Des montagnes au service de la cause nationale : la Société des Alpinistes du Trentin et l irrédentisme de 1872 à 1915 - article ; n°1 ; vol.19, pg 133-148
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Des montagnes au service de la cause nationale : la Société des Alpinistes du Trentin et l'irrédentisme de 1872 à 1915 - article ; n°1 ; vol.19, pg 133-148

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Description

Histoire, économie et société - Année 2000 - Volume 19 - Numéro 1 - Pages 133-148
Abstract Created in 1872, by veterans of the Garibaldian wars, the Societa Alpina del Trentino (known as Societa degli Alpinisti del Trentino after 1876) has always been fighting for the italia- nity of Trentino -a small italianophone province which remained austrian after 1866- through the exploration of the Dolomites mountains, the main resource of the province. Officially apolitical, elitist at first but gradually gaining popularity, the S.A.T contributed in a original way to the politization of the country, and turned the montains into a national issue. Always challenged by the church and other political parties, the S.A.T. has been reflecting, until its dissolution in 1915, the complex history of the irredentist movement in the austro-hungarian Empire.
Résumé Créée en 1872 par des vétérans de l'épopée garibaldienne, la Société Alpine du Trentin, (devenue en 1876 Société des Alpinistes du Trentin) a toujours défendu, à travers la connaissance et l'exploration des montagnes - principal attrait de la région -, l'italianité du Trentin, terre irrédente italianophone, laissée à l'Autriche en 1866. Association officiellement apolitique, d'abord élitiste puis populaire, cette société a contribué de façon originale à la politisation du monde rural et fit des montagnes l'enjeu d'une lutte nationale acharnée. Entre la défense des particularisme locaux et le désir - prohibé - de se rattacher à l'Italie, les liens difficiles avec l'Églises et les autres partis politiques, libéraux et socialistes, l'histoire de la S.A.T., reflète, jusqu'à sa disparition en 1915 la complexité des mouvements irrédentistes dans l'Empire austro-hongrois finissant.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

