Le père adoptif - Le roi Sihanouk du Cambodge (Extraits)
51 pages
Français

Le père adoptif - Le roi Sihanouk du Cambodge (Extraits)

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Description

Journalistes, diplomates et historiens ont beaucoup écrit sur le roi Norodom Sihanouk du Cambodge. Mais aucun observateur n’a publiquement abordé certaines facettes pourtant essentielles de la personnalité de l’être humain.
Sous la carapace de l’homme d’Etat, quelles sont les caractéristiques de la psychologie de la personne privée ? Quels ressorts lui ont permis de survivre aux cruels tours du destin puis de combattre jusqu’à réussir à se remettre en selle, un exploit salué sans réserve par le concert des nations ?
C’est précisément ce que ce livre met en lumière. Il adopte un angle subjectif pour évoquer son enfance et son adolescence. Il éclaire d’une lumière non-conventionnelle ce que les experts en relations internationales n’ont pas décelé chez l’homme qui occupa le devant de la scène politique d’avril 1941 à octobre 2004.
John Gunther Dean, l’ambassadeur américain qui a dû fuir Phnom-Penh en 1975, est l’une des rares personnalités politiques à avoir saisi la vraie nature du roi Sihanouk. Il a souhaité préfacer le livre de Tipram Poivre.
Cet essai est en vente chez Amazon, l'iBookstore, et les principales librairies numériques.

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Publié par
Publié le 23 avril 2013
Nombre de lectures 138
Langue Français

Extrait


Tipram Poivre
LE PÈRE ADOPTIF
Portrait insolite du roi Sihanouk du Cambodge
À celui qui me donna plus que la vie.
SOMMAIRE
Dédicace
Préface
Chapitre 1 : Vers le ponant
Chapitre 2 : Le fruit de l’amour
Chapitre 3 : La chrysalide
Chapitre 4 : Les premiers rugissements
Chapitre 5 : La mâchoire du lion
Chapitre 6 : La raison du plus fort
Chapitre 7 : L’iniquité
Chapitre 8 : L’adieu
Index
Au sujet de l’auteur
Copyrights
*~*~*~*~*
Préface
Au moment où le roi Sihanouk quitte ce monde, je tiens à témoigner du rôle
essentiel et positif qu’il a joué sur la scène internationale durant la seconde partie du
XXe siècle.

Je l’ai connu en 1953, lorsque j'étais chef a.i. de la Mission d'Assistance
Économique à Phnom Penh. Je croyais comme lui à la nécessité du développement
économique et social. Je peux même affirmer qu’en 1953-54, par l'intermédiaire de la
France, les États-Unis finançaient la mise en place d'une armée cambodgienne destinée
à défendre le pays et à soutenir la marche vers l'indépendance khmère.

Sihanouk savait que le salut du Cambodge se trouvait dans la neutralité, et il a
toujours défendu les intérêts stratégiques de son pays. Il était nationaliste et s’est efforcé
de maintenir son pays hors de la guerre d'Indochine. Comme il avait raison !

Sihanouk était le genre d’homme que les Manichéens ne pouvaient pas comprendre.
Malheureusement, à cette époque, l'Occident, et les États-Unis les premiers,
partageaient le monde entre pro communistes et anti communistes. Les États-Unis
étaient tout à fait opposés au neutralisme. Sous Sihanouk, le Cambodge n'était ni pro ni
anti communiste. Il était un petit pays situé entre deux rivaux, la Thaïlande et le
Vietnam, et il n'avait qu'un seul défenseur dans la région, la Chine. En Europe, il
bénéficiait du soutien du Général Charles de Gaulle.

Le coup d'État du Général Lon Nol en 1970 a été perçu par Sihanouk comme une
trahison. Il s’exila à Beijing, non par amitié pour ce pays, mais parce qu'il était
convaincu que la lutte des trois pays d'Indochine pour l'indépendance ne pouvait être
arrêtée par l'intervention des États-Unis.
Sihanouk a été critiqué pour sa décision de se réfugier à Beijing et d’accepter le
soutien des Khmers Rouges. Peut-être voyait-il dans les Khmers Rouges de cette époque les défenseurs de l'indépendance cambodgienne, non soumis à aucune influence
étrangère.
Je crois qu'avec le temps, il est devenu plus critique des actions des Khmers
Rouges. Mais les féroces bombardements américains au Cambodge, qui faisaient
beaucoup de morts civils, l'ont persuadé de ne pas rompre avec les Khmers Rouges. Il
faut ajouter que Sihanouk avait de longue date souffert de la CIA et qu’il se méfiait du
rôle néfaste de cette organisation. Sihanouk a même écrit un livre sur ses mauvaises
relations avec la CIA.

