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Niveau: Supérieur, Master

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MASTER 2 PRO ETHIRES ETHIQUE APPLIQUEE, RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE ET SOCIALE JTS « Une entreprise commerciale à vocation humanitaire ? » Marion GENAIVRE Audrey PICARD Clément RAVON

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  • avenir de l'alimentation

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  • mission aux côtés de l'entreprise


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Langue Français

Extrait

 
MASTER 2 PRO ETHIRES ETHIQUE APPLIQUEE, RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE ET SOCIALE 
 
 
JTS
 
« Une entreprise commerciale à vocation humanitaire ? »
 
 
 
 
 
 
 Marion GENAIVRE Audrey PICARD Clément RAVON
  
 
 
 
 
 
Remerciements  
  A l’occasion de cette seconde mission effectuée dans le cadre du Master 2 Professionnel ETHIRES, nous tenons à remercier chaleureusement Xavier Guchet et Sébastien Descours pour leur soutien renouvelé. Nous gardons une pensée particulière pour Xavier Guchet qui nous a plus particulier guidé tout au long de notre mission aux côtésde l’entreprise JTSsemences. Ici nous voudrions signifier notre gratitude à Laurent Colas, Directeur général de JTSsemences, et Jean-Marie Cordier, fondateur, pour s’être prêtés à cette rencontre autour de l’éthique. Nous gardons une pensée pour les autres membres de l’entreprise qui ont accepté de nous recevoir dont Edouard Libeau. Nous tenons à exprimer notre profonde reconnaissance à Raphaël Larrère et Malik Bozzo-Rey, dont les propos ont été essentiels à la rédaction de ce rapport. Enfin nous sommes redevables à tous nos professeurs, dont la réflexion a d’une façon ou d’une autre nourri la nôtre,et nous adressons une pensée particulière à Sylvie Craipeau.  
 
 
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Sommaire INTRODUCTION ................................................................................................................................................4I.JTS ET LE JTADES SEMENCES, UN JARDIN ............................................................................... 10A.ÀLORIGINE DEJTSSEMENCES ET ENJEUX.......................................................................... 101.ETAT DE LARTRETOUR SUR LE PROCESSUS DE MARCHANDISATION DES SEMENCES................ 102.AUTARCIE OU AUTONOMIE?............................................................................................................... 143.L’INNOVATION PROPOSEE PARJTSET SES CONSEQUENCES ECONOMIQUES.................................. 21B.LE SENS DETRE DUJARNDITCILARPOAILROEME...................32..............................................1.AU CŒUR DU TISSU SOCIAL:UNE AGRICULTURE NON MECANISEE................................................. 242.LA MULTIFONCTIONNALITE DUJTA .................................................................................................. 303.« FMEUBLER MA TETE SELON MON PROPRE GOUTAITES QUE JE PUISSE »..................................... 32LE TRANSFERT TECHNOLOGIQUE ET LA QUESTION DES SAVOIR-FAIRE TRADITIONNELS.............. 32II.VERS UNE CHARTE ETHIQUE DES ACTIONNAIRES................................................................... 40A.JTSET SES COLLABORATEURS. ............................................................................................... 411.LE TEMPS OUVERT DE LA COOPERATION ET LE TEMPS FERME DE LASSISTANCE CONTRACTUELLE:DEUX TYPES DE SOCIALITES................................................................................................................. 422.L LE CHOIX DE SES CLIENTS ETOBJECTIF DE DEVELOPPEMENT DEJTS......................................... 44B.LA CHARTE ETHIQUE:SENS ET FONCTION............................................................................4..51.DDIREEC,CEST CHOISIR...................................................................................................................... 452.THEORIE DES PARTIES PRENANTES ET THEORIE DE LA VALEUR POUR LES ACTIONNAIRES. ......... 473.L’ONNAACTIIRE,LENTREPRISE ET LE PROJET DE SOCIETE.............................................................. 51CONCLUSION ................................................................................................................................................... 53BIBLIOGRAPHIE............................................................................................................................................. 55    
 
 
  
