UNIVERSITE DE CAEN / BASSE-NORMANDIE
U.F.R. : Institut de Biologie Fondamentale et Appliquée
Ecole Doctorale Normande de chimie-biologie
THESE
présentée par
Isabelle TRAVERS
et soutenue
le 30 juin 2004
en vue le l’obtention du
DOCTORAT de l’UNIVERSITE de CAEN
Spécialité : Sciences agronomiques, biotechnologie agro-alimentaire
(Arrêté du 25 avril 2002)
Influence des conditions pédoclimatiques du terroir sur le comportement
du pommier et la composition des pommes à cidre dans le Pays d’Auge
Membres du jury
Monsieur Jean-François DRILLEAU, Directeur de recherche, INRA de Rennes Rapporteur
Monsieur Alain JACQUET, Ingénieur, INAO de Caen Examinateur
Monsieur Frédérik LE DILY, Professeur, Université de Caen Directeur de thèse
Monsieur René MORLAT, Directeur de recherche, INRA d’Angers Rapporteur
Monsieur Alain OURRY, Professeur, Université de Caen Examinateur
Monsieur Jean-LucVERIN, Directeur du Laboratoire Départemental Franck Duncombe Examinateur
1Remerciements
Je tiens à remercier tout d’abord M. Jean Boucaud et M. Alain Ourry, directeurs successifs de
l’UMR INRA UCBN 950 de Physiologie et Biochimie végétales devenue Ecophysiologie Végétale et
Agronomie, nutrition N, C, S ; le premier pour m’avoir accueillie à l’occasion de mon stage de
DEA puis en tant que chargée d’étude sur les terroirs cidricoles et le second pour avoir accepté
que le travail engagé soit poursuivi et fasse l’objet d’une thèse.
Je remercie M. Frédérik Le Dily d’avoir accepté d’en être le directeur, pour ses conseils lors de
la rédaction de ce document et ses relectures attentives.
Je suis très reconnaissante à Messieurs Jean-François Drilleau et René Morlat de s’être
intéressés à ce travail et d’avoir accepté d’en être les rapporteurs. Je remercie également Monsieur
Drilleau pour nous avoir permis d’acquérir la technique de dosage des polyphénols. J’en profite
pour remercier les membres de la Station de Recherches Cidricoles de l’INRA de Rennes et tout
particulièrement Sylvain Guyot et Nathalie Marnet pour l’accueil qu’ils nous ont réservé. Je
remercie également Monsieur Morlat pour ses conseils et déplacements jusque dans les vergers du
Pays d’Auge.
Je tiens à exprimer ma gratitude à Monsieur Alain Jacquet pour son encadrement attentif, son
enthousiasme et ses compétences en matière de terroir, sa capacité à développer les collaborations,
pour m’avoir fait découvrir le travail de terrain qu’il fasse beau ou qu’il vente et pleuve et enfin
pour avoir porté ce projet avec opiniâtreté, jusqu’à son départ pour l’INAO. Je te remercie pour
ces années où nous avons travaillé ensemble et pour tout ce que j’ai appris à tes côtés.
Ce travail a bénéficié de nombreuses collaborations ; celle avec le Laboratoire Départemental
Franck Duncombe a été particulièrement active et fructueuse. Je remercie vivement Monsieur
Vérin, son directeur, pour cette collaboration et son soutien ayant permis le co-financement de ma
thèse par le Conseil Général du Calvados. Je remercie tout particulièrement Valérie Bouchart et
Patrick Legendre pour les kilos de pommes récoltés, échantillonnés, pesés et analysés…et le tout
avec le sourire! Votre contribution a été essentielle. Je n’oublie pas non plus Hélène et Catherine.
Au chapitre des collaborations, je tiens à remercier également le centre INAO de Caen qui nous
a ouvert sa base de données des vergers proposés pour l’identification en AOC, ayant permis la
mise en place du réseau expérimental.
