MONTAIGNE De l Amitié
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Dans cet essai Montaigne distingue divers types de relations.

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MONTAIGNE,De lAmitié. Dans cet essaiMontaigne distingue divers types de relations, ce qui lui permet de chercher la vraie nature de lamitié :  -ainsiécrit-il quelle est impossible entre un père et son fils car le respect quelle suppose rend toute proximité véritable impossible. Tout aussi impossible entre frères car les rivalités, les heurts la contredisent  -ilse penche également sur les relations entre homme et femme et loppose à lamour qui suppose un feu qui se nourrit de lobstacle  -ilpointe également le fait que certaines pseudo amitiés peuvent naître de lintérêt et donc que ce nest pas là une amitié selon ses vœux. Montaigne évoque le projet de cet essaien se montrant au tout début comme un peintre de  crotesques » ; il dit vouloir là au contraire faire du beau et parler de son ami lui paraît une bonne façon de sengager dans ce projet On sait quinitialement le texte de Montaigne devaitsaccompagner de la publication de textes de son ami:poème etDiscours contre la servitude volontaire. Finalement Montaigne y renonce : leDiscoursavait été  réinvesti » par les Protestants notamment et Montaigne entendait probablement ne pas prêter le flanc à lamalgame. Le texte est écrit pour certaines parties avant 76 et après ; dans tous les cas cest après la mort de La Boétie (1763) . Lessai est donc un hommage : Montaigne la rencontré alors quil a 25 ans. Cette relation durera 4 ans, les quatre années qui précède la mort de LB. Le texte a connu des ajouts dans les deux éditions desessais. Comment Montaigne ici parvient-il à tenir un discours sur la vraie nature de lamitié à travers lévocation dune expérience unique et individuelle ? I-Montaigne semploie dabord à marquer la singularité de cette amitié  1-parcequelle soppose aux amitiés ordinaires er  -le1 §fonctionne ainsi sur lopposition entre  ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés » et  en lamitié de quoi je parle » Il oppose ainsi lidée commune marquée par lemploi du  nous » et ladverbe  ordinairement » à lemploi du  je » qui accentue la singularité mais aussi introduit lidée dune expérience intime et unique. Cet effet est renforcé par lemploi du déterminant article défini : lamitié » et lemploi de la proposition subordonnée relative qui a une valeur déterminative : elle distingue cette amitié de toutes les autres.
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 -Montaignene blâme pas lamitié commune mais il la minimise :  -àtravers lemploi de la tournure restrictive :  cenesont quaccointances et familiarités »  -à travers le lexique : accointances » et  familiarités » ne renvoient pas véritablement à des sentiments  -àtravers lemploi des déterminants indéfinis : quelqueoccasion » occasion = moment favorable, circonstance qui vient à propos ou commodité = convenance, agrément. Le terme  occasion » écarte donc lidée dune fatalité ( qui sera évoquée pour sa rencontre avec La Boetie) et suggère quil peut y avoir recherche dune commodité – ce qui rejoint certains réflexions du début de lessai  -Montaigneprolonge le jeu doppositions qui permet daccentuer le contraste entre les deux types damitié :  -nos âmes sentretiennent » VS  elles se m^lent et se confondent dun mélange si universel ». Les deux verbes permettent de distinguer une simple coexistence (cf tenir) et se mêler ( qui est repris par le nom mélange) ; tandis que  se confondent » renvoient à la confusion totale de deux éléments  -nouées par quelque occasion » qui annonce la métaphore suivante VS  elles effacent et ne retrouvent plus la couture qui les a jointes »  -Montaignereprendra cette même idée plus loindans le texte en jouant sur un même système dopposition binaire :  vos amitiés molles et régulières » VS  celle-ci na points dautre idée que delle-même et ne se peut rapporter quà soi » qui ajoute lidée du miroir  2-Montaigne place en outre cette amitié sous le signe dune certaine fatalité -Ainsi on la vu les amitiés ordinaires semblent dépendre dun hasard loccasion ou dune logique  commodité » qui sous-entend des intérêts et donc une rationalité qui na rien à voir avec la force brute du sentiment. Plusieurs éléments vont placer cette amitié sous le signe de linexplicable et au-delà du destin :  -lelexique met en relief ce caractère inexplicable :  cela ne se peut exprimer »  ce que jen puis dire »  ne sais quelle ». Les modalisations répétées renvoient à lindicible, limpossibilité délucider ce qui résonne comme un véritable mystère. Ce qui explique pourquoi Montaigne la définit dabord par opposition à lamitié commune : on peut dire ce quelle nest pas à défaut de parvenir véritablement à dire ce quelle est
