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Th`ese de doctorat en philosophie
pr´esent´ee par
Christophe ECKES
Groupes, invariants et g´eom´etries dans l’œuvre
de Weyl
Une etude des ecrits de Hermann Weyl en mathematiques,
physique mathematique et philosophie, 1910-1931
soutenue publiquement
le 5 decembre 2011 a 14 h 30 a l’Universite Lyon III
Sous la direction de :
M. Daniel Parrochia Professeur `a l’Universit´e Lyon III
M. Bertrand Remy `a l’Universit´e Lyon I
JURY :
M. Daniel Parrochia Professeur, Universit´e Lyon III, co-directeur
M. Bertrand Remy Universit´e Lyon I,
M. Jim Ritter Maˆıtre de Conf´erences, Universit´e Paris VIII
M. Erhard Scholz Professeur, Universit´e de Wuppertal, rapporteur
Mme Hourya Sinaceur Directrice de Recherche, IHPST, rapporteur
M. Jean-Jacques Szczeciniarz Professeur, Universit´e Paris VII
M. Amaury Thuillier Maˆıtre de Conf´erences, Universit´e Lyon I.Remerciements
Je remercie d’abord mes deux directeurs de th`ese, Daniel Parrochia et Bertrand R´emy.
Daniel Parrochia m’a encourag´e d`es le Master II `a orienter mes recherches en histoire et
philosophie des math´ematiques. Il a accept´e de diriger mon travail et il m’a conseill´e tout au
long de mes recherches. Sans son soutien, je n’aurais jamais eu les moyens de me consacrer
pleinement `a la recherche durant mes trois premi`eres ann´ees de th`ese. Bertrand R´emy s’est
int´eress´e tr`es tˆot `a mon projet de th`ese. Je me souviens qu’`a notre premi`ere entrevue, il
m’a´evoqu´e l’œuvre de Weyl et la th´eorie des repr´esentations de groupes. Cet entretien a´et´e
d´eterminant dans le choix de mon sujet de th`ese. Son point de vue de math´ematicien a ´et´e
essentiel pour comprendre les aspects les plus techniques du corpus que j’ai ´etudi´e. Il m’a
en outre permis d’examiner les aspects les plus vari´es de l’œuvre de Weyl. Mais mon travail
n’aurait sans doute pas pu aboutir sans le soutien patient et attentif d’Amaury Thuillier
qui a relu et corrig´e avec attention la traduction de l’article de Weyl sur les groupes de
Lie. De plus il a su m’apporter certains´el´ements de connaissance d´ecisifs en math´ematiques.
Par ses remarques et ses objections, il m’a ´egalement permis d’approfondir mes hypoth`eses
historiques et ´epist´emologiques.
Je suis honor´e qu’Hourya B´enis Sinaceur et Erhard Scholz aient accept´e d’ˆetre mes
rapporteurs. Je remercie vivement Jean-Jacques Szczeciniarz et Jim Ritter d’avoir bien voulu
faire partie de mon jury de th`ese.
L’´equipe d’histoire des math´ematiques de l’Institut Camille Jordan m’a accueilli avec
enthousiasme d`es le d´ebut de ma th`ese. Pierre Cr´epel a mis en valeur mon travail de recherche
dans le cadre du s´eminaire d’histoire et de philosophie des math´ematiques et son aide a ´et´e
extrˆemement pr´ecieuse pour me confronter `a des historiens des math´ematiques. Je
remercie ´egalement Alexandre Guilbaud, Guillaume Jouve et Fabrice Ferlin auxquels je dois de
pr´ecieux conseils. Je tiens ´egalement `a exprimer ma reconnaissance `a l’´egard de S´ebastien
Gauthier, qui a int´egr´e l’´equipe d’histoire des math´ematiques de Lyon 1 au cours de mon
doctorat. Nos discussions sur des points de m´ethode en histoire des math´ematiques ont ´et´e
tr`es utiles.
Je remercie ´egalement certains membres de l’universit´e Paris 7 et de l’´equipe rehseis
du laboratoire Sph`ere. En effet, j’ai ´et´e accueilli en leur sein en tant qu’ATER `a partir de
septembre 2010. Je souhaite tout d’abord exprimer ma gratitude `a Karine Chemla. Elle s’est
int´eress´ee `a mes recherches d`es 2008. Ses suggestions ont ´et´e d´ecisives pour commenter `a
nouveaux frais l’article de Weyl sur les groupes de Lie. Je remercie ´egalement Jean-Jacques
2Szczeciniarz, Ivahn Smadja, David Rabouin et Alexandre Afriat qui m’ont sollicit´e pour
pr´esenter `a l’oral des chapitres de ma th`ese. Cela a ´et´e fructueux pour corriger certaines
surinterpr´etations et pour approfondir mes recherches. J’ai ´egalement ´et´e tr`es heureux de
pouvoir discuter avec Renaud Chorlay, mais aussi avec certains doctorants de l’universit´e
Paris 7 : Davide Crippa, Sylvain Cabanacq et Emmylou Haffner.
