"Les cas cliniques de Jacques Lacan"
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Lacan introduit une triplicité de l'expérience analytique avec les catégories du Réel, de l'Imaginaire et du Symbolique. Le père se décline donc selon ces trois instances. Application à une oeuvre de fiction : "Io e il Re" de Puppi Amati, puis à l'observation du petit Hans que l'on trouve dans les cinq psychanalyses de Freud.
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Langue Français

Extrait

1929-12-19 Paralysie générale prolongée : Exposé à la Société de Psychiatrie
Année 1995-1996 : "Les cas cliniques de Jacques Lacan"
-Pascale Amiel : Le Père Réel
Lacan introduit une triplicité de l'expérience analytique avec les catégories du Réel, de l'Imaginaire et du Symbolique. Le père se décline donc selon ces trois instances. Application à une oeuvre de îction : "Io e il Re" de Puppi Amati, puis à l'observation du petit Hans que l'on trouve dans les cinq psychanalyses de Freud.
-Muriel Mosconi : Passe, Trouvaille et style :
Une lecture des cas de în d'analyse que Lacan évoque dans sa fameuse proposition du 9 Octobre 1967 sur le Psychanalyste de l'École.
-Franz Kaltenbeck : "QtroncanacLnduaSahpr"elôelEal(27 Juin 1996)
Cinq séances du séminaire " Le désir et son interprétation " (1958-1959) portent sur "Analyse d'un rêve singulier " ("Analysis of a single dream"), le chapitre V d'un livre d'Ella Freeman Sharpe, intitulé "Analysis " (23 pages) : les séances du 14 janvier 1959 (manque), 21 janvier 1959, 28 janvier 1959, 4 février 1959, 11 février 1959 et le début de la séance du 4 mars 1959.
A un moment où l'École (ECF) étudie la question de l'interprétation, la lecture du texte d'Ella Sharpe et du long commentaire que Lacan nous en a livré semble s'imposer.
Mais l'interprétation et la ré-interprétation de ce rêve dit unique n'est pas détachée de la névrose complexe du rêveur; Elles sont plutôt articulées aux diïcultés que celui-ci a avec la sexuation et avec son désir. Nous voyons là un domaine bien réel où l'interprétation doit opérer.
1929-12-19 Paralysie générale prolongée : Exposé à la Société de Psychiatrie
Archives trois cas cliniques
Présentation de MM. René Targowla et Jacques Lacan le 19 décembre 1929 à la Société de psychiatrie de Paris, paru dans L’Encéphale Paris, G. Doin et Cie, 1930, t 1, pp. 83-85
Le malade que nous présentons est un paralytique général dont la maladie dure depuis au moins sept ans. La rareté relative des cas de ce genre et certains détails de l’observation nous ont paru justiIer la présentation.
A… P…, 52 ans.
Évolution clinique.– Marié depuis 1906 ; pas d’enfant ni de fausse-couche de la femme. Pas de maladie importante. Aucune notion de la contamination primitive. En 1918, commotion de guerre, d’où naissent certains symptômes qui le font réformer à 15 % ; il semble d’ailleurs que la question de la syphilis a été posée à ce moment. ïl reprend ses occupations ; mais on constate à ce moment de la nervosité, de l’insomnie, des cauchemars de guerre, de l’irritabilité, des tendances aux impulsions.
En septembre 1922, apparaît l’épisode qui force l’attention. Parti en voyage pour aller à l’enterrement d’une parente, il manque la correspondance de ses trains, s’égare, s’endort dans une gare, revient sans songer à donner une explication quelconque de l’emploi de son temps. À partir de ce moment, « taciturne, inerte, se comportant comme un enfant », il a de gros troubles de la mémoire, des troubles de la parole, fait des achats inconsidérés pour le commerce de nouveautés dont il s’occupe, vend des bibelots qui appartiennent à son ménage et dépense cet argent d’une façon incontrôlable. Le diagnostic est porté de paralysie générale, mais il n’est soigné de façon régulière qu’en 1924 à l’ïnstitut prophylactique où l’on constate un amaigrissement notable, de gros déIcits de mémoire, une inégalité pupillaire avec signe d’Argyll-Robertson bilatéral, réexes rotuliens faibles, achilléens abolis, du tremblement des mains et de la langue. Pas de signe de Romberg. ïl est soigné de janvier 1924 à novembre 1924 par une série de 20 injections de Quinby, puis deux séries de tryparsamide-salicylate de mercure, et, de novembre 1924 à octobre 1925, par quatre séries de 8 injections de tryparsamide-salicylate de mercure.
ïl est considéré comme très amélioré sans que nous ayons pu obtenir d’observations plus précises. Le retour d’une activité au moins partielle est tel qu’il se considère comme guéri, ne retourne plus à l’ïnstitut prophylactique et, en 1927, à la place du petit commerce abandonné dans l’intervalle, se charge d’une gérance d’hôtel. Mais bientôt ses colères fréquentes contre les clients, son irritabilité le forcent à abandonner cette nouvelle entreprise. ïl vend les objets qui se trouvent chez lui, se livre à des violences envers sa femme. Ce sont ces manifestations, ainsi qu’un petit ictus ayant donné une hémiparésie droite, d’ailleurs passagère, qui amènent sa femme à le faire entrer en juin 1929 à l’hôpital Henri-Rousselle.
1929-12-19 Paralysie générale prolongée : Exposé à la Société de Psychiatrie
À l’hôpital il s’est montré ce qu’il est depuis. Dément, incapable de travailler, indiFérent, apathique et euphorique, il présente une dysarthrie qui le rend incompréhensible. Assez présent à l’interrogatoire, en général assez bien orienté, il a un gros déIcit mnésique concernant sa vie passée, avec une atteinte même des notions acquises automatiques comme la table de multiplication ; il ne peut saisir un raisonnement élémentaire concernant ses erreurs, se montre incapable d’un eFort psychique, a des troubles de l’écriture.
AFectivité extrêmement diminuée. Mâchonnement, tremblement lingual, réexe photo-moteur aboli, pupille gauche plus grande que la droite ; le réexe achilléen ne provoque qu’une faible exion des orteils sur la plante, le rotulien gauche est aboli ; le rotulien droit est faible, il y a du ptosis de l’œil droit et une légère diminution de la force musculaire du membre supérieur droit, reliquat de l’hémiparésie droite. Bon état général ; poids : 67 kilos. Tension artérielle : 11 1/2 – 8. Rien aux autres appareils.
Traitement : une série de stovarsol à petites doses dont les premières injections réactivent les signes sérologiques du liquide céphalo-rachidien, puis en novembre malariathérapie sans aucun résultat appréciable jusqu’à maintenant.
ÉVOLUTïON DU SYNDROME SÉROLOGïQUE
Dates
Janvier 1924
5 novembre 1 924
20 octobre 1925
17 juin 1929
23 octobre 1929
13 décembre 1929
R. de Vernes ou de B.-W.
 (sérum)
D.O.= 95
D.O.= 28
D.O.= 11
B.-W. : 0
 0
 0
R. de Vernes ou de B.-W.
(L.C.R.)
D.O.= 90
D.O.= 11
D.O.= 0
cc 0 (0 ,5)
 0
 0
Alb.
0,4 6
0,3 8
0,3 1
0,2 4
0,4 0
0,1 5
Leuco
7,2 (par cha mp)
3/4 (par champ)
2 (par champ)
0,4 (par mmc)
1,4 (par mmc)
2 (par mmc)
Réaction du benjoin
00000.02221. 00000-0
11210.02211. 00000-0
00000.00210. 00000-0
1929-12-19 Paralysie générale prolongée : Exposé à la Société de Psychiatrie
ïl semble bien que l’on soit en présence d’un syndrome paralytique, remarquable par sa durée anormale. Un premier point mérite de retenir l’attention : les modiIcations des réexes tendineux. Ceux-ci sont extrêmement atténués, mais ils ne sont pas abolis ; d’autre part, il n’y a pas dans l’évolution de la maladie d’autre manifestation tabétique. ïl faut donc se montrer assez réservé en ce qui concerne la possibilité d’un tabès associé, diagnostic que l’on porte souvent sans discussion susante ; il semble plutôt qu’il s’agit ici d’un processus d’inammation diFuse paralytique ayant évolué vers la sclérose, comme on le voit dans les formes prolongées de paralysie générale, et ayant atteint non seulement l’encéphale mais diFérentes parties du système nerveux.
