L abbé de La Blèterie (1697-1772) : de l érudition à la politique - article ; n°1 ; vol.107, pg 121-143
24 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

L'abbé de La Blèterie (1697-1772) : de l'érudition à la politique - article ; n°1 ; vol.107, pg 121-143

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
24 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée - Année 1995 - Volume 107 - Numéro 1 - Pages 121-143
Claude Moatti, L'abbé de La Blèterie (1697-1772) : de l'érudition à la politique, p. 121-143. Janséniste, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, l'abbé de La Blèterie consacre sa vie à l'histoire romaine. Outre une biographie de Julien qui fut un vrai succès, et des traductions commentées de Tacite, ses articles sur les pouvoirs de l'empereur romain parviennent à des conclusions singulièrement novatrices, qui parfois anticipent sur la réflexion de Mommsen. Mais son œuvre est aussi marquée par les polémiques du XVIIIe siècle : la bulle Unigenitus, la querelle des Parlements, et surtout le débat sur les origines de la monarchie française. Sans jamais aborder ces questions de front, La Blèterie prend résolument parti contre le despotisme, pour la liberté religieuse et se fait l'écho des thèses de Bou-lainvilliers. Il soulève ainsi une question que l'historiographie ne peut négliger, celle des liens entre histoire, érudition et politique.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Claude Moatti
L'abbé de La Blèterie (1697-1772) : de l'érudition à la politique
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée T. 107, N°1. 1995. pp. 121-143.
Résumé
Claude Moatti, L'abbé de La Blèterie (1697-1772) : de l'érudition à la politique, p. 121-143.
Janséniste, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, l'abbé de La Blèterie consacre sa vie à l'histoire romaine.
Outre une biographie de Julien qui fut un vrai succès, et des traductions commentées de Tacite, ses articles sur les pouvoirs de
l'empereur romain parviennent à des conclusions singulièrement novatrices, qui parfois anticipent sur la réflexion de Mommsen.
Mais son œuvre est aussi marquée par les polémiques du XVIIIe siècle : la bulle Unigenitus, la querelle des Parlements, et
surtout le débat sur les origines de la monarchie française. Sans jamais aborder ces questions de front, La Blèterie prend
résolument parti contre le despotisme, pour la liberté religieuse et se fait l'écho des thèses de Boulainvilliers. Il soulève ainsi une
question que l'historiographie ne peut négliger, celle des liens entre histoire, érudition et politique.
Citer ce document / Cite this document :
Moatti Claude. L'abbé de La Blèterie (1697-1772) : de l'érudition à la politique. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie
et Méditerranée T. 107, N°1. 1995. pp. 121-143.
doi : 10.3406/mefr.1995.4364
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_1123-9891_1995_num_107_1_4364CLAUDE MOATTI
L'ABBÉ DE LA BLÈTERIE (1697-1772)
DE L'ÉRUDITION À LA POLITIQUE
L'abbé de La Blèterie n'eut qu'une vraie malchance - mais qui ne par
donne pas : celle d'avoir été raillé par Voltaire. D'un coup de griffe, le
maître du sarcasme disait de lui qu'il «avait fait traduire Tacite en bêtise»,
et il répétait avec dédain :
«Hier on m'apporta pour combler mon ennui le Tacite de La Blèterie.»
Cela suffit à gâcher une postérité. Le siècle ignora en effet la moitié de
son œuvre et le siècle suivant l'oublia totalement. C'est à notre époque qu'il
revient de lui avoir reconnu quelque intérêt1.
La Blèterie est né à Rennes en 1697 et mort en 17722. À l'âge de quinze
ans, il entra à l'Oratoire de Paris, puis enseigna la rhétorique et l'histoire
ecclésiastique, notamment au fameux séminaire de Saint-Magloire, dans le
Quartier latin, entre 1726 et 1730. Après l'échec de sa candidature à l'Acadé
mie française - le roi l'avait jugé trop janséniste, ainsi d'ailleurs que son ad
versaire Racine, le fils —, il fut nommé professeur d'éloquence au Collège
royal et devint membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres en
1742. À cette époque, il avait déjà publié La vie de l'empereur Julien qui,
après un succès assez important en France, fut traduite en anglais (en
1746) et en allemand (en 1752, à Francfort) et dont Voltaire ne dit pas que
1 Quelques allusions dans l'historiographie récente (notamment A.M. Battista,
La Germania di Tacito nella Francia illuminista, dans Studi urbinati, 1979, p. 93-131),
avant la redécouverte par C. Nicolet, à qui je dois de m'être intéressée au personn
age. Je tiens à le remercier ici pour m'avoir fait passer quelques centaines d'heures
sur le sujet.
2 Pour une biographie succincte, voir l'Éloge de M. l'abbé de La Blèterie, par
