Le droit anglo-musulman - article ; n°2 ; vol.6, pg 250-263
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1954 - Volume 6 - Numéro 2 - Pages 250-263
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1954
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

S.G. Vesey-Fitzgerald
Le droit anglo-musulman
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 6 N°2, Avril-juin 1954. pp. 250-263.
Citer ce document / Cite this document :
Vesey-Fitzgerald S.G. Le droit anglo-musulman. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 6 N°2, Avril-juin 1954. pp. 250-
263.
doi : 10.3406/ridc.1954.8992
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1954_num_6_2_8992DROIT ANGLO-MUSULMAN* LE
PAR
S.G-. Vbsby-FitzGbrald
Ancien professeur de législations orientales à l'Université de Londres
Chargé des cours de droits musulman et hindou aux Inns of Court, Londres
Le spectacle que je vais vous présenter est celui du choc d'une
force irrésistible sur une masse immobile ; d'un côté le droit anglais,
se rajeunissant et s' enrichissant toujours (malgré les grandes codif
ications dont il a été l'objet aux Indes et aux Colonies) par le moyen
des décisions judiciaires, moyen qui lui assure qu'il suivra toujours
le courant des besoins de la société contemporaine ; de l'autre côté le
droit musulman, fondé en théorie sur l'immuable volonté de Dieu mais
« enchaîné » (1) (au moins jusqu'à la fin du dix-neuvième siècle) « dans
une sorte de cadre rigide » accentué par le formalisme verbal et la
subtilité scholastique devenue de règle. En droit anglo-hindou, il a
été possible de conclure un mariage plus ou moins heureux entre les
deux systèmes. Rien de semblable n'a pu être effectué dans le droit
anglo-musulman.
Le titre que j'ai choisi pour mon discours est Le droit anglo-
mahométan ou anglo -musulman , c'est-à-dire le droit musulman tel
qu'il a été exposé par les décisions des tribunaux de l'empire britan
nique. Mais, dès le début, je dois signaler que ce terme « anglo-maho-
métan » ou « anglo-musulman », quoique bien connu, n'a jamais été
accepté officiellement. Les textes législatifs se sont, pour la plupart,
bornés à constater quelles parties du droit musulman seront appli
quées et à quelles personnes. Les juges, aussi, n'ont jamais tenté,
sciemment (2), de mélanger le droit musulman avec le droit anglais
ou même de modifier des points particuliers de la Sharî'a. Le but que
l'on s'est toujours proposé a été de trouver et d'appliquer les dispo
sitions de la Sharî'a telles qu'elles furent élaborées par les grands
juristes musulmans — dans la mesure, du moins, où elles font partie
(*) Communication faite à la Faculté de droit de l'Université de Paris, le
2 décembre 1953.
(1) Jabal Abdoli : Législation iranienne actuelle, p. 173. Ce qu'il écrivait sur
le droit duodecimain s'applique à toutes les écoles.
(2) V. cependant, infra, p. 259, Bazayet Hossain v. Doolichand, (1878) L. R. 5,
I. A. 211, où le droit musulman est complètement ignoré. DROIT ANGLO-MUSULMAN 251 LE
des habitudes de vie des peuples musulmans auxquels nous étions
chargés de rendre la justice. « Les règles de la Sharî'a », dit-on,
« sont rigides et c'est par la lettre exacte de la Sharî'a qu'il faut sou
tenir ou rejeter la cause ». Tout de même, en cherchant à appliquer
le droit musulman on ne pouvait éviter d'y apporter parfois de gran
des modifications. Je pense que vous avez, vous-mêmes, observé un
phénomène semblable dans l'application du droit musulman par les
tribunaux d'Algérie. On peut trouver encore quelque chose de sem
blable dans les pays musulmans complètement autonomes, tels que
l'Egypte et l'Iran. Parmi leurs jurisconsultes actuels, plusieurs ont
étudié le droit à Paris et quelques-uns l'ont étudié à Londres ou en
Amérique. Tous ceux-là ne sauraient pas et, pour la plupart, ne veu
lent pas éviter l'application des idées qu'ils ont reçues dans leur dis
cipline occidentale à l'interprétation de leur propre système légis
latif (3).
Mais quand tout cela a été dit, le cas du droit anglo-mahométan
est exceptionnel, sinon en qualité, du moins en quantité. Les modifi
cations sont plus grandes et cela pour plusieurs raisons et la consi
dération sera différente suivant les divers pays de l'Empire (ou,
comme l'on dit aujourd'hui, du Commonwealth) britannique : en
Nigérie, par exemple, à Zanzibar, en Malaisie, aux Indes. Pour ne
pas oublier la forêt en comptant les arbres, je suis obligé de limiter
la plus grande partie de mon discours à l'application de la loi par les
tribunaux de ce qui était, jusqu'à l'an 1946 la British India, c'est-à-
dire les provinces des Indes directement administrées par le pouvoir
britannique, à l'exclusion des territoires des princes indiens demi-
souverains. Mais qu'il me soit permis (entre parenthèses et par excep
tion) de signaler la grande différence qui existe entre l'empire du droit
musulman aux Indes d'un côté, et, de l'autre, son autorité subordon
née dans la Malaisie. En Malaisie, chaque individu, sans égard à sa
religion ou sa race, qu'il soit chrétien, musulman, hindou ou chi
nois, est assujetti, même pour son statut personnel, aux principes du
droit anglais (common law et equity) et les lois personnelles des
religions orientales (la Sharî'a, par exemple) n'ont force que pour
modifier le droit anglais dans son application à leurs adeptes. Mais,
aux Indes , l'empire de la quoique sur un domaine étroit, est
absolu. Quel est ce domaine étroit ? Quelles sont les branches que
l'on a enlevées à la Sharî'a et les bornes qu'on lui a imposées ?
Couper et limiter, c'est l'œuvre du législateur. Mais les raisons
qui poussent le législateur sont à examiner. Le problème, aux Indes,
était de bâtir parmi les ruines des puissances déjà déchirées un édi-
(3) L'influence du droit fiançais sur la législation de FEgypte est bien connue:
voir, par exemple le Statut réel, de Quadri Pacha. Il y a quelques années, on m'a
demandé mon avis sur une liste de termes juridiques arabes avec équivalents
français, que Ton se proposait d'insérer dans un grand dictionnaire arabe-français
sous le patronage du Gouvernement d'Egypte. J'ai dû répondre que la liste que
Ton m'avait montrée n'était point une liste des expressions arabes traduites en
français mais plutôt des expressions françaises rendues en arabe. 252 LE DROIT ANGLO -MUSULMAN
fice nouveau de justice dont les portes seraient ouvertes à tout le
monde, sans égard à sa religion ou sa race. Dans les provinces où
les Hindous sont les plus nombreux, aussi bien que dans celles où la
majorité est musulmane, les Hindous et les Musulmans vivent, côte
à côte, dans les mêmes villes et les mêmes villages. Il ne nous était
donc pas possible d'accorder à une législation religieuse quelconque
un domaine plus étendu que celui de ses propres fidèles. Pour les
négoces quotidiens entre les hommes, c'est-à-dire le droit du com
merce et des obligations (et il en va de même des délits civils), pour
la procédure civile et criminelle et la théorie des preuves, pour le
droit foncier et le droit pénal, il n'était possible d'avoir qu'un seul
système. De ce fait, il ne reste à la Sharî'a que le droit du mariage
et de sa dissolution, de la famille, des successions, des legs, de l'a
dministration des biens des défunts, des fondations pieuses, et, par
deux exceptions très curieuses dans le statut réel, de la donation et
du retrait.
Mais il faut reconnaître que l'on ne peut pas couper un système
de droit en morceaux comme un fromage. Chaque règle dépend d'au
tres règles et on peut toujours craindre qu'en abrogeant une partie
on méconnaisse le reste.
Il me suffira d'en citer trois exemples : le nasab ou filiation, le
li'ân ou répudiation par anathème, et l'aveu de paternité. Ces trois
institutions ont subi une métamorphose complète en droit anglo -mu
sulman parce que l'on a ignoré leurs racines dans le pénal de
l'Islam.
Quant au nasab ou filiation, la Sharî'a admet, autant que les
législations occidentales, le principe pater is est quem nuptiœ demons-
trant. Mais, pour le droit anglais, le mariage est le seul fondement de
la légitimité. Pour le droit musulman l'essen

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