Edward Hopper
7 pages
Français

Edward Hopper

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
7 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description


Pour le psy
Qui était vraiment Edward Hopper? Etait-il aussi solitaire et mélancolique que ses héros? Dans Edward Hopper, Entractes, Alain Cueff le qualifie de «dernier puritain», rappelant la profonde empreinte de son éducation protestante qui se «caractérise entre autres par un rapport frontal à la ''dure réalité'' et par une certaine méfiance à l'égard des émotions, de la jouissance esthétique, des images», explique l'historien d'art au Figaro. Bref, Hopper n’était pas un grand rigolo. Modeste, réservé, il partageait sa vie avec sa femme «Jo», peintre elle aussi, entre un atelier au 3 Washington square et sa maison le long de l’océan à Cap Code. Jo sera son unique modèle: elle refusait qu’il en engage d’autres. Le couple avait un chat, à défaut d’enfant… «La toile blanche d’Edward Hopper» vous permettra de faire connaissance avec Jo, qui n’était pas vraiment la joie incarnée… Votre voisin psy devrait hocher la tête d’un air entendu, avant d’enchaîner sur les relations d’Hopper avec
  [Moins]

Informations

Publié par
Nombre de lectures 103
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Edward Hopper , peintre littéraire
Sur les toiles de Edward Hopper, dont le Grand Palais offre pour la première fois une rétrospective en France, partout: des livres. L'incarnation de ses sources d'inspiration et de la transfiguration du réel qu'il prône dans ses oeuvres.
- Edward Hopper, Hotel Room, 1931. Huile sur toile 152,4 x 165,7 cm. Madrid, musée Thyssen-Bornemisza. -
Edward Hopper, avant de véritablement «percer», comme on ne disait sans doute pas à l’époque, a mis un peu de temps. On ne lui en veut pas, chacun va à son rythme. A l’été 1923 (il a alors 41 ans), quand il se rend dans un petit port de Nouvelle-Angleterre nommé Gloucester peindre des aquarelles, il n'a toujours pas acquis son style définitif. Hopper était un peu trop imprégné de tout ce qu’il avait appris de la peinture pendant ses séjours en France, et un peu trop éloigné de ce que l’Amérique attendait alors: un réalisme si vif qu’il avait donné lieu à une école appelée Ashcan –soit celle de la Poubelle– et un «américanisme» avéré.
Mais cet été-là, une transition s’opère. La série d’aquarelles, qui représentent des maisons, va permettre à Hopper d’acquérir la reconnaissance.«On y retrouve soudain tous les traits qu’avait promu l’Ashcan School», explique Didier Ottinger, directeur adjoint du Centre Georges-Pompidou et commissaire de l'exposition du Grand Palais.«Mais surtout, ces aquarelles font écho aux vers du poète américain Walt Whitman, qui prônait un intérêt pour ce que l’Amérique a de plus banal, de plus ordinaire, de plus anodin, de plus insignifiant peut-être.»
Plus que de peintres, Edward Hopper, disciple d’un poète, tire son esthétique de la littérature autant que de la peinture. D'ailleurs, certains titres de toiles s'inspirent de poésie, commeSoir bleu, tiré d'un vers de Rimbaud:
«Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers...»
Surtout, ses personnages lisent:iagteNichftfO,Chair car,Hotel Lobby,Compartment C, Car 293,Second Story Sunlight,Room in New York... Partout l’intimité des mots sous les yeux des hommes et des femmes isolés dans les cadres du peintre.
Room in New York, 1932. Huile sur toile 74,4 x 93 cm. Lincoln, University of Nebraska, Sheldon Memorial Art Gallery
Ces personnages lisent de tout.
DansExcursion into Philosophy, ils lisent de la philosophie. Un homme assis au bord du lit, derrière lui une femme à moitié nue. Un livre ouvert.«La présence d’une femme dénudée incite les exégètes de l’œuvre à imaginer que le livre en question pourrait bien êtreLe Banquet, dans lequel Platon invite ses lecteurs à s’extraire du monde terrestre des plaisirs et des passions pour élever leur esprit jusqu’à la contemplation des idées pures», explique un communiqué de l’exposition.
Le Chemin de fer, un roman d'amour
Hotel Room, 1931. Huile sur toile 152,4 x 165,7 cm. Madrid, musée Thyssen-Bornemisza.
DansHotel Room, la femme assise dans une banale chambre d’hôtel, ses bagages à ses pieds, semble lire une lettre. On sait grâce à des notes laissées par l’épouse d’Hopper qu’elle lit en fait une notice de chemin de fer. C’est drôle, quand on songe que pour ce tableau, Hopper s’est inspiré de laBethsabée de Rembrandt, qu’il est souvent allé voir au Louvre lors de ses séjours à Paris. La Bethsabée de Rembrandt, elle, épouse modèle, lisait la déclaration d’amour d’un homme qui n’était pas son mari –c'était le Roi David, pas mal non plus, mais cela promettait le mari de Bethsabée à une mort certaine.
