Le droit international dans un monde pluriculturel - article ; n°2 ; vol.38, pg 583-599
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1986 - Volume 38 - Numéro 2 - Pages 583-599
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre-Marie Dupuy
Le droit international dans un monde pluriculturel
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 38 N°2, Avril-juin 1986. pp. 583-599.
Citer ce document / Cite this document :
Dupuy Pierre-Marie. Le droit international dans un monde pluriculturel. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 38 N°2,
Avril-juin 1986. pp. 583-599.
doi : 10.3406/ridc.1986.2434
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1986_num_38_2_2434R.I.D.C. 2-1986
LE DROIT INTERNATIONAL
DANS UN MONDE PLURICULTUREL
par
Pierre-Marie DUPUY
Professeur à l'Université de droit, d'économie
et de sciences sociales de Paris
Directeur du Centre de recherches internationales (Paris 2)
Poser le problème du droit international dans un monde pluriculturel
indique d'emblée le constat d'une inadaptation relative et d'une difficulté
réelle de la pratique d'un droit hérité pour l'essentiel partie du
monde (l'Occident) dans une société internationale devenue à tous les sens
du terme véritablement universelle.
1. — L'unité des origines : chacun sait la provenance du droit inter
national classique, son origine occidentale et la contribution successive à
sa formation des légistes romains, des théologiens chrétiens, puis du droit
naturel laïcisé par Grotius qui préparait ainsi la voie à l'avènement du
positivisme juridique.
Il est sans doute inutile de revenir en détail sur les caractères de
ces différentes phases d'une évolution de près de vingt siècles. On peut,
d'ailleurs, considérer que la phase ultime de la période proprement occi
dentale de formation du droit des gens occulte dans une certaine mesure
l'apport des conceptions morales issues des périodes précédentes. Le droit
international que les nouveaux États allaient trouver lors de leur intrusion
dans une société internationale à l'élaboration de laquelle ils n'avaient
pris aucune part (à l'exception, peut-être, des pays latino-américains) est
d'abord dominé par les conceptions issues de la pratique diplomatique et de 584 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARÉ 2-1986
la doctrine du XIXe siècle européen. Organisé dans le cadre du « concert
européen », le « droit public européen » qui devait fournir certains des
traits essentiels du droit international de la première partie de ce siècle,
était à la fois marqué par la primauté de la volonté souveraine de l'État et
par la prépondérance du consensualisme.
Si l'on devait citer les influences philosophiques à l'origine de ces
caractères, plutôt que de se référer, comme il est de coutume, à Grotius
ou Vatel, sans doute pourrait-on tout aussi bien citer Kant qui, le premier,
avait formulé de la façon la plus explicite la doctrine de l'autonomie de la
volonté, ou Hegel dont on sait tout l'apport à la théorie moderne de
l'État (l).Pour travestir cependant une formule célèbre dans un autre
domaine, on serait tenté de dire qu'on pardonnait à l'époque au droit
international de gouverner mal, pourvu qu'il gouvernât peu les relations
entre les États. Il ne s'agissait plus, comme cela avait été le cas par le
passé, lorsque l'Église médiévale ou les théologiens de la Renaissance
avaient prétendu imposer à la Communauté des peuples des valeurs univers
elles, de s'ingérer dans la motivation des décisions souveraines. La tâche
presqu'exclusive du droit sera au XIXe siècle et jusqu'au Traité de Versaill
es de 1920, d'organiser la co-existence de souverainetés rigoureusement
égales, du moins dans leur perception juridique, la seule qui soit reçue à
l'époque. De ce point de vue là, le XIXe siècle s'inscrit aussi dans la
tradition inaugurée longtemps auparavant, dont les fondements se trouvent
notamment dans une conception patrimoniale de la souveraineté : c'est
ainsi que la négociation des conditions de paix, entraînant le plus souvent
des ajustements ou des transferts territoriaux, fournit au droit des traités
