Justice des mineurs, le plan de Christiane Taubira
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PROJET DE REFORME DE L’ORDONNANCE DU 2 FEVRIER 1945 UNE JUSTICE DES MINEURS TRANSFORMEE AU FIL DES ANNEES 1945 / 2012    L’ordonnance du 2 février 1945 a posé un double postulat : la sanction et l’éducation des mineurs délinquants devaient conduire à leur resocialisation / on affirmait la spécificité de la justice des mineurs et un juge des enfants était créé dans toutes les juridictions.A la sortie de la guerre, ces délinquants mineurs étaient souvent déscolarisés, livrés à eux-mêmes, sans famille. La délinquance juvénile avait crû de manière importante. Le gouvernement provisoire de la République, en promulguant l’ordonnance du 2 février 1945 qui créait une er justice spécifique pour les mineurs, faisait donc un pari ambitieux sur l’avenir. L’ordonnance du 1septembre 1945 créait la direction de l’Education surveillée, indépendante de l’administration pénitentiaire, la future Protection judiciaire de la Jeunesse (PJJ). Une inflation législative depuis 15 ans. Les 8 réformes législatives qui ont eu lieu entre 2002 et 2011 ont produit de la confusion et des incohérences qui rendent aujourd’hui l’application des textes particulièrement complexe. L’ordonnance de 1945 a été modifiée avec une volonté de rapprocher la justice des mineurs de celle des adultes. Les changements concernent principalement le principe d’atténuation de responsabilité des mineurs, celui de la spécialisation des juridictions, les délais de jugement et le droit à l’oubli.

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Publié le 10 novembre 2015
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Langue Français

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PROJET DE REFORME DE L’ORDONNANCE DU 2 FEVRIER 1945
UNE JUSTICE DES MINEURS TRANSFORMEE AU FIL DES ANNEES
1945 / 2012
L’ordonnance du 2 février 1945 a posé un double postulat : la sanction et l’éducation des mineurs délinquants devaient conduire à leur resocialisation / on affirmait la spécificité de la justice des mineurs et un juge des enfants était créé dans toutes les juridictions.A la sortie de la guerre, ces délinquants mineurs étaient souvent déscolarisés, livrés à eux-mêmes, sans famille. La délinquance juvénile avait crû de manière importante.
Le gouvernement provisoire de la République, en promulguant l’ordonnance du 2 février 1945 qui créait une er justice spécifique pour les mineurs, faisait donc un pari ambitieux sur l’avenir. L’ordonnance du 1 septembre 1945 créait la direction de l’Education surveillée, indépendante de l’administration pénitentiaire, la future Protection judiciaire de la Jeunesse (PJJ).
Une inflation législative depuis 15 ans. Les8 réformes législatives qui ont eu lieu entre 2002 et 2011 ont produit de la confusion et des incohérences qui rendent aujourd’hui l’application des textes particulièrement complexe.L’ordonnance de 1945 a été modifiée avec une volonté de rapprocher la justice des mineurs de celle des adultes. Les changements concernent principalement le principe d’atténuation de responsabilité des mineurs, celui de la spécialisation des juridictions, les délais de jugement et le droit à l’oubli.
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Loi du 9 septembre 2002: limitation du pouvoir d’appréciation du juge des enfants pour les adolescents de 16 à 18 ans (renvoi obligatoire devant le tribunal pour enfants dans certaines circonstances); création des centres éducatifs fermés pour les mineurs de 13 à 17 ans ; création des « sanctions éducatives » qui alourdissent la procédure et dont l’irrespect ne peut pas, en pratique, être sanctionné.
Loi du 9 mars 2004: application de la garde à vue de 96 heures aux mineurs de 16 à 18 ans impliqués avec des majeurs ; restriction de l’effacement des mentions au casier judiciaire.
Loi du 5 mars 2007; la: la composition pénale est étendue aux mineurs de 13 ans et plus possibilité de placer un mineur de 13 à 15 ans sous contrôle judiciaire est élargie aux primo délinquants ; la présentation immédiate devant le tribunal pour enfants devient possible ; on limite le pouvoir d’appréciation du juge des enfants quant au prononcé de mesures éducatives ; on facilite l’exclusion de l’atténuation de peines à l’égard des mineurs de 16-17 ans.
Loi du 10 août 2007: l’application des peines planchers aux mineurs réduit la liberté d’appréciation du juge et encourage l’incarcération des mineurs récidivistes ; l’atténuation de peine pour les 16-17 ans est encore restreinte et devient l’exception.
Loi du 10 août 2011: création du tribunal correctionnel pour mineurs (TCM).
