Commission sur le racisme et le négationnisme à l université Jean-Moulin Lyon III : Rapport à Monsieur le Ministre de l Education nationale
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Commission sur le racisme et le négationnisme à l'université Jean-Moulin Lyon III : Rapport à Monsieur le Ministre de l'Education nationale

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Description

Le 15 novembre 2001, le ministre de l'éducation nationale, Jack Lang, décide la création d'une « Commission sur le racisme et le négationnisme au sein de l'université Jean-Moulin Lyon III ». La création de cette commission trouve son origine dans l'apparition d'un certain nombre d'affaires ayant rapport au racisme et au négationnisme au sein de l'université française, notamment dans l'université lyonnaise. La commission est présidée par l'historien Henry Rousso qui a travaillé sur l'histoire et la mémoire de la seconde guerre mondiale.

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Publié le 01 octobre 2004
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Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Commission sur le racisme et le négationnisme à
l’université Jean-Moulin Lyon III
Rapport à Monsieur le Ministre de l’Éducationnationale
par Henry Rousso
Septembre 2004
Rapport surleracismeetlenégationnismeàLyonIIIRapport surleracismeetlenégationnismeàLyonIIIMembres de la Commission :
Annette Becker
Professeure d’histoire contemporaine
àl’universitédeParisX-Nanterre
Florent Brayard
Chargé de recherche au CNRS (IHTP)
(Secrétaire scientifique)
Philippe Burrin
Directeur de l’Institut universitaire de
hautes études internationales de Genève
Henry Rousso
Directeur de l’Institut d’histoire du temps présent (IHTP-CNRS)
(Président)
Rapport surleracismeetlenégationnismeàLyonIIIRapport surleracismeetlenégationnismeàLyonIIIINTRODUCTION
Le 15 novembre 2001, le ministre de l’Éducation nationale, Jack Lang, décide la création
d’une « Commission sur le racisme et le négationnisme au sein de l’université Jean-Moulin
1
Lyon III », mission reconduite par les ministres Luc Ferry et François Fillon. La présidence en
est confiée à un historien, Henry Rousso, après que plusieurs de ses collègues, également
historiens, ont décliné l’offre. Les membres de cette commission ont été nommés le
11 février 2002, sur des critères scientifiques : Annette Becker, professeure d’histoire
contemporaine à l’université de Paris X-Nanterre a été membre de la section 22 (« Histoire et
civilisations ») du Conseil national des universités, et elle est spécialiste de l’histoire des deux
guerres mondiales ; Philippe Burrin, directeur de l’Institut universitaire de hautes études
internationales de Genève, est un spécialiste de l’histoire du nazisme, du fascisme français et
de l’antisémitisme ; Florent Brayard, chargé de recherche au CNRS (Institut d’histoire du
temps présent), responsable du secrétariat scientifique, est un spécialiste de l’histoire du
négationnisme et de l’histoire du génocide ; Henry Rousso a travaillé sur l’histoire et la
2
mémoire de la seconde guerre mondiale. Prévue à l’origine pour janvier 2003, la date de
remise du rapport a été repoussée à deux reprises, d’abord parce que la commission n’a
commencé son enquête qu’à compter de septembre 2002, après les changements politiques
intervenus au printemps, ensuite à cause de la nature même du travail et des méthodes
adoptées.
1 On trouvera la présentation de la commission, ainsi que le dossier de presse à l’adresse suivante:
<www.education.gouv.fr/presse/2002/racismedp.htm>.
2 Deux autres universitaires ont fait partie de la commission à l’origine : le philosophe et politologue Pierre-André
Taguieff, et le sociologue Daniel Filâtre, spécialiste des universités. Ils n’ont pu poursuivre, pris par d’autres projets
ou d’autres charges professionnelles.Introduction p.6/263
Dans la lettre de mission, le ministre écrit :
Depuis une quinzaine d'années, un certain nombre d'affaires ayant rapport au racisme et
au négationnisme ont traversé l’Université française. Ce fut notamment le cas à l’université Jean-
Moulin Lyon III. Les étudiants, les personnels universitaires et, plus généralement, l'opinion ont pu
avoir le sentiment que toute la lumière n'avait pas été faite sur ces affaires, ce qui a suscité les
rumeurs, la suspicion et aussi le mécontentement.
Il est temps de permettre le retour à la sérénité. Celle-ci passe notamment par la mise au