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 -lesmodifications au fil des éditions sont également significatives de cette difficulté :  si lon me presse. » La réponse dont on sait quelle a fait lobjet dune rédaction progressive : dabord rien puis  parce que cétait lui » et dans une édition suivante  parce que cétait moi » La double proposition de cause permet dinsister sur la singularité dune amitié qui met en scène deux individus particuliers : elle accentue donc le caractère unique de cette amitié. Parce quelle fonctionne sur un parallélisme de construction , elle introduit aussi lidée du miroir entre les deux amis. Toutefois ces deux propositions constituent une sorte de tautologie : elle nexplique rien véritablement ; réaffirme limpossibilité dune explication généralisante pour conclure a seul mystère de la rencontre de deux individus.  -voirégalement  je ne sais quelle quintessence de ce mélange » : le terme dalchimie montre la profondeur et le mystère mais la négation et la modalisation continue de montrer que toute explication est vaine  -Ce nest pas une spéciale considération..ni trois, ni quatre, ni mille » Laccumulation , la négation répétée avec la gradation qui sachève sur lhyperbole pointe limpossibilité de trouver une raison objective, une explication rationnelle à une telle relation.  -Enfinon voit surgir à deux reprises au moins lidée dune marque du destin :  force inexplicable et fatale » et  je crois, par quelque ordonnance du Ciel » : image dun destin ( dans lequel on peut voir une résurgence néo platonicienne on y reviendra) Fatalité au sens double du terme puisque cette amitié –et on y reviendra- est placée sous le signe de léphémère et de la prompte disparition. Montaigne sessaie donc ici à son étude de lhomme en tentant de cerner la nature de lHomme. Il a de prestigieux prédécesseurs voir CicéronDe amicitiaextrait sur http://www.site-magister.fr/prepas/page7d.htmvoir Aristote, Sénèque ; lamitié est un des thème récurrent chez les Anciens et des exemples damitié illustres : Achille et Patrocle On voit ici toutefois que les ajouts de Montaigne concernent le récit de la rencontre quil développe au fil des éditions : la réflexion saccompagne alors dun récit à la fois anecdotique et individuel. II-Le récit dune rencontre 1-Le récit dune expérience fulguranteer -aux généralités du 1§ exprimées au présent de généralité succède le système des temps du récit au ps : PS/impft.Le récit de lexpérience est ensuite ponctué de réflexion de lauteur
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-les ajouts sont organisés en plusieurs temps :  -cequi a précédé la rencontre  avant que de nous être vus » lignes 16 à 21 ère  -puis à notre 1rencontre »  -etenfin à partir de la ligne 29 les suites de cette rencontre et les considérations sur cette amitié Il y a donc un agencement qui suit la chronologie. -La rapidité de cette relation est mise en valeur par les indicateurs chronologiques et tous les connecteurs chronologiques qui articulent le récit :  -emploidu  et »  -rien dès lors » l23  -sipromptement 29  -si peu à durer »  si tard commencer »  Ily a à la fois la naissance rapide de cette relation et limpression dune relation-comète ère -Elles est également sensible à travers leffet de sommaire du récit de la 1 rencontre : ère  -à notre 1rencontrenos nous trouvâmes si » ; lemploi du PS, laccumulation et lusage de lintensif  si .. » précipitent le temps -Mais cette fulgurance semble également nécessitée par le temps et la mort prochaine  ayant si peu à durer » proposition de cause qui justifie lidée dune amitié orientée très rapidement vers lessentiel  deux hommes faits, et lui de quelques années » -Et lon voit au contraire comment lessai et le récit sont une volonté de figer le temps : ainsi le récit que fait Montaigne est une réponse à  une satire latine »  il explique et excuse la précipitation de notre intelligence » : jeu de miroir entre les deux auteurs qui auront ainsi tous deux immortalisé la rencontre Tous ces éléments sont présents dans le romanlorsquil sagit de montrer la relationamoureuse.. 2-Une relation placée sous le signe dun néo-platonisme revisité voir synthèse sur les influences platoniciennes à la Renaissance -Il sagit en particulier quil sagit moins dune rencontre que de re-trouvailles  --nous nous cherchions avant que de nous être vus » : si Montaigne fournit ensuite une explication rationnelle, la construction de la phrase fait incontestablement songer aux propos dubanquet -effort de rationalisation de Montaigne, mais cela ne parvient pas à épuiser le mystère de la rencontre :  par des rapports que nous oyons lun lautre » : cela explique lestime qui peut naître à travers des paroles et des discours tenues lun