J’adresse aussi tous mes remerciements à Jean-Paul Simon et Jean-Christophe Dechattre de
l’ARAC qui nous ont permis de réaliser des micro-cidrifications. Si elles n’ont pas forcément
donner des résultats à la hauteur de nos espérances, leur réalisation n’en fut pas moins très
instructive.
Enfin, ce travail n’aurait pu se faire sans la collaboration des producteurs qui nous ont ouvert
les portes de leurs vergers, qui ont accepté les contraintes que les expérimentations imposaient et
qui nous ont laissé prélever les fruits nécessaires aux analyses. Un grand merci à tous.
Les récoltes, le traitement des lots, les analyses ou les mesures effectuées dans les vergers ont
fait participer de nombreuses personnes au fil de ces années. En plus de Patrick et Valérie que j’ai
déjà mentionnés, je tiens à adresser mes plus vifs remerciements à Dominique Ballois (dont la
maîtrise de la conduite en terrain difficile et les grandes mains ont été particulièrement utiles lors
des récoltes), Patrick Beauclair, Marie-Paule Henry (aussi efficace pour résoudre les tracasseries
administratives et que pour les passages des échantillons en IRMS), Emmanuel Gautier, Richard,
Véronique Amiard (pour ses compétences Sugar-Pak et surtout sa gentillesse légendaire). Merci
également à Vanessa Boisgonthier, Adélaïde Brisset et Olivier Chauchon qui ont apporté une
grande contribution à l’occasion de leurs stages respectifs.
2Merci à Marie-Laure Decau pour les longues discussions, si enrichissantes pour moi, qui ont le
pouvoir de remettre les pendules à l’heure et les pieds sur terre ainsi que pour ta relecture de ce
document. Merci à Jean-Claude Simon pour ta gentillesse, ton humour (jamais grinçant ou
presque) et pour m’avoir apporté la chaleur (d’un radiateur) et la lumière (d’une fenêtre) en
m’accueillant dans ton bureau lors de ces derniers mois.
Merci à tous ceux qui contribuent à la bonne humeur de ce laboratoire et à tous ceux que j’ai eu
beaucoup de plaisir à côtoyer pendant ces années. Sans être exhaustive, je tiens à citer Marie-
Pascale, Melle Le Saos, Véronique, Marie-Laure, Annette, Estelle, Nicolas, Michèle.
Enfin, à mes parents et à Sylvain pour leur soutien toujours inconditionnel. Je ne crois pas leur
avoir déjà dit à quel point il m’est précieux.
3SOMMAIRE
Liste des abréviations 6
INTRODUCTION GENERALE 7
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE 9
1- Notion de terroir et éléments de son fonctionnement 9
1.1- Définition du terroir 9
1.2- Diverses approches de l’étude des terroirs 10
1.3- Eléments de fonctionnement de la chaîne terroir/vigne/vin 13
2- La pomme : développement et caractéristiques physico-chimiques 15
2.1- Trois stades majeurs de développement 15
2.2- Evolution des caractéristiques physico-chimiques des fruits 18
3- Facteurs de variation de la composition des pommes 26
3.1- Facteurs biologiques 26
3.2- Facteurs environnementaux 29
4- Conclusions et objectifs de recherche 32
MATERIELS ET METHODES 35
1- Situation géographique 35
2- Constitution du réseau de parcelles expérimentales 35
2.1- Choix des facteurs de variation et de leurs modalités 35
2.2- Plans d’expérience 39
2.3- Choix des parcelles 41
3- Sélection des arbres suivis 42
3.1- Mesures du développement végétatif des arbres 42
3.2- Estimation de la charge en fruits des arbres 43
3.3- Productivité des arbres suivis 45
4- Suivis de floraison 47
5- Prélèvements et procédures d’échantillonnage 48
5.1- Prélèvements de sol 48
5.2- Prélèvements de feuilles 48
5.3- Prélèvements des fruits 48
6- Méthodes d’analyses 51
6.1- Caractérisation du milieu physique 51
6.2- Alimentation hydrique et minérale des arbres 53
6.3- Analyses des fruits et des jus 54
7- Traitement des données 60
7.1- Moyennes pondérées 60
