Arbitrage, concession et nationalisation — quelques observations sur la sentence BP - article ; n°1 ; vol.27, pg 222-230
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Annuaire français de droit international - Année 1981 - Volume 27 - Numéro 1 - Pages 222-230
9 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 62
Langue Français

Extrait

M. le Professeur Patrick
Rambaud
Arbitrage, concession et nationalisation — quelques
observations sur la sentence BP
In: Annuaire français de droit international, volume 27, 1981. pp. 222-230.
Citer ce document / Cite this document :
Rambaud Patrick. Arbitrage, concession et nationalisation — quelques observations sur la sentence BP. In: Annuaire français
de droit international, volume 27, 1981. pp. 222-230.
doi : 10.3406/afdi.1981.2441
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1981_num_27_1_2441CONCESSION ET NATIONALISATION : ARBITRAGE,
QUELQUES OBSERVATIONS SUR LA SENTENCE B. P.
Patrick RAMBAUD
1. — Première des trois sentences rendues dans l'affaire des nationalisations
libyennes (1) , la décision rendue, le 10 octobre 1973, par l'arbitre unique, le
magistrat suédois M. Lagergren, dans le différend entre le gouvernement libyen
et la British Petroleum Exploration Company (Libya) Limited (B.P.), est sans
doute la plus méconnue mais aussi, il faut l'avouer, la plus décevante au premier
abord pour l'internationaliste.
2. — D'une inspiration résolument privatiste et empirique, elle tourne le dos
aux grandes controverses soulevées par le difficile problème des rapports entre
le droit souverain de nationaliser et le respect des droits contractuels du conces
sionnaire étranger.
Aux antipodes de la célèbre sentence Texaco-Calasiatic (2) , elle traduit une
conception de l'arbitrage et du droit qui constitue une négation de la spécificité
des concessions en tant qu'illustration de la notion de «contrats d'Etat» (3),
* Patrick Rambaud, Maître-assistant à l'Université de Paris II, auteur de plusieurs
articles dans cet Annuaire : 1977 sur l'approbation par la France des dispositions sur
l'élection du Parlement européen au suffrage universel direct, 1979 et 1980 sur la
sentence Liamco.
(1) Pour l'étude comparée des trois sentences : B. Stern, « Trois arbitrages, un même
problème, trois solutions », Revue de l'Arbitrage, n° 1, 1980, p. 3 et s.; R. von Mehren et
P. Kourides, < International Arbitrations between States and foreign private parties : the
Libyan Nationalization Cases », A.J.I.L., juil. 1981, p. 476 et s. Dans ces affaires, les faits,
la procédure et le droit applicable sont identiques. Pour cette raison, il a paru inutile de
les reprendre ici.
(2) J.F. Lalxve, « Un grand arbitrage pétrolier entre un Gouvernement et deux sociétés
privées étrangères », J.D.I. , 1977, p. 319 et s. (sentence publiée p. 350 et s.) .
(3) Traduction de l'expression anglaise < State Contracts » qui désigne, on le sait, un
certain type de contrats entre Etats et sociétés étrangères (P. Weil, < Droit international
et Contrats d'Etats», Mél. Renter, 1981, p. 549 et s.). SUR LA SENTENCE B.P. 223 OBSERVATIONS
les difficultés qu'elles suscitent étant réglées sur la base des solutions éprouvées
du droit international privé (4).
3. — Pourtant, en dépit des réserves qu'elle inspire, la sentence B.P. mérite
d'être tirée de l'oubli auquel un ensemble de facteurs défavorables — publication
tardive (5), autorité minée par le désaveu de la demanderesse elle-même (6) , éclat
d'une sentence postérieure contraire (7) — risquent de la condamner. Elle présente
en effet une structure radicalement différente des deux autres arbitrages « libyens »,
affirmant, sans le démontrer, le caractère illicite de la nationalisation pour ne
s'attacher qu'au seul problème de ses conséquences sur le contrat de concession.
A cette différence, il y a, semble-t-il, deux raisons, tenant l'une aux circonstances
de la nationalisation et l'autre à la réaction de la société victime.
4. — Antérieure aux autres nationalisations décidées par le nouveau régime
libyen, la mesure frappant la B. P. est une mesure purement ponctuelle (8) qui,
à l'évidence, a le caractère d'une sanction. Elle vise en réalité le gouvernement
