Les retraites en Chine : organisation et défis futurs - article ; n°1 ; vol.6, pg 145-151
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Santé, Société et Solidarité - Année 2007 - Volume 6 - Numéro 1 - Pages 145-151
Le système de retraite chinois reste encore, dans une large mesure, à construire, notamment pour les populations rurales qui représentent environ les deux tiers de la population. C'est le principal défi que doit affronter le gouvernement chinois au cours des prochaines années. En ce qui concerne les populations salariées urbaines, le taux de couverture reste encore relativement faible, inférieur à 50%. Là aussi, des progrès sont nécessaires. Malgré une démographie qui se rapproche des pays les plus développés et qui devrait entraîner un «vieillissement» assez rapide de la population chinoise, les besoins de financement apparaissent très supportables et ne devraient absorber qu'une très faible partie de la croissance chinoise. En Chine, comme dans les autres pays de la planète, le financement des retraites est bien davantage un choix de société qu'une contrainte économique.
The pension system in China remains, to a large extent, to be built, in particular for the rural populations who represent approximately two-thirds of the total population. This is the main challenge that the Chinese government must face over the coming years. Moreover, the rate of coverage of the urban salaried populations is still relatively low, less than 50%, and progress is also needed in this regard. Despite a demography which is similar to that of the most developed countries and should lead to quite a rapid “aging” of the Chinese population, the needs for funding appear to be highly bearable and should absorb only a very small share of Chinese growth. In China, as in other countries on the planet, pension funding is much more a societal choice than an economic constraint.
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Publié le 01 janvier 2007
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Échos d’ailleurs
Les retraites en Chine: organisation et dÈfis futurs
Pierre ConcialdiÐFRANCE Chercheur ‡ lÕInstitut de recherche Èconomiques et sociales
Le systËme de retraite Résumé chinois reste encore, dans une large mesure, ‡ construire, notam-ment pour les populations rurales qui reprÈsentent environ les deux tiers de la population. C'est le principal dÈfi que doit affronter le gouvernement chinois au cours des prochaines annÈes. En ce qui concerne les populations salariÈes urbaines, le taux de couverture reste encore relativement faible, infÈrieur ‡ 50%. L‡ aussi, des progrËs sont nÈcessaires. MalgrÈ une dÈmographie qui se rapproche des pays les plus dÈvelop-pÈs et qui devrait entraÓner un ´vieillisse-mentª assez rapide de la population chinoise, les besoins de financement apparaissent trËs supportables et ne devraient absorber qu'une trËs faible partie de la croissance chinoise. En Chine, comme dans les autres pays de la planËte, le financement des retraites est bien davantage un choix de sociÈtÈ qu'une contrainte Èconomique.
The pension system in Abstract China remains, to a large extent, to be built, in particular for the rural populations who represent approximately two-thirds of the total population. This is the main challenge that the Chinese government must face over the coming years. Moreover, the rate of coverage of the urban salaried populations is still relatively low, less than 50%, and progress is also needed in this regard. Despite a demography which is sim-ilar to that of the most developed countries and should lead to quite a rapid ÒagingÓ of the Chinese population, the needs for funding appear to be highly bearable and should absorb only a very small share of Chinese growth. In China, as in other countries on the planet, pension funding is much more a societal choice than an economic constraint.
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ans tous les pays, les systËmes de retraite constituent des cons-D tructions complexes, modelÈes par lÕhistoire. CÕest pourquoi il est souvent difficile de synthÈtiser la situa-tion du systËme de retraite. CÕest particuliË-rement vrai dans le cas de la Chine o˘ le systËme de retraite est trËs fragmentÈ, avec diffÈrents rÈgimes (pour les salariÈs urbains, la population rurale et diffÈrentes catÈgories de fonctionnaires, notamment) qui relËvent dÕinstitutions diffÈrentes et ne proposent pas les mÍmes prestations.
