FORANKAOR
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Description

Orin Gil devient Chevalier par hasard, mais aussi par sa volonté. Il devra effectuer une mission quasi-impossible : retrouver l'assassin de son roi, qui peut être n'importe qui et n'importe où. Cette quête lui fera découvrir son propre monde qu'il connait si peu, mais lui fera aussi avoir deux amis: son écuyer Pagelan, et Fen, sa servante qui deviendra son amante. Son petit groupe sera témoin (et subira) de beaucoup de turpitudes, d'injustices, de souffrances, de haines et de peur. Ces maux seront de formes multiples: les belliqueux Orcs, les très ambitieux Hauts-Prêtres, les redoutables Voleurs Thorils, et les terribles Monstres. Mais aussi, cette petite équipe allant d'aventures en aventures, par obligation ou par choix, connaîtra la gloire, et surtout, l'amour... Orin Gil verra enfin l'étendue, la complexité et la laideur de son monde, ainsi que l'espoir de construire un monde meilleur.

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Publié le 17 mars 2019
Nombre de lectures 4
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

FORANKAOR Les guerres sans fin Par Stéphane Bonard I La halte après six heures de marche forcée fut très appréciée par Orin Gil, qui, en tant qu’écuyer, ne pouvait voyager à cheval, comme son maître, le chevalier Irgond Ylsat, qui semblait ne fairequ’unavec son cheval tant il ne le quittait point. Le train du Roi Kelset avait été attaqué deux jours auparavant par les Loupauars, alors qu’il cheminait tranquillement, comme cela se faisait chaque année, de Bril (grande ville du Sud, flamboyante, réputée pour son marché d’esclaves) versGarlistone (autre grande ville, du Nord, cette fois, réputée, elle, pour la qualité de ses armes et armures). Cette attaque, très inhabituelle, surtout au printemps, avait surpris et paniqué tout le monde. Ce voyage voulut par le roi était une occasion de festoyer durant un long et doux chemin pour la simple raison de voir comment allait sa ville; savoir si elle était bien entretenue (concernant les murs d’enceinte, principalement), si elle était bien gérer (cette ville, tout comme Bril où il habitait, se devait de rapporter de l’argent au royaume de Centar, beaucoup d’argent… il y tenait), et, pour le bien-être de ses sujets, si la justiceétait correctement appliquée, sans trop de corruption dans l’air. Bref, c’était un voyage de routine, qui emmenait une bonne partie de la cour du roi, et qui devait être un bon moment pour tous, alors que le roi, pour sa grande joie, faisait justice si besoin était, aux haltes, et donnait sa bénédiction aux villages et villes mineurs qui servaient de relais : le voyage étant fort long, car près de quarante lieues à parcourir. Le train était très important, composé de quarante soldats, six chevaliers, neuf écuyers, près de soixante domestiques et quinze nobles, dont parmi ceux-ci, un duc, trois comtes, huit barons et trois seigneurs sans titre spécifique.