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INTRODUCTION   
 cœur même des problèmes vitaux du XXIème siècle. Il faut bienL’agriculture est au reconnaître, pourtant, qu’elle constitue un véritable impenséde la philosophie contemporaine, même, et surtout, en éthique environnementale. Or il nous semble qu’elle constitue l’un des faits anthropologiques fondamentaux de l’humanité, au moins parce que la survie de l’homme s’y trouve engagée, et en est même devenue tributaire. Ce faisant elle est également constitutive de son être-au-monde, l’activité d’un enracinement qui se redouble, celui des plantes et celui de l’homme qui sème en terre. Car l’homme qui cultive, lui aussi, prend racines ; ce qui ne sera pas ade culture, pris non plus ennodin pour l’autre acception du terme son sens agraire mais en son sens anthropologique.
Avant même d’appréhender l’agriculture en termes praxéologiques, c’est-à-dire à partir des différentes actions qu’elle requiert, un détou :r anthropologique est donc nécessaire l’agriculture est une manière d’habiter l’espace. En modifiant le visage du monde qui entoure le semeur, elle crée pour lui de nouveaux repères et de nouveaux agencements. Elle est sans doute également la première forme de projet qu’ait eu l’homme- planter quoi, où et comment. Projet au sens de l’«à venir » dont a pu parler Pierre Bourdieu, horizon concret du présent dans les économies traditionnelles1.
Autrement dit, l’agriculture influence aussi la structure de la conscience temporelle de l’homme. Comme projet, elle est ce par quoi l’homme envisage de faire quelque chose à même le sol du monde, et aussi ce par quoi l’homme dévisage ce monde. Empruntons la formule à André Leroi-Gourhan et rappelons que l'agriculture a été une manière de « domestiquer » l'espace et le temps. Elle reste, à ce titre, l'un des fondements des civilisations. Les formes contemporaines de l'agriculture dans les pays dits développésultra-mécanisée, soutenue par le génie génétique etc. - transforment en profondeur cette domestication, qui a été initiée il y a quelques 10 000 ans avec la régression de la main dans le travail de la terre. Aujourd’hui le végétal se trouve réduit à des «briques » élémentaires combinables à volonté dans les laboratoires. Ces transformations, il est vrai, ne concernent pas toute l'agriculture dans le monde. Au contraire, l'essentiel des travaux agricoles se fait encore de manière pour ainsi dire artisanale : petites exploitations familiales, faible                                                  1Pierrre Bourdieu, «La société traditionnelle -Attitude  l’gard du temps et conduite conomique», Sociologie du Travail, n°1, 1963.
 
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mécanisation. Toutefois cet artisanat se ressent des pressions du marché agricole mondial, et cela justifie de replacer le Jardin Tropical Amélioré proposé par JTSsemences dans une réflexion de longue portée anthropologique. Il ne s’agit donc pas de se demander si l’agriculture est une extension du territoire domiciliaire, mais de l’appréhender comme un fait social total, comme cette polarisation du monde surchargée de valeurs que la science agronomique à elle seule ne résume pas.
 L’avenir de l’alimentation ressort à cette question de mise à l’épreuve de l’habitabilité du monde naturel, aussi bien en termes de volumes disponibles à l’échelle de la planète que de qualité de ce que l’homme mange. Une chose est sûre cependant, la répartition planétaire des hommes et des sols cultivables étant inégale, et les habitudes de consommation variant d’une société à l’autre, on a désormais conscience qu’il faut révolutionner les pratiques agricoles sur les plans technique, économique et politique.
 Actuellement la planète compte près de 7milliards d’habitants, dont 1,1 milliards de très pauvres, qui vivent avec moins de 1$ par jour. Malgré tous les progrès technologiques ainsi que l’élargissement des échanges, l’humanité ne parvient pas à diminuer collectivement et de façon significative le nombre de personnes sous-alimentées, et de grandes disparités perdurent entre les pays. Dans ce contexte de crise alimentaire mondiale la recherche de solutions a été mise au premier plan des débats. C’est parmi les solutions technologiques pour « produire mieux à partir de moins » que nous rencontrons le jardin tropical amélioré de JTS.
 Jean-Marie Cordier, ingénieur horticole de formation, chercheur à l’Institut National de la Recherche Agronomique (Inra) et spécialiste des pays intertropicaux, a pu faire ce constat sur le terrain africain (au Congo, ex-Zaïre, et en Tunisie) lors de ses missions pour la FAO21987 et 1991. Les besoins en semences sont considérables, les moyens financiers,entre et souvent également la volonté politique, sont insuffisants, la communication entre les différents opérateurs se fait mal, de sorte qu’aucune organisation efficace de l’industrie semencière ne parvient à se mettre en place. Au fil de son expérience, Jean-Marie Cordier en vient à conclure que cet échec s’expldu système de production et deique par la nature distribution des semences ; un système essentiellement administratif qui maîtrise mal, pour ne pas dire pas du tout, le dégroupage des tâches. Un système industriel et commercial apparaît donc au chercheur bien plus approprié.
                                                 2Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture »Food and Agriculture Organization, «
 
