Jean-Baptiste Rousseau—Cantates
Le Triomphe de l’Amour
Fillesdu Dieu de l’univers, Muses, que je me plais dans vos douces retraites ! Que ces rivages frais, que ces bois toujours verts Sont propres à charmer les âmes inquiètes ! Quelcœur n’oublîrait ses tourments Au murmure flatteur de cette onde tranquille ? Qui pourrait résister aux doux ravissements Qu’excitevotre voix fertile ? Non,ce n’est qu’en ces lieux charmants Que le parfait bonheur a choisi son asile.
Heureuxqui de vos doux plaisirs Goûtela douceur toujours pure ! Iltriomphe des vains désirs, Etn’obéit qu’à la nature.
Ilpartage avec les héros Lagloire qui les environne ; Etle puissant dieu de Délos D’unmême laurier les couronne.
Heureuxqui de vos doux plaisirs Goûtela douceur toujours pure ! Iltriomphe des vains désirs, Etn’obéit qu’à la nature.
Mais que vois-je, grands dieux ! quels magiques efforts Changentla face de ces bords ! Quelles danses ! quels jeux ! Quels concerts d’allégresse ! Les Grâces, les Plaisirs, les Ris et la Jeunesse, Serassemblent de toutes parts. Quel songe me transporte au-dessus du tonnerre ? Jene reconnais point la terre Au spectacle enchanteur qui frappe mes regards.
Est-cela cour suprême Dusouverain des dieux ? OuVénus elle-même Descend-elledes cieux ?
Lescompagnes de Flore Parfumentces coteaux, Unenouvelle Aurore Semblesortir des eaux ; Etl’Olympe se dore Deses feux les plus beaux.
Est-cela cour suprême Dusouverain des dieux ? OuVénus elle-même Descend-elledes cieux ?
Nymphes, quel est ce dieu qui reçoit votre hommage ? Pourquoicet arc et ce bandeau ? Quel charme en le voyant, quel prodige nouveau De mes sens interdits me dérobe l’usage ? Il s’approche, il me tend une innocente main : Venez,cher tyran de mon âme ; Venez,je vous fuirais en vain ; Et je vous reconnais à ces traits pleins de flamme Quevous allumez dans mon sein.
Adieu, Muses, adieu : je renonce à l’envie