Les conquêtes sur la mer, de la Zélande au Jutland - article ; n°350 ; vol.65, pg 270-287
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Description

Annales de Géographie - Année 1956 - Volume 65 - Numéro 350 - Pages 270-287
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1956
Nombre de lectures 62
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Fernand Verger
Les conquêtes sur la mer, de la Zélande au Jutland
In: Annales de Géographie. 1956, t. 65, n°350. pp. 270-287.
Citer ce document / Cite this document :
Verger Fernand. Les conquêtes sur la mer, de la Zélande au Jutland. In: Annales de Géographie. 1956, t. 65, n°350. pp. 270-
287.
doi : 10.3406/geo.1956.14252
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1956_num_65_350_14252270
LES CONQUÊTES SUR LA MER,
DE LA ZÉLANDE AU JUTLAND
(Pl. VIII-IX.)
Les côtes de la mer du Nord, entre l'Escaut occidental, en Zélande,
et la péninsule de Skallingen, au Jutland, s'allongent sur plus de 600 km et
bordent les marges Nord-Ouest de la plaine de l'Europe du Nord. Le littoral
de cette zone de marais, que Vidal de La Blache appelait celle de l'éternelle
verdure, apparaît comme une limite très instable entre la terre et la mer.
En effet, la nature y fait alterner, coïncider ou se combiner les mouvements
verticaux de la terre et de la mer, mouvements dont les conséquences sont
d'autant plus grandes que les pentes générales de ce pays sans relief
faibles. A une subsidence tectonique prouvée dans de nombreux cas s'ajoute
le tassement des sédiments, en particulier de la tourbe. Les actions glacio-
eustatiques, dont l'effet est instantané, et celles de la glacio-isostasie, dont
les effets sont lents, parfois même différés, peuvent conjuguer ou opposer
leurs influences respectives à celle de l'affaissement reconnu plus haut.
D'ailleurs, les limites, les valeurs et la durée de ces divers facteurs font l'objet
de nombreuses controverses et sont encore loin d'avoir été dégagées avec
clarté et certitude1. L'homme, d'autre part, a largement contribué à aggraver
l'instabilité naturelle de la limite entre la terre et la mer. Tendant à annexer
au continent les atterrissements du littoral et des estuaires, il a fait reculer
la mer avec plus ou moins de succès. Par ses conquêtes mêmes, il rendait plus
vulnérable un continent agrandi certes, mais où parfois le drainage ou l'exploi
tation de la tourbe — abaissant déjà le niveau bas du pays — augmentaient
le danger. La lutte de l'homme et de la mer a connu des épisodes souvent
dramatiques, comme celui de la Sainte-Elisabeth de l'année 1421, où les pays
riverains des bouches de la Meuse furent submergés. D'autres offensives de
la mer firent du lac Flevo le golfe du Zuyderzée, créèrent les échancrures du
Lauwerszée, du Dollart, de la Jade ; les tempêtes de 1634 ravagèrent le
littoral du Jutland méridional et du Slesvig-Holstein, détruisant de nombreux
villages, comme celui de Misthusum au Danemark. Enfin, tout récemment,
le désastre de février 1953 éprouva particulièrement les Pays-Bas. Ce ne sont
là que quelques faits, parmi beaucoup d'autres, qui témoignent du danger
que font courir à ces contrées plates et basses les flots de la mer du Nord.
Rien n'évoque mieux, d'ailleurs, ce recul des terres que le spectacle offert
parfois par les estrans (ou Watten) du Slesvig, à marée basse. Les vestiges
d'une ancienne occupation humaine y apparaissent, la mer les exhumant
après les avoir fossilisés pendant quelques centaines d'années2.
1. C. Schott, Die Westkilste S Mes wig- H ois teins (Problème der Kûstensenkung) , Kiel, 1950. —
Le Symposium : Kwartaire niveauverandingen, in het bijzonder in Nederland (Geologie en Mijn-
bouw, 1954).
2. A. Bantelman, Das N ordj riesische Wattenmeer, eine Kulturlandschaft der Vergangenheit
(Westkuste, II, 1, 15 décembre 1939, p. 39-115). LES CONQUÊTES SUR LA MER DU NORD 271
Mais cette lutte n'est pas faite que de revers ; les conquêtes — toujours
difficiles — viennent eontre-balancer, quelquefois largement, les pertes
subies. Les progrès considérables des techniques du génie civil depuis le
début du xxe siècle, la mise en œuvre de puissants moyens ont déjà permis,
permettent et plus encore permettront des victoires de l'homme. L'effort
de conquête se traduit par la volonté, d'une part, de favoriser ou de provoquer
le colmatage et, d'autre part, d'empêcher la pénétration des eaux marines
dans le domaine que l'homme leur arrache et qui est constitué tantôt par des
atterrissements, tantôt par des estuaires, tantôt enfin par des estrans ou
même des bas-fonds. Mais ces deux aspects de la conquête revêtent des
caractères différents, du Danemark aux Pays-Bas, suivant les données
géographiques régionales, physiques tout d'abord (fig. 3).