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 C’est dans cet esprit qu’il crée JTS en 1994, aux côtés de Gabriel Mergui, diplômé d’HEC ayant lui-même commencé sa carrière au laboratoire de recherches économiques sur les Industries Agroalimentaires de l’Inra, et actuel directeurde Genopole® International. La triple revendication de l’entreprise, inscrite au frontispice de son site, est de s’offrir comme «une voie pour la lutte contre la malnutrition, la faim et le chômage». La première raison d’être de JTS est donc de combler les lacunes de l’approvisionnement semencier des pays tropicaux, et la première étape consiste toujours à modéliser les besoins des agriculteurs. Mais cette approche s’est enrichie de la conscience que l’agriculture est« un pivot fondamental au sein du triangle climat/alimentation/pauvreté»3, ainsi que le formulent Thierry Doré et Olivier Réchauchère. S’ensuit le concept de Jardin Tropical Amélioré, diversifiant la fonction de fournisseur semencier de JTS.
En tant qu’il est une méthode culturale à part entière, le JTA dessine une forme d’exploitation agricole en conséquence. A la suite de Thierry Doré, nous pouvons rappeler que l’exploitation agricole est d’abord une unité de production agricole, qui s’avère être également souvent une unité sociale réunissant les membres d’un groupe de dimension variable4. Il est à noter que, probablement contre la croyance commune dans les pays du Nord, l’exploitation familiale reste la forme la plus fréquente à l’échelle mondiale. C’est de cette forme que le jardin tropicale promeut, en effet, sous l’appellation «l amélioré relève. JTS  jardin familial », défini comme suit : «Tout petit espace (200 à 300 m2) à proximité de l’habitation, très bien entretenu par la famille. Cette parcelle produit tout au long de l’année lesingrédients qui vont complémenter et mettre en valeur la diète habituelle de la famille. L’utilisation régulière de légumes en cuisine est très favorable à la santé. Il faut consommer au moins dix végétaux différents chaque jour. Le jardin familial est le moyen efficace de se les procurer pour ceux qui ne peuvent les acheter.»5 Il s’agira de mettre en évidence quelles valeurs sous-tendent une telle définition.
 JTA est l’entité par laquelle ses «Le  iaicserbéfiné» se trouvent rattachés à un certain système commercial mondial, sortant par là-même de l’isolement où leur pauvreté trouve son compte. C’est du moins l’analyse qui fonde aujourd'hui JTS et le JTA6, de sorte que JTS
                                                 3 Doré et Olivier Réchauchère (dir.), ThierryLa question agricole mondiale, 2010, Paris, La documentation française, p.9. 4Thierry Doré,op. cité, p.23. 5 www.jtssemences.com6 l’ Ukraine, ou pays comme le Brsil, desplus drgul qu’ il n’ y parat,Dans un monde agricole qui ont à la fois accs  la technologie moderne, disposent d’ une main- progressivement, de rseauxd’ uvre peu coteuse et,
 
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s’affirmepubliquement comme«une société anonyme à vocation humanitaire, industrielle et commerciale».
  intellectuel », et ce dans la mesure malaiseCette juxtaposition provoque un certain « deux termes apparemment antinomiques sont associés: l'humanitaire et l'entreprise. C’est pour cette raison que nous avons choisi d’interroger le sens même de cette affirmation. Effectivement, l’activité première de JTS est le commerce des semences potagères destinées au jardin familial. Or, la marchandisation des semences n’est pas un phénomène anodin: les semences relèvent, à l’origine, p duatrimoine commun de l’humanité. Comme l’a souligné Hélène Tordjman7 dans ses travaux, leur commercialisation s’inscrit dans un vaste mouvement d’extension des marchés au domaine du vivant. Cette réification récente de la nature modifie profondément les rapports multiséculaires que l’homme entretenait avec sa nourriture, avec cette « vision ancestrale d’une nature nourricière »8. La semence est devenue un objet de spéculation à part entière. En s’inscrivant dansle secteur controversé de l’agroalimentaire, JTS pourraitfacilement être targué d’opportuniste. En commercialisant une technique agricole reposant, en sus, sur la vente de variétés de semences spécifiques, JTS nadopterait-elle pas, à moindre échelle, la logique d’un Monsanto? La crise alimentaire serait-elle, dans ces circonstances, aubaine pour l’entreprise une?
 s’engouffrer dans ce lieu commun, ne devrionsPlutôt que de -nous pas réfléchir aux finalités même de l’humanitaire et par conséquent, n’aurions-nous pas une idée erronée de ce qu’est l’humanitaire ? 
Comme l’explique Rony Brauman, l’acception commune s’accorde sur l’idée que le geste humanitaire est le fruit d’un « don désintéressé»9 sur le plan pécuniaire. L’échange engagé par une entreprise, en revanche, relève de la transaction commerciale. C’est un acte intéressé financièrement : il s’agit à terme de générer un chiffre d’affaire, du profit. En s’affichant comme « entreprise commerciale à vocation humanitaire », JTS est-elle en train d’ouvrirla
                                                                                                                                                        de routes, de chemins de fer ou de voies navigables, seront bientôt désignés et mis en demeure de « nourrir la planète », au prix du développement de la malnutrition, voire de la famine, là où les paysans ne pourront pas acheter de semences ni vendre leurs récoltes à leur propre population. On ne peut prétendre vouloir ouvrir un pays en voie de développement au marchée mondial en occu ltant tout ce que cela présente de risques et de dommages collatéraux. cf. Parmentier, p.193. 7 Universit de Paris XIII et membre du CEPNHlne Tordjman est Matre de Confrences en conomie  l’ (CNRS). 8 Tordjman « Hélène le cas des semences :La construction d'une marchandise »,Annales. Histoire, Sciences Sociales6/2008 (63e année), p.1341-1368. 9 Rony Brauman,L’Action Humanitaire,2000, Paris, Flammarion « Dominos introduction , ‘
 
