La maison Nucingen
66 pages
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La maison Nucingen

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Description

La Comédie humaine - Études de moeurs. Troisième livre, Scènes de la vie parisienne - Tome XI (sic, erreur pour le tome III). Onzième volume de l'édition Furne 1842. Extrait : ― Messieurs, dit Bixiou, l’amour qui ne comporte pas une indissoluble amitié me semble un libertinage momentané. Qu’est-ce qu’un entier abandon où l’on se réserve quelque chose ? Entre ces deux doctrines, aussi opposées et aussi profondément immorales l’une que l’autre, il n’y a pas de conciliation possible. Selon moi, les gens qui craignent une liaison complète ont sans doute la croyance qu’elle peut finir, et adieu l’illusion ! La passion qui ne se croit pas éternelle est hideuse. (Ceci est du Fénelon tout pur.) Aussi, ceux à qui le monde est connu, les observateurs, les gens comme il faut, les hommes bien gantés et bien cravatés, qui ne rougissent pas d’épouser une femme pour sa fortune, proclament-ils comme indispensable une complète scission des intérêts et des sentiments. Les autres sont des fous qui aiment, qui se croient seuls dans le monde avec leur maîtresse ! Pour eux, les millions sont de la boue 

Informations

Publié par
Nombre de lectures 60
EAN13 9782824709895
Langue Français

Extrait

HONORÉ DE BALZA C
LA MAISON
N UCI NGEN
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LA MAISON
N UCI NGEN
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0989-5
BI BEBO OK
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distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.LA MAISON N UCI NGEN
N’ est-ce p as à v ous, madame , dont la haute et pr ob e
intellig ence est comme un trésor p our v os amis, à v ous qui
êtes à la fois p our moi tout un public et la plus indulg ente des
sœur s, que je dois dé dier cee œuv r e  ? daignez l’accepter
comme témoignag e d’une amitié dont je suis fier . V ous et
quelques âmes, b elles comme la vôtr e , compr endr ont ma
p ensé e en lisant la Maison Nucing en acollé e à C ésar Bir oe au.
D ans ce contraste n’y a-t-il p as tout un enseignement so cial  ?
DE BALZA C.
    sont minces les cloisons qui sép ar ent les
cabinets p articulier s dans les plus élég ants cabar ets de Paris. ChezV V ér y , p ar e x emple , le plus grand salon est coup é en deux p ar
une cloison qui s’ôte et se r emet à v olonté . La scène n’était p as là , mais
dans un b on endr oit qu’il ne me convient p as de nommer . Nous étions
deux, je dirai donc, comme le Pr ud’homme de Henri Monnier  : « Je ne
v oudrais p as la compr omer e . » Nous car essions les friandises d’un
dîner e x quis à plusieur s titr es, dans un p etit salon où nous p arlions à v oix
basse , après av oir r e connu le p eu d’ép aisseur de la cloison. Nous avions
aeint au moment du rôti sans av oir eu de v oisins dans la piè ce contiguë
1La maison Nucing en Chapitr e
à la nôtr e , où nous n’ entendions que les p étillements du feu. Huit heur es
sonnèr ent, il se fit un grand br uit de pie ds, il y eut des p ar oles é chang é es,
les g ar çons app ortèr ent des b ougies. Il nous fut démontré que le salon
v oisin était o ccup é . En r e connaissant les v oix, je sus à quels p er sonnag es
nous avions affair e . C’était quatr e des plus hardis cor morans é clos dans
l’é cume qui cour onne les flots incessamment r enouv elés de la g
énération présente  ; aimables g ar çons dont l’ e xistence est pr oblématique , à qui
l’ on ne connait ni r entes ni domaines, et qui viv ent bien. Ces spirituels
condoieri de l’Industrie mo der ne , de v enue la plus cr uelle des guer r es,
laissent les inquiétudes à leur s cré ancier s, g ardent les plaisir s p our eux,
et n’ ont de souci que de leur costume . D’ailleur s brav es à fumer , comme
Je an Bart, leur cig ar e sur une tonne de p oudr e , p eut-êtr e p our ne p as
faillir à leur rôle  ; plus mo queur s que les p etits jour naux, mo queur s à
se mo quer d’ eux-mêmes  ; p er spicaces et incré dules, fur eteur s d’affair es,
avides et pr o digues, envieux d’autr ui, mais contents d’ eux-mêmes  ; pr
ofonds p olitiques p ar saillies, analy sant tout, de vinant tout, ils n’avaient