David Blanchon
Des montagnes au service de la cause nationale : la Société
des Alpinistes du Trentin et l'irrédentisme de 1872 à 1915
In: Histoire, économie et société. 2000, 19e année, n°1. pp. 133-148.
Résumé Créée en 1872 par des vétérans de l'épopée garibaldienne, la Société Alpine du Trentin, (devenue en 1876 Société des
Alpinistes du Trentin) a toujours défendu, à travers la connaissance et l'exploration des montagnes - principal attrait de la région -
, l'italianité du Trentin, terre irrédente italianophone, laissée à l'Autriche en 1866. Association officiellement apolitique, d'abord
élitiste puis populaire, cette société a contribué de façon originale à la politisation du monde rural et fit des montagnes l'enjeu
d'une lutte nationale acharnée. Entre la défense des particularisme locaux et le désir - prohibé - de se rattacher à l'Italie, les liens
difficiles avec l'Églises et les autres partis politiques, libéraux et socialistes, l'histoire de la S.A.T., reflète, jusqu'à sa disparition en
1915 la complexité des mouvements irrédentistes dans l'Empire austro-hongrois finissant.
Abstract Created in 1872, by veterans of the Garibaldian wars, the Societa Alpina del Trentino (known as Societa degli Alpinisti
del Trentino after 1876) has always been fighting for the italia- nity of Trentino -a small italianophone province which remained
austrian after 1866- through the exploration of the Dolomites mountains, the main resource of the province. Officially apolitical,
elitist at first but gradually gaining popularity, the S.A.T contributed in a original way to the politization of the country, and turned
the montains into a national issue. Always challenged by the church and other political parties, the S.A.T. has been reflecting,
until its dissolution in 1915, the complex history of the irredentist movement in the austro-hungarian Empire.
Citer ce document / Cite this document :
Blanchon David. Des montagnes au service de la cause nationale : la Société des Alpinistes du Trentin et l'irrédentisme de
1872 à 1915. In: Histoire, économie et société. 2000, 19e année, n°1. pp. 133-148.
doi : 10.3406/hes.2000.2110
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_2000_num_19_1_2110DES MONTAGNES AU SERVICE DE LA CAUSE NATIONALE :
LA SOCIÉTÉ DES ALPINISTES DU TRENTIN ET L'IRRÉDENTISME
DE 1872 À 1915
par David BLANCHON
Résumé
Créée en 1872 par des vétérans de l'épopée garibaldienne, la Société Alpine du Trentin,
(devenue en 1876 Société des Alpinistes du Trentin) a toujours défendu, à travers la connais
sance et l'exploration des montagnes - principal attrait de la région -, l'italianité du Trentin,
terre irrédente italianophone, laissée à l'Autriche en 1866. Association officiellement apolitique,
d'abord élitiste puis populaire, cette société a contribué de façon originale à la politisation du
monde rural et fit des montagnes l'enjeu d'une lutte nationale acharnée. Entre la défense des
particularisme locaux et le désir - prohibé - de se rattacher à l'Italie, les liens difficiles avec
l'Églises et les autres partis politiques, libéraux et socialistes, l'histoire de la S.A.T., reflète,
jusqu'à sa disparition en 1915 la complexité des mouvements irrédentistes dans l'Empire aus
tro-hongrois finissant.
Abstract
Created in 1872, by veterans of the Garibaldian wars, the Societa Alpina del Trentino
(known as Societa degli Alpinisti del Trentino after 1876) has always been fighting for the italia-
nity of Trentino -a small italianophone province which remained austrian after 1866- through
the exploration of the Dolomites mountains, the main resource of the province. Officially apoliti
cal, elitist at first but gradually gaining popularity, the S.A.T contributed in a original way to the
politization of the country, and turned the montains into a national issue. Always challenged by
the church and other political parties, the S.A.T. has been reflecting, until its dissolution in
1915, the complex history of the irredentist movement in the austro-hungarian Empire.
Garibaldi, en se retirant du Trentin sur les ordres du Roi d'Italie Victor-
Emmanuel II malgré sa victoire de Bezzecca, brisa tous les espoirs de réunion
de la province de Trente, sous domination germanique depuis 962, avec le
nouveau Royaume d'Italie. Lorsqu'il prononça son fameux «Obbedisco»,
(«j'obéis»), il signifiait clairement que cette province, bien qu'elle soit peu
plée presque entièrement d'Italiens ne méritait pas de mettre en danger les
intérêts vitaux du reste du Royaume.
Dès lors, les patriotes du Trentin, comme ceux de Trieste, durent s'organi
ser pour défendre la cause de l'Italie parmi les habitants de la région, et pour
rappeler le souvenir de ces provinces non recouvrées, irrédentes, dans le
Royaume. Plusieurs associations furent créées pour défendre la cause de l'irré-
HES 2000 (19e année, n° 1) Histoire Economie et Société 134
dentisme, sur le plan politique et culturel. Influentes en ville et parmi les
membres de la bourgeoisie libérale, ces sociétés parvenaient difficilement à
faire naître un sentiment national parmi les populations rurales. Leurs actions
contribuaient souvent à accentuer la différence entre des villes favorables au
Royaume d'Italie et des campagnes fidèles à l'Empereur.
L'originalité de la Société des Alpinistes du Trentin \ fut, de 1872 à 1914
de défendre la cause nationale tout en promouvant la découverte - et le déve
loppement - des zones de montagnes de la région. Les archives de la société et
les comptes rendus annuels d'activité, ainsi que les rapports militaires et poli
ciers autrichiens sur les activités jugées dangereuses pour la sûreté de l'État
autrichien, montrent l'ampleur de la tâche de cette société, de la promotion de
leur petite patrie, qui nécessite d'associer la plus large partie de la population
de la région au développement du tourisme, à la défense intransigeante de
l'italianité.
Entre régionalisme et nationalisme, entre élitisme lié à un sport bourgeois
et ouverture vers les populations rurales, l'histoire de la Société des Alpinistes
du Trentin reflète la lente et complexe politisation des populations italiennes
de l'Empire, dans le cadre d'une monarchie protégeant le droit à défendre sa
culture, mais interdisant de la prôner le rattachement à l'Italie.
Le Trentin : terre irrédente ?
La ville de Trente avait été choisie pour le célèbre concile parce qu'elle
était «italienne parmi les allemandes et allemande parmi les italiennes».
Comme sa capitale, la province de Trente, de la taille d'un département fran
çais, est aux confins des mondes latins et germaniques. Principauté ecclésias
tique, c'était un des bastions du catholicisme - et jusqu'à un passé récent de
la Démocratie Chrétienne - qui était entré dans l'orbite de la famille des
Habsbourg depuis le milieu du XIVe siècle. Après le Congrès de Vienne, le
Trentin perdit son autonomie et fut rattaché au Tyrol.
Plus que son rôle économique, c'est sa situation stratégique qui fait du
Trentin un enjeu dans la lutte entre le jeune Royaume d'Italie et l'Autriche-
Hongrie. En effet la région s'articule autour de la vallée de l'Adige, axe str
atégique majeur, et les montagnes de la région surplombent la plaine du Pô.
Comme l'écrivit Giovanni Pedrotti : «L'Italie ne pourra jamais être sûre dans
ses confins naturels tant que le formidable coin du Trentin, hérissé de fortif
ications et d'armées sera aux mains de l'Autriche»2.
Peuplé de 350000 habitants, le Trentin était à plus de 95 % italianophone
(seules quelques communes étaient germanophones, et une petite minorité, au
nord-est, parlait le ladin) et, dans la période qui nous intéresse, très majoritai-
1. L'association s'appela «Société Alpine du Trentin» de 1872 à 1876 et «Société des Alpinistes du
Trentin» de 1877 à nos jours.
2. Giovanni Pedrotti, Alcuni Cenni sul Trentino, p. 40 : «L' Italia non sarà mai sicura entro i suoi confini
naturali, finchè il formidabile cuneo del Trentino irto di fortificazione e d'armate sarà in mano all' Austria».
HES 2000 (19e

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