L AIGLE DE MEAUX
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Description

Juste après la libération, la vie d'un fils d'enseignant, de sa soeur et de ses frères dans le pensionnat tenu par le père.

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Publié par
Publié le 10 juillet 2020
Nombre de lectures 49
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

L’AIGLE de MEAUX

2
PÉRÉGRINATION
D’UNE FAMILLE NOMBREUSE
SINGULIÈRE
Jef BLANCHARD L’AIGLE DE MEAUX
2 PROLOGUE

Qui ne connaît la trilogie de Marcel Pagnol ?
‘‘La gloire de mon père’’
‘‘Le château de ma mère’’
‘‘Le temps des secrets’’
Cette vie d’instituteur public au siècle dernier
avec ses rentrées scolaires, ses grandes vacances,
ses ambitions professionnelles et sa vie familiale.
Un régal avec l’accent du midi et le chant des
cigales.
On connaît moins la vie d’un instituteur de
l’autre réseau, le privé confessionnel. C’est le pari
qui est fait ici de la dépeindre en suivant Jeannot,
l’un des fils du directeur d’école catholique, et
croyez-le, les anecdotes sont croustillantes, parfois
banales, d’autres peu édifiantes voire scabreuses, le
plus souvent ignorées.
C’est incarné dans une famille certainement
unique en son genre puisque, le temps venu, le
père et deux des fils y enseigneront de conserve
plusieurs années de suite, une entreprise familiale...
impossible dans l’enseignement public...
Les lieux sont réels. Les faits, comme
chacun sait, sortis de l’imagination de l’auteur.
Par extraordinaire, si des personnages ou
des institutions venaient à s’y reconnaître ce
serait pure coïncidence...
3