Une évolution législative inefficace pour prévenir la récidive.Les nombreuses modifications des textes législatifs ont produit des incohérences et des injonctions contradictoires auxquelles les juges des enfants doivent faire face. La diversification des réponses pénales, dont la pertinence est variable, a contribué au manque de lisibilité, comme le soulignent l’ensemble des travaux engagés ces dernières années (cf. commission Varinard).
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Les délais de jugement se sont allongés au détriment des victimes, sans pour autant permettre une baisse de la récidive.
Pour beaucoup de jeunes, un premier contact avec la justice suffit : 65 % des mineurs ayant eu un contact avec l’institution judiciaire pour une affaire pénale, y compris les alternatives aux poursuites prononcées par le parquet pour des primo-délinquants et les mesures éducatives, ne retournent pas devant la justice durant le temps de leur minoritéSDSE Ministère de la Justice)(Source : . Mais les choses changent en cas de condamnation pénale : une enquête de l’INSEE de 2013 a montré que parmi les jeunes condamnés en 2004, 60% ont récidivé en 2011 contre 38% chez les adultes. Dans le même ordre d’idées, une étude de la DPJJ a montré une forme d’escalade de la délinquance des mineurs : plus ils reviennent devant le juge, plus ils réitèrent, et dans des délais de plus en plus courts. On peut en déduire que les réponses actuelles n’empêchent pas que les mineurs s’installent dans la délinquance (DPJJ 2004).De plus, l’incarcération a un effet aggravant de la récidive. 75% des mineurs sortis de prison en 2002 ont récidivé dans les 5 ans. Le durcissement de la réponse pénale n’est donc pas la bonne réponse.
Les réponses judiciaires ont elles aussi connu des évolutions profondes.Laréponse pénale est devenue systématiquelorsque les affaires impliquent des mineurs : de 60% en 1994, le taux est passé à 78% en 2000 et 94% en 2013. Une forte judiciarisation de la délinquance des mineurs s’est accompagnée d’un renforcement du rôle du procureur de la République. Mais cette sévérité accrue n’a pas non plus permis de diminuer le niveau de la récidive.
En conséquence, les principes généraux qui définissent depuis 1945 la philosophie de la législation applicable aux mineurs délinquants ont été largement entamés par les réformes successives.
Les constats sont les suivants :
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une vision insuffisante de la réalité des mineurs pris en charge dans le cadre pénal, une déspécialisation progressive des acteurs de la justice pénale des mineurs, une complexification des règles procédurales qui sont peu lisibles, des réponses pénales peu claires.
Depuis 2012, une refonte de la justice des enfants et des adolescents déjà engagée
« Ainsi seront conciliés les intérêts de la société, de la victime et du mineur ».Lors de son discours du 18 janvier 2013, devant la Cour de cassation, le Président de la République a affirmé la nécessité de transformer en profondeur la justice des mineurs et s’est engagé à supprimer les tribunaux correctionnels pour mineurs.
15 août 2014 : Suppression des peines planchers,y compris pour les mineurs, et rétablissement de l’atténuation de peine pour minorité dans son état antérieur.
30 septembre 2011 :note d’orientation PJJ pour favoriser la continuité et la cohérence du suivi des jeunes.
ème Le 2 février 2015, à l’occasion du 70 anniversaire de l’ordonnance de 1945, la conférence sur la justice des enfants et des adolescentsa établi un état des connaissances à partir de nombreuses consultations de professionnels et d’universitaires. Les participants se sont attachés à identifier les pratiques qui puissent améliorer la prise en charge et la réinsertion des mineurs en situation de délinquance. Les actes du colloque et l’état des connaissances ont été envoyés à tous les parlementaires.
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AXE 1 –UNE JUSTICE PLUS SIMPLE, PLUS LISIBLE ET PLUS RAPIDE
Le temps de la procédure est réaménagé afin de supprimer les temps morts.Pour les 30% de mineurs qui sont poursuivis devant le juge des enfants et nécessitent un bilan de personnalité approfondi ou une prise en charge éducative, la réforme instaure uneprocédure uniquequi prévoitdeux jugementsdans des délais définis.
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Un premier jugement établit la culpabilité et la responsabilité du jeune ainsi que le préjudice subi par la victime et son indemnisation. Un plan d’intervention personnalisé est établi. Ce premier jugement est rendu dans un délai de 10 jours à 3 mois après les faits.
Suit une période d’épreuve d’une durée de six mois, pendant laquelle un bilan de personnalité et un suivi peuvent être ordonnés, des contrôles et des sanctions applicables si le juge le décide.
Enfin, intervient le second jugement qui détermine la sanction et les mesures de suivi visant à la réinsertion du jeune.