«C’est bien la démarche de Hopper, de faire choir dans la réalité américaine, tout cet univers de l’olympe, de la grande pensée métaphorique, symbolique, de la culture occidentale, explique Didier Ottinger.On pourrait croire que c’est déprimant de passer d’une lettre du Roi David à l’annuaire des chemins de fer. Mais cet annuaire n’est pas ce qu’il semble être.»
Hopper, qui était un grand lecteur de littérature française, comptait parmi ses livres de chevetÀ La Recherche du temps perdu. DansUn Amour de Swann, (récit de la passion douloureuse de Swann pour Odette), Swann attend Odette et se languit. Il fantasme alors sur l'indicateur de chemin de fer.
«Dès que venait le jour où il était possible qu'elle revînt, il rouvrait l'indicateur, calculait quel train elle avait dû prendre et, si elle s'était attardée, ceux qui lui restaient encore.»
Cet indicateur de chemin de fer est chez Hopper comme chez Proust, selon les mots de Proust,«le plus enivrant des romans d'amour».
La toile la plus célèbre de Hopper –pour avoir été suggérée comme fond d’écran par Apple pendant des années, à l’époque où il n’y avait que trois choix, et pour avoir été détournée et reprised’innombrables fois au cinéma,dans la pop cultureet même dansle dessin de presseNighthawks, est aussi probablement inspirée de la littérature –«la grande littérature», précise Didier Ottinger.
Nighthawks, 1942. Huile sur toile, 84,1 x 152,4 cm. Chicago, The Art Institute of Chicago.
«Hopper a découvert une nouvelle d’Ernest Hemingway dans un magazine en 1927,raconte Didier Ottinger.Il en est tellement enthousiaste que lui, d’habitude si discret, qui ne se manifeste jamais publiquement, écrit au rédacteur en chef du journal pour lui communiquer sa joie de trouver enfin de la grande littérature américaine, débarrassée de tout sentimentalisme sirupeux.»
Cette nouvelle qu’il découvre dans le magazine Scribner's est intituléeLes Tueurs. En ouverture, il y a la description de tueurs qui se rendent dans une petite ville des Etats-Unis, pour assassiner l’un des personnages.
«C’est l’une des sources possibles, mais elle est intéressante car elle montre l’ancrage de Hopper dans la littérature de son temps et sa découverte d’une esthétique qu’il applique à sa propre peinture.»
La littérature déborde des toiles de Hopper de manière figurée, cachée ou métaphorique. «C’était un grand lecteur, et à travers la représentation omniprésente des livres, Hopper fait l’apologie de la vie intérieure dans ses toiles», selon Didier Ottinger.
«Soulever le voile de laideur»
Reparlons de Proust. DansSur la lecture, l'écrivain joignait le peintre et l’écrivain dans leur rôle de passeur à travers leur oeuvre.«Ce qui est le terme de leur sagesse ne nous apparaît que comme le commencement de la nôtre»,écrivait celui qui suscitait l’admiration de Hopper et qui adorait lui-même la peinture.
«Le suprême effort de l’écrivain comme de l’artiste n’aboutit qu’à soulever partiellement le voile de laideur et d’insignifiance qui nous laisse incurieux devant l’univers.»
Puis l’écrivain comme l’artiste nous dit«“Apprends à voir”. Et à ce moment, il disparaît».
Pour Didier Ottinger, cette représentation des livres chez Hopper, est «une sorte de propagande pour la réflexion, l’imagination, la vie intérieure, l’extraction de la réalité au profit de la culture, des idées». Pour sa transfiguration onirique et pour le silence.
Charlotte Pudlowski
• L'exposition Edward Hopper se tientau Grand Palais du 10 octobre au 28 janvier 2013.
AJOUT DE LA REDACTION
http://www.20minutes.fr/article/1019920/tout-savoir-edward-hopper-sans-avoir-vu-expo
C’est l’évènement de la rentrée.Hopper à Paris, pour la première fois. Le commissaire de l’exposition a parcouru les Etats-Unis pendant des mois pour convaincre les conservateurs de se séparer des tableaux du maître, et tout le monde ne va ne parler que de ça. Problème: dans les prochaines semaines, vous n’avez pas quatre heures devant vous (+ quatre autres deTGVpour les non parisiens) pour poireauter sous un parapluie devant leGrand Palais, ni la santé pour étouffer peu à peu, pressé par la foule, devant chaque tableau, jusqu’à finir piétiné devantkwahthgiNs. Mais il va falloir suivre. Petite antisèche pour votre survie en milieu hostile, j’ai nommé les dîners snobs, peuplés de convives dont il vous faudra identifier les penchants pour viser juste.
Pour le biographe