Par ailleurs, il existe comme partout un dÈcalage entre, dÕune part, les textes qui or-ganisent ou orientent lÕÈvolution des rÈgimes de retraite et, dÕautre part, la mise en Ïuvre effective de ces textes. Ce dÈcalage ne tient pas seulement, comme dans beaucoup de pays, ‡ la capacitÈ de lÕ…tat ‡ faire respecter la loi. Il rÈside aussi dans la mÈthode gÈnÈ-ralement employÈe par le gouvernement central pour impulser sa politique. Dans bien des cas, le gouvernement central fixe des objectifs qui font dÕabord lÕobjet dÕexpÈri-mentations dans certaines provinces avant dÕÍtre gÈnÈralisÈes. Ces textes constituent davantage des directives que des prescrip-tions impÈratives. Selon le degrÈ dÕavance-ment de ces expÈriences, en fonction de leur degrÈ de gÈnÈralisation, le systËme de retraite Èvolue et les variations rÈgionales sont souvent importantes.
Pour apprÈhender la rÈalitÈ du systËme de retraite, il faut donc disposer dÕÈlÈments empiriques permettant dÕapprÈcier ce dÈca-lage entre les objectifs politiques poursuivis et lÕÈtat effectif du systËme de retraite. On se heurte ici ‡ une autre difficultÈ qui tient ‡ la faiblesse des sources statistiques et, aussi, 1 dans certains cas, ‡ leur fiabilitÈ. Ce problËme nÕest pas spÈcifique ‡ la Chine, mais il prend, dans ce pays, une ampleur particuliËre.
Pour toutes ces raisons, il est difficile de dresser un Ètat des lieux prÈcis du systËme de retraite en Chine. Comme dans bien dÕautres pays, ce systËme est en transformation, une transformation qui accompagne, dans une large mesure, les mutations du systËme Èco-nomique et de la sociÈtÈ. Les dÈveloppements
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qui suivent sÕintÈressent donc davantage aux tendances dÕÈvolution du systËme de retraite en Chine. Pour bien comprendre ces ten-dances actuelles, un rapide dÈtour histori-que est nÈcessaire.
La situation avant les rÈformes Èconomiques
AprËs lÕarrivÈe au pouvoir du parti com-muniste en 1949, les structures Èconomi-ques et sociales sont profondÈment modi-fiÈes. La rÈforme agraire se traduit par une redistribution massive des terres aux paysans. Pour ces derniers, les deux piliers de la sÈcu-ritÈ seront la propriÈtÈ de la terre et le soutien de la famille. La protection en matiËre de re-traite est inexistante.
Pour les salariÈs urbains, une loi sur les assurances sociales, promulguÈe en 1951, prÈvoit lÕintroduction progressive de rÈgimes de retraite. Le systËme se dÈveloppe princi-palement dans les administrations (services gouvernementaux), les entreprises dÕ…tat et, dans une moindre mesure, dans les entreprises collectives. Les prestations sont dÈfinies par les unitÈs de production. En rËgle gÈnÈrale, elles dÈpendent de la durÈe du service et du dernier salaire sans ajustement particulier pour tenir compte de lÕinflation.
Ce systËme est gÈrÈ au niveau local par les syndicats sous la tutelle de la FÈdÈration panchinoise des syndicats (All China Fede-ration of Trade UnionsÐ ACFTU) qui devient, en 1954, responsable de la gestion au niveau national du systËme. La couverture sÕÈtend dans la pÈriode 1949-1965, mais elle reste trËs faible :dans les entreprises dÕ…tat, on dÈnombrait en 1966 environ un million de retraitÈs. Durant la RÈvolution culturelle qui abolit les syndicats, on assiste ‡ une quasi-disparition du systËme. Les fonds sont utilisÈs ‡ dÕautres fins et les entreprises dÕ…tat demeurent seules responsables du paiement des prestations ‡ leurs salariÈs. Durant cette pÈriode, de nombreux salariÈs ‚gÈs ont vu le versement de leur pension diffÈrÈ et ont d˚ continuer ‡ travailler aprËs lÕ‚ge de la retraite.
AprËs la disparition de Mao en 1976 Ð date qui signe symboliquement la fin de la
1. LesdonnÈes statistiques reprises dans cet article sont principalement extraites de deux documents: Asian Development Bank (2002) et Salditt F., Whiteford P., Adema W. (2007).
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RÈvolution culturelle Ð et ‡ la suite de lÕarrivÈe au pouvoir de Deng Xiaoping, un premier mouvement de rÈformes sÕengage.
Les zones rurales: un systËme qui reste embryonnaire
Dans les zones rurales, dans la seconde moitiÈ des annÈes 1970, la possibilitÈ est ouverte aux unitÈs de production en bonne situation finan-ciËre dÕaccorder des prestations de retraite ‡ leurs membres. Environ 200 000 travailleurs sont couverts dans quelques zones rurales ‡ la fin de lÕannÈe 1980.
¿ partir de 1987, des expÈriences visant ‡ Ètendre le systËme de retraite dans les zones rurales sont menÈes. En janvier 1991, le Conseil des affaires dÕ…tat Ètablit un ´Plan pour lÕassurance vieillesse dans les cam-pagnes ªet confie la responsabilitÈ de la mise en Ïuvre de ce plan au MinistËre des affaires civiles (Ministry of Civil AffairsÐ MOCA). Ce plan prÈvoit la crÈation de comptes individuels de retraite financÈs par des contributions individuelles des travailleurs et complÈtÈes par des subventions collectives. Entre 70 et 80 millions de paysans participent ‡ ce systËme en 1997.
En 1998, la responsabilitÈ de la mise en Ïuvre de la rÈforme en zone rurale est transfÈrÈe au MinistËre du travail et de la sÈcuritÈ sociale (Ministry of Labour and Social SecurityÐ MOLSS) qui transforme le systËme existant en faisant la promotion des assurances commerciales. Cette rÈforme sÕaccompagne dÕune baisse du taux de couverture qui passe dÕenviron 15% en 1997 ‡ 11% en 2004.
Le bilan des rÈformes menÈes en zone rurale se rÈsume assez simplement. La structure administrative du systËme a ÈtÈ mise en place dans la plupart des provinces. Cependant, au niveau local, les autoritÈs restent rÈticentes ‡ financer les co˚ts de gestion du systËme, ce qui entraÓne une perte de confiance de la population dans le mouvement engagÈ. Surtout, la couverture du systËme ne parvient pas ‡ atteindre un seuil significatif. Seule une faible minoritÈ de la population active rurale est couverte par une forme dÕÈpargne retraite et trËs peu
de paysans ‚gÈs perÁoivent une pension. On estime quÕun peu moins de 10% des paysans ‚gÈs (60 ans ou plus) perÁoivent une pension alors que 85% dÕentre eux doivent compter sur le soutien de leur famille (Saldittet al., 2007).
Le systËme de retraite dans les zones rurales peine donc ‡ exister et la ligne politique du gouvernement reste incertaine. Des critiques existent au sein mÍme du parti sur la charge que fait peser sur les paysans le systËme de pension, dans un contexte o˘ la concurrence des assurances privÈes introduite ‡ la fin des annÈes 1990 limite lÕextension de comptes individuels administrÈs. LÕincertitude qui existe dans ce domaine sÕajoute au fait que la situation Èconomique des paysans reste trËs 2 difficile : les conditions ne semblent pas rÈunies pour entrevoir un changement significatif ‡ un horizon prÈvisible. MÍme si des rÈsolutions ont ÈtÈ prises par le gouvernement pour amÈliorer la situation des paysans, la construction dÕun systËme de retraite nÕapparaÓt pas comme une prioritÈ (Chongguo, Concialdi, 2006).
