Au Bonheur des Dames
422 pages
Français

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Description

Au Bonheur des Dames est un roman d’Émile Zola publié en 1883, le onzième volume de la suite romanesque les Rougon-Macquart. Denise Baudu se fait embaucher au Bonheur des Dames, découvre le monde cruel des petites vendeuses, la précarité de l'emploi et assiste au développement de ce magasin et à la mort des anciens petits commerces. Extrait : Il avait levé son porte-plume, il le brandissait, et il le pointa dans le vide, comme s'il eût voulu percer d'un couteau un cœur invisible. L'associé reprit sa marche, s'inclinant comme toujours devant la supériorité du patron, dont le génie plein de trous le déconcertait pourtant. Lui, si net, si logique, sans passion, sans chute possible, en était encore à comprendre le côté fille du succès, Paris se donnant dans un baiser au plus hardi. Un silence régna. On n'entendait que la plume de Mouret. Puis, sur des questions brèves posées par lui, Bourdoncle fournit des renseignements au sujet de la grande mise en vente des nouveautés d'hiver, qui devait avoir lieu le lundi suivant. C'était une très grosse affaire, la maison y jouait sa fortune, car les bruits du quartier avaient un fond de vérité, Mouret se jetait en poète dans la spéculation, avec un tel faste, un besoin tel du colossal, que tout semblait devoir craquer sous lui.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 231
EAN13 9782824702353
Langue Français