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voie à une nouvelle démarche humanitaire où aide au développement et intérêt financier convergeraient ?
 Cette problématique, pour être traitée, doit s’accompagner d’un questionnement sur la relation agriculture–agronomie qui constitue le cœur de métier de JTS.Pour Jean-Marie Cordier, en effet, «l’agriculture n’est ni de la littérature, ni de la politique, mais de la chimie. On ne négocie pas. Il ne suffit pas de vouloir, encore faut-il que ce vœu soit compatible avec les lois de la nature »10. Cette définition qu’il donne de l’activité agricole inscrit son entreprise, Jardin Tropical Semences, dans un paysage qui nousfait saisir d’emblée combien JTS nous situe, en fait, àl’articulation de l’agriculture- ensemble des travaux transformant le milieu naturel -et de l’agronomie, science des problèmes physiques, chimiques et biologiques que posent ces travaux. C’est grâce à cette articulation que nous pouvons également introduire la question de l’humanitaire. Le geste humanitaire, à l’endroit des pays de la zone intertropicale (espace de prédilection pour le JTA), ne peut-il pas aussi se concevoir comme un transfert de techniques et de savoir-faire,ici pensés à partir de l’agronomie européenneau terme d’un échange marchand ? En élargissant ainsi le champs’établissant d’action de l’humanitaire, on ne saurait faire l’économie d’une réflexion sur les valeurs implicites d’un tel modèle (agricole et économique) et de son rapport aux savoir-faire traditionnels. 
 initiale de JTS était de réfléchir à l’élaboration d’une charte éthique desLa demande  actionnaires. Dans cette perspective notre analyse s’est déployée en deux temps. Il s’agissait d’interroger d’abord l’expression même de «société commerciale à vocation humanitaire », témoin de son identité d’entreprise. Ce travail préalable, nous semblait essentiel dans la mesure où il permettait de cerner « la culture de JTS » et constituait un préambule incontournable pour une réflexion sur le sens d’une charte des actionnaires. Cette dernière est d’ailleurs assez peu répandue au sein des entreprises. C’est pour cette raison que nous avons ensuite choisi de lui donner une certaine assise conceptuelle, conditionsine qua none sa à légitimité. Ce retour de fond sur l’importance des valeurs partagées etsur la figure de l’actionnaire constituera une feuille de route pour les membres de JTS. La société sera à même de forger sa propre définition de l’« »actionnaire éthique et de luis soumettre une charte en conséquence.
                                                   10 in opicalAgriculture tropicale, une approche systémique. Le jardin tr amélioré, p.5.(en cours de publication)
 
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I. JTS et le JTADes semences, un jardin
 L’agriculture est née avec la mise en terre de premières semences et de la domestication des animaux par l’homme, lors de la Révolution néolithique, il y a plus de dix mille ans. Depuis les paysans ont instinctivement eu recours à la variabilité génétique naturelle des plantes pour augmenter leur diversité afin de les adapter à la diversité et aux évolutions des territoires, des climats et de leurs besoins. Ils ont ainsi sélectionné, au fil des siècles, une multitude sans cesse renouvelée de populations de plantes diversifiées et variables11. Traditionnellement les graines s’échangeaient de manière informelle, sur le mode du don et du contre/don. Elles ne sont devenues que depuis peu des marchandises, produites en vue de l’échange marchand. En effet, en un peu moins d’un siècle, une transformation s’est opérée mué en bien privé: les semences, au statut de bien environnemental commun ont marchand.
  
