Le concept de mélancolie chez Aristote - article ; n°3 ; vol.41, pg 299-330
33 pages
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Description

Revue d'histoire des sciences - Année 1988 - Volume 41 - Numéro 3 - Pages 299-330
RÉSUMÉ. — C'est une problématique latérale dans l'œuvre d'Aristote. Les conceptions hippocratiques et aristotéliciennes sont dans l'ensemble solidaires. Le concept de mélancolie est lié à la notion de bile noire. La bile noire apparaît responsable de tableaux qui oscillent (en fonction de sa qualité, quantité, localisation) entre l'inhibition la plus massive et l'excitation la plus débridée (ou les deux à la fois comme dans l'épilepsie par exemple). La symptomatologie recouvre donc une pathologie beaucoup plus vaste que ce que nous appelons mélancolie aujourd'hui. Sur le plan éthique, le mélancolique apparaît surtout comme un « excité », une variété d'intempérant par impétuosité. La faculté imaginative domine, mettant entre parenthèses l'intellect en général et la sensibilité propre ; de là semble résulter la folie.
SUMMARY. — This is a side issue in Aristotle's work. The Hippocratic and Aristotelian notions are interdependent on the whole. The concept of Melancholia is bound up with the notion of black bile. Black bile appears to be responsible for tables that fluctuate between the greatest inhibition and the most uncontrolled excitation, or the two at the same time as in epilepsy, for example, according to its quality, quantity and localization. Thus the symptomatology covers a far wider range of pathologies than what is called Melancholia today. On the ethical plane, a melancholic seems above all to be a hothead and Melancholia a variety of intemperance caused by impetuousness. The power of the imagination dominates all other mental faculties, thereby putting, for example, the intellect and sensitivity in general between brackets so to speak. Madness seems to result from this.
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 140
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M FABRICE ROUSSEL
Le concept de mélancolie chez Aristote
In: Revue d'histoire des sciences. 1988, Tome 41 n°3-4. pp. 299-330.
Résumé
RÉSUMÉ. — C'est une problématique latérale dans l'œuvre d'Aristote. Les conceptions hippocratiques et aristotéliciennes sont
dans l'ensemble solidaires. Le concept de mélancolie est lié à la notion de bile noire. La bile noire apparaît responsable de
tableaux qui oscillent (en fonction de sa qualité, quantité, localisation) entre l'inhibition la plus massive et l'excitation la plus
débridée (ou les deux à la fois comme dans l'épilepsie par exemple). La symptomatologie recouvre donc une pathologie
beaucoup plus vaste que ce que nous appelons mélancolie aujourd'hui. Sur le plan éthique, le mélancolique apparaît surtout
comme un « excité », une variété d'intempérant par impétuosité. La faculté imaginative domine, mettant entre parenthèses
l'intellect en général et la sensibilité propre ; de là semble résulter la folie.
Abstract
SUMMARY. — This is a side issue in Aristotle's work. The Hippocratic and Aristotelian notions are interdependent on the whole.
The concept of Melancholia is bound up with the notion of black bile. Black bile appears to be responsible for tables that fluctuate
between the greatest inhibition and the most uncontrolled excitation, or the two at the same time as in epilepsy, for example,
according to its quality, quantity and localization. Thus the symptomatology covers a far wider range of pathologies than what is
called Melancholia today. On the ethical plane, a melancholic seems above all to be a "hothead" and Melancholia a variety of
intemperance caused by impetuousness. The power of the imagination dominates all other mental faculties, thereby putting, for
example, the intellect and sensitivity in general between brackets so to speak. Madness seems to result from this.
Citer ce document / Cite this document :
ROUSSEL FABRICE. Le concept de mélancolie chez Aristote. In: Revue d'histoire des sciences. 1988, Tome 41 n°3-4. pp. 299-
330.
doi : 10.3406/rhs.1988.4099
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhs_0151-4105_1988_num_41_3_4099Le concept de mélancolie
chez Aristote
conceptions responsable Le concept RÉSUMÉ. de hippocratiques — mélancolie tableaux C'est une qui est problématique et oscillent lié aristotéliciennes à la notion (en fonction latérale de bile sont de dans noire. sa qualité, l'œuvre La l'ensemble bile quantité, d'Aristote. noire solidaires. apparaît localiLes
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deux à la fois comme dans l'épilepsie par exemple). La symptomatologie recouvre
donc une pathologie beaucoup plus vaste que ce que nous appelons mélancolie
aujourd'hui. Sur le plan éthique, le mélancolique apparaît surtout comme un
« excité », une variété d'intempérant par impétuosité. La faculté imaginative
domine, mettant entre parenthèses l'intellect en général et la sensibilité propre ;
de là semble résulter la folie.
SUMMAR Y. — This is a side issue in Aristotle's work. The Hippocratic and
Aristotelian notions are interdependent on the whole. The concept of Melancholia is
bound up with the notion of black bile. Black bile appears to be responsable for tables
that fluctuate between the greatest inhibition and the most uncontrolled excitation, or
the two at the same time as in epilepsy, for example, according to its quality, quantity
and localization. Thus the symptomatology covers a far wider range of pathologies
than what is called Melancholia today. On the ethical plane, a melancholic seems
above all to be a "hothead" and Melancholia a variety of intemperance caused by
impetuousness. The power of the imagination dominates all other mental faculties,
thereby putting, for example, the intellect and sensitivity in general between brackets
so to speak. Madness seems to result from this.
Dans l'œuvre d'Aristote qui nous est parvenue et qui est
considérée comme authentique, il ne se trouve que deux citations
de la bile noire et une douzaine concernant le concept de mélanc
olie. C'est bien peu pour approcher la pensée exacte d'un auteur
(pensée dont on n'ignore pas par ailleurs qu'elle était toujours en
mouvement) (x).
(*) Voir à ce sujet P. Aubenque, Le problème de VEtre chez Arislote (2e éd., Paris,
PUF, 1966).
Rev. Hist. Set, 1988, XLI/3-4 300 Fabrice Roussel
Nous interrogerons néanmoins ces rares textes et nous tenterons
d'en dégager quelques hypothèses. Pour les étayer, nous nous
pencherons sur l'ensemble du corpus aristotélicien, en particulier :
quelques fragments (les nos 311, 335, 341 de l'édition Rose), une
citation de la Grande Ethique (1203 b 1) (2) et surtout les Problemata
dont le caractère aristotélicien ne paraît pas remis en cause (8),
bien que le traité ne soit généralement pas considéré comme
d'Aristote lui-même. Ce recueil de questions mérite d'être étudié car
son contenu est d'un grand intérêt quant à notre sujet (cf. Probl. I,
III, IV, XI, XVIII), le Problème XXX d'ailleurs est justement
célèbre dans l'histoire du concept de mélancolie (4).
Une dizaine de passages qui évoquent la bile noire et une
vingtaine qui concernent les mélancoliques, constitueront la base
de notre réflexion (6).
Précisons tout d'abord qu'il n'est pas certain qu'à l'époque
(2) Ouvrage dont le caractère serait d'inspiration stoïcienne et donc postérieur
comme le soutient R. A. Gauthier (éd.), Ethique à Nicomaque, Introduction, traduction
et commentaire, 2e éd. (Louvain, 1970), p. 94 sq.
(8) La question de l'authenticité des œuvres d'Aristote est toujours âprement
débattue, le texte des Problèmes n'a pas fait, à notre connaissance, l'objet de discus
sions passionnées sans doute en raison du caractère secondaire du traité. A part Bar
thélémy Saint-Hilaire, le seul traducteur du texte en français (1891), tous les traduc
teurs (en particulier les éditions anglaises : éd. W. S. Hett, Loeb classical library,
1936 ; éd. D. Ross, trad. E. S. Forster, Oxford, 1927) récusent l'authenticité du texte
mais tous le considèrent comme aristotélicien. J. Pigeaud a publié une traduction et
un commentaire de la lre partie du Problème XXX (953 a 10-955 b 40), malheureu
sement après la rédaction de cet article : Arislote, VHomme de génie et la Mélancolie
(Paris : Petite Bibliothèque Rivages, 1988). L'auteur pourrait en être Théophraste
(cf. p. 54 sq.).
(4) La bibliographie sur ce point est très abondante ; signalons par exemple parmi
les anciens : le Traité ďEsquirol sur la Igpémanie (p. 109) ; et de nos jours : H. Flashar,
Melancholie und Melancholiker (Berlin, 1966) ; H. Tellenbach, La mélancolie (Paris,
PUF, 1979), trad, franc., 29-33 : commentaire précis à partir du précédent ; M. C. Lam-
botte, Esthétique de la mélancolie (Paris : Aubier, 1984), 26-27 ; J. Pigeaud, La maladie
de l'âme (Paris : Les Belles-Lettres, 1981), 261 sq. et op. cit. n. 3, p. 9-71.
(5) Bile noire : (xeXaiva x°^i > Histoire des animaux, III, 2, 511 b 10; Veille-
Sommeil, 457 a 31 ; Fgt 311 (1531 a 14), Athen, VII, 319 e; Fgt 335 (1534 a 36),
Galien, comm. ad I Hippoc. de natur. hom. (XV, p. 25 éd. Kuhn) ; Problèmes I, 12,
860 b 24, I, 19, 861 b 20 ; XXX, 953 a 13-19, 953 b 23, 954 a 15-21, 955 a 14-30-36 ;
[zeXcavicc 7са6т(] Métaphysique, 1020 b 10. Mélancoliques, erase, maladie, chyme : Veille-
sommeil, 457 a 27 ; Des rêves, 461 a 22 ; Divination dans le sommeil, 463 6 17, 464 a 32 ;
Mémoire et réminiscence, 453 a 19. Fgt 341 (1534 b 27), Escolapius, De morbis, p. vin;
Ethique à Nicomaque, 1 150 b 25, 1 152 a 19-28, 1 154 b 10-14 ; Ethique à Eudème, 1248 a 39 ;
Magna Moralia, 1203 b 1 ; Problèmes III, 16, 873 a 32, III, 25, 874 b 18, IV, 20, 878 b 38,
IV, 30, 880 a 30, XI, 38, 903 b 19-20, XVIII, 1, 916 b 5, XVIII, 7, 917 a 21, XXX,
953 a 11-35, 953 b 7-15-25-32, 954 a 6-7-10-12-28, 954 b 1-8-27-29-38, 955 a 31-39,
957 a 32. Le concept de mélancolie chez Aristole 301
d'Aristote, le concept de mélancolie fût réservé à l'usage médical (6).
Dans la Grèce antique, le terme est attesté dans la littérature
dès 414 av. J.-C. (7), ce qui pour R. Joly laisse supposer une vulga
risation suffisante du concept (8). Toutefois, l'hypothèse inverse
d'un concept du sens commun peu à peu intégré à un discours

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