Avant de peindreGasouHotel Roomque vous avez peut-être en poster dans votre chambre, Hopper était illustrateur. Le Hopper que l’on connaît ne le devient qu’à 42 ans. Avant cela, il se forme à la New York School of Illustrating, et pour subvenir à ses besoins, travaille à partir de 1908 à New York comme dessinateur publicitaire puis comme illustrateur. «Hopper le vit très mal. A tort, car son ancrage dans l'illustration sera la clef de son succès»notele commissaire de l’exposition Didier Ottinger. Hopper connaît donc un début de carrière difficile, et n’est reconnu que dans l’entre-deux-guerres, avec sa première exposition personnelle au Whitney Studio Club en 1920.
Pour le patriote
Certes, la France est un pays merveilleux auquel on ne peut rien refuser (croyez-y le temps de séduire votre voisin de table chauvin), mais si la rétrospective a lieu à Paris, ce n’est pas pour rien. Hopper était un grand francophile, qui «récitait du Verlaine dans le texte», dit-on. Entre 1906 et 1910 il fait trois longs séjours à Paris qui l’inspirent beaucoup. Il étudie de près les grands tableaux du Louvre, s’intéresse à la photographie avec Eugène Atget, et produit une trentaine d’œuvres sur Paris. Quelques-unes sont présentes dans l’exposition. Dites donc: «J’ai adoréFrench Six-day rider… Hopper est peut-être le peintre de l’Amérique, mais il nous doit tout». Il sera ravi.
Pour le matheux
Cent. De 1924, date à laquelle ses aquarelles de la Nouvelle-Angleterre lui ouvrent les portes du succès, jusqu’à sa mort en 1967, Hopper n’a réalisé que cent toiles. Soit: rien du tout. A titre de comparaison, à l’extrême opposé sur l’échelle du prolifique, on trouve Picasso: 8.000 œuvres en 80 ans de carrière. Hopper, lui, ne réalisait qu’un à deux tableaux par an, depuis sa maison de Cap Code, semblant insensible à son succès et à l’avancée, qui le fera bientôt passer pour un has-been, de la peinture abstraite, Jackson Pollock en tête.
Pour le poète
Déclamez d’un air inspiré:«Je crois que l'humain m'est étranger. Ce que j'ai vraiment cherché à peindre, c'est la lumière du soleil sur la façade d'une maison». C’est ainsi qu’a décrit un jour Hopper l’essence de son travail. Au fil des ans, les toiles d’Hopper seront de plus en plus épurées, jusqu’aux fameuxSun in an empty roometRooms by the sea(1951) où seule la lumière illumine un décor vide de toute âme humaine.
Pour le cinéphile
L’ami des salles obscures sera ravi d’apprendre qu’House by the railroad, l'un des plus célèbres tableaux de Hopper - celui où surgit d’une lumière jaune la silhouette d’une maison à l’abandon - a inspiré Alfred Hitchcock pourPsychose. Montrez-luices deux photos mises côte-à-côtepour le convaincre.Night Windows(1928) évoque aussi fortementFenêtre sur cour(1954) du même cinéaste. Autre réalisateur inconditionnel d’Hopper: Wim Wenders, qui raconte dans «La toile blanche d’Edward Hopper» (voir encadré) avoir été «électrifié» quand il a découvert le travail d’Hopper pour la première fois. «Je l’ai montré à tous mes amis, surtout à mon chef-opérateur de l’époque, Robby Müller, et on a pris Hopper pour modèle». L’esprit d’Hopper se retrouve dansParis, Texas(1984) et dansLa fin de la violence(1997). Lynch, Jarmusch et Antonioni font aussi partie du fan club.
Pour le psy
Qui était vraiment Edward Hopper? Etait-il aussi solitaire et mélancolique que ses héros? DansEdward Hopper, Entractes,Alain Cueff le qualifie de «dernier puritain», rappelant la profonde empreinte de son éducation protestante qui se «caractérise entre autres par un rapport frontal à la ''dure réalité'' et par une certaine méfiance à l'égard des émotions, de la jouissance esthétique, des images»,h'siotirneexpliqueld'artauFigaro.Bref, Hopper n’était pas un grand rigolo. Modeste, réservé, il partageait sa vie avec sa femme «Jo», peintre elle aussi, entre un atelier au 3 Washington square et sa maison le long de l’océan à Cap Code. Jo sera son unique modèle: elle refusait qu’il en engage d’autres. Le couple avait un chat, à défaut d’enfant… «La toile blanche d’Edward Hopper» vous permettra de faire connaissance avec Jo, qui n’était pas vraiment la joie incarnée… Votre voisin psy devrait hocher la tête d’un air entendu, avant d’enchaîner sur les relations d’Hopper avec ses parents.
>> L'expo Hopper en images, c'est par ici.
Annabelle Laurent
Le documentaire de Jean-Pierre Devillers«La toile blanche d’Edward Hopper»(2012 - 52 min) sera diffusé dimanche 14 octobre à 16h45 sur Arte, à l'occasion d'une programmation
spéciale tout au long de la journée. Le film sera aussi disponible en DVD le 6 novembre (20 euros).
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents