La répudiation dans l Islam d aujourd hui . - article ; n°3 ; vol.14, pg 521-548
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La répudiation dans l'Islam d'aujourd'hui . - article ; n°3 ; vol.14, pg 521-548

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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1962 - Volume 14 - Numéro 3 - Pages 521-548
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1962
Nombre de lectures 70
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Y. Linant de Bellefonds
La répudiation dans l'Islam d'aujourd'hui .
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 14 N°3, Juillet-septembre 1962. pp. 521-548.
Citer ce document / Cite this document :
Linant de Bellefonds Y. La répudiation dans l'Islam d'aujourd'hui . In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 14 N°3, Juillet-
septembre 1962. pp. 521-548.
doi : 10.3406/ridc.1962.13419
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1962_num_14_3_13419LA RÉPUDIATION DANS L'ISLAM D'AUJOURD'HUI
Maître de Y. recherches LINANÏ au Centre DE national de la recherche scientifique
La répudiation discrétionnaire (lalâq), privilège exclusif du mari de
mettre fin au mariage, quand bon lui semble, et sans avoir besoin de re
courir à la justice, demeure encore de nos jours, de l'avis des observat
eurs les plus qualifiés, d'un usage pour le moins excessif dans toutes les
classes de la société musulmane, en dépit des mesures légales ou admin
istratives prises ces dernières années, en Orient et dans le Maghreb, en
vue d'en gêner le fonctionnement, et d'en limiter les méfaits.
Ni l'antique réprobation morale dans laquelle on a toujours feint de
tenir cette prérogative du mari ni sa disparition de tous les autres sys
tèmes législatifs actuels (1) n'ont pu discréditer, d'une manière sensible,
une institution à laquelle restent attachés la majorité des 400 millions
d'être humains — ou tout au moins les maris — qui, en matière de statut
personnel, continuent à être régis par les règles du droit musulman (2).
Cette dernière réserve vise, d'une part, les populations d'Europe et d'Asie,
réputées de confession musulmane mais qui, par suite de leur soviétisa-
tion plus ou moins profonde, ont été amenées à abandonner toute la
construction législative de l'Islam et, partant, la répudiation unilatérale
et, d'autre part, les Turcs qui, ayant adopté pour le droit de la famille
le Code civil suisse, dans sa totalité, ne pouvaient, bien entendu, y intro
duire une institution si éloignée des concepts occidentaux. Il n'en sera
donc pas question dans l'exposé qui suit. Ne faudrait-il pas en exclure
aussi les Tunisiens ? Le cas de la Tunisie est très particulier. Lors de
la promulgation du nouveau Code du statut personnel, en 1956, le minist
re de la justice n'avait pas hésité à affirmer que, d'une façon générale,
ceux qui l'avaient élaboré ne s'étaient guère éloignés de la doctrine offi-
(1) Sauf en droit hébraïque (biblico-talmudique) où elle a, les mêmes caractères qu'en
droit musulman, à savoir d'être à la fois permise et réprouvée : « Je hais la répudiation,
dit Yahweh » (Livre de Malachie, II, 16). On trouve la répudiation pratiquée dans les com
munautés juives qui continuent à être régies en matière de statut personnel par le droit
talmudique. Cf. pour les communautés juives du Maroc, Abraham Zagouri, Le divorce
d'après la loi talmudique chez les Marocains de confession israélitc et les réformes en la mat
ière, Paris 1958.
(2) Le tribunal civil du Caire (on précise bien, non pas le tribunal religieux) statuait,
ainsi le 16 décembre 1952 : « II est de principe en droit musulman que la répudiation est
soumise à la seule volonté du mari ; qu'il s'agit là d'une règle fondamentale qui est à la
base de la famille en Islam », Revue des sommaires, V 354. .

