Nouveaux documents sur l histoire et la langue de la Bactriane - article ; n°2 ; vol.140, pg 633-654
23 pages
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Description

Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1996 - Volume 140 - Numéro 2 - Pages 633-654
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 72
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Nicholas Sims-
Williams
Nouveaux documents sur l'histoire et la langue de la Bactriane
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 140e année, N. 2, 1996. pp. 633-
654.
Citer ce document / Cite this document :
Sims-Williams Nicholas. Nouveaux documents sur l'histoire et la langue de la Bactriane. In: Comptes-rendus des séances de
l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 140e année, N. 2, 1996. pp. 633-654.
doi : 10.3406/crai.1996.15618
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1996_num_140_2_15618COMMUNICATION
NOUVEAUX DOCUMENTS SUR L'HISTOIRE ET LA LANGUE DE LA BACTRIANE,
PAR M. NICHOLAS SIMS -WILLIAMS*
Le bactrien, l'ancienne langue de la Baetriane (Afghanistan
septentrional), occupe une place unique au sein des langues
iraniennes car il a été transcrit au moyen de l'écriture grecque -
un héritage de la conquête de la Baetriane par Alexandre au
IVe siècle av. J.-C. Par la suite, après que la Baetriane fut envahie
par des peuples nomades venus du nord, les Kouchans, ses nou
veaux maîtres, continuèrent d'abord à utiliser le grec comme
langue administrative, puis, rapidement, ils en vinrent à employer
des lettres grecques pour écrire la langue locale, le bactrien.
L'adoption du bactrien par le souverain kouchan Kanishka Ier
comme langue de ses monnaies marqua un moment crucial dans
l'histoire de cette langue. Après la première émission de Kani
shka, le grec disparut pour toujours du monnayage, pour être
remplacé par le bactrien.
Durant les premiers siècles de notre ère, le bactrien aurait pu
légitimement être compté au rang des langues les plus import
antes du monde. En tant que langue des rois kouchans, il était
certainement largement compris sur tout le territoire d'un vaste
empire incluant l'Afghanistan actuel, le Nord de l'Inde et une part
ie de l'Asie centrale. Même après la chute de l'empire kouchan, le
bactrien continua d'être écrit pendant au moins six siècles,
comme en témoignent les inscriptions du IXe siècle trouvées dans
la vallée de Tochi au Pakistan, ainsi que des fragments de manusc
rits bouddhistes et manichéens trouvés dans la lointaine oasis
de Turfan située à l'ouest de la Chine. Ainsi, sa carrière comme
langue de culture a duré près de mille ans.
Il y a encore environ quarante ans on ne connaissait pour ainsi
dire rien de la langue bactrienne, à l'exception des légendes sur les
monnaies des Kouchans et de leurs successeurs. Les monnaies
kouchanes sont inscrites en lettres grecques d'un type angulaire,
qui imite apparemment un style d'écriture utilisé pour les inscrip
tions monumentales. En principe ces légendes ne sont pas parti-
* Texte traduit par Frantz Grenet 634 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
Kara-tepe
(Termez) A,
Delbarjin
( Tochi valley
100 200 300 (00 500
FlG. 1. - Carte de l'Afghanistan de l'Est. Les points noirs indiquent
les emplacements des principales inscriptions bactriennes
connues à l'heure actuelle.
culièrement difficiles à lire, mais leur contenu se limite à des noms
et à des titres de rois et de divinités. Les monnaies des souverains
plus tardifs de la Bactriane - Kouchano-Sassanides, Kidarites,
Hephtalites, Turcs - sont inscrites dans une écriture cursive qui
s'est avérée beaucoup plus difficile à déchiffrer. On connaissait
également quelques bribes de manuscrits dans la même écriture
cursive, trop peu nombreux et trop incomplets pour offrir des
perspectives réalistes d'interprétation.
La situation changea en 1957, lorsque la première inscription
substantielle en bactrien fut découverte à Surkh Kotal près de
Baghlan par la Délégation Archéologique Française en Afghanist
an. Le texte, inscrit dans l'écriture monumentale déjà connue par
les monnaies kouchanes, fut rapidement déchiffré et publié par l'histoire et la langue de la bactriane 635
André Maricq1 ; son interprétation fut une entreprise plus lente, à
laquelle contribuèrent de nombreux savants. Cependant les points
essentiels furent immédiatement reconnus par W. B. Henning : le
texte concernait la fondation d'un sanctuaire par l'empereur Kani-
shka, son abandon à la suite de problèmes d'adduction d'eau et sa
restauration par un haut dignitaire nommé Nukunzuk en l'an 31
de l'ère de Kanishka, c'est-à-dire au début du règne de son suc
cesseur Huvishka2.