Les salariÈs urbains dans la tourmente des mutations Èconomiques Pour les salariÈs urbains, le Conseil des affaires dÕ…tat a modifiÈ la rÈglementation en matiËre de retraite en 1978. Les nou-veaux textes prÈvoient notamment de fortes incitations au dÈpart prÈcoce en retraite (rel‚chement des critËres dÕÈligibilitÈ, relË-vement des taux de pension) et Ètendent les possibilitÈs de substitution (ding ti) qui per-mettent de rÈserver un emploi dans le secteur dÕ…tat ‡ raison dÕun enfant par retraitÈ. Enfin, la rÈforme de 1978 formalise le rÙle des entreprises dans la prise en charge de la protection sociale des salariÈs. Cette politique poursuit deux objectifs: £ libÈrer des emplois pour accueillir les jeunes salariÈs urbains qui avaient ÈtÈ envoyÈs dans les zones rurales durant la RÈvolution culturelle et qui reviennent massivement dans les villes;
2. LesÈcarts de revenu entre villes et campagnes ont considÈrablement augmentÈ depuis une dizaine dÕannÈes.
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£ rÈorganiser lÕappareil du parti en Ècar-du systËme de pension pour les salariÈs des tant une partie des cadres des leviersentreprises :promotion de lÕintÈgration de de commande.programmes locaux au niveau provincial et, Èventuellement, ‡ lÕÈchelon national; Cette rÈforme se traduit par une forte £ croissance du nombre de retraitÈs qui qua-alternativement :quelques villes et provin-druple entre 1978 et 1985. Dans le mÍmeces ont dÈveloppÈ de nouveaux program-temps, on observe une croissance Èquivalentemes sÕÈcartant de la norme nationale en du co˚t des pensions: celles-ci reprÈsentaientmettant en place des fonds de retraite 10,6 %de la masse salariale en 1985 contrequi visaient souvent ‡ Ètendre la couver-2,8 %en 1978.ture aux salariÈs du secteur privÈ et des joints venture. Cette politique de dÈpart prÈcoce se pour-suivra sous lÕimpulsion de Deng Xiaoping,En 1991, la rÈsolution du Conseil des avec la crÈation Ð ‡ partir du milieu desaffaires dÕ…tat sur ´La rÈforme du systËme de annÈes 1980 Ð des ´mises au reposª (LÌxiuª vise ‡des salariÈs des entreprises). pension Ce dispositif permet aux vieux cadres du particouvrir lÕensemble des salariÈs des entreprises et ‡ ceux qui avaient travaillÈ pour lui avantdÕ…tat dans un systËme ‡ ´trois piliersª : la LibÈration de ne plus travailler (dÕo˘ le £ une pension de base pour tous les retrai-terme de ´mise au reposª) tout en conservant tÈs, financÈe par lÕ…tat, les entreprises entre 80% et 95% de leur ancien salaire ainsi et les salariÈs; que la prise en charge de leurs frais de santÈ. £ En 2005, 1,26 million de personnes relevaientune pension complÈmentaire financÈe par de ce rÈgime particulier de ´mise au reposª. lÕentreprisesur son ´surplus ª ; £ ¿ partir du milieu des annÈes 1980, lesun compte individuel financÈ par le salariÈ rÈformes Èconomiques sÕamplifient. La rÈfor-sur une base volontaire (payable sous me visant ‡ mettre en place un ´systËme formede capital au moment du dÈpart ‡ moderne dÕentreprisesª a pour but de dÈbar-la retraite). rasser les entreprises, autant que possible, des Cette rÈsolution reprÈsente davantage diffÈrents ´fardeaux sociauxª et de leur re-une ligne directrice quÕune obligation. Elle donner une organisation Èconomique compa-recommande en outre: tible avec des objectifs de rentabilitÈ. La rÈforme du systËme dÕentreprise sÕaccompa-que les fonds dÕassurance sociale soient £ gne dÕune rÈorganisation du rÙle des