L expert, le témoin et le juge dans le procès civil en droits français et anglais - article ; n°2 ; vol.29, pg 285-300
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1977 - Volume 29 - Numéro 2 - Pages 285-300
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1977
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. J.A Jolowicz
L'expert, le témoin et le juge dans le procès civil en droits
français et anglais
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 29 N°2, Avril-juin 1977. pp. 285-300.
Citer ce document / Cite this document :
Jolowicz J.A. L'expert, le témoin et le juge dans le procès civil en droits français et anglais. In: Revue internationale de droit
comparé. Vol. 29 N°2, Avril-juin 1977. pp. 285-300.
doi : 10.3406/ridc.1977.16923
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1977_num_29_2_16923LE TÉMOIN ET LE JUGE L'EXPERT,
DANS LE PROCÈS CIVIL
EN DROITS FRANÇAIS ET ANGLAIS
par
J. A. JOLOWICZ
Professeur de droit comparé à l'Université de Cambridge
Fellow of Trinity College
L'un des développements les plus importants de la procédure civile
moderne a été l'extension des pouvoirs du juge en ce qui concerne les
règles de droit applicables au litige. Autrefois, en Angleterre, le système
des « forms of action » avait une tendance marquée à fixer le cadre du
litige, non seulement par rapport aux faits, mais aussi par rapport aux
moyens de droit proposés par le demandeur : en France, le concept de
« cause de la demande » tendait à la même fin. Depuis les réformes du
dix-neuvième siècle, les règles de la procédure civile anglaise n'exigent
plus des plaideurs qu'ils se fondent uniquement sur telle ou telle règle
de droit. Elle ne leur demande que l'allégation des faits pertinents à la
demande ou à la défense selon le cas (1) ; mais en ce qui concerne
le choix des règles de droit applicables à l'espèce, le juge est souverain
(2). En France, au moins depuis l'entrée en vigueur du décret du 9
septembre 1971 (3), maintenant intégré dans le nouveau Code de pro
cédure civile, c'est également aux parties qu'il appartient d'alléguer
les faits propres à fonder leurs prétentions (4) : le juge tranche le litige
conformément aux règles de droit qui lui sont applicables (5) — ce
qui veut dire, bien entendu, qu'il revient au juge de décider quelles
sont ces règles — et le juge peut relever d'office les moyens de pur droit
quel que soit le fondement juridique invoqué par les parties (6). Bien
plus, la législation française dispose en termes exprès que le juge doit
donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux
(*) Texte de la communication faite à l'Assemblée générale de la Société de
législation comparée le 21 janvier 1977.
(1) Judicature Acts 1873-1875. V. maintenant les Rules of the Supreme Court
<* R.S.C. ») 0.18, r. 7.
(2) Par ex. Shaw v. Shaw [1954] 2 Q.B. 429.
(3) Décret n" 71-740 du 9 septembre 1971.
(4) Nouveau Code de procédure civile, art. 6.
(5) Id. art. 12, al. 1.
(6) Id. art. 12. al. 3. 286 l'expert, le témoin et le juge dans le procès civil
sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée
(7).
Il est vrai que dans les deux systèmes de droit, anglais et français,
et surtout dans le droit français actuel, le juge dispose de certains pou
voirs en ce qui concerne les faits d'un litige ; mais nous pouvons tout de
même discerner dans les deux législations une répartition des tâches
entre les parties et le juge qui suit la distinction entre le fait et le droit :
les faits aux parties, le droit au juge. L'ancien adage, Da mihi factum,
dabo tibi jus est restauré (8).
Malheureusement cette analyse cache autant qu'elle révèle. Je
ne fais pas allusion ici aux réserves expresses de la loi — par exemple,
au pouvoir du juge français d'ordonner d'office une mesure d'instruc
tion (9) — mais à la tâche fondamentale et permanente du juge de tran
cher les questions ou controverses de fait qui se présentent au cours
d'un très grand nombre de procès civils. Il est, à mon avis, une faute
grave que commettent de temps en temps les professeurs de procédure
civile : c'est d'oublier le simple fait que, si l'un des plaideurs allègue
le blanc, l'autre le noir, il appartient au juge, à la fin du jour, sinon de
déclarer où se trouve la vérité à son avis personnel, au moins de décla
rer qui a tort et qui a raison.
