L écriture usuelle, reflet d un enseignement et signification historique - article ; n°13 ; vol.6, pg 143-165
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L'écriture usuelle, reflet d'un enseignement et signification historique - article ; n°13 ; vol.6, pg 143-165

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Description

Médiévales - Année 1987 - Volume 6 - Numéro 13 - Pages 143-165
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

Madame Françoise Gasparri
L'écriture usuelle, reflet d'un enseignement et signification
historique
In: Médiévales, N°13, 1987. pp. 143-165.
Citer ce document / Cite this document :
Gasparri Françoise. L'écriture usuelle, reflet d'un enseignement et signification historique. In: Médiévales, N°13, 1987. pp. 143-
165.
doi : 10.3406/medi.1987.1088
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1987_num_6_13_1088Françoise GASPARRI
L'ÉCRITURE USUELLE :
REFLET D'UN ENSEIGNEMENT
ET SIGNIFICATION HISTORIQUE
Plutôt que de parler d'écriture usuelle, certains paléographes préfèrent
utiliser les termes « écriture courante » ou « écriture de travail ». Comme
devant chaque problème concernant l'histoire de l'écriture, se pose donc,
ici aussi, l'éternelle question de la terminologie. « Écriture courante »
implique une idée de temps gagné, de rapidité de tracé : même si le mot
« courant » peut ne daigner que l'aspect vulgaire, quotidien de l'écriture,
l'ambiguïté demeure. L'écriture « de travail » ne prend en compte, quant
à elle, que la position de son auteur devant un texte sur lequel il a à
travailler : ce n'est qu'un aspect de la question qui est alors envisagé. Si
nous préférons ici le terme d'écriture « usuelle » (d'autres spécialistes
parlent d'écriture « commune », expression quasi-synonyme tout à fait
acceptable) c'est parce que ce mot « usuel » implique, une finalité à la
fois unique et globale : c'est l'écriture dont on se sert pour établir un texte,
l'appliquer sur un support, et dans cette seule intention, c'est-à-dire
uniquement comme instrument de mémorisation, de seule objectivation,
ou encore de communication, mais en aucun cas comme une fin en soi,
pour faire de ce texte et de son support un objet de nature esthétique,
destiné au plaisir des yeux, en quelque sorte un objet d'art, ce rôle étant
dévolu, par nature, à toute la gamme des écritures calligraphiques. En
outre le mot « usuel » implique une autre notion, un autre type de
comportement, non plus seulement de la part de l'auteur de cette écriture,
contrairement à l'expression « écriture de travail », mais également de
la part de son lecteur ou destinataire : cette écriture s'adresse aux lecteurs
qui s'intéressent au seul contenu du texte écrit et non à sa forme extérieure.
L'écriture usuelle est donc, pour son auteur comme pour son lecteur,
essentiellement un instrument, un outil de communication et rien de plus.
Pour aborder un tel sujet il conviendrait de remonter aux origines de
l'écriture et de voir à partir de quand et dans quels lieux l'écriture a joué
seulement le rôle de support d'une pensée, d'un fait, d'un événement ou,
au contraire, où et quand elle a représenté une expression indépendante,
le support visuel d'un idéal esthétique, d'une symbolique, d'une idéologie,
en un mot une fin en soi. 144
Dans le cadre de l'histoire originelle de l'écriture, ce type de recherche
est impossible, faute de documents. Il apparaît cependant que les plus
anciens témoins écrits, en Mésopotamie, sont des textes utilitaires, destinés
aux comptabilités concernant l'exploitation des terres et la gestion des biens
agricoles. L'écriture calligraphique, les monuments écrits à destination
solennelle, ostentatoire, pour la beauté formelle, arrivent bien plus tard.
Dans le monde égyptien la recherche est, quant à elle, impossible puisque
les plus anciens textes écrits témoignent déjà d'un stade évolué de l'écriture.
Si donc on se limite au monde latin, qui est déjà un très vaste domaine,
alors s'impose la nécessité de remonter à l'époque des premiers documents
écrits, de l'écriture archaïque. A travers les monuments qui nous restent,
jusqu'à la fin du IIe siècle avant J.C., et qui sont pour la plupart en écriture
plus ou moins calligraphique, on distingue des formes de nature tendant
à la cursivité et qui donnent à penser que, pour les monuments plus
modestes, une écriture plus usuelle devait exister. La question est donc
de savoir quand, dans l'Antiquité, se sont véritablement formées des
écritures diversifiées suivant le contenu et la destination du texte écrit.
L'écriture usuelle apparaît, clairement cette fois, au cours du premier siècle
avant notre ère, et l'on constate une évolution des caractères graphiques,
des formes fondamentales des lettres dans deux directions, très perceptible
au milieu du Ier siècle après J.C. (1) : une capitale régulière pour l'écriture
calligraphique, un « cursive » à des degrés divers dans les plus anciens
papyrus latins. Désormais une écriture usuelle existe vraiment, qui va se
répandre aussi bien dans les manuscrits d'usage commun de textes
littéraires que dans les documents juridiques ou de la vie pratique. Entre
l'inscription ornementale, en capitale plus ou moins solennelle, et l'acte
privé, toute une gamme d'écritures intermédiaires dans des textes gravés
ou peints sur les murs, inscriptions funéraires populaires ou inscriptions
peintes de Pompei par exemple, où les écritures de tracé plus ou moins
rapide s'appelleront « capitale rustique », « capitale semi-cursive »,
« capitale cursive », etc.
Si l'on passe de ce qu'il est convenu d'appeler « épigraphie » à ce que
l'on a coutume d'appeler « paléographie », en faisant des sauts dans le
temps, nécessaires pour disposer d'une matière documentaire suffisante,
on voit s'accentuer la différenciation entre écriture calligraphique et usuelle,
celle-ci pénétrant comme nous venons de le dire, dans les manuscrits
d'usage commun, mais parfois sous des formes plus ou moins mélangées,
donnant des écritures telles que Ponciale ou la « semi-onciale ». L'écriture
proprement usuelle, difficile à suivre dans ces temps faute de documents,
figure essentiellement sur des documents de nature précaire : tablettes de
bois ou de cire, graffites, inscriptions sur argile avant cuisson, ou encore
1. Deux fragments du cadastre d'Oxyrhynchus : cf. B. Bischoff, Paléographie de l'Antiquité
romaine et du Moyen Age occidental, trad. H. Atsma et J. Vezin, Paris, Picard, 1985, p. 64. fragments de papyrus. Elle devient progressivement, au cours des premiers
siècles de notre ère, une écriture de type minuscule, inscrite entre quatre
lignes horizontales parallèles. C'est alors qu'apparaît véritablement
l'opposition entre écriture majuscule et écriture minuscule, cette distinction
n'ayant eu, d'ailleurs, jusque-là aucune incidence sur la differentiation entre
écriture calligraphique et écriture usuelle, laquelle prend, au cours du
11e siècle, une orientation puis une forme nouvelle, à l'origine de notre
écriture médiévale et moderne (2) : nous n'en parlerons pas ici puisque
cette modification n'influe en rien sur son caractère usuel, et que là n'est
donc pas notre propos.
Pendant la période barbare et la formation des royaumes « nationaux »,
les conditions de l'écriture changent. C'est tout d'abord une période de
maintien de l'école antique dans un monde devenu chrétien, au cours de
laquelle la fréquentation scolaire est encore importante, une période au
cours de laquelle il n'y avait d'école chrétienne que l'école monastique,
limitée aux rudiments de l'enseignement élémentaire ; aux Ve et VIe siècles
la nature de l'école antique n'a pas fondamentalement changé : les enfants
des classes moyennes sont encore, pour une large part, scolarisés, ceux
de l'aristocratie avaient sans doute, quant à eux, le privilège d'une
instruction plus poussée, celle qui était toujours dispensée par les
grammairiens et les rétheurs. Toutefois, deux faits s'imposent de plus en
plus aux regards de l'historien : l'enseignement dispensé s'appauvrit, des
secteurs entiers de la culture disparaissent, avec, par exemple, le grec et,
dans une certaine mesure, la philosophie. La culture devient plus mondaine
du fait même que

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