Extrait

ÉMI LE ZOLA
A U BON H EU R DES
D AMES
BI BEBO O KÉMI LE ZOLA
A U BON H EU R DES
D AMES
1883
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0235-3
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.CHAP I T RE I
    à pie d de la g ar e Saint-Lazar e , où un train de
Cherb our g l’avait débar qué e av e c ses deux frèr es, après une nuitD p assé e sur la dur e banquee d’un wag on de tr oisième classe . Elle
tenait p ar la main Pép é , et Je an la suivait, tous les tr ois brisés du v o yag e ,
effarés et p erdus, au milieu du vaste Paris, le nez le vé sur les maisons,
demandant à chaque car r efour la r ue de la Micho dièr e , dans laquelle leur
oncle Baudu demeurait. Mais, comme elle déb ouchait enfin sur la place
Gaillon, la jeune fille s’ar rêta net de sur prise .
―  Oh  ! dit-elle , r eg arde un p eu, Je an  !
Et ils r estèr ent plantés, ser rés les uns contr e les autr es, tout en noir ,
ache vant les vieux vêtements du deuil de leur pèr e . Elle , chétiv e p our
ses vingt ans, l’air p auv r e , p ortait un lég er p aquet  ; tandis que , de l’autr e
côté , le p etit frèr e , âg é de cinq ans, se p endait à son bras, et que , der rièr e
son ép aule , le grand frèr e , dont les seize ans sup erb es florissaient, était
deb out, les mains ballantes.
1A u Bonheur des D ames Chapitr e I
― Ah bien  ! r eprit-elle après un silence , en v oilà un mag asin  !
C’était, à l’ encoignur e de la r ue de la Micho dièr e et de la r ue Neuv
eSaint- A ugustin, un mag asin de nouv e autés dont les étalag es é clataient
en notes viv es, dans la douce et pâle jour né e d’ o ctobr e . Huit heur es
sonnaient à Saint-Ro ch, il n’y avait sur les tr ooir s que le Paris matinal, les
emplo yés filant à leur s bur e aux et les ménagèr es courant les b outiques.
D e vant la p orte , deux commis, montés sur une é chelle double , finissaient
de p endr e des lainag es, tandis que , dans une vitrine de la r ue Neuv
e-SaintA ugustin, un autr e commis, ag enouillé et le dos tour né , plissait
délicatement une piè ce de soie bleue . Le mag asin, vide encor e de clientes, et où
le p er sonnel ar rivait à p eine , b ourdonnait à l’intérieur comme une r uche
qui s’é v eille .
― Fichtr e  ! dit Je an. Ça enfonce V alognes. . . Le tien n’était p as si b e au.
D enise ho cha la tête . Elle avait p assé deux ans là-bas, chez Cor naille ,
le pr emier mar chand de nouv e autés de la ville  ; et ce mag asin r encontré
br usquement, cee maison énor me p our elle , lui g onflait le cœur , la r
etenait, émue , intér essé e , oublieuse du r este . D ans le p an coup é donnant sur
la place Gaillon, la haute p orte , toute en glace , montait jusqu’à l’ entr esol,
au milieu d’une complication d’ or nements, char g és de dor ur es. D eux
figur es allég oriques, deux femmes riantes, la g or g e nue et r env er sé e , dér
oulaient l’ enseigne  : Au Bonheur des Dames . Puis, les vitrines s’ enfonçaient,
long e aient la r ue de la Micho dièr e et la r ue Neuv e-Saint- A ugustin, où
elles o ccup aient, outr e la maison d’angle , quatr e autr es maisons, deux à
g auche , deux à dr oite , acheté es et aménag é es ré cemment. C’était un dé v
elopp ement qui lui semblait sans fin, dans la fuite de la p er sp e ctiv e , av e c les
étalag es du r ez-de-chaussé e et les glaces sans tain de l’ entr esol, der rièr e
lesquelles on v o yait toute la vie intérieur e des comptoir s. En haut, une
demoiselle , habillé e de soie , taillait un cray on, p endant que , près d’ elle ,
deux autr es dépliaient des mante aux de v elour s.
― A u Bonheur des D ames, lut Je an av e c son rir e tendr e de b el
adolescent, qui avait eu déjà une histoir e de femme à V alognes. Hein  ? c’ est
g entil, c’ est ça qui doit fair e courir le monde  !
Mais D enise demeurait absorbé e , de vant l’étalag e de la p orte centrale .
Il y avait là , au plein air de la r ue , sur le tr ooir même , un éb oulement
de mar chandises à b on mar ché , la tentation de la p orte , les o ccasions qui
2A u Bonheur des D ames Chapitr e I
ar rêtaient les clientes au p assag e . Cela p artait de haut, des piè ces de
lainag e et de drap erie , mérinos, che vioes, molletons, tombaient de l’ entr
esol, floantes comme des drap e aux, et dont les tons neutr es, gris ardoise ,
bleu marine , v ert oliv e , étaient coup és p ar les p ancartes blanches des
étiquees. A côté , encadrant le seuil, p endaient ég alement des lanièr es de
four r ur e , des bandes étr oites p our g ar nitur es de r ob e , la cendr e fine des
dos de p etit-gris, la neig e pur e des v entr es de cy gne , les p oils de lapin de
la fausse her mine et de la fausse martr e . Puis, en bas, dans des casier s,
sur des tables, au milieu d’un empilement de coup ons, déb ordaient des
articles de b onneterie v endus p our rien, g ants et fichus de laine tricotés,
cap elines, gilets, tout un étalag e d’hiv er , aux couleur s bariolé es, chiné es,
rayé es, av e c des taches saignantes de r oug e . D enise vit une tartanelle à
quarante-cinq centimes, des bandes de vison d’ Amérique à un franc, et
des mitaines à cinq sous. C’était un déballag e g é ant de foir e , le mag asin
semblait cr e v er et jeter son tr op-plein à la r ue .
L’ oncle Baudu était oublié . Pép é lui-même , qui ne lâchait p as la main
de sa sœur , ouv rait des y eux énor mes. Une v oitur e les for ça tous tr ois à
quier le milieu de la place  ; et, machinalement, ils prir ent la r ue Neuv
eSaint- A ugustin, ils suivir ent les vitrines, s’ar rêtant de nouv e au de vant
chaque étalag e . D’ab ord, ils fur ent sé duits p ar un ar rang ement
compliqué  : en haut, des p arapluies, p osés obliquement, semblaient mer e un
toit de cabane r ustique  ; dessous, des bas de soie , p endus à des tringles,
montraient des pr ofils ar r ondis de mollets, les uns semés de b ouquets de
r oses, les autr es de toutes nuances, les noir s à jour , les r oug es à coins br
odés, les chair s dont le grain satiné avait la douceur d’une p e au de blonde  ;
enfin, sur le drap de l’étagèr e , des g ants étaient jetés sy métriquement,
av e c leur s doigts allong és, leur p aume étr oite de vier g e b y zantine , cee
grâce raidie et comme adolescente des chiffons de femme qui n’ ont p as
été p ortés. Mais la der nièr e vitrine surtout les r etint. Une e xp osition de
soies, de satins et de v elour s, y ép anouissait, dans une g amme souple et
vibrante , les tons les plus délicats des fleur s  : au sommet, les v elour s, d’un
noir pr ofond, d’un blanc de lait caillé  ; plus bas, les satins, les r oses, les
bleus, aux cassur es viv es, se dé colorant en pâleur s d’une tendr esse
infinie  ; plus bas encor e , les soies, toute l’é char p e de l’ar c-en-ciel, des piè ces
r etr oussé es en co ques, plissé es comme autour d’une taille qui se cambr e ,
3A u Bonheur des D ames Chapitr e I
de v enues vivantes sous les doigts savants des commis  ; et, entr e chaque
motif, entr e chaque phrase coloré e de l’étalag e , courait un accomp
agnement discr et, un lég er cordon b ouillonné de foulard crème . C’était là , aux
deux b outs, que se tr ouvaient, en piles colossales, les deux soies dont

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