sa principale occasion d'exercice. La coutume internationale est réduite à
quelques principes essentiels, comme celui de liberté des mers, tout entier
animé par la préoccupation d'affranchir les États de contraintes collectives
plutôt que de les soumettre à des devoirs réciproques. Et lorsque l'on se
trouve confronté au problème des lacunes du droit international, après
1920, au moment où il s'agit de déterminer le droit substantiel sur la base
duquel la nouvelle juridiction internationale (Cour permanente de justice
internationale) devra rendre ses arrêts, on songe naturellement à mention
ner les « principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées »
(article 38, 1° d) du Statut de la C.P.J.I.). Par nations civilisées, on entend
bien évidemment à l'époque nations occidentales dont les systèmes juridi
ques et les traditions judiciaires fondamentalement apparentés pourront
(1) L'ouvrage de référence sur le sujet est constitué par les actes du colloque conjoint
de l'Académie de droit international de La Haye et de l'Université des Nations Unies,
L'avenir du droit international dans un monde multiculturell The future of international law in
a multicultural world, 17-19 nov. 1983, Martinus Nijhoff, 1984 (ci-après cité Colloque 1983
précédé du nom du contributeur cité). Sur les origines philosophiques du droit international
classique v. ainsi F. EWALD, Colloque 1983, spec. pp. 50-56 ; v. aussi Peter HAGGEN-
MACHER, Grotius et la doctrine de la guerre juste, Genève, Publications de l'Institut universi
taire des Hautes Études Internationales, P.U.F., 1983, 680 p. ; on trouvera également
plusieurs études intéressantes dans Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, méthode
d'analyse du droit international, Mélanges offerts à Charles Chaumont, Pédone, 1984 (ci-après
cité Mélanges Chaumont). P.M. DUPUY : DROIT INTERNATIONAL ET MONDE PLURICULTUREL 585
fournir au nouveau juge international un vivier de règles, aisément adapta
bles au jugement des rapports entre États.
2. — Sans doute pourrait-on déjà discerner au cours de cette période
(allant pour l'essentiel de 1815 à 1920) les premières manifestations d'une
contestation ou d'une évolution qui apparaîtront dans les phases ultérieur
es. C'est ainsi que, dès la seconde moitié du XIXe siècle, on observe
l'institution des premières « unions administratives internationales »
comme l'Union postale universelle qui date de 1878 ou l'Union radiotélé-
graphique internationale de 1906 ; leur création manifeste que, désormais,
la coexistence minimale ne va pas sans une coordination des services
techniques et des équipements dont l'apparition est liée à la première
révolution industrielle. D'un point de vue plus substantiel, au cours de cet
âge de sécularisation d'un droit réputé parfaitement neutre parce qu'il
aurait exclu définitivement la référence à des valeurs ou idéologies
transcendantes s'imposant aux États, se manifestent certaines ambitions
quant à l'assignation de fins éthiques autant que politiques au droit des
Gens : c'est en effet à la fin du XIXe siècle qu'au travers des tentatives
successives de substitution de l'arbitrage à la guerre, reprennent vie, dans
un contexte d'ailleurs nouveau, les théories de « la Paix par le Droit ».
C'est au tournant du siècle, avec les Conférences de La Haye, que l'on
tente de limiter ou tout au moins de régulariser les conditions du recours
à la force armée, efforts annonçant déjà les tentatives qui aboutiront à la
création de la Société des Nations et plus tard, de l'Organisation des
Nations Unies.
Néanmoins, pour l'essentiel, il y a accord entre les puissances domi
nantes pour assigner au droit des fonctions restreintes qui se ramènent à
l'organisation d'une coexistence normalisée par voie d'accords express ou
tacites. Le droit n'a lieu de s'exercer qu'entre des nations issues de la même
civilisation. Les grands empires étrangers, comme la Chine ou le Japon,
encore mal sorti de son long Moyen- Age, campent en dehors de ce club.
Quant au reste des peuples qui habitent la plan

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