En quel sens parler de la romanisation du culte de Dionysos en Étrurie ? - article ; n°2 ; vol.99, pg 573-594

Françoise-Hélène Pairault-Massa

Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1987 - Volume 99 - Numéro 2 - Pages 573-594
Françoise-Hélène Pairault-Massa, En quel sens parler de la romanisation du culte de Dionysos en Étrurie?, p. 573-594. L'a. tente de poser les différents termes qui définissent la question des cultes dionysiaques en Étrurie. Les conditions historiques du développement de ces cultes et les modes de leur insertion dans le système religieux de la cité étrusque permettent de mieux définir la crise des Bacchanales de 186 av. J.-C. Les documents examinés sont essentiellement les dédicaces à Fufluns paxie, le groupe dionysiaque de la ciste Napoléon, les groupes du fronton de via S. Leonardo à Orvieto, la situle de Bolsena au Musée de Florence, l'amphore de Giessen. L'analyse définit ainsi le terrain sur lequel se sont exercés les effets de la romanisation. Les processus de transformation précurseurs de la crise se sont exercés dans trois (v. au verso) domaines que les cités étrusques avaient assumés en propre : 1) la pratique des thiases dans la cité aristocratique; 2) l'association de Dionysos à des panthéons agraires locaux et sa compréhension dans le monde de la production; 3) la réception des cultes dionysiaques à l'intérieur de la famille, éventuel dépositaire ou propagateur des messages mystiques ou sociaux du dionysisme.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: MELANGES_DE_L-ECOLE_FRANCAISE_DE_ROME
• Publié le: 01 janvier 1987
• Nombre de lectures: 52
• Langue: Français
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Extrait

