L’Innocence d’amour
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Variétés historiques et littéraires, Tome IIL’Innocence d’amour, à Lysandre.1626L’Innocence d’Amour, à Lysandre.M.D.C.XXVI.In-8.Mainte fillette du quartierDit, en parlant de ce mestier,Que tous deux en mesme bricolleNous avons gagné la verolle,Dont ici j’en appelle en Dieu,Car je ne fus jamais en lieuQuy donnast ceste villenie ;Et plustost je lairrois la vieQue d’aller aux endroits quy fontPorter des rubis sur le front ;Plustost eunuque me ferois-je,Et pareil ainsy me rendrois-jeAux hommes sans bas de pourpoint,Que les dames ne cherchent point.Si je voy quelque jeune filleQuy soit agreable et gentille,Et quy monstre je ne sçay quoyPour mettre le cœur en emoy,Pourveu qu’elle ne soit farouche,Incontinent elle me touche,Et ne dis pas que mon desirNe soit d’en faire mon plaisir.Mais une garce de louage,1Une fille de garouage ,Si vrayment je la regardois,Soudain je m’en confesserois ;Et si je l’avois desirée,Ou tant seullement admirée,Je voudrais sur les mesmes lieux,M’arracher le cœur et les yeux.Tel amour est digne de blasme,Et son feu n’est que pour une ameOu sans merite ou sans honneur ;Mais Lysandre, un homme de cœur,Un amant digne de conqueste,Ne dance pas à telle feste,Et n’ayme, comme les pourceaux,La fange au lieu de claires eaux.Voyant toutefois que nous sommes(Chose commune à tous les hommes)Presque en temps mesme indisposez ;Et que n’estant des moinz prisezEntre ceux qu’amour authorise,Ensemble, à la rüe, à l’eglise ...

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Variétés historiques et littéraires, Tome II L’Innocence d’amour, à Lysandre. 1626
L’Innocence d’Amour, à Lysandre. M.D.C.XXVI. In-8.
Mainte fillette du quartier Dit, en parlant de ce mestier, Que tous deux en mesme bricolle Nous avons gagné la verolle, Dont ici j’en appelle en Dieu, Car je ne fus jamais en lieu Quy donnast ceste villenie ; Et plustost je lairrois la vie Que d’aller aux endroits quy font Porter des rubis sur le front ; Plustost eunuque me ferois-je, Et pareil ainsy me rendrois-je Aux hommes sans bas de pourpoint, Que les dames ne cherchent point. Si je voy quelque jeune fille Quy soit agreable et gentille, Et quy monstre je ne sçay quoy Pour mettre le cœur en emoy, Pourveu qu’elle ne soit farouche, Incontinent elle me touche, Et ne dis pas que mon desir Ne soit d’en faire mon plaisir. Mais une garce de louage, 1 Une fille de garouage, Si vrayment je la regardois, Soudain je m’en confesserois ; Et si je l’avois desirée, Ou tant seullement admirée, Je voudrais sur les mesmes lieux, M’arracher le cœur et les yeux. Tel amour est digne de blasme, Et son feu n’est que pour une ame Ou sans merite ou sans honneur ; Mais Lysandre, un homme de cœur, Un amant digne de conqueste, Ne dance pas à telle feste, Et n’ayme, comme les pourceaux, La fange au lieu de claires eaux. Voyant toutefois que nous sommes (Chose commune à tous les hommes) Presque en temps mesme indisposez ; Et que n’estant des moinz prisez Entre ceux qu’amour authorise, Ensemble, à la rüe, à l’eglise, On nous a veu, le plus souvent, Comme deux frères de couvent, Ces petites mal adviseez (Sans dire le mot de ruseez) Nous jugent de cœur et de voix Tous deux assailliz à la fois
Du mal que je hay davantage Qu’un vieux marmot, un jeune page Et qu’un homme de Charenton, 2 Les sermons du père Cotton . Mais voyez quelle medisance ! On a beau vivre en innocence, L’on aura plus de mauvais bruicts Que de galloper toutes nuicts 3 Les manteaux de soye et de laine. Ô saison de misère plaine ! Que les choses sont mal en poinct ! 4 L’Antechrist ne viendra-t-il point? Un mal de teste, une saignée Quy m’a la jambe scratignée, Un feu pour mourir et brusler, Est-ce le mal quy faict peler Et quy faict, sortant de la couche, 5 Parler du nezet de la bouche ? Quant à moy, je dy sainement, Et le public asseurement, Que la plus chaste et la plus fille, Et dont moins la robbe fretille De celles quy m’ont blazonné, Telle verolle m’a donné, Catherine, Jeane ou Michelle, S’il faut que verolle on appelle Ce quy m’a tenu plus d’un mois, Depuis le voyage de Blois, Et dans le lict et dans la chambre ; Où toy, gaillard de chaque membre, Desirant me donner secours, Tu m’as visité quelques jours, Avant que ta santé première Eust suivy la mesme carrière. Mais pourquoy m’excusé-je ainsy, Puisque les belles n’ont soucy, La plupart, que d’estre cheries De hauteurs de bordelleries, Quy, presque en toutes les saisons, Vont muant comme des oysons, N’ayant pour sauce et pour bouteille Que pruneaux et salsepareille ? Puis que ceux dont l’emotion Ne cherche par affection Que des genres de pucelage, Affin d’esviter le naufrage, Sont moins doux à leurs appetitz Que des villageois apprentiz, De quy la main noire et terreuse Badine près leur amoureuse, Tournant et grattant, les yeux bas, Leurs chapeaux ou leurs bonnets gras ? Estant donc si plain de merite, Ces nymphes de prix et d’elite, Me voyant reparoistre un jour, Me tesmoigneront plus d’amour. Ainsy discours-je, ô Lysandre ! Afin que l’on me sçache entendre Et que les filles du quartier, En devisant de ce mestier, N’accusent plus mon innocence Et l’honneur de ta conscience, Dont tu sçauras de bonne foy Te laver aussy bien que moy, Laissant à des gens sans pratique, Sans honneur et sans theorique, Ce mal volontaire quy prent Aux endroicts où chacun se rend, Et non pas aux lieux de recherche
Où l’on defend mieux une bresche.
1. Lieu de débauche où l’on n’alloit que la nuit, en cachette, comme un garou. La Fontaine s’est encore servi de ce mot :
. . . . . . . Jupiterétoit en garrouage De quoi Junon étoit en grande rage.
2. Le père Cotton, alors en polémique ouverte avec les protestants de Charenton. Le plus célèbre de leurs ministres, P. Du Moulin, alors en fuite, étoit soupçonné d’avoir fait le fameux livrel’Anti-Cottoncontre ce confesseur du roi.
3. Les grands seigneurs, Gaston d’Orléans le premier, se faisoient un jeu de ces voleries sur le Pont-Neuf. Sandras de Courtilz, dans sesMémoires du comte de Rochefort, p. 152, nous l’avoit appris. Sorel nous le confirme par un passage duFrancion, 1603, in-12, p. 73.
4. C’étoit une des grandes appréhensions de ce temps-là. Plusieurs pièces, dont l’une est citée par L’Estoille (mardi 8 décembre 1607), le prouvent assez. Nos volumes suivants en contiendront quelques unes.
5. Le Jodelet de l’hôtel de Bourgogne devoit à un pareil accident l’un des charmes de sa diction. « Jodelet, dit Tallemant, parle du nez pour avoir été mal pansé de la v....., et cela lui donne de la grâce. » (Édit. in-12, t. 10, p. 50.)
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