Force ennemie
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Description

Force ennemie est publié en 1903 et récompensé par le premier Prix Goncourt de l'histoire la même année. Lorsque Force ennemie fut couronné par le prix Goncourt en décembre 1903, John-Antoine Nau n'avait publié jusque-là que quelques nouvelles dans La Revue blanche et une plaquette de vers à compte d'auteur. C'est donc le livre d'un parfait inconnu qui circula parmi les membres du jury et qui finit par remporter le prix par six voix contre quatre. Le roman n'eut par la suite qu'un succès médiocre, ce qui n'empêcha pas le président de l'académie, J.-K. Huysmans, de dire bien plus tard : « C'est encore le meilleur que nous ayons couronné. »

Informations

Publié par
Nombre de lectures 61
EAN13 9782824711331
Langue Français

Extrait

JOH N- AN T OI N E NA U
FORCE EN N EMI E
BI BEBO O KJOH N- AN T OI N E NA U
FORCE EN N EMI E
1904
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1133-1
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.A V ERT ISSEMEN T
   amis inconnus qui v oudr ont bien me, ou plutôt nous, lir e
de ne p as ré clamer , d’ur g ence , mon inter nement à Sainte- AnneJ ou dans tout autr e asile .
Je n’ai collab oré à ce v olume que dans les pr op ortions les plus mo destes.
Force Ennemie est en ré alité l’ œuv r e d’un aliéné à demi-lucide que j’ai pu
souv ent et longuement visiter et qui me char g e a, p eu de temps avant sa
mort, de publier sa pr ose après l’av oir revue .
Or , mes r etouches n’ ont p orté que sur des détails. Le fond demeur e
p arfaitement insane malgré une app ar ence de suite dans les idé es. C’ est
p eut-êtr e , à mon humble avis, ce qui r endra l’ ouv rag e curieux, v oir e
intér essant, p our des le cteur s doués de quelque indulg ence .
Je me hâte de dé clar er que je n’ai v u, de ma vie , une maison de santé
p ar eille ou seulement analogue à celle dont le vrai auteur nous entr etient.
Certes, j’ai visité b on nombr e de ces établissements, j’ai causé av e c for ce
mé de cins-aliénistes, g ardiens et g ardiennes  ; mais je puis jur er que je n’ai
jamais r encontré ni un D ʳ Bid’homme , ni une Célestine Bouffard, ni un
Le Lancier , ni un Bar r oug e , ni une Aricie Robinet.
J’ai toujour s v u les déments et démentes bien traités et soignés av e c
dé v ouement ou tout au moins av e c le zèle conv enable . Encor e une fois,
1For ce ennemie Chapitr e
le liv r e a été é crit p ar un fou raisonnant mais sujet à caution.
Mon habituelle mo destie — encor e p eu notoir e — mais que le public
aura, je l’ espèr e , mainte o ccasion d’appré cier dans un pr o chain av enir , —
me p ousse à fair e aux amis le cteur s une der nièr e r e commandation.
and ils dé couv rir ont, p ar hasard, dans les p ag es qui suiv ent, un
p assag e bien é crit, des finesses d’ e xpr ession, une phrase dénotant de la
délicatesse de sentiments, de la hauteur morale , — une b elle âme , enfin  !
— qu’ils n’hésitent p as une se conde à m’aribuer le p assag e , les finesses,
la phrase . . …
and, au contrair e , ils ser ont cho qués p ar un style bas ou impr opr e ,
des idé es bar o ques ou banales, des scènes plus ou moins indé centes ou
gr ossièr es, des longueur s, des platitudes, — qu’ils en r endent r esp onsable
le mauvais fou, le vilain fou  !
Je suis d’autant plus noble et g énér eux en agissant ainsi que je r e
connais, dès lor s, la p art de travail du défunt et p eu r egr eable aliéné comme
ég ale aux neuf dixièmes et demi du v olume .
J. AN T . NA U .
Huelva, 28 juin 1902.
n
2Pour mon cher B. Moussier.
3Pr emièr e p artie
4CHAP I T RE I
    ! Certes, je connais cee chambr e , mais il
me semble bien qu’il y a des mois, p eut-êtr e des anné es que jeQ ne l’ai v ue  !
Ces p ar ois de planches jaunes, ciré es, m’ ont été jadis assez familièr es  ;
mais p our quoi les av oir capitonné es depuis le p ar quet jusqu’à hauteur
d’homme av e c d’ép ais, d’énor mes matelas r e couv erts de drap gris, — de
« drap de wag on »  ?
La lumièr e doré e du matin flue p ar une lar g e fenêtr e grillé e aux
barr e aux mé dio cr ement ser rés.
V o y ons  : en me le vant, en allant r eg arder p ar une vitr e , je suis sûr
que je vais ap er ce v oir un grand bâtiment blanc, luisant, comme stuqué ,
un vaste jardin raidement dessiné p ar un sous-Lenôtr e contemp orain et
une sorte de tour en b ois ( ¹ ) toute plissé e de lamelles de jalousies.
1. J’ai su plus tard que c’était un sé choir  !
5For ce ennemie Chapitr e I
Eh oui  ! c’ est bien cela  ! Et je r e connais, là-bas, cee colline frisé e de
b osquets  ; plus près, ce p etit clo cher frêle d’un gris doux que r osit un
p eu la v erdur e  ; et, sur cee bue r oug eâtr e , l’ o r me solitair e qui p araît
g é ant. Comment tout ce p ay sag e p eut-il m’affe cter à la même minute —
et comme un sp e ctacle habituel et comme une vision p erdue dans le vague
des temps  ? Singulièr e contradiction qui me tr ouble d’une bizar r e
inquiétude  : serais-je de v enu très vieux sans le sav oir  ? A urais-je sommeillé
des lustr es ou un siè cle  ? Suis-je une espè ce de très ridicule , de très vilain
« Be au au b ois dor mant »  ?
Ces soes idé es m’écrasent d’une si lourde tristesse , d’une si oppr
essante «  pesadumbre  », — diraient les Esp agnols, — que je v eux tout oublier ,
de nouv e au.
Je me r e couche , laisse tomb er ma tête sur l’ or eiller et fer me les y eux. . .
A moi les b ons menteur s de song es ou la divine inconscience  !
. . . Cllacc — fffrrr. . . Ce br uit dur , — autoritair e et menaçant, dirait-on,
— me ter rifie au p oint de me p araly ser . C’ est à p eine si j’ ose entr’ ouv rir
les p aupièr es et ce que j’ap er çois ne me rassur e nullement  : un guichet
bé e dans la b oiserie , au-dessus de ma tête  ; deux y eux bleus très pâles me
dé visag ent, — av e c fér o cité , me figurè-je . Mais bientôt j’ai honte de ma
couardise , je me dr esse sur mon sé ant et crie d’une v oie aussi for midable
que p ossible  :
― ’ est-ce que v ous f. . .ichez là  ? V oulez-v ous bien me laisser
dormir et aller espionner ailleur s  !
L’ ouv ertur e du guichet est de b elles dimensions. Une tête en sort qui
fait une grimace de pitié , — une tête tr oué e des étrang es y eux pâles, —
or né e d’un mince nez en b e c de p er r o quet et de longues moustaches
tombantes, plus jaunes que la p ar oi. Elle ouv r e une b ouche que tord un assez
laid rictus e xhibant une dentition mordoré e , — à p etits créne aux — et
pr oèr e des sons  :
―  Y a p as d’ offense de ma p art et je suis heur eux de v oir que ça va
mieux « de la vôtr e ». Si «  Monsieur  » v eut «  kekchose  », je vais «  vous  » le
sercher.
― D onnez-moi à mang er . . . n’imp orte quoi  ! Mais aup aravant. . . p our
riezv ous me dir e ce que je fais ici  ?
― D ans un e stant. . . je vais v ous e z pliquer . . .
6For ce ennemie Chapitr e I
L’homme r efer me son « guignol » et le v oilà p arti.
Dix minutes plus tard j’ entends des grincements de v er r ous et le lourd
clap otis d’une gr osse ser r ur e .
Le p ossesseur des y eux pâles et de la moustache jaune entr e , agite des
clefs g é antes, r ep ousse la p orte et s’appr o che de mon lit, un plate au à la
main.
―  V oilà l’arti que demandé .
― Mer ci. Mais, maintenant, allez-v ous rép ondr e à ma question de
tout-à-l’heur e  ?
―  T out de suite . . . D’ab ord, que « Monsieur » mang e .
― Bon, je ne demande p as mieux. . . V o y ez  ! Parlez à présent  ! où
m’at-on four ré  ? Je v ois que je n

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