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Variétés historiques et littéraires, Tome IX La Journée des Dupes. Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon e XVIII siècle
1 La Journée des Dupes.
Il y a bien des choses importantes, curieuses et très particulières arrivées pendant le sejour de la Cour à Lyon, sur lesquelles on pourroit s’etendre, et qui preparèrent peu à peu l’evenement qui va être presenté, auquel il faut venir sans s’arrêter aux preliminaires. Il suffira de dire qu’il n’y fut rien oublié pour perdre le cardinal de Richelieu, et que le roy entretint la reyne d’esperances, sans aucune positive, la remettant à Paris pour prendre resolution sur une demarche aussi importante.
Soit que la reyne, c’est toujours de Marie de Medicis dont on parle, comprist qu’elle n’emporteroit pas encore la disgrâce du cardinal, et qu’elle avoit encore besoin de tems et de nouveaux artifices pour y reussir ; soit que, desesperant, elle se fust enfin resolue au raccommodement ; soit qu’elle ne l’eust feint que pour faire un si grand eclat qu’il effrayast et entraînast le roy ; ou que, sans tant de finesse, son humeur etrange l’eust seule entraînée sans dessein precedent, elle declara au roy, en arrivant à Paris, que, quelque mecontentement extrême qu’elle eust de l’ingratitude et de la conduite du cardinal de Richelieu et des siens à son egard, elle avoit enfin gagné sur elle de lui en faire un sacrifice, et de les recevoir en ses bonnes grâces, puisqu’elle luy voyoit tant de repugnance à le renvoyer, et tant de peine à voir sa mère s’exclure du conseil à cause de la presence de ce ministre, avec qui elle ne feroit plus de difficulté de s’y trouver desormais, par amitié et par attachement pour luy, roy.
Cette declaration fut reçue du roy avec une grande joie, et comme la chose qu’il desiroit le plus et qu’il esperoit le moins, et qui le delivroit de l’odieuse necessité de choisir entre sa mère et son ministre. La reyne poussa la chose jusqu’à l’empressement, de sorte que le jour fut pris au plus prochain (car on arrivoit encore 2 de Lyon , les uns après les autres), auquel jour le cardinal de Richelieu et sa nièce 3 de Combalet , dame d’atours de la reyne, viendroient, à sa toilette, recevoir le pardon et le retour de ses bonnes graces. La toilette alors, et longtems depuis, etoit une heure où il n’y avoit ny dames ny courtisans, mais des personnes en très petit nombre, favorisées de cette entrée, et ce fut par cette raison que ce tems fut choisi. 4 La reyne logeoit à Luxembourg, qu’elle venoit d’achever , et le roy, qui alloit et 5 6 venoit à Versailles, s’etoit etabli à l’hôtel des Ambassadeursextraordinaires, rue de Tournon, pour être plus près d’elle.
Le jour venu de ce grand raccommodement, le roy alla à pied de chez luy chez la reyne. Il la trouva seule à sa toilette, où il avoit été resolu que les plus privilegiés n’entreroient pas ce jour-là : en sorte qu’il n’y eut que trois femmes de chambre de la reyne, un garçon de chambre ou deux, et qui que ce soit d’hommes, que le roy et 7 mon père, qu’il fit entrer et rester. Le capitaine des gardes même fut exclu. Madame de Combalet, depuis duchesse d’Aiguillon, arriva comme le roy et la reyne parloient du raccommodement qui s’alloit faire en des termes qui ne laissoient rien à desirer, lorsque l’aspect de madame de Combalet glaça tout à coup la reyne. Cette dame se jeta à ses pieds avec tous les discours les plus respectueux, les plus humbles et les plus soumis. J’ai ouï dire à mon père, qui n’en perdit rien, qu’elle y mit tout son bien-dire et tout son esprit, et elle en avoit beaucoup. À la froideur de la reyne, l’aigreur succeda, puis incontinent la colère, l’emportement, les plus amers reproches, enfin un torrent d’injures, et peu à peu de ces injures qui ne sont connues qu’aux halles. Aux premiers mouvements, le roy voulut s’entremettre ; aux reproches, sommer la reyne de ce qu’elle luy avoit formellement promis, et sans qu’il l’en eust priée ; aux injures, la faire souvenir qu’il etoit present, et qu’elle se manquoit à elle-même. Rien ne peut arrêter ce torrent. De fois à autre, le roy regardoit mon père et lui faisoit quelque signe d’etonnement
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