La liberté religieuse - article ; n°2 ; vol.46, pg 629-644
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1994 - Volume 46 - Numéro 2 - Pages 629-644
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Jacques Robert
La liberté religieuse
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46 N°2, Avril-juin 1994. pp. 629-644.
Citer ce document / Cite this document :
Robert Jacques. La liberté religieuse. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46 N°2, Avril-juin 1994. pp. 629-644.
doi : 10.3406/ridc.1994.4893
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1994_num_46_2_4893R.I.D.C. 2-1994
LA LIBERTE RELIGIEUSE
Jacques ROBERT
Professeur de droit public
à l'Université de Panthéon-Assas (Paris 2)
Membre du Conseil constitutionnel
Président du Centre français de droit comparé
Dans la catégorie — aujourd'hui classique — des « libertés de
l'esprit », la liberté religieuse ou « liberté de la foi » occupe une place
particulière en raison même de son contenu à la fois très proche de
l'intimité personnelle de chacun et chargé d'une lourde histoire complexe,
dramatique et heurtée.
La liberté religieuse, qui n'est qu'un aspect particulier de la liberté
d'opinion (elle s'intègre en effet en elle en même temps qu'elle la dépasse)
réunit en effet deux éléments :
Elle est d'abord une liberté « individuelle » puisqu'elle consiste, pour
l'individu, à donner ou non son adhésion intellectuelle à une religion, à
la choisir librement ou à la refuser.
Mais elle est aussi une liberté « collective » en ce sens que, ne
s 'épuisant pas dans la foi ou la croyance, elle donne nécessairement
naissance à une « pratique » dont le libre exercice doit être garanti. Il
faut en effet assurer le libre exercice des cultes si l'on veut pleinement
garantir la liberté religieuse. Ce qui suppose que tout mouvement religieux
doit être maître de son activité, donc posséder le droit de s'organiser
librement.
Cette libre organisation pose inévitablement le problème délicat des
rapports des religions — ou des églises — avec l'Etat (1).
(1) V. Jacques ROBERT avec coll. Jean DUFFAR, Droits de l'homme et libertés
fondamentales, 5e éd., Paris, Montchrestien, 1993, 808 pages. REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARÉ 2-1994 630
II convient de noter tout de suite ici qu'il n'y, a point d'étroite
concordance entre tel système de rapports entre les Églises et l'État et
le respect ou la méconnaissance de la liberté religieuse. Simplement, telle
formule de relations peut aller davantage de pair — que telle autre —
avec le respect de la liberté religieuse — ...
On peut en effet parfaitement imaginer qu'un État qui entretient avec
telle ou telle religion des rapports particulièrement étroits, voire même
qui s'identifie avec une Église donnée, soit d'une totale tolérance à l'égard
des autres confessions. Chacun a présent à l'esprit l'exemple d'États qui,
privilégiant la place et le statut d'une religion déterminée, admettent avec
un grand libéralisme la présence et l'exercice d'autres cultes... L'identifica
tion d'un État à telle religion n'est donc nullement — au plan conceptuel
— synonyme d'intolérance à l'égard des autres.
La France, pour sa part, a expérimenté, tout au long de son histoire,
à peu près toutes les formules de rapports entre les religions et l'État et
si elle a finalement opté pour le régime dit « de laïcité », c'est qu'elle
l'a trouvé, au début du XXe siècle, plus conforme que d'autres à sa vocation
et à ses idéaux.
Après la longue expérience de la religion d'État pratiquée sous l'An
cien Régime qui, en contrepartie de la situation privilégiée reconnue à
l'Église catholique, réservait à l'État d'importants droits sur elle, la France
tenta, sous la Révolution la formule — vite avortée — de la « francisation »
de la religion catholique et des « cultes nationaux », avant d'évoquer,
pour la première fois dans son histoire et d'ailleurs bien timidement (dans
la Constitution de l'An III), l'idée que nul ne devrait être forcé de contri
buer aux dépenses d'un culte, la République n'en salariant aucun.
Promulgué par la loi du 18 Germinal AnX et complété par des
articles organiques, le Concordat de 1801 régira ensuite les rapports entre
les Églises et l'État pendant un siècle jusqu'à l'adoption de la loi de
séparation en 1905.
Le principe général du régime concordataire est déjà celui de la liberté
des cultes et des religions mais certains bénéficient d'une reconnaissance
officielle alors que d'autres sont simplement licites, les premiers seuls
étant érigés en services publics.
C'est par la loi du 9 décembre 1905 que la France allait définitivement
sortir de ce régime concordataire de « publicisation » des cultes pour
adopter le — qu'elle connaît encore aujourd'hui — de la « sépara
tion », qualifié plus généralement de « régime de laïcité ».
La conception actuelle de la liberté religieuse en France se trouve
ainsi — au plan juridique — tout entière incluse et exprimée par les deux
articles de la loi du 9 décembre 1905 portant séparation de l'Église et
de l'État :
— Article 1er : « La République assure la liberté de conscience. Elle
garantie le libre exercice des cultes, sous les restrictions éditées dans
l'intérêt de l'ordre public ».
— Article 2 : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subven
tionne aucun culte ». J. ROBERT : LA LIBERTE RELIGIEUSE 631
De ces deux articles découle tout le régime juridique des cultes en
France. C'est dans leur cadre que s'est déployée depuis près d'un siècle,
en France, la liberté religieuse.
Mais, sous la pression, soit de nouveaux mouvements religieux, soit
d'anciennes confessions renaissantes, soit de groupes sectaires ou scission
nistes qui radicaliseraient leur doctrine, n'assistons-nous pas aujourd'hui,
en France, à l'éclosion et au développement d'une nouvelle conception
de la laïcité ?
I. LA LIBERTÉ RELIGIEUSE
TRADITION DE LA FRANCE RÉPUBLICAINE
La loi du 9 décembre 1905 est très explicite. Elle affirme à la fois
la neutralité de l'État et le respect de la liberté de conscience.
A. — La neutralité de l'État
Le fait que la République ne reconnaisse plus aucun culte ne signifie
point que l'Etat méconnaisse l'existence de religions, d'Églises ou de
mouvements cultuels. Cela veut seulement dire qu'est définitivement aban
donné le système dit des « religions reconnues ». La République a voulu
effacer toute distinction entre les anciens cultes reconnus (le culte catholi
que, les deux principales Églises protestantes, le culte israélite) et les
autres. Elle les met désormais tous sur le même plan.
La « non-reconnaissance » ne signifie point non plus que l'État ne
souhaite pas entretenir de bonnes relations avec les religions. La non-
reconnaissance n'est pas une attitude d'hostilité ou de méfiance. Elle
implique que le fait religieux, contrairement aux solutions concordataires,
cesse d'être un fait public.
La conséquence inéluctable en est que la République ne peut plus
salarier ni subventionner un culte.
Les implications de la suppression du service public de l'Église ont
été à l'origine nombreuses : disparition du ministère et du budget des
cultes ; suppression des traitements octroyés aux ministres des cultes ;
cessation de l'intervention de l'État dans l'organisation des cultes, en
particulier dans la nomination des dignitaires ecclésiastiques...
Dès l'instant, par ailleurs, que les Églises n'accomplissent plus une
mission de service public, il n'y a plus d'organisation « publique » des
cultes et donc plus de droit de regard « institutionnel » de la puissance
publique sur leur exercice, même si un service chargé des cultes existe
toujours, en France, au ministère de l'Intérieur...
Le corollaire de cette suppression du service public de l'Église, c'est
la liberté totale laissée à l'Église — à toutes les Églises — de s'organiser
et

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