L. Dupuy, Histoire de l'Académie royale des inscriptions et belles-lettres, dans Mém
oires de l'Académie des inscriptions et belles-lettres (abrégé désormais MAI), 1773-
75, t. XL, p. 206-217 (repris dans Histoire et mémoires, 40, 1980, p. 206-216); voir
aussi Hoefer, Biographie générale, 1855, t.5; Michaud, Biographie universelle, t. 4,
1811, p. 580
MEFRIM - 107 - 1995 - 1, p. 121-143 122 CLAUDE MOATTI
du mal : il s'était même empressé de la lire dès sa publication3, en 1735, et
la commente à diverses reprises dans sa correspondance avec le roi Frédér
ic II4, ainsi que dans son Dictionnaire philosophique, aux articles Apostat
et Julien.
Cette biographie et la suivante, L'histoire de l'empereur Jovien (1748)5,
connurent plusieurs rééditions et valurent à leur auteur une certaine r
enommée, jusqu'en Angleterre où Gibbon ne cachait pas qu'elle l'avait in
fluencé : «Je ne saurais, écrit-il dans ses Mémoires, passer sous silence trois
livres qui eurent une lointaine influence sur l'historien de l'Empire romain.
D'abord les Lettres à un provincial de Pascal... Ensuite La vie de l'empereur
Julien de l'abbé de La Blèterie, qui me donna un premier aperçu de
l'homme et de son époque... Enfin... Y Histoire civile de Naples de Gian-
none....»6. Gibbon la cite aussi une vingtaine de fois dans le chapitre de son
Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain, consacré à Julien; et le
plus souvent pour confirmer les thèses de notre érudit contre Baronius ou
Le Nain de Tillemont. Il fait également référence à ses articles d'érudition
sur les pouvoirs de l'empereur romain parus entre 1744 et 1761 dans les Mé
moires de l'Académie1 . De ces derniers textes, on peut dire pourtant qu'ils
n'eurent qu'un écho limité : leurs thèses hardies et nouvelles ne furent re
prises ni dans Y Encyclopédie, ni dans aucun ouvrage sur l'Empire romain8;
Gibbon lui-même, qui avait acheté les vingt premiers volumes des Mé-
3 Cf. Ch. Mervaud, Julien l'Apostat dans la correspondance de Voltaire et de Fré
déric II, dans RHLF, 1976, 2, p. 725.
4 Sur cette relation épistolaire, cf. Ch. Mervaud, op. cit., p. 724-743.
5 D'abord lue à l'Académie le 13 mars 1742 et le 7 mai 1743, cette vie de Jovien
parut en 1748, suivie d'une Dissertation sur le traité de cet empereur avec les Perses
(lue à l'Académie le 27 août 1743) et d'une traduction d'œuvres choisies de Julien.
L'ouvrage fut réédité en 1776, et traduit en anglais en 1784.
6 E. Gibbon, Mémoires, tr. fr. de G. Villeneuve, Paris, 1992, p. 121.
7 «Où l'on examine si la puissance impériale chez les Romains était patrimon
iale, héréditaire ou élective», trois dissertations prononcées les 18 août 1744, 29
janvier 1745 et 20 décembre 1745, dans MAI, XIX, 1753, p. 357-381; 381-400; 401-
446; Puis «Traité de la nature du gouvernement romain sous les empereurs depuis
Auguste jusqu'à Dioclétien», en trois mémoires : Sur le titre d Imperator qu'on don
nait aux empereurs romains, dans MAI, XXI, 1754, p. 299-332; Sur les prérogatives de
la dignité de prince du Sénat dont les empereurs étaient revêtus, dans MAI, XXTV, 1756,
p. 261-288; Sur la puissance consulaire des empereurs, ibid., p. 289-344; puis De la
puissance tribunicienne des empereurs romains, dans MAI, XXV, 1759, p. 392-439; et
Dissertation sur l'empereur romain dans le Sénat, dans MAI, XXVII, 1761, p. 438-482;
et Suite de la dissertation sur l'empereur romain dans le Sénat, réponses à quelques ob
jections, ibid., p. 483-533.
8 Louis de Beaufort y fait simplement allusion dans une note de son Plan de l'an
cien gouvernement de Rome (livre II, chapitre 7), paru en 1766. L'ABBÉ DE LA BLÈTERIE (1697-1772) 123
moires de l'Académie, n'en tire presque rien et il doit surtout à ses relations
personnelles avec La Blèterie de les avoir cités. De fait, les deux hommes se
rencontrèrent plusieurs fois, notamment à l'occasion du séjour de Gibbon
en France en 1763 9. C'est sans doute sa biographie de Julien qui valut à La
Blèterie d'être compté dans l'Encyclopédie parmi les érudits célèbres de
l'Oratoire10 et, dans le rapport de Dacier à Napoléon, parmi les historiens
marquants du XVIIIe siècle...11.
Bien que peu lu, La Blèterie fut donc assez célèbre en son temps. Mais
pour compléter rapidement le tableau, citons, outre les biographies déjà ci
tées et les dissertations sur les pouvoirs impériaux, des traductions de Tac
ite12 et trois autres publications d'un autre genre : une introduction à la
nouvelle méthode, inventée par Mascleff, pour apprendre l'hébreu13, une
défense du quiétisme et des mœurs de Mme Guyon14 et encore un texte
d'attribution dout

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents