Cacus
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Description

Victor Hugo — Premières publicationsÉpître à Brutus(Extrait d’une traduction inédite de l’Enéide) Jam primum saxis suspensam hanc adspice rupem, etc.(Liv. VIII.)Vois sur ce mont désert ces rochers entassés,Vois ces blocs suspendus, ces débris dispersés ;Là, dans un antre immense, au jour inaccessible,Vivait l’affreux Cacus, noir géant, monstre horrible.A ses portes pendaient des crânes entr’ouverts,Pâles, souillés de sang, et de fange couverts.Ses meurtres, chaque jour, faisaient fumer la terre.De ce monstre hideux Vulcain était le père ;Sa gorge vomissait des tourbillons de feux,Et son énorme masse épouvantait nos yeux.Enfin, comblant nos voeux et vengeant ses victimes,De ce géant farouche un dieu punit les crimes.Heureux et fier vainqueur du triple Géryon,Arriva sur nos bords le fils d’Amphytrion ;Ses taureaux, bondissant dans de vastes prairies,Erraient en liberté sur ces rives fleuries.Cacus, que rien n’étonne et qui veut tout oser,Au courroux du héros craint peu de s’exposer ;Il dérobe à la fois, par d’obscurs artifices,Quatre taureaux fougueux, .quatre ardentes génisses.Tremblant de voir leurs pas déceler ses larcins,De leur superbe queue il saisit les longs crins,Il les traîne en arrière, espérant que peut-êtreLeur trace déguisée abusera leur maître.Mais Hercule s’apprête à quitter ces beaux lieux.Ses taureaux font mugir les bois de leurs adieux,Et fuyant pour jamais ces fertiles campagnes,De leurs regrets plaintifs remplissent les ...

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Victor HugoPremières publications
Épître à Brutus (Extrait d’une traduction inédite de l’Enéide)
Jam primum saxis suspensam hanc adspice rupem, etc. (Liv. VIII.)
Vois sur ce mont désert ces rochers entassés, Vois ces blocs suspendus, ces débris dispersés ; Là, dans un antre immense, au jour inaccessible, Vivait l’affreux Cacus, noir géant, monstre horrible. A ses portes pendaient des crânes entr’ouverts, Pâles, souillés de sang, et de fange couverts. Ses meurtres, chaque jour, faisaient fumer la terre. De ce monstre hideux Vulcain était le père ; Sa gorge vomissait des tourbillons de feux, Et son énorme masse épouvantait nos yeux. Enfin, comblant nos voeux et vengeant ses victimes, De ce géant farouche un dieu punit les crimes. Heureux et fier vainqueur du triple Géryon, Arriva sur nos bords le fils d’Amphytrion ; Ses taureaux, bondissant dans de vastes prairies, Erraient en liberté sur ces rives fleuries. Cacus, que rien n’étonne et qui veut tout oser, Au courroux du héros craint peu de s’exposer ; Il dérobe à la fois, par d’obscurs artifices, Quatre taureaux fougueux, .quatre ardentes génisses. Tremblant de voir leurs pas déceler ses larcins, De leur superbe queue il saisit les longs crins, Il les traîne en arrière, espérant que peut-être Leur trace déguisée abusera leur maître.
Mais Hercule s’apprête à quitter ces beaux lieux. Ses taureaux font mugir les bois de leurs adieux, Et fuyant pour jamais ces fertiles campagnes, De leurs regrets plaintifs remplissent les montagnes. Soudain trompant l’espoir du monstre qui frémit, Du vaste sein de l’antre un des taureaux gémit. Le fiel de la fureur bouillonne au coeur d’Alcide ; Terrible, il court, il prend sa massue homicide : Pour la première fois on vit Cacus trembler, Son front hideux pâlir et ses yeux se troubler. Hercule, au haut du mont, s’élance plein de rage. Cacus l’évite, et fuit vers son antre sauvage. Aussi prompt que le vent, redoutant le trépas, Il s’échappe ; la peur précipite ses pas. Ce noir géant détache une roche pesante Dont Vulcain suspendit la masse menaçante ; Sa main brise le fer, rompt les chaînes d’airain, Et le roc en tombant ferme le souterrain. Mais Hercule le voit : il court, frémit de rage, Et de ses yeux errants cherche au loin un passage. En vain de la caverne il tente d’approcher ; Trois fois son bras robuste ébranle le rocher ; Trois fois, d’un pas rapide, il parcourt la montagne, Et trois fois fatigué s’assied dans la campagne. Un roc, triste séjour des sinistres oiseaux, S’inclinait vers la gauche et menaçait les eaux, Et ses flancs escarpés et sa cime orgueilleuse, Couvraient de l’antre obscur la voûte ténébreuse ; Pour le déraciner rassemblant ses efforts, Le dieu sur son bras droit penche son vaste corps, Pèse, l’ébranle enfin ; la masse qui s’écroule Dans la plaine à grand bruit tombe, bondit et roule. D’un fracas prolongé l’air au loin retentit,
Dans les flots écumants la rive s’engloutit, Le fleuve épouvanté recule... L’antre sombre Par les feux du soleil voit dissiper son ombre. Si la terre brisait ses vieux flancs entr’ouverts, Tels s’offriraient à nous les ténébreux enfers, Le gouffre craint des dieux, et les pâles fantômes, Tremblant de voir le jour dans ces tristes royaumes. Le géant dans son antre, en hurlant de terreur, Loin du jour ennemi se roule avec fureur ; Mais Alcide le presse, et, d’un bras implacable, D’arbres et de rochers à la fois il l’accable. Cacus, n’espérant plus échapper au danger, Par un dernier effort veut du moins se venger. Ô prodige ! sa gorge, en sa caverne obscure, Vomit en tourbillons une fumée impure ; Le monstre, avec ses feux, souffle une affreuse nuit, Et se cache aux regards du dieu qui le poursuit. Parmi des flots épais et de flamme et de soufre, Alcide impatient se plonge au sein du gouffre ; Et malgré son courroux, malgré ses feux vaincus, Dans ses bras vigoureux saisit le noir Cacus, L’étreint, et, fier de voir sa vengeance assouvie, Arrête dans sa gorge et son sang et sa vie.
Le dieu brise le seuil de ce fatal séjour ; Les larcins de Cacus se découvrent au jour. Le peuple, par les pieds, traîne son corps difforme, De ses membres hideux il contemple la forme, Il voit ses yeux sanglants, ses flancs noirs et velus, Et ses feux expirants, qu’il ne redoute plus.
V. D’AUVERNEY
[Le Conservateur littéraire, 29 janvier 1820]
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