diffÈrentsÈtablis au niveau de chaque province et, acteurs, notamment en ce qui concerne laensuite, que la distinction entre salariÈs prise en charge des divers services sociauxtemporaires et permanents soit supprimÈe (retraite, santÈ, logement) par lÕentreprise.afin de mutualiser les ressources; CÕest le dÈbut de la fin du fameux ´bol de riz £ lÕextinction de la responsabilitÈ sociale en ferª (Chongguo, 2005). de lÕentreprise individuelle au profit de La rÈforme de 1986 introduit le principefonds collectifs financÈs par lÕ…tat, les dÕune contribution individuelle des salariÈsentreprises et les salariÈs. au systËme de pension. La mÍme annÈe sont Des expÈrimentations seront conduites crÈÈes des agences visant ‡ gÈrer les fonds dans ce sens. Elles serviront de base pour de retraite ‡ lÕextÈrieur des entreprises. Les dÈfinir les principes dÕorganisation du sys-entreprises cessent dÕÍtre perÁues comme les tËme de retraite qui seront fixÈs en 1997 par seules pourvoyeuses de sÈcuritÈ sociale par le Conseil des affaires dÕ…tat. les salariÈs. Ces rÈformes sont introduites sur une: unLa rÈforme de 1997 base expÈrimentale au niveau local avec desnouveau systËme de retraite variantes. Deux approches ont ÈmergÈ de ¿ la suite de la tournÈe effectuÈe dans le ces diverses expÈriences: sud du pays par Deng Xiaoping en 1992, le £ celle reprise en 1991 par la rÈsolution dumouvement de rÈformes sÕest accÈlÈrÈ et la Conseil dÕ…tat (cf. infra) sur la rÈformeprivatisation des entreprises dÕ…tat et des
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entreprises collectives a ÈtÈ engagÈe ‡ une large Èchelle. Ce processus intense de restruc-turations a conduit au licenciement dÕenviron 50 ‡ 60 millions de salariÈs urbains dans la seconde moitiÈ des annÈes 1990.
LÕapprofondissement du mouvement de rÈformes dans les annÈes 1990 sÕest concrÈtisÈ par un vÈritable bouleversement du statut des ouvriers, dÈclenchant une rÈforme du systË-me de retraite. Le principal texte qui forma-lise ce changement est un document approuvÈ en 1997 par le Conseil des affaires dÕ…tat qui dÈfinit, pour les salariÈs urbains, un systËme ‡ ´trois piliersª (Zhigang, Jin, 2004), conforme aux prÈconisations de la Banque mondiale.
Le premier pilier, payÈ par les employeurs, 3 impose un prÈlËvement sur salaire de 17% et garantit aux employÈs ayant travaillÈ plus de 15 ans un taux de remplacement de 20%. Le deuxiËme pilier, payÈ conjointement par les employeurs et les employÈs, ouvre un compte individuel pour chaque employÈ. Le taux de contribution est de 11% du salaire individuel. AprËs son dÈpart ‡ la retraite, lÕemployÈ reÁoit une prestation mensuelle dÕun montant Ègal ‡ la valeur accumulÈe dans 4 ce compte divisÈe par 120. LÕobjectif est que le cumul du premier et du deuxiËme pilier assurent un taux de remplacement global de 5 58,5 %. Dans ce systËme, environ 60% des contributions financent le systËme par rÈpar-tition, tandis que 40% vont dans des comptes individuels. Le troisiËme pilier est constituÈ par lÕÈpargne facultative des salariÈs, comme dans le schÈma de la Banque mondiale.
La transition vers le nouveau systËme est organisÈe de faÁon diffÈrenciÈe selon les salariÈs. Le nouveau systËme doit sÕap-pliquer intÈgralement ‡ ceux qui sont entrÈs sur le marchÈ du travail ‡ partir de 1997. Pour ceux qui sont dÈj‡ ‡ la retraite cette mÍme annÈe, lÕancien systËme sÕapplique et un systËme mixte est prÈvu pour les gÈnÈrations intermÈdiaires.