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Tout ce monde avançait lentement et en file sur un grand chemin, qui coupait en deux une immense forêt, quand une attaque sans crier gare se produisit à l’arrière du train, ce qui était bien joué tactiquement, car la troupe en armes était devant…Près de la moitié des domestiques moururent par les crocs de loups colossaux, bipèdes, aux griffes et crocs redoutables. Il y eut quelques soldats à l’arrière,mais si peu qu’ils furent balayés en quelques instants, totalement surpris d’ailleurs par la soudaineté de l’attaque, et surtout l’extrême hardiesse de celle-ci. Finalement, les chevaliers, à cheval, purent rapidement se regrouper pour assaillir ces créatures. Les chevaliers crièrent tous : « Sus aux Loupauars ! Sus ! ». Les écuyers et les soldats, à pieds, finirent eux aussi par se ressaisirent et attaquèrent l’ennemi. Cependant, tout cela se fit trop lentement et beaucoup périr, principalement les domestiques, sans défense, sans armes et protections. Le roi apprit plus tard, choqué par l’évènement, qu’il fut attaqué par environ trente Loupauars (tous périrent dans la bataille). Heureusement, pour l’occasion, les meilleurs chevaliers du royaume avaient été là. Tous convinrent qu’un tel assaut ne s’était jamais vu ni ouï, et que trente Loupauars pour attaquer était un pur suicide, ce qui rendait les choses encore plus mystérieuses pour eux. Le Duc Eldons’était exclamé devant tous pour dire que les Loupauars, bien que belliqueux, ne lesont que si l’on approche de trop près leur territoire, et que cela ne leur ressemble pas. La cour itinérante convint que cela était terrible et qu’il devaiten savoir plus. Par malheur, il n’y eut aucunloupauar survivant: nul n’ayant songé à en garder un vivant pour une éventuelle mise à la question. Il fut donc décidé de continuer sans se retourner, mais vélocement, et avec prudence, pour enfin, une fois sur place à Garlistone, remplacer les domestiques perdus : cette affaire devait être oubliée. Orin, qui brossait « son» cheval, sut ce qu’il advint quand «son » chevalier vint lui apprendre les nouvelles.  Orin, si tu avais été avec nous avec tous ces grands nobles, tu aurais, je pense, été aussi ébaubi que moi : ces hautes personnes ont en effet décidé qu’il valaitmieux oublier cette attaque, laquelle, après tout, fut de petite conséquence, car seuls des domestiques et quelques soldats périrent ; aussi, bien que cette attaque soit étonnante, le roi a décidé qu’il n’y avait pas là matière à tragédie.Qu’en dis-tu ? dit Irgond avec un petit sourire malicieux. J’en dis que ce roi est comme toujours un superficiel doublé d’un pusillanime. Il est ainsi. Il n’a pas mauvaises tripes, mais pour lui, rien ni
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personne ne devrait avoir l’audace de déranger son univers feutré, doux et joyeux. Je vois à ta mine renfrognée et à tes paroles, que je dois admettre comme véridiques, que tu ne l’aimes vraiment pas ! Moi non plus comme tu le sais, mais lui, au moins, contrairement à son prédécesseur, n’est point cruel ni méchant, ce qui est pour moi déjà gros avantage. On évite ce travers majeur, dû reconnaître Orin, mais Certes. comme àcontrecœur. Cette attaque m’intrigue, mais, finalement, je pense que cela devait arriver un jour ou l’autre. Ce qui me navre l’âmec’est qu’ils ont déjà oublié toutes les turpitudes que nous, les Humains, avons infligées à ce peuple des forêts, qui n’ont fait que se défendre de l’invasion de leur propre territoire… Oh! Il est vrai qu’ensuite ils n’ont eu de cesse de nous chercher partout, traquant tout Humain : leur revanche nous est amèreJ’ai bien consciencede tout cela. Leur irresponsabilité à voyager si peu prudemment à coûter la vie à de nombreuses personnesaujourd’hui, mais s’en soucient-ils ? Que nenni ! La voix de l’écuyer avait porté plus loin qu’il ne l’eut voulu, et immédiatement, le chevalier se retourna de tous côtés pour voir si quelqu’un avait entendu, ce qui fût le cas, car un autre écuyer qui s’occupait lui aussi de son cheval, les regardait avec un sourire de connivence, comme s’il approuvait leur propos. En tous les cas, il détourna son regard lentement et revint à sa tâche. Orin ! Par ma barbe ! Soit moins beuglant ! chuchota avec quelque anxiété le chevalier. Si une personne mal intentionnée nous entendait et répétait nos propos à un de ces nobliaux, nous serions moult moqués, pour dire le moins !  