Courtelineries
47 pages
Français

Courtelineries

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Description

Sur ce disque, dans la première partie, intitulée: Courtelineries, l'auteur, sous le fallacieux prétexte d'évoquer des évènements de sa prime jeunesse, lors de la seconde guerre mondiale, en profite perfidement pour vous conter une histoire à la limite du graveleux.
Dans la seconde partie, dont le titre est : Enfin ca y est ! II vous expliquera combien il est pénible d'écrire une nouvelle et dévoilera à d'éventuels futurs écrivains, quelques basses astuces pour arriver malgré tout, à noircir quelques pages. Si Georges Courteline inspira la première nouvelle, la seconde sera consacrée en partie à Catulle Mendes, écrivain maudit, contemporain du premier.

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Informations

Publié par
Publié le 01 novembre 2011
Nombre de lectures 138
Langue Français
Poids de l'ouvrage 17 Mo

Extrait

Enfn ça y est! 1 2 Courtelineries 1 Courtelineries. Chapitre 1 Que nous consacrerons plus particulièrement à l’excellente Madame Courteline. L’un de mes correspondants ayant un jour porté un jugement que je jugeais un peu hatif sur l’oeuvre de l’un de mes auteurs préférés, je lui répondis par une longue missive dont il m’a paru intéressant de vous communiquer ci-dessous quelques extraits. Vous avez fait référence à la fin de votre dernière missive à Georges Courteline. Il se trouve qu’en plus de m’être délecté de la lecture de ses oeuvres, j’ai vécu ma prime jeunesse dans un environne- ment qui ne me permettait pas de l’ignorer. J’étais trop jeune pour l’avoir personnellement connu, il décéda en effet en l’an de grâce 1929 un triste (pour lui) 25 juin, soit deux ans avant ma naissance. Par contre, j’ai bien connu son épouse dans les dernières années de sa vie qui se trou- vaient être aussi les premières de la mienne. Madame Courteline, car tout le monde la nom- 2 mait ainsi, bien que le véritable nom de son époux ait été Georges Moinaux, habitait dans un im- meuble cossu proche de celui, plus modeste, où mes parents et moi logions, face au square Cour- teline dans le douzième arrondissement de Paris. Dans les années de guerre, ce devait être en 1942 ou 1943, je me souviens qu’elle aborda sur le trot- toir les deux petits chenapans dont j’étais et qui malgré la bise qui incitait les passants à presser le pas, menaient une partie de billes d’enfer dans le caniveau. Sans doute la vue de nos mains bleuies par le froid l’amena à nous proposer de venir boire un chocolat dans son ap- partement. Chocolat!... Nul de ceux qui blasés, par- courent de nos jours les rayonnages des super- marchés, croulant sous des monceaux de den- rées aussi nombreuses et variées que tentatrices, ne peuvent imaginer combien ce mot était à cette époque chargé de réminiscences d’un pas- sé révolu. Ce fut donc en tenant dans chacune de ses mains habillées de long gants noirs, une menotte des deux gamins de dix ans, qu’elle se dirigea vers l’aris- Courtelineries 3 tocratique portail du 43 avenue de St Mandé. L’intérieur du vaste appartement ne ressemblait en rien à celui pourtant confortable et douil- let où je gîtais d’or- dinaire. Hormis une sorte de sculpture en bronze qui dans l’entrée m’avait un peu effrayé, car quatre serpents enroulés sur une grosse branche d’arbre dardaient aux quatre points cardinaux d’inquiétantes têtes au bout de leur long cou, tout respirait la sérénité. Sans en avoir d’autres souve- nirs précis, j’en garde comme l’impression d’être entré dans une sorte de musée où tout les objets au milieu desquels le grand homme avait vécu étaient désormais figés comme dans l’attente de son retour de voyage. Madame Courteline était la gardienne vigilante de ce temple dédié à l’être cher, qui dans le cadre du grand portrait le représentant dans le salon, posait sur tout cela son souriant regard de philosophe amusé. Mais ce fut dans la grande cuisine un peu sombre, à cause des journaux collés sur les carreaux pour cause de défense passive, que nous attendait dans deux tasses la merveilleuse boisson. En fait, il s’agissait principalement d’eau chaude, 4 dans laquelle la bonne dame avait parcimonieuse- ment dilué deux cuillerées à café d’un petit pot de cacao sucré. Par quel réseau clandestin cette rareté avait-elle abouti chez la vieille dame? Et quel profond al- truisme lui interdisait-il de la réserver à son seul usage? Peut importe, nul ne saura qui, des consomma- teurs ou de la donatrice en retira le plus grand bonheur! Un autre jour, mais j’étais seul cette fois, je fus invité à nouveau à consommer une autre tasse. Je me souviens que la dame me deman- da si je travaillais bien à l’école et ce que faisaient mes parents puis, tout à trac, me demanda si je serais content si elle me racontait une his- toire. Comme j’acquiesçait, elle me récita je ne me souviens plus quoi, sans doute une poésie, mais j’en garde l’impression d’une sorte d’ inexplicable enchantement. Etait-ce que le texte, quel qu’il ait pu être véhi- culait des notions par trop hermétiques pour un jeune enfant, que je n’en ai gardé souvenance? Sans doute, mais par contre, ce visage aux grands yeux sombres, aux expressions perpétuellement changeantes, ces mains soulignant telles la ba- guette d’un chef d’orchestre les modulation de la voix, avaient su captiver l’attention du jeune spec- tateur. Spectateur! ... Tel était bien le rôle que m’avait Courtelineries 5 dévolu la bonne dame et ce ne fut que bien plus tard, lorsque ce souvenir d’enfant ressurgit dans mon cerveau d’adulte que je compris la significa- tion de la scène. Madame Courteline avait été actrice et avait joué sous le nom de Jeanne Brécourt dans une revue dont Georges était coauteur avec un certain Catulle Mendès. Je dois, ici aussi, au risque de faire perdre le fil de l’histoire aux courageux lecteurs, que ce n’est que tout dernière- ment et fortuitement, par le biais de ma passion pour les vieux clichés photographiques, que je fis plus ample connaissance avec ce Catulle Mendès. Mes bien chers et patients amis, si vous le souhai- tez, vous n’en ignorez plus rien, en lisant une autre petite histoire, partiellement autobiographique également, qui fut la première de mes élucubra- tions. Vous la trouverez à la suite de celle-ci sous le 6 titre: Enfin ça y est! Mais de quoi par- lions nous dèjà? Ah! oui. Madame Courteline! Jeanne Brécourt connut donc Georges en jouant en 1892 au Nouveau Théatre: Les Joyeuses com- mères de Paris. Elle ne l’épousera que quinze années plus tard après le décès de la première madame Courteline qui avait, elle aus- si été actrice dans la même pièce. Lors de cette se- conde et malheureu- sement dernière tasse de chocolat chez la bonne dame, je vis en repartant, pendu sur la tête de l’un des effrayants reptiles de l’entrée, une sorte de manteau sombre sur lequel était cousue une étoile jaune. Comme le vêtement n’était pas là à notre arrivée et que j’entendais comme de légers bruits derrière une porte fermée de l’appartement, j’en conclus qu’une autre personne homme ou femme s’y acquittait de quelque tâche ménagère au ser- vice de cette femme âgée. Cette étoile jaune n’a jamais quitté ma mé- Courtelineries 7 moire! Le soir, mon père me questionnant sur mes acti- vités de la journée, je lui raconte surtout la bonne tasse de chocolat mais aussi l’étoile jaune car je savais, comme on nous l’apprenait à l’école com- munale de la rue de Picpus, que le port de cette marque était obligatoire pour des gens peu recom- mandables que l’on appelait les juifs. D’ailleurs notre instituteur monsieur F.... nous avait fait visi- ter quelques semaines auparavant une grande ex- position où était bien expliqué tout ce que ces gens nous faisaient comme mal! A l’entrée de cette belle exposition, il y avait dessiné une grande tête d’un homme avec un gros nez crochu et un mauvais regard, c’était un Juif. C’est vous dire que je n’étais pas du tout content d’avoir vu l’étoile jaune chez la bonne dame. Mais ce qui m’effraya vraiment, ce fut la réaction violente de mon papa qui se ré- suma en une phrase: Si jamais tu reparles de cela à qui que ce soit, tu te souvien- dras longtemps de la fessée que je t’administrerai! Il faut vous dire que mon père avait des opinions diamé- tralement opposées à celles de 8 monsieur F.... , il écoutait donc de préférence la radio de Londres plutôt que Le Poste Parisien. Il avait à cet effet réalisé une sorte de grand cadre en forme de losange sur lequel étaient bobinés un grand nombre de spires de fil de cuivre. Il semblait que seule l’orientation de ce cadre avec une préci- sion extrême permettait de séparer «Les Français parlent aux Français» du puissant brouillage gé- néré par un emetteur allemand. Quelques jours avant la libération de Paris, il sera tué, le 4 juillet 1944, d’une rafale de mitrail- lette par la Milice de Vichy, me conférant dès lors le statut de Pupille de la Nation. Ce n’est encore que bien plus tard que je com- pris la présence de ce vêtement marqué d’infamie, Jeanne Brécourt était née Sarah Bernheim et je suppose que la police de Vichy, soit ignorait ce dé- tail, soit n’osait pas s’attaquer au symbole qu’elle représentait. Quant au pauvre manteau sombre, c’était sans doute celui d’un ou d’une coreligion- naire qu’elle secourait ou qu’elle cachait. Les quelques documents qui illustrent mon texte proviennent tous du site web: www.bookine.net/courtelinebIOGRAPHIE.htm
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