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sur lautre (Nemours et Mm de Chartres dansLa Princesse ont entendu maintes fois parler lun de lautre ce qui peut expliquer en partie le coup de foudre mais pas slt) La PSR au contraire nie cette rationalité pour renvoyer encore une fois à linexplicable  qui faisaient en notre affection plus deffort que ne porte la raison des rapports » La comparaison implique quelque chose qui va au-delà de la Raison. Le terme affectio est aussi significatif sans doute AFFECTER vient du latin chercher à atteindre 1)désirer rechercher sens fréquent au ème ème 17 2-toucher12 impliquela disposition dune âme venant dune influence reçue. Affecter implique donc le désir, la recherche déjà exprimées dans  nous nous cherchions »  -laconnivence de la rencontre exprimées par laccumulation  si pris, si connus, si obligés » avec un effet de rythme croissant induit également lidée dune reconnaissance  -si.profondément..perfection » implique un achèvement souligné par les deux adverbes et le terme  perfection » lui-même Ce néo platonisme ressort également dans le  fondu » de ces deux êtres qui se mêlent jusquà ne plus semble-t-il former quun seul être. 3-Une amitié exceptionnelle : ravissement  aliénation ou plénitude dun retour à soi. -lestermes qui servent à exprimer cette amitié sont marqués par lintensité :  je laimais »  cette union »  notre affection »  si pris, si connus, si obligés »  nous nous embrassions par nos noms » : image hyperbolique qui insiste sur la proximité des âmes dans la distance mais le terme embrasser renvoie à une proximité physique  -Montaignesemble peindre un ravissement qui le saisit :  -lecadre de la fête dans laquelle a lieu la rencontre sestompe  grande fête et compagnie de ville » ne servent que de toile de fond et suggère une compagnie qui semble ensuite sévaporer  -lelexique convoque cette idée de façon explicite :  quelle quintessence de ce mélange ayant saisi ma volonté » : image du rapt, de lenivrement.Montaigne est en position dobjet(voir aussi  lamena » et la quintessence ( = en alchimie , le plus subtil extrait dun corps) montre bien quil sagit dun ravissement profond qui implique lâme  -Montaignenos conduit de lidée dune parfaite réciprocité ( avec effet de miroir) àcelle dune sorte de fusion des deux êtres  -réciprocitéet miroir suggérés par les parallélismes de construction  parce queparce que »
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mais aussi par loscillation entre lemploi des pluriels  nous » et le singulier  lun , lautre » : on les voit donc tour à tour unis et séparés dans une sorte dévidente réciprocité  -onnotera également lemploi de verbes pronominaux de sens réciproque :  nous nous cherchions »  nous être vus »  nous nous embrassions »  mais aussi  nous nous trouvâmes » qui cumule les sens réfléchi et réciproque.  -laréciprocité est également présente par le jeu des indéfinie :  nous oyons lun de lautre » qui implique la réciprocité, tout comme  ne nous fut si proche de lun à lautre » Mais dans la dernière phrase il semble que la réciprocité franchisse un cap et devienne une sorte de fusion ou de confusion :  -lejeu est cette fois établi sur les possessif : ma volonté/se perdre dans la sienne+ ayant saisi toute sa volonté lamena à se plonger dans la mienne avec un jeu de chiasme sur les possessif : ma-sienne/sa-mienne la répétition, le parallélisme , le chiasme pousse le miroir jusquau bout Mais en même temps on pourrait avoir le sentiment dune aliénation paradoxale , dans laquelle se perdre  cest mieux se retrouver en lautre.  -lanégation nie lindividu  -perdresuggère sinon laliénation du moins la dissolution de soi  -nousfût propre, ni qui fût sien, ou mien : négation dont certaines ne sont pas exprimées n, ce qui accompagne la totale confusion  -perdreet plonger suggèrent un mouvement dans lequel lindividu soublie Montaigne évoque ici une expérience individuelle et singulière de lamitié et cest peut-être ce qui touche encore aujourdhui le lecteur bien plus quun discours sur lamitié. Il évoque le mystère dune relation unique dont Montaigne dit dans cet essai quil a gardé le souvenir vivant et ému pendant longtemps Dans lessai suivent des exemples empruntés à lhistoire antique pis retour à lhommage et à lexpression de soi : Montaigne exprime sa pleine connaissance de lautre et sa confiance absolue : je me fusse certainement plus volontiers fié à lui de moi quà moi » Il rappelle en outre la plénitude de cette amitié :  il ne lui reste plus à départir ailleurs » et enfinmême les discours antiques lui semblent  lasches au prix du sentiment que jen ay » Montaigne dit être entré après l mort de LB dans  une nuit obscure et ennuyeuse »
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