Un second point intéressant de cette observation est l’évolution clinique. Elle s’est caractérisée par une rémission importante suivie d’une reprise insensible, apparemment lente et progressive, des symptômes neuro-psychiques. Si on la compare aux réactions du liquide céphalo-rachidien, on voit que ces dernières se sont assez rapidement atténuées sous l’inuence du traitement, en même temps que les troubles psychiques. ïl faut en outre remarquer qu’elles sont actuellement apparemment négatives ; il y a là un contraste singulier avec l’accentuation de l’état démentiel et de la dysarthrie qui montrent que le processus inammatoire a continué d’évoluer sourdement. Cette persistance est d’ailleurs armée par l’action de la réactivation sur le syndrome humoral ; la négativité n’implique donc pas la guérison absolue, mais simplement la réduction du processus encéphalitique dont l’intensité est en quelque sorte au-dessous du seuil des réactions.
EnIn, on notera l’absence d’aFection intercurrente grave chez ce malade. C’est donc vraisemblablement à l’action de la tryparsamide qu’il faut imputer la rémission et la modiIcation de l’allure évolutive. ïl semble que l’action de la malariathérapie, dans les cas favorables, soit plus complète ; nous espérons peu dans les conditions où elle a été instituée ici mais nous pensons que, pratiquée dès le début, en période de pleine activité inammatoire, et complétée par un traitement persévérant à base d’arsenicaux pentavalents du type de la tryparsamide, elle est susceptible d’amener la guérison vraie, qui n’a pu être obtenue dans ce cas, où l’on observe seulement le ralentissement de l’évolution.
1930-02-17 Psychose hallucinatoire encéphalitique
Présentation de MM. A. Courtois et J. Lacan à la séance du 17 février 1930 de la Société clinique de Médecine mentale. Paru dans l’Encéphale, Paris, G. Doin et Cie, 1930, paru également dans les Annales Médico Psychologiques.
Psychose hallucinatoire encéphalitique.– MM. A. Courtoiset J. Lacan présentent un nouveau cas de psychose hallucinatoire chez une parkinsonnienne post-encéphalitique. Élément onirique important avec phénomènes visuels au début des troubles, qui ont concidé avec l’apparition d’une insomnie absolue. ïnterprétations des troubles neurologiques. Absence de conviction délirante vraie. À rapprocher des cas antérieurement publiés à l’étranger et en rance.
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1930-11-20 crises toniques combinées de protrusion de la langue et de trismus se produisant pendant le sommeil chez une parkinsonienne post-encéphalitique – amputation de la langue consécutive Observation par Jacques Lacan lors de la séance du 20 novembre 1930, à la Société de Psychiatrie de Paris, paru dansl’Encéphale, 1931, 2, pp. 145-146.
observation. – Mme L. 53 ans.
Présentation de la malade : Parkinsonienne évidente. Rigidité du masque. Pli nasogénien très accentué à droite, séquelle de paralysie faciale à droite. Trouble de la motilité oculaire.
On voit à l’ouverture de la bouche un moignon lingual correspondant à une perte de substance étendue de la langue, il se termine par trois lobules dans l’un desquels on croit reconnaître la pointe de la langue elle-même. Édentation complète thérapeutique.
Histoire de la maladie
1918. Grippe « espagnole », dépression post grippale. Vers 45 ans, hypertension artérielle. Malaises, insomnie, irritabilité.
Décembre1927. Au bout de quelques jours, Ièvre mystérieuse, qualiIée d’intestinale ; dure un mois et ne dépasse jamais 39. Dort toute la journée. Se réveille pour les repas, se rendort. Contraste avec l’insomnie précédente.
Un jour, paralysie faciale asque très passagère, à la suite de laquelle s’établit le spasme.
An1928. Somnolence, qui durera jusqu’en septembre. Dès le début, des troubles de la marche s’établissent. Crises toniques oculaires, semble-t-il. Troubles du caractère. Boulimie. Amaigrissement de 25 kilos.
Durant l’été apparition des crises qui nous intéressent. Accourus à ses cris la nuit, les siens trouvent notre malade les dents profondément enfoncées dans la langue tirée au dehors sans qu’elle puisse desserrer cette morsure et poussant des gémissements et des cris étouFés ; la crise cesse au bout d’un quart d’heure, laissant sur la langue des marques et des plaies. Conscience complète pendant la crise. Scène renouvelée presque toutes les nuits. Sa Ille l’observe : elle constate, toujours dans le sommeil de la malade un mouvement d’abaissement de la mâchoire, puis un moment de protrusion de la langue, que suit une fermeture de la mâchoire, et un trismus. La langue est ainsi attrapée entre les dents et aussitôt réveillée par la douleur, la malade crie et gesticule. Pas d’état crépusculaire. Si on réveille la malade avant la morsure de la langue, elle peut retirer celle-ci. « Oh ! j’allais encore me mordre ». Cessation des crises dans les deux derniers mois de l’année.
