Le silence des agneaux : essai psychanalytique
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Description

Lecture psychanalytique du celebre film aux 5 oscars, Le silence des agneaux.

Informations

Publié par
Publié le 26 février 2013
Nombre de lectures 906
Langue Français

Extrait

Approche psychanalytique du Silence des agneaux
et des principaux personnages du film.
Projeté au cinéma Bel'air de Mulhouse,
le vendredi 05 novembre 2010, dans le cadre des soirées
« cinéma et psychanalyse ».

« Accrocs perdus .. .»
Tiré d'un thriller de Thomas Harris publié en 1988, « Le silence des agneaux » (The silence
of the lambs) à été réalisé par Jonathan Demme deux ans plus tard. Vingt ans après sa sortie
cinématographique, cette fiction continue d'être d'une actualité et d’une force étonnante.
Inspirée des modes opératoires de trois véritables tueurs en série arrêtés par le FBI, l'auteur
en a compacté l'histoire en un seul. On y retrouve la façon dont le premier attirait ses
victimes en simulant le handicap d'un bras dans le plâtre, la manière dont le second les
détenaient dans une cave, et la compulsion du troisième à dépecer ses malheureuses proies
pour se revêtir de leurs peaux en contemplant son image dans un miroir.
Éviter ce film sous le prétexte de sa violence, des (très peu de) scènes de cannibalisme qu’il
contient est un écran derrière lequel se cachent, sans doute, des motifs d'une horreur bien
plus ordinaire. Ne sont-ce pas, en effet, d'autres folies dissimulées en second plan, qui nous
rendent ce film autrement insupportable ? Celle de la déshumanisation des institutions
psychiatriques qui font de moins en moins le pari de laisser advenir la parole du malade,
celle de l'instrumentalisation d'individus dont les supérieurs hiérarchiques vont se servir, à
fins de jouissance, celle de la violence du pouvoir politique quand il se fait anthropophage,
dans son seul intérêt et plus globalement, enfin, celui du rapport de notre société
consumériste aux objets qu'elle convoite de dévorer, quel qu'en soit le prix.
*
Ce film parle tout d’abord d'une horreur. Celle d'une oralité entièrement tournée vers
la jouissance, ou pour en faire un néologisme lacanien, « ça parle d'horralité ». Freud
avait décrit la coexistence au stade oral chez l'enfant, de pulsions ambivalentes. Cet
orifice qu'est la bouche est, en effet, tant le siège de satisfactions (besoins et plaisirs
alimentaires, contacts sensuels) qu'un lieu de destructions (morsure, ingestion). N’aime-t-on pas quelqu'un à croquer ? C'est aussi, toujours selon Freud, un des trois
mécanismes d'identification, avec le trait unaire et le symptôme. Ce lieu troué est, de plus,
l'issue, permettant à la parole de se faire entendre.
Ce film parle ensuite de la perversion. Il en montre le clivage moïque et la prévalence
de la métonymie et de l'agir dans les choix d'objets et les signifiants. Il met en scène le
déni de la castration, l'élection d'objets fétiches (capable de leurrer le manque dans
l'Autre) et la réification de semblables pour sa propre jouissance.
**
J'ai choisi de m'intéresser aux personnages principaux du film, plutôt que de re-dérouler le
fil de l'histoire, qu'il suffira de retrouver, en visionnant ou re-visionnant cette œuvre aux
cinq oscars.
Je commencerai, peut-être par galanterie mais peut-être aussi parce que c'est un des rôles les
moins inquiétants du film, par parler de l'agent Clarice Starling, qu'incarne Jodie Foster. Elle
n'est rassurante qu'à moitié, tant ce qui semble la faire fonctionner ressemble à un
paramétrage codifié, un esprit formaté duquel tout inconscient et tout désir semble au départ
éteint.
Clarice Starling est une élève de l'académie de police,
attendant d’intégrer le FBI. Elle est filmée d'entrée de
jeu, en plein exercice physique, courant et franchissant
un « parcours du combattant » au milieu d'une paisible
forêt de Virginie. On remarque furtivement des panneaux
accrochés à des arbres et annonçant la devise de ce camp
d'entraînement : « douleurs-souffrance-peine : un régal ! ». Le décor est planté... brouillant
déjà les pistes. Ceux qui se placent du coté de l'ordre et de la loi prendraient-ils donc, eux
aussi, un plaisir spécial à la souffrance, et si oui, à laquelle ? La leur ou celle des autres ?