Dans le plan initial du gouvernement, la transition vers ce nouveau systËme de retraite devait Ítre financÈe de trois faÁons: £ gr‚ce ‡ une extension de la couverture aux entreprises collectives et aux entre-prises privÈes; £ par une hausse du taux de cotisation; par une rentabilitÈ accrue attendue de la £ part capitalisÈe du rÈgime de retraite. LÕexpÈrimentation de ce nouveau systËme de retraite a dÈbutÈ en 2000 dans la province du Liaoning, dans le nord-est du pays. Cette province, qui a longtemps constituÈ un des cÏurs industriels de la Chine, accueille une part importante des retraitÈs des entreprises dÕ…tat qui ont ÈtÈ massivement licenciÈs au 6 cours des dix derniËres annÈes. LÕexpÈrimen-tation sÕest ensuite Ètendue ‡ dÕautres pro-vinces couvrant, ‡ la fin de lÕannÈe 2006, environ 40% de la population chinoise.
Les problËmes actuels
La mise en Ïuvre de la rÈforme de 1997 sÕest heurtÈe ‡ un certain nombre de difficultÈs.
La couverture du systËme de retraite est restÈe faible. En 2005, elle se situe ‡ 48% des salariÈs urbains, en lÈgËre progression depuis 1997, mais ‡ peine au-dessus du taux de couverture observÈ en 1994 (45,5%). Par ailleurs, le gouvernement nÕa pas pu compter, comme il lÕespÈrait, sur la vente des actifs des entreprises dÕ…tat, ce qui a limitÈ Ègalement les ressources de financement.
Pour faire face aux besoins de financement du premier pilier en rÈpartition, les gou-vernements provinciaux et le gouvernement central ont d˚ accroÓtre leurs subventions. Ces besoins de financement ont aussi ÈtÈ couverts, en partie, par lÕutilisation des som-mes collectÈes pour alimenter les comptes individuels, de sorte que ces derniers sont
3. Dansune fourchette allant de 60% ‡ 300% du salaire moyen de la rÈgion. 4. Celasuppose que lÕespÈrance de vie moyenne au moment de la retraite est de dix ans. Si lÕespÈrance de vie moyenne des retraitÈs dÈpasse dix ans, ces pensions ´capitalisÈes ªseront en fait financÈes par des transferts directs, cÕest-‡-dire comme dans un systËme en rÈpartition. 5. Celaest basÈ sur lÕhypothËse que lÕespÈrance de vie est de 70 ans et que le taux de croissance des salaires rÈels est Ègal au taux dÕintÈrÍt rÈel. Si on contribue au systËme pendant 35 annÈes, le compte individuel pourrait ainsi fournir un taux de remplacement de 38,5%. Conjointement, les deux piliers ont donc un taux de remplacement de 58,5%. 6. Laprovince du Liaoning reprÈsente 3,2% de la population chinoise, mais regroupe 7,2% des retraitÈs des entreprises dÕ…tat.
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restÈs largement fictifs, ce qui a ÈrodÈ la confiance dans ces dispositifs.
DÕautres amÈnagements ont ÈtÈ apportÈs ‡ la rÈforme initiale. Pour la premiËre compo-sante en rÈpartition, une contribution de 20% 7 des salairesest dÈsormais prÈvue et doit permettre de procurer, pour les salariÈs ayant une durÈe minimale de cotisation de 15 ans, une pension Èquivalente ‡ 35% du salaire moyen de la rÈgion. Un texte promulguÈ en 2006 supprime la participation des entre-prises au financement des comptes indivi-duels. DÈsormais, ces derniers sont alimentÈs par une cotisation salariale de 8% (en pratique, une cotisation de 3% des salariÈs, et une subvention de 5% des gouvernements central et locaux). Enfin, le coefficient de conversion de ces comptes en rente indivi-duelle a ÈtÈ modifiÈ au cours des expÈrimen-tations et devrait Ítre davantage en rapport avec lÕespÈrance de vie ‡ la retraite.