Françoise Hélène Pairault-
Massa
En quel sens parler de la romanisation du culte de Dionysos en
Étrurie ?
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 99, N°2. 1987. pp. 573-594.
Résumé
Françoise-Hélène Pairault-Massa, En quel sens parler de la romanisation du culte de Dionysos en Étrurie?, p. 573-594.
L'a. tente de poser les différents termes qui définissent la question des cultes dionysiaques en Étrurie. Les conditions historiques
du développement de ces cultes et les modes de leur insertion dans le système religieux de la cité étrusque permettent de mieux
définir la crise des Bacchanales de 186 av. J.-C. Les documents examinés sont essentiellement les dédicaces à Fufluns paχie, le
groupe dionysiaque de la ciste Napoléon, les groupes du fronton de via S. Leonardo à Orvieto, la situle de Bolsena au Musée de
Florence, l'amphore de Giessen. L'analyse définit ainsi le terrain sur lequel se sont exercés les effets de la romanisation. Les
processus de transformation précurseurs de la crise se sont exercés dans trois
(v. au verso) domaines que les cités étrusques avaient assumés en propre : 1) la pratique des thiases dans la cité aristocratique;
2) l'association de Dionysos à des panthéons agraires locaux et sa compréhension dans le monde de la production; 3) la
réception des cultes dionysiaques à l'intérieur de la famille, éventuel dépositaire ou propagateur des messages mystiques ou
sociaux du dionysisme.
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Pairault-Massa Françoise Hélène. En quel sens parler de la romanisation du culte de Dionysos en Étrurie ?. In: Mélanges de
l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 99, N°2. 1987. pp. 573-594.
doi : 10.3406/mefr.1987.1559
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1987_num_99_2_1559FRANÇOISE-HÉLÈNE PAIRAULT-MASSA
EN QUEL SENS PARLER DE LA ROMANISATION
DU CULTE DE DIONYSOS EN ÉTRURIE?
La lente transformation des mentalités et des institutions, l'adéqua
tion de plus en plus marquée au modèle de la cité dominante, l'intégrapolitique des oligarchies citadines, tous phénomènes qui accompag
nent ou caractérisent la romanisation de l'Étrurie, ont des conséquences
ou des incidences particulières dans le domaine des cultes, de leurs signi
fications, et de leurs expressions sociales1. Les formes italiques du culte
de Dionysos ne font pas exception à la règle et constituent même pour
notre propos un champ d'observation privilégié. La crise des Bacchanal
es, en 186, permet en effet de comprendre rétrospectivement quels ont
été les points sensibles ou les contradictions d'une société en mutation : ce
sont la définition de la famille au sein de la cité, la place des composantes
plébéiennes, par rapport à la nouvelle classe dirigeante romaine, enfin,
par rapport à la tradition, le renouvellement de l'expression symbolique
ou mystique du culte, susceptible de rencontrer des visées ou des projets
politiques également d'un type nouveau.
Aussi, pour avoir quelque chance de progresser à partir de l'analyse
classique d'A. Brühl sur Liber pater et Fufluns2, devons-nous tenter de
reconstituer les étapes d'un dynamisme qui s'exprime d'abord diachroni-
quement avant de déboucher sur une crise. Peut-on repérer quelques
conditions historiques initiales où la famille, la cité, le rapport de compos
antes sociales différentes, ont connu, à travers le culte de Dionysos, et
1 Cf. la réflexion d'ensemble résumée dans les brèves pages du catalogue Civili-
tà degli Etruschi. Catalogo dell'esposizione internazionale 16 maggio-20 ottobre 1985,
Milan, 1985, p. 375-376.
2 A. Brühl, Liber pater. Origine et expansion du culte dionysiaque à Rome et
dans le monde romain (BEFAR, 175), Paris, 1953, p. 70-81.
MEFRA - 99 - 1987 - 2, p. 573-594. FRANÇOISE-HÉLÈNE PAIRAULT-MASSA 574
sous des formes adaptées aux réalités italiques, un relatif équilibre? La
tâche n'est pas facile mais une esquisse des questions actuellement posées
est d'autant plus utile et opportune que la place de Volsinii, transplantée
et transformée sur les bords du lac de Bolsena nous paraît tout à fait
notable. La recherche archéologique à Poggio Moscini a conduit en effet
à la découverte d'un ensemble cultuel et d'un trône dionysiaques, dont la
destruction, dans le premier quart du IIe siècle, a permis de rouvrir le
dossier de la répression des cultes bachiques après 186. En outre, au-delà
de cette découverte, l'histoire en général des cultes de Volsinii nous paraît
revêtir un caractère exemplaire qui, se reflétant sur le cas particulier du
culte dionysiaque, est susceptible d'éclairer un schéma d'évolution valable
aussi pour d'autres cités étrusques.
Mais a-t-on raison d'attribuer un rôle aussi important aux cultes
bachiques comme révélateurs des transformations sociales du monde it
alique? L'empreinte que ces cultes, au départ fondamentalement étrangers
à ce monde, ont apposée au système social des cités peut sembler a priori
légère, malgré l'abondance et la qualité des images dionysiaques, import
ées ou adaptées en Étrurie, et malgré le rôle assumé par de populaires
personnages du cortège dionysiaque lors de certaines manifestations col
lectives comme les jeux. En effet, Dionysos n'occupe pas une place cen
trale dans l'organisation ou la conception des emporta archaïques de
l'aire centrale tyrrhénienne ; dans les cités, il ne paraît pas avoir fait l'ob
jet d'un culte à l'origine indépendant d'autres cultes; à Rome, nous igno
rons encore les temps et les modalités de l'assimilation Dionysos-Liber.
Aussi sommes-nous d'emblée confrontés à une série de difficultés pour
tenter de reconstituer la situation des cultes dionysiaques en Étrurie au
début du IVe siècle lorsque Rome commence à modifier les rapports de
force entre cités italiques et les équilibres acquis à l'intérieur des cités
étrusques.
Le premier document susceptible d'éclairer notre route est constitué
par les dédicaces à Fufluns paXie, en majorité de la seconde moitié du Ve
siècle, repérées sur des vases attiques, ou imitant la céramique attique,
trouvés à Vulci. Après C. De Simone, M. Cristofani a récemment souligné
l'intérêt philologique de l'adjectif paXie3 tout en évoquant les modèles
grecs éventuels d'un Dionysos βάκχειος connu à Égine, Corinthe et Sicyo-
3 C. De Simone, Die griechische Entlehnungen im Etruskischem, II, Wiesbaden,
1968, p. 105-330; M. Cristofani-M. Martelli, Fufluns paXie, dans SE, 46, 1978,
p. 119 sq. LA ROMANISATION DU CULTE DE DIONYSOS EN ÉTRURIE 575
ne4. Pour M. Cristofani, la mention du nom de la cité au locatif, Velcldi,
revêt un intérêt économique de premier ordre puisque Vulci et son terri
toire sont notoirement connus pour la production et l'exportation du
vin5.
Mais l'intérêt de ces dédicaces nous paraît se situer encore à un autre
niveau, celui des institutions plus encore que de l'économie. Le contexte
vraisemblablement funéraire des inscriptions ne leur enlève rien en effet
de leur force pregnante pour éclairer la situation de la cité, tout comme
dans le cas de la dédicace aux Dioscures au nom étrusquisé trouvée à Tar-
quinia dans un contexte similaire. VelcWi est aussi important que paXie
par rapport à Fufluns dans la mesure où le nom de la cité révèle comme
une sorte d'approbation officielle de la divinité des βάκχοι. Fufluns paXie
est corrélatif de Vulci-communauté et le Fufluns des thiases (paXie évo
que l'association plus que le vin)6 est reconnu par la cité. Les inscriptions
proclameraient donc à leur manière l'absence de conflictualité entre l'as
pect officiel de la divinité et la pratique sociale privée, (familiale, gentili-
ce, ou autre) du dionysisme. Les documents et les monuments funéraires,
certains temples de la cité seraient de nature à confirmer, par la suite,
cette hypothèse. L'assimilation de Fufluns au Dionysos grec, révélée par
la qualification de la divinité, et la manifestation, corollaire de cette assi
milation, du rôle central de la cité, illustre sans doute la force d&