Pardonnez-moi messire, mais tout cela me répugne, et j’ai moins d’aisance que vous à calmer mes nerfs.Bon, vérifie ses fers et veille à ce qu’il soit bien harnaché, car je pense que le reste du chemin ne sera pas des plus reposant. Orin hocha la tête et continua son travail, quand soudain, l’écuyer qui les avait entendut, apparut juste derrière lui : il fut surpris et eut un petit sursaut.  Mes excuses de vous avoir fait sursauter, mais je voulais m’approcher discrètement pour ne pas être remarqué. Mon maître s’en est allé prendre un bain dans une rivière qui est proche, alors j’en aiprofité. Ce confrère, se dit Orin, avait la mine honnête, il était jeune, peut-être dix-sept ou dix-huit ans, et un regard où pétillait l’intelligence, ce qui était assez rare. Son habit ne différait par contre en rien des autres écuyers : un pantalon de tissu marron tout simple, des bottes et une chemise tout aussi simple. Bien sûr, comme tout bon écuyer qui se
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respecte, une longue dague était coincée dans sa ceinture de cuir. Aussi, il semblait lui aussi se comporter comme un espion : Orin découvrit vite pourquoi. Je partage vos sentiments et j’ai d’autresamis à notre semblance… J’ai remarquéque ton maître et toi êtesbien proches… C’est une grande chance que tu as là; le mien à l’esprit gourd et le savoir d’une huitre, alors que moi je sais lire et écrire. Lui ne jure que par la guerre, ses armes et son armure, et les ordresqu’il reçoit sont pour lui paroles divines à suivre sans restriction.  Commentquelqu’un d’aussi instruit que toi a pu devenir écuyer d’un tel rustre?  Mon père était prêtre du Dieu du Chaos à Goma, un village près de Bril, d’où mon enseignement. Mes parents moururent lors d’une attaque avec les Groguandsen représailles d’une attaque de chevaliers dans leur montagne pour récupérer le fameux minerai junium. Lors de cette attaque, des chevaliers étaient restés en garnison non loin du village, car celui-ci servait de point de ravitaillement: ils virent l’attaque et assaillirent les assaillants. Nous gagnâmes de justesse, et ce, grâce aux courageux villageois qui se battirent aussi, avec leurs moyens, en soutient à la chevalerie. Je ne fus pas en reste… J’avais seize ans quand cela arriva, et armé d’un candélabre d’argent à une branche, je moulinais tant que je pouvais, la colère me portant, car mon père, un des premiers qui s’enquit du trouble survenant, mourut très vite d’un coup d’épée;je l’ai vengé… Un des chevaliers survivants, m’ayant vu en combattant forcené, sans peur,et surtout faisant des victimes chez l’ennemi, vint à ma rescousse, me sauva (car oui, je serai mort, tout de même, sans lui), et impressionné par mon exploit et ma bravoure, me fit immédiatement son écuyer. Voilà mon histoire. C’est un exploit, en effet, et tu mérites amplement ton titre d’écuyer. Donc le sauveur fut ce chevalier mal dégrossi…En effet. Et malgré ses défauts, il est assez bon avec moi, alors je le sers bien, enlui lisant même les lettres qu’il reçoit où sont écrits ses ordres! Bien sûr, il m’a faitjurer de ne rien dire ; aussi, bien malgré lui, il me donne un surcroit de valeur à ses yeux, et il en a que trop conscience : je lui suis très précieux, finit l’écuyer en un sourire entendu.  Et ta mère ? Que faisait-elle ? dit Orin, candidement, tout en brossant vaguement son cheval. Etait-elle au village ? La mine souriante du « héros » devint soudainement funèbre et se ferma soudainement. Je n’en veux point parler.
