Autres repères, autres paysages
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Le Courrier de l’environnement de l’INRA n°51, février 2004
89
Autres repères, autres paysages Les animaux révélateurs des tensions politiques en république islamique d’Iran par JeanPierre Digard 29 av. du MaréchalDe Lattre de Tassigny, 94220 Charenton digard@ivry.cnrs.fr Les relations hommesanimaux domestiquesPigeons sous surveillance sont éminemment culturelles : elles varient d'une époque à une autre, d'un lieu à un autre. À chaque sociétéFin septembre 1994, la municipalité de Qom décidait le correspond un « système domesticatoire » particulier,massacre des pigeons de la ville sainte. La presse combinaison originale de techniques d'élevage, de modesoccidentale, toujours prompte à fustiger le fanatisme des d'utilisation et de représentations des animaux (Digard,mollâs, eut tôt fait de s'étonner d'une telle décision  les 1990). L'Iran contemporain, fûtil « islamique », ne faitpigeons étaientils des agents de l'« invasion culturelle » pas exception (Balland et Digard, 1996).de l'Occident dénoncée par le « Guide de la révolution » L'Iran n'est pas un pays où, comme en France,Ali Khâmenei?  ainsi que de la polémique qu'a fait naître les animaux (ou, du moins, certains d'entre eux) sonten Iran même cette décision  le chef du pouvoir partout visibles dans l'entourage des humains. Comme (etjudiciaire islamique, l' âyatollâh Yazdi en personne, plus encore, peutêtre, que) dans les autres paysn'avaitil pas pris la défense des volatiles et qualifié musulmans, les chiens, réputés « impurs » (nadjesd'irresponsable l'édit de la municipalité de Qom), sont maintenus à distance et plutôt maltraités ; les chats ne(Adelkhah, 1998 : 30) ? Pour comprendre cette situation sont que tolérés ; les porcs, interdits(harâm)à laquelque peu confuse, il faut savoir que les pigeons ont en consommation, sont absents ; les autres animauxIran un statut ambivalent. d'élevage (volailles, ovins, caprins, bovins, équidés,D'une part, ils font figure de « lien privilégié camélidés) sont, en revanche, nombreux mais traités etavec le sacré et le symbolique » : perchés sur les minarets exploités durement, sans états d'âme. Ce contraste avecet les dômes des mosquées ou volant audessus d'eux, ils l'Europe n'a pas manqué de choquer certains observateursmanifestent la « continuité entre l'icibas et l'audelà » occidentaux, telle Vita SackvilleWest, voyageuse(ibid.:31). D'où la réaction de l'âyatollâh Yazdi. D'où britannique dans la Perse de 1926, qui, après avoiraussi, trente ans auparavant, l'un des chefs d'accusation souligné l'omniprésence des animaux domestiques,lancés contre le chah par l'emâm Khomeyni dans un de précise : « Dieu sait que ce n'est pas l'amour des bêtes quises premiers communiqués de mai 1963 : « avoir chassé suscite ce commerce constant et continu avec elles ; lade leur nid les pigeons des lieux saints de l'islam et les Perse n'est pas faite pour ceux qui aiment les bêtes. »avoir contraints à l'errance » (Dehnavi, 1981). (1993 : 92)D'autre part, les pigeons donnent lieu en Iran à Dans ce contexte, l'apparition d'animauxune activité colombophile à la fois populaire et domestiques dans l'actualité et les médias ou leur percéecontroversée (Goushegir, 1997). Le « jeu aux pigeons » dans l'intérêt des Iraniens depuis une dizaine d'années,iranien(kaftarbâzi)consiste à faire capter en vol par ses provoquant résistances et discussions, n'en sont que pluspigeons et ramener dans son pigeonnier les pigeons des remarquables et significatives.autres colombophiles(kaftarbâz).La mauvaise réputation de ce jeu et de ceux qui s'y livrent est fondée
er Cet article a pour origine une communication présentée au colloque « L’animal en politique », organisé les 31 janvier et 1février 2001 à l’Institut d’études politiques de Lyon. Il est repris, avec l’aimable autorisation de la revueÉtudes rurales, janvierjuin 2003,165/166, 123132.
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