I. — Le milieu naturel
Les conditions naturelles varient de l'Escaut occidental à la pointe
de Blaavand Huk au Jutland. Néanmoins, des caractères communs existent,
pour l'ensemble de la côte ; nulle part la roche en place n'affleure, et, en
dehors des terrains glaciaires, l'ensemble du matériel est formé de vases,
d'argiles, de sables alluviaux. Les sables, en particulier, ont constitué un
long cordon de dunes qui s'étend d'un bout à l'autre du domaine étudié.
Morcelé dans le pays des bouches de l'Escaut, de la Meuse et du Rhin, le
cordon est continu au Nord de cellea-ci jusqu'au Helder, Ли delà, il se pour
suit dans le chapelet des îles frisonnes, disparaissant comme ces îles entre
la Jade et l'estuaire de l'Elbe, pour réapparaître dans l'Ouest du Slesvig-
Holstein et du Jutland : Trischen, Ouest de l'Eiderstedt, Sylt, Romô et
Fano. Ainsi, cette côte se divise en plusieurs secteurs naturels :
1° le « delta » de l'Escaut, de la Meuse et du Rhin ;
2° le littoral de la Hollande continentale (de Hoek van Holland au
Helder) ;
3° celui de la mer des Wadden (du Helder à l'embouchure de l'Elbe,
et de celle-ci à Skallingen).
Le second secteur doit être défendu contre l'attaque de la mer qui ronge
les dunes surtout entre Hoek van Holland et Scheveningen, mais l'homme
n'y fait aucune tentative de conquête. Au contraire, les deux autres sont les
domaines, par excellence, de l'effort humain pour refouler la mer.
Le delta du Sud-Ouest des Pays-Bas. — Les eaux de l'Escaut, de la Meuse
et une partie de celles du Rhin se jettent dans la mer du Nord par de nomb
reuses passes entre la Flandre zélandaise et Hoek van Holland. Les eaux
des trois fleuves pouvaient se mêler dans des bras multiples et anastomosés
jusqu'à ce que des barrages aient isolé l'Escaut occidental, de l'ensemble,
condamnant ainsi l'embouchure de l'Escaut oriental à être séparée du reste
du cours du fleuve. Au contraire, il n'est pas de frontière entre la Meuse et
le Rhin, au milieu de l'inextricable enchevêtrement des cours d'eau qui
enserrent des îles, elles-mêmes formées d'une juxtaposition de polders dilFi- 272 ANNALES DE GÉOGRAPHIE
cilement arrachés aux eaux. La marée gonfle deux fois par jour les véritables
bras de mer qui séparent les îles. Son action rythme la vie du Hont, de
l'Escaut oriental, du Grevelingen et du Haringvliet. Le marnage moyen,
qui est de 1,70 m à Hoek van Holland, s'accroît vers le Sud et aussi vers
le fond des estuaires, atteignant 3,85 m à Terneuzen et plus de 4 m à Bath.
A l'intérieur de ces bras — larges lits majeurs — les courants fluviaux et
surtout les courants de marée ont creusé des chenaux profonds qui — selon
l'expression d'Albert Demangeon1 — ricochent d'une rive à l'autre. J. van
Veen2 a étudié la morphologie de ces chenaux et comparé leur système
à la structure stylisée du peuplier ; les uns ont un cours sinusoïdal et longent
alternativement les deux rives, tandis que d'autres prennent naissance sur
les inflexions des premiers et meurent sur des bancs sableux. L'Escaut
occidental présente un aspect très proche de ce schéma simple ; au contraire,
la disposition des multiples chenaux peut offrir une grande complexité,
comme c'est le cas pour l'Escaut oriental. Le jeu de la marée contribue
non seulement à dégager ces larges bras et à en menacer perpétuellement
les «rives, mais aussi à permettre l'engraissement des slikkes par endroits,
puis leur transformation en schorre, surtout dans les angles morts du rivage,
comme à Saaftinge ou au Sud-Ouest de Bergen op Zoom.
La mer des Wadden. — Du Helder à la péninsule de Skallingen s'étendent
les larges estrans ou wadden qui ont donné leur nom3 à une mer sans pro
fondeur, sorte de marge de la mer du Nord. Ses rivages, le long d

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