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 Bien, bien, ajouta précipitamment Orin qui subodora immédiatement une horreur survenue à celle-ci. Au fait, comment te nommes-tu? Moi, c’est Orin.Pagelan. Et mon maître se nomme Bartagas, dit le Sourd, non qu’il soit réellement sourd, mais parcequ’il tape comme un sourd… Et toi, c’est quoi ton histoire? dit Pagelan qui redevint tout aussi soudainement, assez gai et souriant. Mon maître, Irgond, passa un jour chez moi (j’habitais la campagne avec mes parents paysans dans un hameau) pour réclamer de l’aide: son cheval était un peu blessé, mais lui, l’était beaucoup, et semblait épuisé ; à peine pouvait-il parler. Mon père et ma mère le soignèrent pendant une semaine, ainsi que son fidèle cheval. Il en fut moult reconnaissant. Aussi, il apprécia grandement mes parents, ainsi que moi-même (qui moccupais la semaine durant de son cheval, comme à une belle garce en qui je me serais amouraché). J’étais alors adolescent et mon seul rêve et but dans la vie était de partir de ce hameau pour faire mes preuves en tant que chevalier, métier que j’avais toujours envié. Je m’en ouvris à ce chevalier émérite qui avait déjà connu la guerre et obtenu quelques gloires grâce à celle-ci ; il me conta beaucoup sur les guerres. Par respect et gratitude pour mes parents, parce qu’il m’aimaitet parce que je lui avais bien, dévoilé mon rêve, il me fit écuyer ; échelon indispensable pour prétendre à la chevalerie. Tu imagines bien que mon cœur fit un bond, ainsi que celui de mes parents (qui vivaient assez pauvrement), infiniment heureux pour moi, car cette destinée était inespérée. Je suis donc parti avec Irgond en promettant à mes parents que je les visiterai quand je le pourrais. S’ensuivit un long apprentissage du maniement des armes, des lettres (qu’Amond, Dieu du Savoir, bénisse mon maître pour cela !), et des codes chevaleresques.Depuis lors, j’ai déjà bataillé deux fois avec mon maître, et avec succès, je dois le dire, finit Orin, avec un petit sourire trahissant une certaine fierté.  Eh bien ! Même si nos histoires diffèrent grandement quant à nos origines dans la chevalerie, nous avons un point commun : elles sont liées au hasard de la vie, et non comme le voudrait la normalité. Certes, répondit laconiquement Orin. Nous nous reverrons, Orin, je dois maintenant fourbir les armes. Pagelan s’éloigna, laissant Orin bien pensif sur tout ce qu’ils s’étaient dévoilés, et il s’aperçut, avec le recul, qu’ils avaient raconté tout naturellement des pans entiers de leur vie privée, alors qu’ils se voyaient pour la première fois. Bien sûr, le fait qu’ils fassent le même métier dans le même train, les rapprochaient, assurément, mais à ce point… Il finit par conclure qu’il aimaitbien ce Pagelan, qui avait beaucoup souffert, contrairement à lui.
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II La rencontre du Roi Kelset et du maire de Garlistone, Brolian, fit beaucoup jaser, car sous les sourires de circonstances et les paroles hypocrites, tous savaient qu’ils se détestaient. Pourquoi? Pour plusieurs raisons. Le maire était un homme à la forte personnalité, très indépendant d’esprit, droit, fort intelligent et cultivé; le roi, lui, était quelque peu lunatique, peu intelligent, peu cultivé (il savait tout juste lire et écrire), une personnalité molle, bien que peu influencé par ses conseillers, car il était tout de même fier et voulait paraître tel un roi digne de ce nom. Ensuite, Bril, bien que riche, représentait l’insouciance, la joie de vivre, et les inégalités sociales les plus flagrantes, la grande richesse côtoyant la grande pauvreté. La meilleure image et celle du quartier riche (composé de l’aristocratie et de la bourgeoisie), fortifié, représentant à peine un dixième de Bril, et de l’autre, le reste de la population, soient les marchands (certes, quelques-uns, riches eux aussi, mais se mêlant constamment dans la populace), les esclaves, les soldats (nombreux, n’obéissant qu’à l’autorité royale, etpresque seuls représentants de la population « moyenne», c’est-à-dire ni riche, ni pauvre), les artisans, et le reste de la ville. Bref, la majorité de Bril était habitée par des gens pas loin d’être pauvres, ce qui, pourtant, ne l’empêchait pas de faire maintes fêtes et de vivre assez joyeusement (incluant certains esclaves). Tout cela devait être comparé à Garlistone, l’éternelle rivale, l’opposée de Bril. En effet, Garlistone était rarement en effervescence, toujours sous contrôle, bien que la ville ait pourtant bien moins de soldats que Bril, et pour cause ! Elle avait une population sans esclave (décision du maire pour éviter une surpopulation, donc le désordre). Aussi, bien que l’on puissepresque tout à Garlistone, il y avait infiniment acheter moins de variétés de denrées, d’objets exotiques et d’attractions avec jongleurs, musiciens et artistes. De plus, Garlistones’était spécialisée dans les armes et protections, donc la majorité des marchands, source économique très importante, ne vendaient que cela, ce qui amenait une homogénéité de la population marchande, sérieuse et travailleuse ; sans compter les nombreux forgerons (quelques-uns étaient mêmes fameux), dont Bril manquait cruellement. Cela s’arrêterait là que le roi et le maire ne se détesteraient pas ; il y aurait une petite animosité dû à beaucoup de divergences entre deux villes à l’image de leur souverain ; le roi aurait rongé son frein devant ce maire trop indépendant et autoritaire, mais qui néanmoins donnait à son royaume un impôt important, jamais fluctuant, et Garlistone pouvait s’enorgueillir de ne jamais demander de l’argent ou de l’aide au roi pour un problème financier, ou de guerre, ou pourl’ordre public. Mais, car il y
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avait un grand « mais », le maire Broliann’avaitcessé d’êtreréélu par le Conseil de la ville, empêchant le roi d’avoir enfin un maire plus obéissant, plus accommodant, et surtout moins indépendant. Tout cela, principalement, à cause del’Arène…L’Arène naquit grâce au maire, qui le finançat, mais aussi et surtout grâce à son associé, Sirlon, un ancien guerrier reconvertit en marchand d’armes, qui eut l’idée brillante de créer un championnat annuel qui réunirait tous les guerriers de tous horizons, et toutes races confondues, voulant combattre en duel,moyennant une pièce d’or pour le droit de participer. Ils se combattaient jusqu’à ce que le meilleur, seul, reste. Le combat allait jusqu’à la mort, sauf si uncombattant indiquait qu’il cédait; le gagnant final remportant cinquantepièces d’or(une petite fortune), et surtout, une gloire importante, car immédiatement, le vainqueur était considéré comme le meilleur guerrier du monde. Or, ce championnat rapportait beaucoup aux associés… En fait, le maire et son associé étaient riches. Aussi, la richesse amène le pouvoir, et cela déplaisait au roi, qui voyait, au surplus,la popularité, la gloire de sa ville natale et d’habitat, se ternir au fil du temps, inexorablement, au profit de Garlistone, qui attirait toujours de nouveaux chalands, de nouveaux marchands. Enfin, le maire en était bien conscient, etd’un maireassez indépendant, aisé, certes, mais sans réelle importance et qui ne pouvait porter ombrage au roi, il devint un mairetrès riche, très puissant (sa richesse lui permit d’avoir une petite armée personnelle de cent soldats à la valeur confirmée, bien armés et en armure, et le tout, d’excellentequalité !), très respecté et très écouté dans tout le royaume, et, le comble pour un roi, devint carrément indocile, allant même jusqu’à contredire le roi en public! Cependant, tous connaissaient le manque de courage du roi, à tous égards : nul ne fut surpris que le maire ne soit pas dépossédé de son titre par un ordre royal : le maire pourrait se montrer récalcitrant et ne plus envoyer régulièrement l’énorme impôt annuel..: avoir le. ou pire encore soutient de sa population... Le roi allait donc chaque année à Garlistone, mais non pour les raisons officielles. Il y allait pour se tenir bien informé de ce que faisait le maire, si celui-ci avait fait quelques nouveautés en sa ville, et surtout pour rappeler à tous, quec’était tout de mêmeSA ville, contrairement à ce que beaucoup de gens pensaientTout le train du roi s’installait; en fait,partie au sein de la ville  en juste la cour. Pour le reste, puisqu’iln’y avait plus de place, à l’extérieur de la ville, derrière ses remparts, à l’orée de la forêt circonvoisine.Orin avait l’habitude de cela et commençait à préparer le camp avec les autres écuyers. Même les chevaliers prêtaient mains fortes.