Clarice a perdu très tôt sa mère, et son père a été tué dans l'exercice de son métier de shérif
d'une police locale quand elle avait une dizaine d'années. Placée chez un oncle, elle est
réveillée une nuit par des cris d'horreurs qu'elle associe à des cris d'enfants.Ces cris étaient en réalité ceux d'agneaux égorgés par son oncle, personnage doux et
attentionné au demeurant. Voulant connaître la vérité, elle se lève et assiste en cachette à
cette tuerie. Impuissante et terrifiée, elle décide d'en sauver au moins un, en s'enfuyant avec
l'un des agneaux dans les bras. Rattrapée par l'oncle, elle ne pourra éviter que s'accomplisse
sur l'agneau, le sort réservé à ses semblables. Ce sera pour elle, une seconde confrontation à
la mort et peut-être un point de fixation de fascination, autour du morbide. Peu de temps
après, elle sera placée en orphelinat.
Dans la mythologie grecque, Nyx (la nuit) issue du Chaos primordial, a enfanté deux frères
jumeaux, Hypnos (le sommeil) et Thanatos (la mort). Pour Clarice aussi désormais, ses
nuits, accoucheront d’un sommeil mêlé d’angoisses de mort. Les cris de ses agneaux
oniriques, mais également leurs silences, seront autant d'interrogations sur la mort dont ils
sont l'évocation, et sur les mobiles qui conduisent à la donner.
Elle vise donc professionnellement un service particulier du F.B.I., le service spécialisé dans
l'approche comportementaliste des criminels. Est-ce déjà pour elle une façon de pouvoir les
confondre pour ne plus les confondre ? Ne plus confondre l'image d'un père protecteur mais
capable de « tuer des méchants », comme elle se revoit lui dire quand elle était enfant, ou
encore celle d'un oncle aimant (autre figure paternelle), mais tueur d'agneaux innocents.
Elle accepte la mission que lui confie Jack Crawford, son supérieur hierarchique, que les
élèves nomment «le gourou». Ce chef aux accents paternaliste, va pourtant se servir d'elle
comme appât, pour pêcher des informations auprès du psychopathe Hannibal Lecter, au
sujet d'un tueur en série surnommé Buffalo Bill.
Sa rencontre avec Hannibal Lecter va, pour elle, s'avérer cathartique. Dès-après leur
première rencontre, l'inconscient de Clarice va se mettre en marche. Des réminiscences
surviennent, images d'une enfance idéalisée auprès de son père, dans la campagne
américaine.
Une étrange relation s'installe entre Hannibal et elle, une sorte de « talking-relation ». Une
relation analytique pourrait-on dire, où la notion de « temps nécessaire pour comprendre »
sera orchestrée par ce sujet supposé-savoir-quelque-chose, qu'est Hannibal. Au départ, ce
dernier semble même touché par la sincérité courtoise de la jeune femme. Il va la conduire à
accepter un « contrat » rappelant étrangement la règle fondamentale énoncée au début de
chaque cure analytique : Elle lui dévoilera des morceaux de l'intimité de ses pensées, et lui,
lui dira quelques mots de temps en temps, mots-indices capable de la mener vers la réponse à sa question : qui les tuent ?… mais n'est-ce pas, plus loin, un « qui es-tu ?», auquel
Hannibal l'a renvoi ?
Le savoir scientifique nous est montré dans son insuffisance à pouvoir élucider cette affaire.
Ni la police technique, ni les questionnaires de profil psychologique ne semblent capable de
résoudre l'énigme. Il va falloir se mettre à table, ouvrir sa bouche pour parler et ses oreilles
pour écouter !
Ici, la notion d'énigme ne peut pas ne pas nous évoquer celle du sphinx de Thèbes (le terme
« sphinx » est d'ailleurs cité par l'entomologiste qui dissèque la chrysalide de la chenille,
trouvée dans la bouche d'une des victimes. Une chrysalide déposée sur le bout de la langue
… comme un mot qui peine à en sortir. Encore fallait-il se donner la peine de vouloir le
recueillir ce mot-cocon, ce que n'avait manifestement pas l'intention de faire le médecin
légiste, présent lors de l'examen du cadavre : « on retrouve souvent des tas de choses dans
la bouche des morts que l'on a repêché .. ! » se contente-t-il de dire ironiquement...
Pour comprendre ce qui se trame, Clarice devra lire son propre livre intérieur. Chercher en
elle, comme le lui suggère H

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