DÈfis pour le futur
Comme dans tous les pays, la dÈmographie constitue un des leitmotiv des dÈbats sur les retraites. La Chine prÈsente ‡ cet Ègard deux caractÈristiques qui la singularise dÕautres pays du mÍme niveau de richesse.
Tout dÕabord, lÕespÈrance de vie est relati-vement ÈlevÈe en Chine, en comparaison de pays de niveau de dÈveloppement comparable, et elle devrait continuer ‡ augmenter dans les annÈes ‡ venir. Ensuite, la politique dite de ´lÕenfant uniqueª a fortement abaissÈ le taux de natalitÈ. MÍme si certains assouplissements de cette politique sont aujourdÕhui envisagÈs, il est certain que ses effets devraient marquer lÕÈvolution de la dÈmographie chinoise. AujourdÕhui, le taux de fÈconditÈ en Chine se situe ‡ un niveau proche de celui de lÕAllema-gne (1,3 ‡ 1,4). En dÈfinitive, la dÈmographie chinoise se rapproche davantage de celle des pays europÈens que de celle des pays de niveau de dÈveloppement comparable. Cela devrait se traduire, ‡ terme, par un vieillissement important de la population: le ratio de dÈpen-dance vieillesse devrait passer de 10% en 2000 ‡ 27% en 2030.
Échos d’ailleurs
En Chine, lÕÈquation de base des systËmes de retraite est la mÍme que dans tous les autres pays. Pour faire face ‡ ce ´vieillissementª de la population, trois solutions peuvent Ítre envisagÈes: la hausse des cotisations, la baisse des prestations ou le relËvement de lÕ‚ge de la retraite.
Le relËvement de lÕ‚ge de la retraite pose les mÍmes questions que dans la plupart des pays. En Chine aussi, la question du chÙmage est devenue trËs prÈoccupante. ¿ cÙtÈ du chÙ-mage officiel, qui reste statistiquement faible, il est aujourdÕhui reconnu que le sous-emploi touche bien davantage de personnes. Si bien que le relËvement de lÕ‚ge de la retraite se traduirait, comme dans bien des pays, par une baisse dÈguisÈe des prestations.
La question clÈ reste donc celle du partage des gains de productivitÈ futurs. Quelques scÈnarios permettent de prendre la mesure des besoins de financement. Le tableau 1 indique quelle devrait Ítre la croissance nÈcessaire pour absorber le financement prÈvu des retraites. Selon les hypothËses retenues, il faudrait une croissance comprise entre 0,4 %et 0,6% pour assurer les besoins de financement des rÈgimes de retraite. En valeur absolue, lÕeffort apparaÓt environ deux fois supÈrieur ‡ celui que devraient consentir les 8 pays europÈens . Mais la croissance chinoise est bien supÈrieure; depuis une dizaine dÕannÈes, elle tourne autour dÕenviron 10% par an. MÍme si le chiffrage de cette croissance prÍte ‡ controverse ou ‡ discussion, il est certain que lÕeffort relatif que les salariÈs chinois devraient fournir est plus faible que dans les pays europÈens. ¿ cette aune, le financement des retraites en Chine nÕapparaÓt moins soutenable quÕen Europe.
Les dÈfis posÈs au systËme de retraite chinois sont plutÙt ‡ chercher ailleurs. On se limitera ici ‡ en soulever deux. Pour les salariÈs urbains, la question du chÙmage est majeure, car la capacitÈ ‡ disposer dÕune pension ´dÈcente ªdÈpend, dans une trËs large mesure, des revenus dÕactivitÈ antÈ-rieurs. Quant aux zones rurales, la cons-truction dÕun vÈritable systËme de retraite reste encore ‡ lÕordre du jour. DÕautant que
7. Dansune fourchette allant de 60% ‡ 300% du salaire moyen de la rÈgion. 8. Lacroissance minimale nÈcessaire pour couvrir les besoins de financement en matiËre de retraite en Europe est de 0,25% par an entre 2005 et 2030 (Concialdi, 2006).