En ce qui concerne les questions de droit, il est présumé, même
si cette présomption a souvent le caractère d'une fiction, que le juge
connaît le droit. Il n'est pas besoin, en théorie, que les parties lui four
nissent les matériaux nécessaires pour décider des questions de ce genre.
Par contre, en ce qui concerne les questions ou controverses de fait,
aucune présomption de ce genre ne saurait être admise. Jura novit curia :
si cet adage n'est pas toujours vrai, il est vraisemblable ; facta novit curia
est absurde. Etant donné que la solution des questions de fait appartient
au juge, il est donc utile que soit éclâircie autant que possible la répart
ition, dans le domaine des faits, des tâches respectives des parties et
du juge. L'analyse de cette répartition est importante pour tous ceux qui
s'intéressent au caractère du procès civil ; elle est aussi complexe, et
je ne tenterai pas de l'envisager dans sa totalité. Il me semble cependant
que le problème des questions techniques et les solutions différentes qu'ont
adoptées le droit français et le droit anglais nous offrent quelques éclai
rcissements du point de vue du comparé ; c'est dans ce sens que je
me propose d'en parler aujourd'hui. Je n'ai pas l'intention de mal refaire
ce qu'a si bien fait l'Institut de droit de Paris dans son ouvrage
L'expertise dans les principaux systèmes juridiques d'Europe qui a été
publié en 1969 (10).
(7) Id. art. 12, al. 2.
(8) Les dispositions liminaires du nouveau Code de procédure civile impliquent
l'adoption par le législateur français de la doctrine à laquelle le nom du professeur
Motulsky est le plus souvent associé. Pour une critique importante, v. Martin,
« Le fait et le droit ou les parties et le juge », J.C.P. 1974.1.2625.
(9) N.c.p.c, art. 10.
(10) Publié sous les auspices du Centre français de droit comparé avec le
concours du C.N.R.S., Paris, 1969. DROITS FRANÇAIS ET ANGLAIS 287 EN
La répartition des tâches dans le domaine des faits est reconnue
dans nos deux systèmes par l'existence des règles dites de preuve. Même
s'il comporte des exceptions, que je ne crois pas utile de mentionner, c'est
un principe général, tant du droit anglais que du droit français, qu'il
incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de
sa prétention. Qu'est-ce que cela veut dire ? En réalité il ne saurait être
ici question de preuve au sens littéral de ce mot : rien n'est prouvé, en
ce sens, au cours d'un procès. Ce que veut dire le principe général n'est
rien d'autre qu'il incombe aux parties de fournir au juge les matériaux
pour sa décision, décision qu'il prendra sur le fondement de son intime
conviction. Entrent donc en jeu la mentalité, l'esprit, la manière de pen
ser du juge lui-même ; il est rare que puisse être offert au juge comme
moyen de preuve — pour utiliser la formule habituelle — une pièce, un
témoin, un indice qui touche directement le fait générateur du prétendu
droit. Le professeur Motulsky a insisté avec raison sur l'idée que les
seuls éléments générateurs de n'importe quel droit sont les faits (11),
mais les faits d'un droit sont toujours définis eux-mêmes par
le droit. Dans la grande majorité des cas, il faut que les faits « bruts »
qui, dans la réalité, ont donné naissance au litige soient qualifiés soit
par les avocats soit par le juge. Pour prendre l'exemple d'une action en
responsabilité, à la fin de l'instruction ou, si nous parlons de la procé
dure anglaise, à la fin de l'audition des témoins, le juge forme sa convic
tion que le défendeur, conducteur d'automobile, avait doublé dans un
virage sans visibilité et que ce fait avait causé le préjudice dont se plaint
le demandeur. Pour qu'il déclare responsable le défendeur, il faut que le
iuge qualifie comme faute dans le sens de l'article 1382 du Code civil
français, ou négligence dans le sens du droit anglais, l'acte de
doubler dans lesdites conditions.
Que la question de la qualification des

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