Plusieurs autres inscriptions bactriennes ont été mises au jour
depuis celle de Surkh Kotal, la plupart fragmentaires ou mal
conservées (fig. 1). H y a trois ans, cependant, une nouvelle ins
cription d'une importance capitale a été découverte par hasard sur
un site appelé Rabatak, non loin de Surkh Kotal.
L'inscription de Rabatak (fig. 2), dont le texte et la traduction
sont donnés ci-dessous en appendice, décrit les événements de la
première année du règne de Kanishka en des termes qui rappel
lent de manière frappante ceux qui sont employés dans l'inscrip
tion de Bisitun de Darius le Grand. Comme une étude complète
de cette inscription par Joe Cribb et moi-même va bientôt
paraître3, je me contenterai d'attirer l'attention sur quelques-uns
des points les plus importants.
Les premières lignes se réfèrent à Kanishka présenté comme « le
grand salut, le droit, le juste, l'autocrate, le dieu digne de culte (?),
qui a obtenu la royauté de Nana et de tous les dieux, qui a inauguré
(?) l'an un comme il plaisait aux dieux ». Puis le texte continue : « II
a émis (?) un édit (?) (en) grec (et) ensuite il l'a mis en langue
aryenne. » En principe toute langue de la famille indo- iranienne
pouvait être dénommée « aryen » ; mais il est évident que quand
Kanishka parle de « langue aryenne » il désigne le bactrien, la
langue de l'inscription, tout comme Darius désignait le vieux
perse, la langue de son inscription, lorsqu'il écrivait : « Par la grâce
d'Auramazda, j'ai fait un autre texte en aryen, qui auparavant
n'existait pas. » 11 est difficile de ne pas mettre en relation l'em
phase mise ici par Kanishka sur l'emploi de la « langue aryenne »
et le remplacement du grec par le bactrien sur son monnayage.
Les données numismatiques montrent que ce remplacement inter-
1. A. Maricq, « La grande inscription de Kaniska et l'étéo-tokharien... », JA CCXLVI,
1958, p. 345-440.
2. W. B. Henning, « The Bactrian inscription », BSOAS XXIII, 1960, p. 47-55. Voir aussi,
entre autres, I. Gershevitch, «The well of Baghlan », Asia Major XII, 1966, p. 90-109;
« Nokonzok's well », Afghan Studies II, 1979, p. 55-73 ; G. Lazard, Fr. Grenet, C. de Lamber-
terie, « Notes bactriennes », Studio Iranien XIII, 1984, p. 199-232 : N. S ims- Williams, « A note ftS'flAS' on Bactrian phonology », XLVIII, 1985, p. 111-116.
'i. N. Sims-Williams, J. Gribb, « A new Bactrian inscription of Kanishka the Great », Silk
RoadArtandArchaeologyW, 1995/1996, p. 75-142. i
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FlG. 3. - Carte de l'Inde du Nord. Les points noirs indiquent les lieux
identifiables mentionnés dans l'inscription de Rabatak.
vint très tôt dans le règne de Kanishka, rien ne permettant d'ex
clure la toute première année.
Les lignes 4 à 7 donnent la liste des principales villes de l'Inde
du Nord qui se sont soumises à Kanishka. Quatre des cinq noms
sont identifiables : il s'agit de Saketa, Kausambi, Pataliputra et
Champa (fig. 3) ; seulement les termes employés ne permettent pas
de décider si Champa est mentionnée en tant que partie du terri
toire de Kanishka ou bien comme première ville au-delà de sa
limite est. De toute façon, même dans ce dernier cas, l'affirmation
selon laquelle Kanishka gouverne l'Inde du Nord jusqu'à Patali
putra est suffisamment frappante.
La majeure partie de l'inscription concerne la fondation d'un
temple, vraisemblablement situé à Rabatak même, qui semble
avoir été un site très étendu. Les lignes 9 et 10 nomment les divi
nités devant être adorées dans le temple. Cette liste est très inté
ressante. Si elle comprend les noms de deux dieux zoroastr

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