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1930-11-20 crises toniques combinées de protrusion de la langue et de trismus se produisant pendant le sommeil chez une parkinsonienne post-encéphalitique – amputation de la langue consécutive
An1929. Renversement des troubles du caractère dans le sens d’une sensiblerie et d’un excès de tendresse. Traitement par novarséno-benzol. Réapparition déclarée des violences contre les siens, d’une méchanceté perverse, d’une mythomanie maligne exprimée par des discours et des hurlements à la fenêtre.
Réapparition des crises de morsures de la langue qui aboutissent en avril à une gangrène partielle de la langue, suivie dans les 24 heures de chute de 1’escarre. Les crises continuent. Après avoir tenté vainement d’en supprimer les eFets par une sorte de gouttière dentaire en caoutchouc, on arrache toutes les dents à la malade en mai 29. Les crises elles-mêmes sont encore observées par l’entourage jusqu’en août. Nous avons pu faire constater nous-mêmes dans le service des mouvements d’abaissement de la mâchoire durant le sommeil.
Examen actuel de la malade.Parkinsonienne typique, troubles de la marche, pulsion, hypertonie, perte des mouvements associés des bras, faciès Igé, commissure labiale droite relevée, ptosis à droite, strabisme interne très marqué, absence de mobilité oculaire. L’édentation accentue encore la profonde transformation de la physionomie de la malade. Hypersalivation, Ilet de salive aux commissures sans cesse contenu à l’aide d’un mouchoir. Parole monotone, élevée, plaintive et agressive à la fois. Écriture typique. Précision et clarté des dires. Viscosité psychique. Malveillance. Tension artérielle : 18-12.
Examen des yeux. Acuité visuelle 0,4, réaction pupillaire normale, tension rétinienne 60, strabisme interne existant avant la maladie s’est exagéré, abolition des mouvements de latéralité des yeux, conservation du mouvement de convergence et des mouvements d’élévation et d’abaissement des yeux. Pas d’amyotrophie des muscles sterno, ni cliniquement ni à l’examen électrique.
Examen auriculaire, sang, liquide céphalo-rachidien :normaux.
Commentaire. – Lesspasmes toniques post-encéphalitiques de protrusion de la langue sont rares dans la littérature. Relevons une note de Christin sur un cas de contracture de la langue post-encéphalitique dans laRevue Neurologiquede 1922, un cas de « protraction de la langue par spasme dans l’encéphalite prolongée ; amyotrophie localisée aux masticateurs » par MM. Lhermitte et Kyriaco(Revue Neurologique,1928), une observation de MM. Crouzon et Ducas, une observation de M. Dubois (de Berne), un syndrome des abaisseurs de la mâchoire au cours d’un syndrome consécutif à une grippe publié par MM. ribourg-Blanc et Kyriaco dans laRevue Neurologique,1929.
Notre observation diFère des précédentes par l’association du trismus mutilateur, par l’absence de l’amyotrophie fréquemment notée dans ces observations. Le point le plus remarquable nous semble être l’apparition de
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1930-11-20 crises toniques combinées de protrusion de la langue et de trismus se produisant pendant le sommeil chez une parkinsonienne post-encéphalitique – amputation de la langue consécutive
ces crises pendant le sommeil. Toutes les observations antérieures insistant bien sur la cessation ou l’absence des crises toniques paroxystiques ou permanentes durant le sommeil.
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1931-11-20 Troubles mentaux homochromes chez deux frères hérédosyphilitiques
Observation par P. Schi, mme Schi-Wertheimer et J. Lacan lors de la séance du 20.11.1930 à la Société de Psychiatrie de Paris, paru dans l’Encéphale, 1931, pp. 151 à 154.
(151) Chez deux frères, séparés par une diFérence d’âge de deux ans et qui ont pu être observés durant une longue période, nous avons constaté le même ensemble de troubles – instabilité, perversions instinctives, arriération physique et psychique – qui signalent le déséquilibre mental constitutionnel. Plusieurs points sont à relever dans l’histoire de ces jeunes gens. La similitude des destinées d’une part : l’homologie des causes pathogènes a entraîné celle des réactions psychiques et ces deux frères, nullement jumeaux, fortement hostiles l’un à l’autre et ne désirant rien moins que se ressembler et s’imiter, ont subi les mêmes entraînements, se sont montrés anti-sociaux de la même façon, ont eu une odyssée à peu près identique, ont commis les mêmes actes médico-légaux. D’autre part les dicultés du diagnostic étiologique sont à noter : l’origine précise des troubles chez le premier sujet n’a pu être prouvée que par l’examen du second. Les deux frères, enIn, ont présenté des « crises » dont la valeur clinique est d’appréciation délicate.