Des victimes mieux prises en compte et plus rapidement dédommagées.Le préjudice de la victime sera pris en compte peu de temps après les faits et la victime pourra obtenir réparation dès la première audience. Le délai de décision concernant le préjudice passera de 17 mois en moyenne aujourd’hui à 3 mois maximum. Pendant le temps entre les deux jugements, une obligation d’indemnisation de la victime pourra être imposée au mineur, mesure dont le non-respect pourra impacter la décision finale du juge. Cela ne pourra qu’encourager le mineur à la respecter.
Un jugement plus rapide.Dans de nombreuses affaires impliquant des mineurs, la culpabilité des auteurs du délit est simple à établir. Nul besoin de procédures de plusieurs mois comme c’est le cas aujourd’hui. Si les faits sont reconnus, l’auteur pourra être jugé dès la première audience. Dans les affaires qui nécessitent du temps, la culpabilité des auteurs de délits sera établie plus rapidement et à l’issue du délai d’épreuve, la sanction sera prononcée dans les 9 mois suivant la transmission de l’affaire au parquet, contre 17 mois en moyenne aujourd’hui. Confronter rapidement le jeune à la loi et lui faire prendre conscience immédiatement de son acte déviant est la clé de voûte d’une action efficace d’insertion.
Une évaluation approfondie du jeune et une prise en charge plus efficace : le délai d’épreuve va soumettre le mineur à une période d’observation.Le même juge assurera le suivi du jeune tout au long de la procédure, ce qui n’était plus le cas depuis 2011. Les services de la PJJ et le secteur associatif habilité informeront périodiquement le juge de l’évolution du mineur, proposant d’éventuelles modifications du plan d’intervention. En cas d’irrespect des mesures de contrôle imposées ou en cas d’infractions graves et répétées de la part du mineur, le juge des enfants pourra décider la révocation de son sursis, renforcer le contrôle, rapprocher la date du jugement final ou ordonner une incarcération provisoire.
Le tribunal correctionnel pour mineurs (TCM) est supprimé :Créé en 2011 pour exercer une justice plus ferme et plus rapide à l’égard des adolescents délinquants récidivistes âgés de plus de 15 ans, les TCM ont plutôt ralenti les procédures et alourdi l’activité des juridictions – en particulier les juridictions petites et moyennes - pour finalement sanctionner de la même manière, voire moins sévèrement. Les récidivistes de 16 à 18 ans ne peuvent plus être jugés selon les procédures rapides de présentation immédiate qui n’existent que devant le tribunal pour enfants. En 2013, ils ont prononcé moins de 1% des condamnations appliquées à des mineurs.
AXE 2 – FAVORISER L’INSERTION ET PREVENIR LA RECIDIVE
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Création d’une mesure éducative unique.Dans un souci de renforcement de l’individualisation de l’accompagnement éducatif, une fois le mineur déclaré coupable et le préjudice de la victime réparé, une mesure éducative personnalisée unique est prononcée par le juge. Elle est modulable et transversale à toutes les procédures concernant un même mineur. Ainsi, on évite l’effet de dispersion généré par l’accumulation de mesures au gré des procédures.
Elle permet de cibler l’action éducative sur les problématiques du jeune, de renforcer la cohérence de l’intervention en simplifiant les modalités de mise en œuvre. En recourant de manière souple au large panel de réponses à disposition des services éducatifs, elle permet de supprimer les ruptures de prise en charge qui provoquent souvent des rechutes et des actes de réitération.
Création d’une mesure coercitive temporaireElle s’applique entre. Elle concilie la fermeté et l’éducatif. les deux audiences, pour les adolescents de plus de 12 ans. Par exemple : ne pas sortir des limites territoriales déterminées; établir sa résidence en un lieu déterminé ; se soumettre à des mesures d’examen, de traitement ou de soins.
Retour à un régime juridique simplifié pour le casier judiciaire et l’inscription au fichier. La justice pénale des mineurs doit favoriser l’insertion des adolescents et les inciter à mettre un terme à leur parcours délinquant. Pour ce faire, il est nécessaire de revisiter les conditions d’inscription au casier judiciaire et aux fichiers : les mesures éducatives prononcées pour les enfants jusqu’à 12 ans ne seront plus inscrites au casier judiciaire et pour les plus de 13 ans, l’effacement du casier judiciaire sera facilité pour les mesures éducatives. De même, les obligations de contrôle judiciaire ou de sursis mise à l’épreuve sont adaptées aux mineurs.
La réforme exclut l’application aux mineurs de procédures conçues pour les majeurs et inadaptées pour eux :composition pénale, aménagement du contrôle judiciaire et des peines de SME.
La mesure de « sanction éducative » est supprimée.Créée en 2012 pourmontrer que les enfants de moins de 13 ans peuvent être sanctionnés, elle est difficilement applicable, elle alourdit la procédure (passage obligatoire par le tribunal pour enfants) et son irrespect par le mineur ne peut pas, en pratique, être sanctionné.
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