A. Àl’origine de JTS –Semences et enjeux.  1. Etat de l’art –Retour sur le processus de marchandisation des semences   
 Dans son article,La construction d’une marchandise. Le cas des semences12, Hélène Tordjman souligne les différents mécanismes (économiques, juridiques et politiques) à l’œuvre dans la construction d’une nouvelle classe de marchandise relevant des domaines de la nature et du vivant. Le cas des semences s’inscrit ainsi en faux contre la théorie économique standard : les marchandises ne préexistent pas au marché mais résultent, au contraire, d’une institutionnalisation complexe. Hélène Tordjman met ainsi en lumière deux processus fondamentaux dans leur constitution en marchandise. Le premier est celui d’une normalisation aboutissant à définir la variété végétale comme un objet technique, aux contours parfaitement définis, permettant la coordination d’un nombrede métiers de plus en plus grand ainsi que la définition d’un système de droits de propriété. L’échange marchand ne peut, en effet, exister sans propriété privée. La privatisation des semences correspond au                                                  11 Semences Paysannes, « RéseauOuvrir le marché aux semences paysannes -Reconnaître la diversité et la variabilité intravariétales des variétés population »,15 avril 2009.12 Hélène Tordjman,Ibid.
 
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deuxième processus à l’œuvre dans leur transformation en marchandise.
  enLa recherche en science agronomique est venue à l’aide des besoins de l’économie participant à la création de variétés toujours plus prometteuses. Traditionnellement, l’agriculteur exerçait une sélection intuitive et empirique fondée sur quatre caractères essentiels: la croissance (taille de l’épi et des grains, vitesse de maturation…), la résistance (à la sécheresse, aux maladies, aux insectes…), l’architecture (hauteur, floraison, ramification, floraison…) et les qualités gustatives et nutritionnelles13. Par ces tris successifs, les agriculteurs sélectionnaient, en réalité, inconsciemment les gènes. Les explications scientifiques ne sont arrivées qu’à partir du XIXèmeet du XXème. Jusqu’au XIXème, la sélection s’effectuait principalement par d’une lignée prometteuse jusqu’à obtenir une lignéeisolement homogène issue du meilleur individu d’une variété. Avec la redécouverte au début du XXème, par Hugo de Vries14des «lois génétiques «» de Mendel, lasupériorité de la variété du sélectionneur»15 s’impose progressivement au champ, corrigeant le «savoir profane» du paysan. Les premiers hybrides de maïs, issus du croisement de deux lignées pures, permettant de meilleurs rendements, sont mis au point aux Etats-Unis. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, la rupture est définitive: la sélection variétale devient l’apanage de spécialistes, un secteur d’activité indépendant et séparé des agriculteurs. Les hybrides de type F1 se répandent16 se diversifient (tournesol, colza, e etspèces potagères…) en dépit des inconvénients. Car,conséquence inhérente à l’hybridation, les graines de deuxième génération -F2 -obtiennent des rendements bien inférieurs de sorte que l’agriculteur est obligé de racheter, chaque année, de nouvelles gr permis, au lendemain de aaines. Certes l’hybridation la Guerre, de nourrir la population, des agriculteurs, accruemais au prix d’une dépendance d’une homogénéisation des semences et au détriment des variétés paysannes. 
 La génétique continue de progreen 1953, la structure de l’ADN est découverte etsser : l’ingénierie génétique apparaît au début des années 1970. En 1983, les premières plantes génétiquement modifiées sont mises au point en laboratoire, faisant ainsi entrer les semences dans «l’ère dela biotechnologie »17. La biologie moléculaire ouvre ainsi de nouvelles perspectives à la sélection variétale dans une vision toujours plus rationnelle. Intérêts
                                                 13 Bruno Parmentier,Nourrir l’humanit, La Découverte, Paris, 2010 14 agronome américain -1935) : Hugo de Vries (1848 15 Réseau Semences Paysannes,«Ouvrir le marché aux semences paysannes-Reconnaître la diversité et la variabilité intravariétales des variétés population »,15 avril 2009.6 1 Repère - 1948 : introduction du premier maïs hybride en France. 17 H. Tordjman,Ibid
 
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