L’aîné, Eugène T… 20 ans a été suivi par l’un de nous à intervalles plus ou moins réguliers pendant quatre ans. ïl a les antécédents suivants : convulsions dans la première enfance ; cependant développement physique e normal, première scolarité normale, puis vers la 11 année se manifeste un échissement de l’attention et une tendance à l’indiscipline. C’est à ce moment semble-t-il – les renseignements fournis par la famille sont abondants mais parfois contradictoires – qu’il aurait fait un épisode infectieux, avec Ièvre pendant 8 jours, insomnie totale, diplopie, phases consécutives de somnolence diurne pendant plusieurs semaines. Après cette maladie l’enfant, jusque-là bien noté, ne veut plus se préparer au certiIcat d’études et est placé d’emblée dans une école de pré-apprentissage. Après un an d’étude il se montre incapable d’un apprentissage suivi, il a essayé en deux ans une dizaine de places, toutes dans des professions diFérentes, et partout a été considéré comme capable (152) de réussir « s’il voulait » mais il ne persévère nulle part, soit qu’on le e renvoie, soit que lui-même fasse une fugue. À partir de la 14 année il quitte en eFet de temps à autre le domicile familial pour des escapades d’une ou plusieurs journées. Deux de ces fugues ont même duré des semaines, il prétend gagner sa vie tout seul, a un besoin de grand air, vagabonde le long des routes et semble avoir commis des actes médico-légaux au sujet desquels il fait des déclarations que des contrôles ont prouvé mensongères. Étant donné sa hâblerie mythomaniaque, la vanité qu’il tire de ses perversions, la diculté d’enquêtes lointaines de vériIcation, il est dicile de se rendre un compte exact des méfaits qu’il a réellement accomplis. En tout cas il avait déjà été accusé de vol à l’école et a reconnu des vols d’argent au domicile paternel. Placé dans diverses œuvres de relèvement, dans des patronages, à la campagne, il s’y est montré insupportable, 9
1931-11-20 Troubles mentaux homochromes chez deux frères hérédosyphilitiques
intervenant sans cesse dans la marche des services, inamendable et, malgré ses protestations et promesses de réforme, inintimidable, opposant aux diverses méthodes d’éducation, indiscipline et instabilité, une mendicité tantôt utilitaire, tantôt gratuite, une nocivité maligne qui vont s’aggravant et paraissent être plus accusées encore dans le milieu familial. ïl y est constamment agressif vis-à-vis de sa mère, et aussi de son frère cadet (v. obs. n° 2) qu’il paraît, au moins pendant de longues périodes, détester. ïl est sujet à des accès de colère paroxystique où il profère des menaces de mort et se livre à des voies de fait sur l’entourage.
Au point de vue intellectuel, pas d’arriération nette, les réponses aux tests de Terman sont celles de la moyenne des sujets de son âge.
ïl s’estime malade, accuse des étourdissements, des céphalées, des lipothymies, mais on ne constate aucun signe caractéristique d’épilepsie jusqu’en ces dernières semaines où, après des excès alcooliques (armés par lui) il aurait eu à diverses reprises, dans une même journée, six crises en 6 heures, crises comportant, dit-il, un vertige initial, une chute avec perte de conscience, des morsures sanglantes de la langue, de l’écume aux lèvres. Nous n’avons pu observer une de ces crises, et comme le sujet a été hospitalisé à plusieurs reprises dans des services où se trouvaient des comitiaux, qu’il aurait été, selon ses dires, inIrmier dans plusieurs asiles et maisons de santé, une forte sursimulation ne nous paraît pas devoir être d’emblée exclue.
Au point de vue physique c’est un adolescent d’aspect gracile, avec un retard du développement pileux, un faciès adénode à voûte palatine ogivale et prognathisme du maxillaire supérieur. Les examens biologiques, à part une albuminorachie discrète, donnent des résultats normaux.Sang :Urée à 0,17 0/00 réactions de Bordet-Wassermann, de Sachs-Georgi, de Besredka négatives.Liquide céphalo-rachidien :tension normale, albumine 0,40 0/00. Sucre : 0,630/00, globulines : 0. Bordet-Wassermann négatif. Benjoin : 00000.02222, 10.000.