Au cours de mon doctorat, j’ai pu ´evoquer mon projet de th`ese aupr`es de philosophes,
d’historiensdesmath´ematiquesetdemath´ematiciensquim’ontconseill´eouindiqu´ecertaines
sources n´ecessaires pour approfondir ma r´eflexion. Je remercie tout particuli`erement
Catherine Goldstein, Norbert Schappacher, Jim Ritter, Fr´ed´eric Brechenmacher, Rossana Tazzioli,
Erhard Scholz, Martina Schneider et Yvette Kosmann-Schwarzbach. Je suis particuli`erement
heureux que Marcus Willaschek ait accept´e de m’accueillir dans le d´epartement de
philosophie de la Goethe-Universit¨at `a Francfort durant six mois. Grˆace `a lui, j’ai pu pr´eciser mes
connaissances sur le criticisme kantien. Il m’a sollicit´e pour´etudier la r´eception de la th´eorie
kantienne de l’espace par certains math´ematiciens, dont Weyl.
Enfin, j’adresse toute ma reconnaissance `a ma famille, en particulier mes parents et ma
sœur. Je remercie ´egalement mes amis : Alexandre, Marine, Ir`ene, Laurence et Anne. Un
grand merci `a Olivier et `a sa famille pour leur soutien.
34Introduction g´en´erale
≪ ≫0.1 Une œuvre h´et´erog`ene
L’œuvre de Hermann Weyl (1885-1955) frappe d’abord par son h´et´erog´en´eit´e et sa
diversit´e`atous´egards:domainesdesmath´ematiquesinvestis,m´ethodesutilis´eespourr´esoudredes
probl`emes ou d´emontrer des th´eor`emes, prises de position contrast´ees sur les fondements des
math´ematiques, sources philosophiques tr`es diff´erentes convoqu´ees `a l’appui de ses r´eflexions
— en particulier Husserl et Fichte.
Proposons une courte mise en perspective pour confirmer ce point.
´Etudiant puis Privatdozent `a l’universit´e de G¨ottingen jusqu’en 1913, Weyl s’int´eresse
d’abord aux ´equations int´egrales qui constituent alors l’objet central des investigations de
Hilbert,sondirecteurdeth`ese.Entre1910et1912,Weyldispense´egalementdescourssurles
fonctions d’une variable complexe et sur les surfaces de Riemann qui donneront lieu `a l’un de
ses premiers ouvrages fondamentaux : Die Idee der Riemannschen Fl¨ache (1913). Dans
cet
ouvrage,nonseulementWeyld´efinitrigoureusementunesurfacetopologiqueetunesurfacede
Riemann,maisdeplusild´emontre`anouveauxfraisleth´eor`emed’uniformisationdePoincar´eKoebe (1907). Il adh`ere alors pleinement `a la m´ethode des d´efinitions implicites ou par
axiomes de Hilbert pour construire des concepts math´ematiques et il consid`ere l’axiomatique
de Zermelo comme un aboutissement pour fonder les math´ematiques sur des bases solides.
Mais, dans le mˆeme temps, il reconnaˆıt sa dette envers Klein et il admet avec ce dernier
l’importance des repr´esentations g´eom´etriques `a des fins p´edagogiques et heuristiques en
math´ematiques.
Recrut´e `a l’ETH de Zuric¨ h en 1913, traumatis´e par sa participation `a la premi`ere guerre
mondiale entre le printemps 1915 et le printemps 1916, il oriente brutalement ses recherches
en direction de la math´ematisation de la relativit´e g´en´erale durant l’´et´e 1916. Son coll`egue
Grossmann `a l’ETH de Zuric¨ h qui, d`es 1912-1913, indique `a Einstein l’importance des id´ees
g´eom´etriques de Riemann et du calcul tensoriel pour formaliser la relativit´e g´en´erale, a sans
5doute une incidence non n´egligeable sur ce choix. D`es 1917, Weyl propose un cours sur la
relativit´e g´en´erale `a l’ETH de Zuric¨ h dans lequel il int`egre les derni`eres innovations que
Levi-Civita vient de publier en g´eom´etrie riemannienne avec l’introduction de la notion de
ntransport parall`ele dans le cas des sous-vari´et´es de R . En 1918 paraˆıt la grande
monographie de Weyl sur la relativit´e g´en´erale, `a savoir Raum, Zeit, Materie. Entre 1918 et 1923,
pas moins de cinq ´editions de cette œuvre majeure sont publi´ees avec des modifications
substantielles en fonction des deux grands projets de recherche men´es alors par Weyl : (a)
une g´en´eralisation de la g´eom´etrie riemannienne qui sert apr`es coup de cadre `a une th´eorie
unifi´eedeschampsgravitationnelet´electromagn´etique;(b)laformulationetlar´esolutiondu
probl`emedel’espacequiconsiste`acaract´eriserlanature delam´etriquedel’universphysique.
Parall`element, `a partir de 1917-1918, il adopte des proc´edures constructives pour engendrer
le continu math´ematique dans son ouvrage Das Kontinuum et, l’ann´ee suivante, il adh`ere
plus radicalement au programme intuitionniste de Brouwer. Il en r´esultera en 1921 un article
tr`es pol´emique de Weyl contre