britannique (9) , « sanctionné », de l'aveu même des Libyens, pour avoir laissé
l'Iran occuper trois îlots dans le Golfe Persique(lO). La B.P. est donc victime
d'une mesure de rétorsion étrangère à toute finalité d'intérêt général — son
caractère ponctuel et sa motivation clairement politique interdisant d'y voir la
mise en oeuvre d'une politique pétrolière cohérente qui ne sera élaborée qu'un
peu plus tard (11) — mesure qui viole ouvertement le droit international des
nationalisations. En présence d'une violation aussi flagrante de la légalité, l'arbitre
ne peut que la dénoncer sans s'y attarder tant elle est évidente à ses yeux.
5. — D'autre part, la réaction de la B. P. n'est pas étrangère non plus à
l'optique particulière de la sentence. S'attachant exclusivement à la reconnaissance
(4) Ainsi, prenant prétexte de ce que le siège du tribunal a été fixé à Copenhague,
M. Lagergren choisit-il le droit danois comme droit procédural (en raison avant tout de la
plus grande efficacité d'un interne, à la fois plus « convenient and constructive » que
le droit international adopté par la sentence Aramco; sent. pp. 309-310) et place-t-il dans
ce le fondement du choix du droit applicable opéré par les parties, droit qu'il lui
appartient, souligne-t-il, de déterminer en toute liberté (p. 326); aucune allusion n'est faite
en conséquence à l'enracinement du contrat dans l'ordre juridique international (contrair
ement à l'analyse de la sentence Texaco) .
(5) Elle n'est publiée qu'en 1979, dans International Law Reports, vol. 53, pp. 293-357.
A cette occasion, la Libye qui a refusé de participer à la procédure a réaffirmé qu'elle
considérait cette sentence comme < nuit and void » (ibid., p. 297) .
(6) La B.P. a saisi en effet le tribunal d'un recours en révision pour violation des
règles procédurales et erreur de droit, recours qui a été rejeté pour incompétence, le droit
danois s'opposant à son examen au fond. Le memorandum de la B.P. et la décision de rejet
du 1er août 1974 sont publiés pp. 358-388.
(7) II s'agit évidemment de la sentence Texaco qui a été abondamment commentée
(v. réf. dans P. Weil, op. cit., p. 555, note 16).
(8) Non seulement la B.P. est la seule visée par la loi de nationalisation du 7 décembre
1971 mais encore ses droits et intérêts ne sont pas tous confisqués. La loi exproprie sa
participation à 50 % dans la concession 65 (qu'elle détient depuis 1960 en vertu d'une cession
du titulaire originaire, M. Hunt, qui en conserve l'autre moitié; délivrée en 1957, la conces
sion < Hunt » a une durée de 50 ans) mais ne touche pas aux deux autres concessions
qu'elle possède (80 et 81) .
(9) La B.P. est une entreprise publique dont le gouvernement détient près de la moitié
du capital social.
(10) Accusation formulée par le représentant libyen au Conseil de Sécurité (séance du
9 décembre 1971) ; le grief libyen s'explique par le fait que les îlots en question étaient
sous la juridiction nominale de protectorats du Royaume-Uni.
(11) En 1973-74. V. J.L. Retai* « La Libye républicaine face au cartel pétrolier », An
nuaire d'Afrique du Nord, 1974. 224 ARBITRAGE, CONCESSION ET NATIONALISATION
de ses droits qui, selon elle, n'ont pu être affectés par la nationalisation, elle
demande seulement à l'arbitre de les proclamer avec la force que donne l'autorité
de la chose jugée (12) , concourant ainsi à circonscrire l'examen de l'affaire à
un aspect déterminé. Ce n'est plus l'ensemble des questions soulevées par
l'exercice du droit de nationaliser une concession qui seront envisagées mais
essentiellement l'une d'entre elles : l'effet juridique de la nationalisation illicite
d'une concession.
Dès lors, un déplacement du centre de gravité de la sentence par rapport
aux deux autres se produit : l'examen des conséquences de la nationalisation
est privilégié au détriment des questions se posant en amont (celles qui touchent
à la nature de la concession et au caractère licite ou non de la nationalisation).
Ainsi, l'illicéité flagrante de la nationalisation en l'espèce rend-elle inutile,
pour l'arbitre, un long développement sur ce point; seules importent ses cons

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