O2Ü LA REPUDIATION DANS L ISLAM D AUJOURD'HUI
cielle de l'Islam, et, cependant, l'article 30 du code dispose que « le di
vorce (et le mot embrasse toutes les formes de rupture tenant à la vo
lonté des époux) ne peut avoir lieu que par devant le tribunal ». N'était-
ce pas condamner la répudiation discrétionnaire, dite aussi extrajudi
ciaire qui, par définition, s'effectue en dehors de toute intervention du
juge ?
Il importe, avant de répondre à la question, de bien préciser ce qu'on
est convenu d'entendre quand on dit que la répudiation est extrajudic
iaire. Si la répudiation a lieu, en principe, sans que le juge en soit même
prévenu, cela tient au fait que, le mari disposant d'un pouvoir souverain,
n'étant jamais tenu de donner une justification à son acte, on n'aperçoit
pas, tout de suite, en quoi consisterait le rôle du juge. Celui-ci n'aurait
pas le droit de s'informer des raisons qui ont décidé le mari à rompre
le mariage, encore moins d'exiger que ce dernier produise des preuves
à l'appui de griefs qu'il pourrait avoir à rencontre de sa femme et qu'il
entend garder secrets. Ainsi, le juge-arbitre, le juge exerçant une vérita
ble juridiction contentieuse, n'a pas de place dans le fonctionnement
de cette institution. Mais si le juge, sans dire le droit, sans trancher un
conflit, sans exiger que le mari légitime son acte, sans disposer d'aucun
pouvoir d'appréciation sur les raisons plus ou moins secrètes qui ont dé
terminé celui-ci à se séparer de sa femme, se contente, dans les limites
de sa juridiction gracieuse, de faire enregistrer la décision souveraine
du mari, ou de l'homologuer, ou d'en contrôler la régularité formelle
par exemple, alors, on ne voit pas pourquoi les plus farouches défenseurs
de la tradition s'offusqueraient d'une intervention qui ne touche en rien
au pouvoir absolu, reconnu au mari, et au mari seul, de rompre à sa
guise le mariage.
Or, le dernier aliéna de l'article 31 du code tunisien autorise le juge
à prononcer le divorce sans que les époux aient eu à donner de motif
à leur demande de séparation. Cela suffit à apparenter ce pseudo-divorce,
loul au ij.io.ma quäuu î'iîiilia.U.ve câl piiâc pcii ic man, à. la vieille iepuuia-
tion du droit classique sous les réserves que nous aurons à exposer plus
loin (2 bis). Ceci explique aussi que nous n'ayons pas cru pouvoir négli
ger complètement la solution tunisienne.

• •
Si l'on s'accorde, en général, à tenir pour très fréquentes les répu
diations dans toutes les contrées du monde régies par le droit musulman,
il est plus délicat de mesurer cette fréquence d'une façon précise. La
difficulté confine même à l'impossibilité, dans les nombreux pays où la
répudiation a conservé le caractère d'acte « domestique » qui a été le
sien pendant des siècles, par quoi il faut entendre qu'elle n'y est suivie
d'aucun enregistrement, fût-il simplement administratif. Cette circon
stance explique très probablement que, s'agissant de tel pays — en fait
l'Inde anglaise avant la partition — on ait pu écrire que le talâq y
était peu pratiqué (3). Il est vrai qu'à cette époque, les Musulmans sun-
(2 bis) Dans le même sens, v. Jambu-Merlin, Le droit privé en Tunisie, Paris 1960,
p. 262.
(3) Bousquet, Du droit musulman et de son application effective dans le monde, Alger
1949, p. 59. LA RÉPUDIATION DANS i/ISLAAi D'AUJOURD'HUI -)23
nites ou orthodoxes (hanafites) y vivaient au voisinage des Chiites hété
rodoxes pour la plupart duodécimains (4). Or, dans le droit de cette
secte, la plus importante de l'Islam non sunnite, la répudiation y est r
églementée d'une façon beaucoup plus stricte qu'en droit sunnite. De sur
croît, les Chiites admettent le mariage temporaire, auquel il est permis
de fixer un terme très éloigné (90 ans par exemple). Comme l'adjonction
d'un terme a pour effet de priver le mari du droit de répudier (5), il en
résulte cette conséquence, à première vue paradoxale, que ce sont ces
mariages, dits temporaires, qui en fait durent le plus longtemps. Il est
donc possible que, dans l'Inde britannique, l'exemple des duodécimains
ait exercé une certaine influence sur leurs coreligionnaires hanafites, les
amenant à user de la répudiation avec plus de modération que dans le
reste de l'Islam. Nous aurons du reste l'occasion de revenir à la doctrine
chiite, à laquelle on est redevable de quelques-unes des réformes actuell
es non seulement en matière de répudiation mais dans d'autre domaines
du droit. Pour nous en tenir à un pays — l'Egypte — où les répudiations
sont, en fait, presque toujours enregistrées, dès lors facilement rec

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