p as encor e pu se fair e jour dans le monde où ils v oudraient se pr o duir e .
Un seul des quatr e est p ar v enu, mais seulement au pie d de l’é chelle . Ce
n’ est rien que d’av oir de l’ar g ent, et un p ar v enu ne sait tout ce qui lui
manque alor s qu’après six mois de flaeries. Peu p arleur , fr oid, g our mé ,
sans esprit, ce p ar v enu nommé Ando che Finot, a eu le cœur de se mer e à
plat v entr e de vant ceux qui p ouvaient le ser vir , et la finesse d’êtr e insolent
av e c ceux dont il n’avait plus b esoin. Semblable à l’un des gr otesques du
ballet de Gustav e , il est mar quis p ar der rièr e et vilain p ar de vant. Ce prélat
industriel entr etient un caudatair e , Émile Blondet, ré dacteur de jour naux,
homme de b e aucoup d’ esprit, mais dé cousu, brillant, cap able , p ar esseux,
se sachant e xploité , se laissant fair e , p erfide , comme il est b on, p ar
caprices  ; un de ces hommes que l’ on aime et que l’ on n’ estime p as. Fin
comme une soubr ee de comé die , incap able de r efuser sa plume à qui la
lui demande , et son cœur à qui le lui empr unte , Émile est le plus sé
duisant de ces hommes-filles de qui le plus fantasque de nos g ens d’ esprit a
dit  : « Je les aime mieux en soulier s de satin qu’ en b oes. » Le tr oisième ,
nommé Coutur e , se maintient p ar la Sp é culation. Il ente affair e sur
affair e , le succès de l’une couv r e l’insuccès de l’autr e . A ussi vit-il à fleur
d’ e au soutenu p ar la for ce ner v euse de son jeu, p ar une coup e r oide et
2La maison Nucing en Chapitr e
audacieuse . Il nag e de ci, de là , cher chant dans l’immense mer des intérêts
p arisiens un îlot assez contestable p our p ouv oir s’y log er . Évidemment,
il n’ est p as à sa place . ant au der nier , le plus malicieux des quatr e , son
nom suffira  : Bixiou  ! Hélas  ! ce n’ est plus le Bixiou de 1825, mais celui de
1836, le misanthr op e b ouffon à qui l’ on connaît le plus de v er v e et de
mordant, un diable enrag é d’av oir dép ensé tant d’ esprit en pur e p erte , furieux
de ne p as av oir ramassé son ép av e dans la der nièr e ré v olution, donnant
son coup de pie d à chacun en v rai Pier r ot des Funambules, sachant son
ép o que et les av entur es scandaleuses sur le b out de son doigt, les or nant
de ses inv entions drôlatiques, sautant sur toutes les ép aules comme un
clo w n, et tâchant d’y laisser une mar que à la façon du b our r e au.
Après av oir satisfait aux pr emièr es e xig ences de la g our mandise , nos
v oisins ar rivèr ent où nous en étions de notr e dîner , au dessert  ; et, grâce
à notr e coite tenue , ils se cr ur ent seuls. A la fumé e des cig ar es, à l’aide
du vin de Champ agne , à trav er s les amusements g astr onomiques du
dessert, il s’ entama donc une intime conv er sation. Empr einte de cet esprit
glacial qui r oidit les sentiments les plus élastiques, ar rête les inspirations
les plus g énér euses, et donne au rir e quelque chose d’aigu, cee causerie
pleine de l’âcr e ir onie qui chang e la g aîté en ricanerie , accusa
l’épuisement d’âmes liv ré es à elles-mêmes, sans autr e but que la satisfaction de
l’ég oïsme , fr uit de la p aix où nous viv ons. Ce p amphlet contr e l’homme
que Dider ot n’ osa p as publier , le Neveu de Rameau  ; ce liv r e , débraillé
tout e xprès p our montr er des plaies, est seul comp arable à ce p amphlet
dit sans aucune ar rièr e-p ensé e , où le mot ne r esp e cta même p oint ce que
le p enseur discute encor e , où l’ on ne constr uisit qu’av e c des r uines, où
l’ on nia tout, où l’ on n’admira que ce que le scepticisme adopte  : l’
omnip otence , l’ omniscience , l’ omniconv enance de l’ar g ent. Après av oir
tiraillé dans le cer cle des p er sonnes de connaissance , la Mé disance se mit
à fusiller les amis intimes. Un signe suffit p our e xpliquer le désir que
j’avais de r ester et d’é couter au moment où Bixiou prit la p ar ole , comme
on va le v oir . Nous entendîmes alor s une de ces ter ribles impr o visations
qui valent à cet artiste sa réputation auprès de quelques esprits blasés,
et, quoique souv ent inter r ompue , prise et r eprise , elle fut sténographié e
p ar ma mémoir e . Opinions et for me , tout y est en dehor s des conditions
liérair es. Mais c’ est ce que cela fut  : un

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