le frapper et lÕ-ac cabler de reproches. ´Vous serez, lui dit-il, la cause de la ruine des Musulmans. ª (T. D. A.M AQRŒZ , Œ Histoire des Sultans Mamlouks de lÕ…gyp,tetraduite enfranÁais et accompagnÈe de notes philologiques, historiques-gÈographiques par…. Q UATRE - , 2 t. / M»RE  4 p., B. Duprat, Paris, 1840-1845, t. I,  1, p. 87 ; sur al-Malik al-N‚sir Y˚suf, cf. K. V. Z ETTERST…EN , art.al-N‚sÓr, inEnc. de lÕIsla,mIËre Èd., t. III, p. 922-924). 3 . CÕest-‡-dire les Croisades. 4 . portuaire de Palestine, aux mains des CroisÈs de Ville 1104 ‡ 1187 et 1191 ‡ 1291. Sa reconquÍte ‡ cette date par le sul- tan maml˚k al-Malik al-Ashrafmarqua la fin de la domination croisÈe en Palestine. Cf. D. P. L ITTLE ,The Fall of ÔAkk‚ in 690/1291 : the Muslim version, inStudies inIslamic History and Civilization in honour of Professor David A YALON , ed. by M .S HARON 1986, p. 159-, Cana, JÈrusalem - E. J. Brill, Leyde, 181 ; A. DÕS UOZA ,The Conquest of ÔAkk‚ (690/1291). A com- parative analysis of Christianand Muslim sources, inThe Mus- lim World, Hartford, t. LXXX, 1990, p. 234-249.

Des R‚fidites font partie les adeptes de la libre pensÈe et 5 delÕhÈrÈsieÐlesNusayr,ÓslesIsmaÈliensetleurssem-  blables dÕentre les libres penseursqarmates et autres se trou- vant au Khur‚s‚n, en Iraq, en Syrie, etc. Les R‚fidites sont 6 des Jahmites qadarites. Chez eux,il y a comme mensonge,  innovations et forgerie ‡ lÕencontre de Dieu et de Son Me-s sager quelque chose de plus grave que ce quÕil yachez les Kh‚rijitesrenÈgatsquelÕÈmirdescroyants,ÔAlÓ,etreleste des Compagnonsont combattus sur ordre du Messager de Dieu Ð Dieu prie sur lui et lui donne lapaix ! Ou, plutÙt mÍme, chez eux, il y a comme rejet desprescriptions lÈgales de la religion quelque chose de plus grave que ce quÕilyavait chezceuxquirefusËrentdepayerlÕaumÙneetquÕAbB˚akrle VÈridique et les Compagnons combattirent. [530] Il y a eu consensus des Musulmans sur la nÈcessitÈ de combattre les Kh‚rijites,les R‚fidites et leurs pareils lorsquÕilsse sÈparent de la communion des Musulmans, ainsi que ÔAlÓles a combattus Ð Dieu soit satisfait de lui ! Combien plus encore quand, en outre,ils souscrivent ‡ ce 7 qui, des rËgles des associateurs, tel leYasade Gengis Kh‚n,

5 . shÓÔite extrÈmiste tirant so Sectenom de Muhammad b. Nusayr al-FihrÓ l-NumayrÓ, un disciple du 10e ou du 11e im‚ms duodÈcimains, et encore existante aujourdÕhui(ÔAlawites de Syrie) ; cf. D. G IMARET - G. M ONNOT , trad. dÕ AL -S HAHRAST¬NŒ , Livre des religions I, p. 542, n. 225. Ibn Taymiyya expose et rÈfute les doctrines nusayries dans un fetwa cÈlËbre,Èvoquant leurs alliances avec les CroisÈset les Tatars et prÈcisant le comportement ‡ adopter ‡ leur Ègard ; cf. S. G UYARD ,Le fetwa dÕIbn Taymiyyah sur les NosairisNosairÓs ont plusieurs: ´ Les noms en vogue parmi les musulmans.TantÙt on les appelle Mol‚hidah (hÈrÈtiques),tantÙt IsmaÈlÓs, tantÙt Karmathes, tantÙtB‚tinÓs,tantÙtNosairÓts,antÙtKhorramÓs,tantÙtenfin Mohammars [É] Leur religiona les dehors du RafÈdhisme, et au fond cÕest lÕincrÈdulitÈ pure et simple ª (p. 189). 6 . Cette formule a un aspect de paradoxe, dans la mesure o˘ les ShÓÔitesi,nfluencÈs par le MuÔtazilisme, passent gÈnÈra-le ment pourÍtre partisans de la libertÈ humaine, c'est-‡-dire anti- Jahmites, anti-qadarites. Sans doute Ibn Taymiyya y recourt-il pour dÈnoncer les R‚fidites qui, sans plus considÈrerlesordres et prohibitions de la Loi, justifientleur alliance avec les Mongols par le fait que ´ laprÈdÈtermination divine est avec ces in- fidËles ª, ainsi quÕen tÈmoignent leurs succËs militaires ; cf. notreMusique et danse, p. 29 ;Textes spirituels III, p. 10-11. an 7 .  ka-y‚s‚q: Ñ kan‚Õis  Ñ waFAyalon (. D.The great Y‚sa ofChingiz Kh‚n. A Re-examination. C, inStudia Isla- 2 mica, Paris, t.XXXVIII, 1973, p. 107-156) a montrÈ comment lÕaffirmation dÕal-MaqrÓzÓob(. 845/1442) que les Maml˚ks Ètaient jugÈsdansleurs disputes internes selon les ordonnances duYasalÕIslam, devait Ítre relativisÈe. Il, et non selon la Loi de a cependant aussi fait ÈtatdÕun tÈmoignage ancien, d˚ au fameux biographe al-SafadÓo(bau. 764/1363), Èvoquant un recoursYasa pour le jugement des gardes du corps de lamaison du sultan maml˚k. En ce qui concerne le campmongol, Ibn Taymiyya apporte un tÈmoignagetrËs clair, quelque peu antÈrieur ‡ celui dÕal-SafadÓ : certains ´ Musulmans ªde ce camp suivaient effectivement des prescriptions duYasaplutÙt gengiskh‚nide que la Loi de lÕIslam. Presque certainement,cÕestaussi leYasa que le grand Docteur a en vue lorsque, plus haut(Textes spirituels XII, p. 523), il Ècrit ‡ propos deces´ Musulmans ª mongols : ´  Il est jugÈ de ce qui Èclate entre les plus grands dÕentre eux selon les rËgles de lÕ¬ge delÕIgnorance,non selon les rËgles de