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Le soir arrivant, Orin demanda à sonmaître s’il pouvait muser enville. Celui-ci accepta, et il partit donc immédiatement dans cette ville qu’il n’avaitjamais connue. Il dut passer le petit pont surplombant le grand fossé qui entourait Garlistone, ainsi que les gardes qui contrôlaient nonchalamment. La herse était perpétuellement levéepour l’évènement, et la grande porte massive, bardée de bandes de bronze, était ouverte. Sans qu’il ne soit grandement surpris, il vit l’écuyer Pagelan qui accourait vers lui, sourire aux lèvres, comme ne voulant pas manquer l’occasion de faire la visite avec son: il estami. Orin en fut heureux toujours plus agréable de visiter à deux. Garlistone, pour Orin, était une ville en grand contraste avec Bril, la seule grande ville qu’il connaissait. En effet, la citée était réellement fortifiée, alors que Bril n’avait qu’un mur de pierre haut d’un mètre et épais comme deux briques cote-à-cote ; nul mendiant arpentait les rues, alors qu’ils étaient fort nombreux à Bril (si nombreux même qu’ils perturbaient parfois l’ordre public); pas de spectacle de rue, ni musicien, ni artiste, alors que Bril grouillaient de ces gens-là ; la ville était peu bruyante, hormis les incessants coups de marteau qu’on entendait un peu partout, dus au grand nombre de forgerons qui travaillaient à la fabrication des armes et armures, mais aussi pour fabriquer les cerceaux pour les roues, les fers à cheval, clous et autres objets utiles ; alors que Bril générait un bruit permanentvenant d’une multitude très bavarde, hurlante, braillarde. On pouvait y voir aussi des Hauts-Orcs (Orcs indépendants et civilisés, contrairement à leurs frères Orcs, souvent barbares et incultes, et fonctionnant comme une tribu), des Aetridils (créatures mi-insecte, mi-humaine, civilisées, mais ne connaissant rien aux choses mécaniques) et des Groguands (petits hommes civilisés, très portés sur les minerais et la forge ; à ne pas confondre avec des nains Humains) : chose impensable à Bril où toutes ces races étaient interdites d’entrer, sauf pour certains marchands Groguands, qui vendaient des armes, armures et objets divers qu’eux seuls, à quelques exceptions près, pouvaient fournir, grâce à leur précieux métal, le junium. Tout cela ébaubi grandement les deux compagnons, surtout Orin, qui n’avait jamais vu d’Aetridils, car généralement vivants très loin des Humains et ne commerçant presque jamais avec eux. Ils décidèrent d’aller à la taverne prendre une bière pour serafraîchir le gosier. Dans la taverne nommée Au Cochon Pendu, ilss’attablèrent et attendirent tout en regardant avec avidité tous ceux qui peuplaient cet endroit hautement convivial. Il y avait majoritairement des Humains, quelques Groguands (qui malgré leur petite taille buvaient autant que les Humains), et à une table isolée, un Aetridil et un Haut-Orc.