7.2- Stades de référence 60
7.3- Analyses statistiques 60
4RESULTATS ET DISCUSSION 61
1- Caractérisation du milieu physique des terroirs étudiés 61
1.1- Topographie 61
1.2- Caractérisation agropédologique 62
1.3- Caractérisation climatique des quatre années étudiées 65
1.4- Discussion - Conclusions 66
2- Paramètres de fonctionnement de l’arbre en fonction du type de sol 68
2.1- Vigueur et développement 68
2.2- Alimentation hydrique 68
2.3- Nutrition minérale 69
2.4- Précocité 70
2.5- Synthèse des relations sol/pommier 72
3- Caractéristiques physico-chimiques des pommes 75
3.1- Cinétiques de maturation des pommes 75
3.2- Influence du terroir et des autres facteurs de variation étudiés sur la composition des
pommes à cidre 83
3.3- Discussion et conclusions 97
CONCLUSION GENERALE 106
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 115
5Liste des abréviations
AOC : Appellation d’origine contrôlée
ARG : altitude relative globale
ARM : altitude relative selon la pente maximale
AS : argile à silex
AV : argile verte
BQ : Bisquet
BR : Binet rouge
BT : basse tige
CEC : capacité d’échange cationique
CLHP : chromatographie liquide haute performance
CTPC : Centre technique des productions cidricoles
DM :début de maturation
DP : degré de polymérisation
DPnérisation moyen des procyanidols
ETP : évapotranspiration potentielle
HT : haute tige
INAO : Institut National des Appellations d’Origine
IP : indice de productivité
LI : limons
M0 : matière organique
MC : maturation complémentaire
MF : matière fraîche
MS : matière sèche
PPO : polyphénoloxydase
RU : réserve utile
SR : stade récolte
UTB : Unité Terroir de Base.
6
INTRODUCTION
ET
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE Introduction générale
INTRODUCTION GENERALE
Les consommateurs exigent de plus en plus des produits alimentaires dont l’origine,
l’originalité, l’authenticité et la traçabilité sont attestées. Les différents «signes de qualité» qui
fixent les conditions de production et une protection commerciale offrent les garanties souhaitées
par la demande sociale et participent significativement au développement agricole durable. Parmi
ceux-ci, l’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) est l’un des plus anciens et des plus prestigieux.
La reconnaissance en AOC d’une production s’accompagne du constat selon lequel, dans une
région donnée, un certain nombre de milieux physiques particuliers mis en valeur par le savoir-faire
d’une collectivité d’hommes (choix des variétés, des pratiques culturales et technologiques) ont
abouti à l’élaboration d’un produit original et typique. Au-delà d’une indication de provenance, la
reconnaissance en AOC implique l’existence d’un lien entre le milieu physique et le produit en
termes de qualité et de typicité. De nombreux travaux ont montré que la réponse de la vigne à
travers le vin était forte et reproductible dans chacun des terroirs élémentaires composant une aire
d’appellation (Seguin, 1970 ; Morlat, 1989 ; Asselin et al., 1992). Des approches similaires ont été
réalisées sur d’autres productions comme les fromages (Coulon et al., 1998 ; Dorioz et al., 2000).
La Normandie concentre 40 à 70% de la production nationale de pommes à cidre et la Basse-
Normandie compte plus de 10 000 producteurs engagés dans la démarche d’appellation d’origine.
Par ailleurs, si la majeure partie de la transformation des pommes revient aux PME et aux
industriels, cette filière a su garder une production fermière importante qui participe
significativement au maintien du tissu rural. La Basse-Normandie compte actuellement six AOC
cidricoles (Calvados, Calvados Pays d’Auge, Calvados Domfrontais, Pommeau de Normandie,
Cidre Pays d’Auge et Poiré Domfront).