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Échos d’ailleurs
T a b l e a uLes 1retraites en Chine ‡ lÕhorizon 2030 Ð Croissance annuelle nÈcessaire pour absorber les besoins de financement
HYPOTH»SES
Taux dÕactivitÈ
Sans changement
Baisse de 70% ‡ 65%
Hausse de 70% ‡ 75%
Taux de chÙmage
Sans changement
Hausse de 5% ‡ 10%
Sans changement
les flux de migration des campagnes vers les villes risquent dÕaffaiblir le rÙle traditionnel de soutien des enfants envers leurs parents qui reste le pilier de la vieillesse pour lÕimmense majoritÈ des populations rurales.
Comme toujours, le dÈtour par les com-paraisons internationales permet de mieux comprendre les rÈalitÈs de son propre pays. ¿ cet Ègard, deux enseignements peuvent Ítre retenus.
PremiËrement, le cas de la Chine fournit une bonne illustration des rapports Ètroits entre lÕorganisation du systËme Èconomique et celle du systËme de protection sociale. En lÕespace dÕun demi-siËcle Ð de la LibÈration de 1949 aux rÈformes des annÈes 1990 Ð les structures Èconomiques et sociales de la Chine ont ÈtÈ profondÈment transformÈes et, ‡ chaque Ètape, cela sÕest traduit par une profonde modification des dispositifs de
Croissance annuelle (en %)
0,43 Ð 0,51 0,59 Ð 0,61 0,37 Ð 0,46
prise en charge des risques sociaux. Ce nÕest pas un hasard si, avec une politique prÙnant ouvertement le dÈveloppement de lÕÈconomie de marchÈ depuis plus de vingt ans, le systËme de retraite chinois se transforme en Èpousant Ètroitement les recommandations formulÈes par la Banque mondiale dans son rapport de 1994.
DeuxiËmement, la protection sociale nÕest pas une construction figÈe. CÕest un Èdifice qui est en transformation permanente. Ce phÈnomËne est encore plus visible dans le cas de la Chine, mais tout aussi vrai ailleurs. Notamment dans le cas des retraites. Car les rÈformes se mettent en Ïuvre de faÁon gra-duelle, ÈtalÈe dans le temps. La Chine, comme les autres pays, est entrÈe dans un processus de rÈforme de la protection socia-le. Un processus dont le terme reste incertain et lourd de menaces pour la sÈcuritÈ Ècono-mique future des salariÈs.
Bibliographie Asian Development Bank (2002).PeopleÕs Republic of China - Old-Age Pensions for the Rural Areas: From Land Reform to Globalization, Asian Development Bank, Manila. Chongguo C. (2005).Chine, lÕenvers de la puissanc,e…ditions Mango, collection En clair. Chongguo C., Concialdi P. (2006). AprËs la derniËre session de lÕAssemblÈe populaire nationale :quels changements?,Chronique internationale de lÕIRES, n∞ 100, mai. Concialdi P. (2006). Demography, the cost of pensions and the move to pension funds, Review of Political Economy: 301-315., 18 (3) Salditt F., Whiteford P., Adema W. (2007). Pension Reform in China: Progress and Prospects,OECD Social Employment and Migration Working Papers, n∞ 53, OECD Directorate for Employment, Labour and Social Affairs. Zhigang Y., Jin F. (2004). Pensions Reforms in China/Repenser la rÈforme des pensions en Chine, in Parsons N., Zhigang Y. (Èds),Economic Globalisation and Employment Policy, (bilingual edition English/Chinese).
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