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Pour Orin, les Groguands lui étaient assez familier (de vue), mais il était presque entièrement ignorant sur les deux races minoritaires. Une jolie et accorte serveuse, fort jeune, brune aux yeux verts, à la jupe longue et sale, et au chemisier, sale aussi, mais très « ouvert », leur apporta deux chopes de bière et un grand sourire aux lèvres, car ils payèrent immédiatement etils n’avaientpoint vilaine face, et en plus, ils étaient courtois, ce qui n’allait pas de soi dans son quotidien.Quand elle repartit, Orin, qui lui avait souri avec insistance alors qu’elle les servait avec une lenteur calculée, reçutune petite œillade coquine lancée par la serveuse derrière son épaule. Orin en fut ravi. Pagelan, qui ne manquat pas la scène, rit bien fort de cette petite scène volée, charmante, qui leur manquait tant, et qu’ils n’avaient pas connue depuis bien longtemps. Alors qu’ils finissaient leur chope, un éclat de voix, au fond de la taverne, se fit entendre, malgré le brouhaha incessant. Bigre ! Une Bête et un Insecte en pleine causerie ! A-t-on jamais vu cela ?! HeinCastor qu’ils sont mignons tousles deux à partager leur petit verre de vin, car c’est bien du vin qu’ils boivent mesamis ! Les deux Humains étaient en train de s’asseoir tout en faisant leur commentaire bien fort afin que tout le monde entende. Visiblement, ils venaient d’entrer, et, fait intéressant, ils étaient en tenu de guerre et en armes. Rien qu’à voir leur tête d’idiot, pensa Orin, on avait envi de les jeter dehors. ! cria presque le tavernier, pressentant une Il suffit chevaliers querelle pouvant aller jusqu’à la bagarre. Soit vous vous taisez, soit j’appelle la garde pour vous calmer ! Un silence de mort envahit soudainement la salle.  Tavernier, ne te mêle pas de nos affaires ! Et tu devrais mieux choisir ta clientèle ! dit Castor, qui ne voulait pas être en reste. Ces sales races de merde, on devrait les éradiquer ! A la Grande Bataille de Spetel, nous aurions dû les exterminer au lieu nous montrer magnanime. Orin, comme tousceux présent, savait qu’il faisait référenceà une bataille majeure dans l’histoire, celle de Spetel, quiengagea les Humains contre les Orcs, à ce moment alliés des Aetridils. Or, cette bataille trouve l’origine dans la bêtise des Humains, et dans une moindre mesure, des Orcs. En effet, il y a de cela près de quarante ans, le prédécesseur de Kelset, Maximor, se querella avec les Orcs au sujet d’un tout petit territoire sur les terres ancestrales des Aetridils, mais que ceux-ci n’occupaient jamais, car tout à l’extrémité de leur royaume, et trop « vert » à leur goût (ils préfèrent les zones quelque peu désertiques). Bien sûr, les Orcs, voyant les Humains commencer à coloniser cette zone, devinrent furieux et voulurent leur part. Maximor, arguant qu’ils étaient arrivés les premiers, nia le droit des Orcs. Sur ces entres-faits, les
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Aetridils apparurent, alerter par le bruit que faisait les deux armées en présence. Les Aetridils décidèrent que ni les Humains, ni les Orcs ne devaient rester, que cela leur appartenait à eux, et à eux seuls. Les Orcs, à contrecœur, en convinrent, car s’ils étaient assez belliqueux, ils vivaient en tribuset l’honneur était ce qui liaitles tribus entres elles ; aussi, ils devaient convenir que ce qu’ils s’apprêtaient à faire était mal, sans honneur, car ils conquerraient un territoire sans même avoir combattu : une honte importante pour eux. Maximor, lui, ne s’embarrassa pas de tels scrupules: pour l’occasion, il avait amené une grande armée dont une partie devait rester sur ce nouveau territoire pour le défendre. Il n’allait pas manquer une telle occasion d’agrandir son royaume avec de si bonnes terres.Ce qui devait arriver, arriva, et Maximor, qui représentait une lignée de souverains à l’entendement limité, ne comprit pas, ou ne voulut pas comprendre, l’implication d’un tel bellicisme: les Orcs, voyant l’obstination de Maximor, ne voulurent pas que les