La qualité du cidre est reconnue comme étroitement liée aux variétés de pommes utilisées, à
la conduite du verger, à la productivité des arbres ou à la technologie de transformation et aux
souches levuriennes présentes pendant la fermentation. Ces différents aspects de variabilité de la
qualité sont étudiés par différents instituts et centres techniques. Citons, par exemple, la Station de
Recherches Cidricole du centre INRA de Rennes, le CTPC (Centre Technique des Productions
Cidricoles), l’ARAC (Association de Recherche Appliquée à la Transformation Cidricole), le
Laboratoire de Microbiologie de l’Environnement de l’université de Caen ou encore la Station
d’Amélioration des Espèces Fruitières du centre INRA d’Angers. Mais, s’il est empiriquement
admis que les conditions pédoclimatiques qui affectent le verger peuvent modifier la composition
des fruits pour une variété donnée, ce facteur n’était pas étudié jusqu’ici.
7Introduction générale
Les seuls travaux récents connus ont été initiés il y a plus de 15 ans pour la reconnaissance en
AOC des cidres du Pays d’Auge. La délimitation de l’aire géographique de cette appellation a
nécessité d’engager des études visant à améliorer la connaissance du verger (Brault et Felgines,
1987 ; Manteaux, 1991 ; Jacob, 1993 ; Simon, 1995). Si celles-ci ont permis de proposer les
premiers outils de délimitation parcellaire (Brunet et al., 1997), elles ne constituent pas la
démonstration de l’existence d’un lien entre le milieu physique et la composition des pommes
d’une part, et les caractéristiques analytiques et sensorielles des cidres d’autre part. Ces travaux ont
fait suite à une longue période d’abandon des recherches en matière d’écologie cidricole, les
èmedernières relatives à l’influence du pédoclimat sur la qualité des cidres datent du 19 siècle
(Bouteville et Hauchecorne, 1875 ; Truelle, 1890 ; Léon, 1893).
Face à la rareté des travaux récents concernant l’influence du milieu naturel sur la
composition des pommes et des cidres résultants, une démarche scientifique apparaît nécessaire
dans le but d’une part, d’objectiver les critères de délimitation parcellaire afin de les rendre le plus
efficace et le moins contestable possible et d’autre part, de permettre d’adapter le choix des
techniques culturales et de transformations aux conditions offertes par le milieu naturel. Dans ce
contexte, l’objectif de ce travail est d’étudier la relation entre les conditions pédoclimatiques du
terroir et la composition des pommes.
8Etude bibliographique
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
Dans une première partie, l’étude bibliographique fait le point sur les méthodologies
d’études employées dans la caractérisation des terroirs viticoles et sur certains facteurs
identifiés comme prépondérants dans la liaison entre la composante physique du terroir et le
produit. La deuxième partie dresse un bilan des connaissances acquises en termes de
développement de la pomme et d’évolution de ses caractéristiques physico-chimiques. Puis
elle aborde les facteurs biologiques et environnementaux reconnus comme faisant varier ces
caractéristiques.
1- Notion de terroir et éléments de son fonctionnement
1.1- Définition du terroir
La consultation de dictionnaires indique que le terroir désigne, d’une part, une étendue
limitée de terre considérée du point de vue de ses aptitudes agricoles et d’autre part, une
région rurale considérée comme la cause de caractères particuliers à ceux qui y vivent ou qui
en sont originaires. Selon Salette (1996) et Salette et al., (1998), ces deux aspects sont
complémentaires et fournissent deux axes de réflexion. Le premier axe concerne la
connaissance physique du terrain et correspond aux facteurs de situation (sol, topographie,
climat, paysage associé) tandis que le second se rapporte à l’action de l’homme et à sa co-
adaptation avec son environnement en vue de valoriser au maximum les potentialités du
milieu. Au final, ces auteurs définissent le terroir comme «un système d’interactions
complexes entre un ensemble d’actions et de techniques conduites par des hommes, une
production agricole et un milieu physique à valoriser par un produit auquel il confère une
originalité particulière».
Trois grands types de facteurs en interaction interviennent :
- les facteurs liés au milieu naturel (sol, climat, topographie et paysage associé),
- les facteurs biologiques (variété, porte-greffe),
- les facteurs d’intervention ou facteurs humains (pratiques culturales et technologie
appliquée à la transformation de la matière première).
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