On a pratiqué à ce moment dans le sang des parents les réactions de Bordet-Wassermann, de Sachs-Georgi et de Besredka : elles sont négatives. De plus le père nous dit qu’une ponction lombaire, qu’il avait antérieurement réclamée à son médecin « pour découvrir l’origine du déséquilibre de son Ils », est négative. Nous avons suspecté chez Eugène T. une syphilis blastotoxique ou transplacentaire. Cependant l’ignorance où les résultats négatifs obtenus sur ses parents nous laisse sur l’origine des troubles mentaux de cet adolescent, la notion d’un épisode infectieux e apparu chez lui vers la 11 année portent à attribuer une particulière importance aux résultats de l’examen oculaire. Le réexe photomoteur est, aux deux pupilles, vif mais incomplet et parfois il « tient mal ». Ce signe pourrait être considéré comme la phase tout initiale d’un signe d’Argyll, mais il se trouve aussi dans les cas d’encéphalite épidémique. En outre Mme SchiF-Wertheimer a constaté que les mouvements de convergence sont
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1931-11-20 Troubles mentaux homochromes chez deux frères hérédosyphilitiques
insusants et qu’après les eForts de convergence des secousses nystagmiformes de grande amplitude apparaissent dans le regard latéral.
C’est là un trouble fonctionnel qui parait avoir été signalé jusqu’ici dans l’encéphalite épidémique seulement, et nous avons d’abord conclu (153) qu’Eugène T. a été atteint d’une encéphalite épidémique fruste qui n’a pas réagi sur l’intelligence mais a entraîné une détérioration tardive du caractère, détérioration devenue manifeste, comme il est fréquent, après un temps de latence et au moment de la crise pubérale.
Ces conclusions provisoires sont révisées quand nous avons à traiter son frère.
observation 2.– Deux ans après Eugène, en eFet, son frère Raoul entre à l’hôpital Henri Rousselle pour des désordres identiques de la conduite et du caractère. D’emblée on constate à l’examen physique une certaine ressemblance d’aspect mais ce qui frappe chez le cadet ce sont, à la mâchoire supérieure, deux incisives d’Hutchinson typiques, avec incisure semi-lunaire en coup d’ongle. L’imprégnation hérédo-syphilitique est chez lui évidente. Les dystrophies crâniennes sont plus accusées que chez Eugène, son liquide céphalo-rachidien, par ailleurs normal contient 5 3 lymphocytes au mm . Dans le sang on trouve une réaction de Bordet-Wassermann négative mais une réaction de Meinicke partiellement positive. EnIn l’examen oculaire montre un signe d’Argyll-Robertson complet : pupilles déformés réexe photomoteur presque nul avec réaction pupillaire conservée à l’accommodation convergence. En outre il existe un petit strabisme convergent.
L’histoire clinique de Raoul est la suivante. Né à terme. Retard de la parole et de la marche. Péritonite tuberculeuse à 6 ans. Pott lombaire ( ?) vers 8 ans. Scolarité jusqu’à 14 ans, apprend mal, est incapable de passer le certiIcat d’études. Très bon caractère jusqu’à 15 ans, mais à partir de ce moment, à la crise pubérale de nouveau, changement de caractère, inadaptation sociale complète : instabilité mentale et motrice, indocilité continue, grossièretés, fugues, mensonges, vols répétés et commis avec artiIce, sabotage de machines dans les ateliers où il est employé, est renvoyé de partout : 16 places et 10 métiers diFérents en 2 ans. Relations suspectes pour Inir, après avoir quitté la maison paternelle, il devient, contre la nourriture et le couchage, plongeur dans un bar mal famé. Récemment, crises multiples, semblables à celles de son frère : lors de la première il a avoué à son père qu’il avait simulé.
Outre son instabilité, Raoul présente une arriération psychique plus nette que son aîné et qui est d’ordre intellectuel autant que volontaire. Ses réponses au test de Terman sont nettement inférieures à la normale. La diminution de l’intelligence s’accuse d’ailleurs progressivement dans la lignée T : après Eugène et Raoul se place un troisième Ils, Tony, âgé de 11 ans, à la face dissymétrique, porteur d’un tubercule de Carabelli à droite, 11
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