Humains profitent d’encore plus de terres ; par conséquent, ils se préparèrent à la guerre, et pour faire bonne mesure, s’allièrent avec les Aetridils pour affronter les Humains, ce que les Aetridils firent, quoiqu’avec méfiance. Le résultat fut ce qui devait advenir: l’écrasement desface Humains aux puissants Orcs, des créatures de près de deux mètres, très fortes, endurantes, et n’ayant pas peur de la mort, aidés au surplus, par d’autres créatures, certes sans armes et armures, mais qui compensaient largement avec leur intelligence similaire aux Humains, leur peau chitineuse très résistante, une grande force, comme celle des Orcs, une endurance encore plus grande, des doigts qui se terminaient en griffes redoutables, et une discipline excellente. Depuis lors, bien qu’une animosité ait toujours existée entre ces races, elle atteignit un pic dans le sens Humains contre Orcs/Aetridils. Dans une grande ville comme Garlistone, où les races se mélangeaient en apparence sans heurts, la violence, bien que généralement verbale, pouvait se lire sur certains regards Humains ou Orcs (il est presque impossible à un Humain ou un Orc de décrypter les mimiques faciales des Aetridils, dont le visage insectoïde, couvert de chitine, telle une armure organique, empêchait quasiment tout mouvement, sauf les lèvres). Dans la taverne, le ton, donc, montait, et le Haut-Orc mettait déjà la main à son immense épée. L’Aetridil finit par se retourner vers les « agresseurs », en sifflant comme un serpent avec une note aiguë, ce qui était un signe de colère caractéristique. Le tavernier, très gêné au début, mais maintenant en colère devant cette scène (de plus, quelques clients, déjà, fuyaient la taverne de peur de recevoir des coups), sortit immédiatement de sa taverne et hurla à la garde.
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Les deux intrus, apparemment très « grande gueule », mais dépourvue de courage, s’en allèrent aussitôt, dépités, la queue entre les jambes, et précipitamment. Tous les clients invectivèrent les couards, soulagés de ne pas avoir à partir et de continuer à manger tranquillement, en bavardant, et en buvant du vin ou de la bière. La garde arriva peu après, accompagné du tavernier, mais voyant que les fauteurs de troubles étaient partis, ils s’en allèrent sans attendre eux aussi, habitués à ce genre d’intervention, et sachant fort bien que très peu d’individus oseraient leur tenir tête en leur présence.III Orin et Pagelan étaient finalement restés bien longtemps en cette taverne si appréciée, car ils avaient tant à voir et à écouter de celle-ci, qu’ils burent beaucoup et mangèrent bien, et à la fin, ne visitèrent quasiment pas la ville. Cependant, ils en entendirent beaucoup. Pendant tout ce temps, bien qu’ilsfussent fascinés par les Hauts-Orcs et les Aetridils, ils manquèrent de courage pour aller leur parler, ce qu’ils regrettèrent en quittant la taverne. Mais ils devaient partir rejoindre leur camp. Arrivés à leur camp, ils furent accueillis peu après par Irgond, qui leur dit que les chevaliers devaient le lendemain aller en ville pour accompagner le roi, car la grande entrevueavec l’autre« roi » devait avoir lieu sous haute-protection : le roi de Bril était détesté par les habitants de Garlistone et ses environs, et il n’était pas rare que des légumes et fruits pourris soient lancés sur sa royale personne. Le lendemain arriva, et tout se déroula comme prévu : Orin, Pagelan, Irgond, Bartagas (dit « le Sourd ») et deux autres chevaliers accompagnés de leur écuyer respectif, représentaient les gardes du corps du roi de Bril, et menaient la marche. Juste derrière eux, il y avait le Duc Eldon, le conseiller personnel du roi, le page du roi et du duc, et ses trois traducteurs pour les langues Groguand, Orc ou Aetridil (bien qu’il y ait une langue universelle, celle-ci n’était toutefois pas tout le temps usité, soit du fait de l’ignorance de l’intervenant, soit de son refus à l’utiliser pour une quelconque raison).
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