jour objective des faits. Un travail de cet ordre avait été conduit, il y a quelques années, pour
l'université Lumière Lyon II, par le professeur Bernard Comte. II apparaît aujourd'hui souhaitable
qu'une recherche analogue soit menée à propos de l'université Lyon III.
C'est pourquoi je vous demande, Monsieur le professeur, de bien vouloir présider et animer
une commission historique chargée de faire la lumière sur le racisme et le négationnisme qui ont
putrouverleurexpressionauseindel'universitéLyon III.
II s'agira pour vous, en reconstituant l’« histoire du problème » et en proposant une
interprétation fondée sur des sources fiables, d'éviter pour l'avenir le double écueil d'une
occultation – volontaire ou involontaire – du passé et d'une polarisation injustifiée sur ces
questions.
C'est à cette condition que votre enquête historique permettra à cette grande université de
3
renforcer le rôle qui est le sien et de développer le rayonnement qu'elle mérite. [...]
PRÉSENTATIONDESFAITS
La création de cette commission s’inscrit dans une histoire locale déjà longue, aux
péripéties nombreuses et déroutantes pour qui n’est pas un observateur du milieu universitaire
et politique lyonnais. Elle résulte à court terme d’une exacerbation des polémiques concernant
la présence à Lyon III d’enseignants proches de l’extrême droite. En réalité, le problème a
surgi il y a trente ans, avec la création même de cet établissement, en 1973-1974, après une
scission brutale avec l’université Lyon II fondée après 1968 et marquée « à gauche ». Son
histoire a été émaillée de plusieurs scandales mettant en cause une poignée d’enseignants et
d’étudiants, dénoncés pour leurs écrits et leurs activités politiques dans et hors de l’université.
Deux types de reproches émergent de manière récurrente, qu’il ne faut pas confondre
même s’ils sont liés entre eux. Le premier concerne le fait que Lyon III a abrité depuis la fin
des années 1970, un petit groupe d’enseignants engagés à l’extrême droite. Par commodité
de langage, et tout en sachant qu’il s’agit là d’une simplification, nous parlons ici d’« extrême
3 La copie de la lettre de mission se trouve en annexe.
Rapport surleracismeetlenégationnismeàLyonIIIIntroduction p.7/263
droite » pour désigner des tendances politiques de type autoritaire, fondées sur le principe des
communautés organiques contraire aux principes démocratiques issus des droits de l’homme
et du citoyen. Le terme d’extrême droite recouvre en France, depuis 1945, plusieurs variantes
idéologiques : nationalistes exclusifs hostiles aux « étrangers », néofascistes, partisans du
« différencialisme » biologique, ethnique ou culturel, catholiques intégristes, monarchistes
contre-révolutionnaires. Marquées par la défaite de Vichy et de la collaboration en 1945, la
plupart des tendances de l’extrême droite française ont refait surface à la fin des années 1950,
avec le combat pour l’Algérie française. À compter des années 1980, elles se sont engagées
autour du Front national dans la contestation des politiques d’immigration. Dans la France du
eXX siècle, ce sont les mouvements d’extrême droite qui ont le plus porté le racisme et
l’antisémitisme, même si toutes leurs composantes n’adhèrent pas à ces idées, et même s’ils
ne sont pas les seuls à promouvoir ces formes d’exclusion.
C’est ainsi que Lyon III a vu l’enracinement, à la fin des années 1970, d’un petit noyau
d’universitaires proches du GRECE (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation
européenne), un des mouvements de la Nouvelle Droite qui a suscité de vives oppositions à
ecause de ses thèses inspirées du racisme « scientifique » du XIX siècle et de son
instrumentalisation de la question « indo-européenne ». Les attaques se sont concentrées sur
l’Institut d’études indo-européennes (IEIE), un centre de recherche créé à Lyon III en 1980 par
des linguistes (Jean Haudry, Jean Varenne, Jean-Paul Allard), qui a servi de lieu de
regroupement idéologique. Certains enseignants (Bruno Gollnisch, Pierre Vial) rejoignent
également, dans ces années-là, le Front national, où ils exercent des responsabilités
importantes. La présence de l’extrême droite à Lyon III a revêtu une forte visibilité et a
cristallisé les passions, même si elle a toujours été marginale : cette université, à tort ou à
raison, a été stigmatisée à cause d’un « climat » particulier, dans un contexte local et nat

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