Le devoir d'un chef d'État est de défendre les intérêts à long terme de son pays et de
son peuple. Dans ce sens, Sihanouk a été parmi les plus grandes figures de son temps, et
un visionnaire. Le rôle des petits pays est, si possible, de rester en dehors des conflits
que se livrent les grandes puissances.
Le roi Sihanouk fut un Neutraliste jusqu'à la fin de sa vie. Il voyait dans Bandung
puis dans le Mouvement des Non-alignés - dont il fut l'un des pères-fondateurs - la voie
à suivre pour échapper à un désastre militaire et rester indépendant.
Hélas, l'Occident, et surtout les États-Unis, n'appréciaient pas cette politique. Pour
ma part, j’approuve entièrement le roi Sihanouk, et suivant son exemple, je crie :
Que vive l'esprit de Bandung !

Je suis honoré d'écrire ce témoignage en faveur de mon ami Sihanouk, et j'espère
qu'avec le temps l'histoire lui donnera raison.
Paix à son âme.

Respectueusement,
John Gunther Dean
Ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique au Cambodge (1974 à 1975) 1 – Vers le ponant
« Les nouvelles ne sont pas très bonnes aujourd'hui. »
Si la reine, sa mère d'adoption, commence son message par ces mots
précautionneux, c'est que la situation est sérieuse, pensa Ti avec effroi. Elle délaissa sa
tablette internet pour chercher dans un coffret rangé à l'abri de la lumière un petit flacon
d'huile essentielle de pruche aux vertus sédatives éprouvées, car elle devinait que la
situation exigerait sang-froid et discernement. Elle fit couler deux gouttes d'un liquide
pâle dans le creux de ses coudes et frictionna vigoureusement la peau de son poing
fermé. Elle ingéra à larges goulées les molécules odorantes, inspirant et expirant
bruyamment jusqu'à l'étourdissement, le regard rivé sur le croissant de lune qui se
découpait dans le ciel de Paris. Puisque cette virgule argentée a le pouvoir de soumettre
à ses caprices le phénomène des marées, pria-t-elle, elle saura aussi enrayer les périls
sur terre, si un cœur sincère le lui demande avec force.
Quand son pouls commença à s'assagir, Ti reprit la lecture du courrier reçu de
Beijing en épluchant chaque phrase pour déceler le danger peut-être tapi derrière la
banalité apparente. L'épée de Damoclès menaçait de se détacher, et la reine l’annonçait
sur la pointe des pieds pour ne pas créer d’affolement, ou pour endiguer son propre
sentiment de panique. Le roi Sihanouk, le père adoptif de Ti, approche de ses 90 ans et
doit affronter un quatrième ou cinquième cancer, elle ne sait plus trop, car elle n'en est
plus à les compter. L'issue maintes fois redoutée est-elle devenue inéluctable ?
S'apprête-t-on à mettre un point final à l'existence de l'homme à qui elle doit tant ? Cette
éventualité lui transperça l’abdomen même si, elle en avait conscience, ce n'était rien
d'autre que l'aboutissement naturel de toute vie terrestre.
Elle se força à visualiser ce qui se préparait. Dans la moiteur tropicale, le catafalque
aménagé sous un dais orné de longues tentures de brocart, les oriflammes immaculées,
les candélabres en bronze, les flammes tremblotantes des cierges reflétées par la
vaisselle en argent massif. Les gerbes de tubéreuses, de frangipaniers et de jasmin
dressées en haies aux effluves capiteux, les vasques d'eau lustrale, les vapeurs sucrées
de la cire en fusion, les bâtons d'encens incandescents versant leurs larmes de cendre.
Les rangées monotones de bonzes psalmodiant les invocations rituelles, le glissement des pieds nus sur les tapis, l'assemblée vêtue de blanc, les mines compassées, les
reniflements de circonstance. Dehors, de l'autre côté de la rue, le tintamarre des
charpentiers érigeant le soubassement du bûcher funéraire avec des marteaux, des
perceuses et des scies.
Ti décida qu'elle n’assisterait pas aux cérémonies de la crémation tant la perspective
de côtoyer certains princes et princesses de sang la révulsait. La cupidité de ces gens est
insatiable, leurs fantasmes sont à l’échelle de leur voracité, et leur suffisance les rend
insensibles à l'amoralité de leur conduite. Coupe illégale de bois précieux, détournement
de fonds destinés à la Croix-Rouge cambodgienne, passe-droits, népotisme, trafic
d'influence en tous genres, rien ne les choque. Tandis que le plus grand nombre se débat
pour survivre, les altesses royales mènent grand train. Elles rivalisent d'extravagances
pour aligner orgueilleuses villas, berlines haut de gamme, 4x4 toutes options, opérations
de chirurgie esthétique, maîtresses et gigolos. À moins qu’elles ne soient occupées à
gambader d'un bout à l'autre des fuseaux horaires pour s'acheter des avions, des bijoux
ou quelque nouvelle fantaisie dispendieuse.
Comme si des hommes, des femmes et des enfants n'avaient pas péri sous le feu
des B-52 américains, comme si la démence khmère rouge n'avait pas ensanglanté à
jamais l'histoire de l'humanité, les égocentriques se pavanent dans les meilleurs palaces
avec la vulgarité des parvenus. Le chatoiement de la soie et l'or des bijoux qui enserrent
leur corps gavé de concussion ne masquent pas leur vénalité. Ils n'en ont cure. Partout
où ils passent, lèvres pincées et torses bom

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