Nouvelle demeure





Le petit Jean ne se souvient guère du
débarquement dans cette immense demeure. Après quelques
jours de visite tous azimuts des caves au grenier, il est
en mesure de vous guider, suivons-le.
Voici l’entrée, une lourde porte cochère : il faut
sonner et le pêne s’efface dans la serrure dès qu’au
logis éloigné on y répond. Entrée sécurisée, la prison
n’est pas bien loin, sur le trottoir d’en face, avec le va-
et-vient de ses visiteurs plus ou moins fréquentables.
Du haut des quelques marches du seuil plongeons dans
la cour de récréation. Deux arbres majestueux
ombragent le sol non bitumé. Ils seront les pivots de nombre
de jeux des élèves comme celui dit du berger lequel
doit attraper un mouton quand le troupeau tourne en
courant et que, lui, barre le passage étroit entre le tronc
et le mur. Chaque mouton pris devient berger aussi,
ainsi de suite jusqu’à ce que tous les moutons
deviennent bergers. Inutile de dire les courses folles, les
empoigna-
4 des, les bousculades, les hourras.
D’un côté le préau, de l’autre l’alignée des
habituelles toilettes à la turque où nombre de balles et petits
ballons termineront leur existence. En face le logement
de la direction avec ses annexes, en sous-sol, demi
enterrées, deux portes basses, l’entrée des caves, lieux
entre autres d’inénarrables rencontres. Traversons la cour,
près du socle orphelin où devait trôner autrefois le
buste de Bossuet, trop souvent maquillé par les espiègles
adolescents, l’inévitable cloche des rassemblements et
le coin des trublions au piquet. Jeannot en sait quelque
chose pour y avoir siégé de manière injustifiée pendant
plusieurs récréations de suite par son Poirier
d’instituteur. Il ne fléchira pas, c’est Poirier qui se lassera
d’attendre la punition non faite et lèvera le piquet.
Pénétrons par la grande porte vitrée, nous voici
au cœur du bâtiment; à droite un vaste local, il
deviendra, après aménagement par l’instituteur-menuisier, le
lieu de dépose des chaussures pour les pensionnaires
avant de monter au dortoir; en face les portes vitrées
des deux classes, l’une réservée au primaire, l’autre au
cours complémentaire. Une troisième s’ouvrira dès
l’année suivante, aménagée sur une partie du préau. Les
premières sont séparées par une cloison vitrée mobile
permettant à l’occasion une autre activité. Jeannot n’en
vit qu’une fois le médiocre spectacle réalisé par les
anciens élèves. Il se souvient de la scène comique d’un
grand gaillard en jupons poussant une brouette dans
laquelle un homme du même acabit accoutré ainsi
qu’un bébé suçait la tétine de son biberon en même
5 temps qu’il braillait à tue-tête.
À gauche l’escalier monumental d’accès aux
dortoirs et par un couloir étroit l’accès à la cuisine, au
vestibule, aux appartements privés, à la descente aux caves.
Le vestibule, belle pièce au sol carrelé éclairée par trois
portes vitrées donne sur le jardin d’agréments et
s’ouvre sur le grand réfectoire d’un côté, avec ses longues
tables à bancs côté cour pour les élèves et sa table à
chaises côté jardin pour les professeurs et surveillants,
avec ses casiers individuels contre le mur où les
pensionnaires stockent leurs provisions d’appoint, beurre,
confitures, lithiné voire pâté et saucisson, ce sont
souvent des fils d’agriculteurs de la Brie et ils ont déjà des
appétits de travailleurs manuels. Il donne enfin sur le
bureau directorial ainsi que sur la salle-à-manger
familiale au centre.
Montons aux dortoirs, l’un à gauche le plus grand,
celui qui accueillera Jeannot parmi les pensionnaires
dans peu de temps, l’autre à droite, plus modeste où
seront érigées les chambres des professeurs, cellules
toute neuves en contre-plaqué réalisées par des
professionnels cette fois. Entre les deux la place du cabinet à
la turque et du petit local d’intendance : savonnettes,
brosses à dents, dentifrices en tube et en plaque, cirage,
graisse à brodequins, lacets, feuilles de papier à couvrir,
gommes, crayons, carnets, bouteilles d’encre bleue
Waterman pour stylos etc… sans oublier la dernière
nouveauté, les stylos-bille.
Douches encore inconnues, seulement une alignée
de lavabos surmontés d’un miroir au mur du dortoir.
6 À partir du vestibule montons l’escalier des
appartements privés. Quatre chambres, la rose, celle des
parents, la bleue plus vaste à côté, la chambre de
Marité, une autre des garçons. Sur le palier les toilettes, pas
à la turque celles-là, et la montée vers le laboratoire,
une autre chambre et un immense placard à
provisions : sac énorme de cacao, caisse de figues, de dattes,
de bananes et pruneaux séchés, biscuits, pâtes, sucre,
tablettes de chocolat, châtaignes décortiquées, pois
cassés…
Encore un effort, pénétrons dans le grenier
sombre, il n’y a qu’un seul vasistas et la surface est
immense. On ne peut que marcher accroupi sous la charpente.
Jeannot y fera des découvertes : une série de plaques de
verre à projeter pour la lanterne magique, hélas
absente. Une collection de cartons imprimés et brillants,
armes d’un évêque disparu ou bien armes de l’Aigle de
Meaux remisées dans l’attente d’une manifestation
anniversaire. Un tableau énigmatif tout noir de fond sur
lequel voguent de maigres tracés patatoïdes et quelques
points argentés. L’encadrement est doré, le titre :
l’enfer… Enfin, des mécanismes d’horloge hors d’usage.
C’est dans ce lieu obscur qu’avec son aîné ils
essaieront sans grand succès, toussant et crachant, de
fumer les cigares chipés dans le bureau paternel lesquels
étaient gardés en réserve pour les repas de baptême ou
de communion solennelle.
Redescendons au vestibule et sortons. Un large
palier sous véranda domine la vue du jardin
d’agréments. Beaucoup de verdure, des taillis, de grands ar-
7 bres dont deux sapins qui resteront mémorables dans
l’histoire des aînés qui aurait pu finir tragiquement. Au
centre, le bassin qui restera vide longtemps. Tout
contre, un socle maçonné de pierres assez haut,
soutient la pieuse statue bras ouverts du Sacré-Cœur.
Au fond deux pavillons à un étage encadrent le
portail de sortie. L’un en location par une vieille fille
acariâtre, l’autre logement d’un professeur.
Parallèlement et encore plus vaste le jardin

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