L enseignement de l hébreu en Occident médiéval (XIIe-XIVe siècles) - article ; n°1 ; vol.57, pg 3-22
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L'enseignement de l'hébreu en Occident médiéval (XIIe-XIVe siècles) - article ; n°1 ; vol.57, pg 3-22

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Description

Histoire de l'éducation - Année 1993 - Volume 57 - Numéro 1 - Pages 3-22
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Gilbert Dahan
L'enseignement de l'hébreu en Occident médiéval (XIIe-XIVe
siècles)
In: Histoire de l'éducation, N. 57, 1993. pp. 3-22.
Citer ce document / Cite this document :
Dahan Gilbert. L'enseignement de l'hébreu en Occident médiéval (XIIe-XIVe siècles). In: Histoire de l'éducation, N. 57, 1993.
pp. 3-22.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hedu_0221-6280_1993_num_57_1_2610L'ENSEIGNEMENT DE L'HEBREU
EN OCCIDENT MÉDIÉVAL
(XIP-XIVe siècles)
par Gilbert DAHAN
L'intérêt pour la méthodologie de l'enseignement des langues
semble relativement récent : il est devenu une nécessité dans un
monde où les frontières se franchissent de plus en plus aisément et
où les échanges de toutes sortes acquièrent une dimension interna
tionale et donc plurilinguale. Or, même s'ils n'ont jamais eu l'am
pleur qu'ils possèdent aujourd'hui, les échanges entre peuples de
langues différentes (échanges commerciaux, diplomatiques, rel
igieux ou culturels) sont aussi vieux que l'organisation de l'humanité
en nations. Dans ce vaste ensemble, des problèmes particuliers se
trouvent posés par l'enseignement des langues « mortes » ou des
langues de culture (on désignera ainsi les non vernaculaires,
non utilisées dans une pratique quotidienne par des locuteurs dont ce
seraient les langues maternelles). Mal résolus aujourd'hui encore, ils
existent pourtant depuis longtemps. Ainsi, la culture occidentale au
Moyen Âge, que l'on imagine encore trop souvent repliée sur elle-
même et limitée culturellement à la seule langue latine, a été
confrontée à de telles interrogations et y a diversement répondu : à
des titres divers, avec des objectifs divers, l'arabe, le grec et
l'hébreu ont été l'objet d'un enseignement (1).
On s'interrogera ici sur l'enseignement de l'hébreu. Il s'agit
certes d'un cas atypique, tant à l'égard des langues vernaculaires
qu'à celui de l'arabe et du grec ; en effet, langues culturelles figées,
(1) Vue d'ensemble : L. Valente, I. Rosier et G. Dahan : « L'arabe, le grec,
l'hébreu et les langues vernaculaires », in Sprachtheorien in Spàtantike und
Mittelalter, Tubingen, 1993 [sous presse], S. Ebbesen, éd. (Geschichte der
Sprachtheorie). Sur l'étude du grec, on trouvera divers renseignements dans l'ouvrage
collectif The Sacred Nectar of the Greeks : the Study of the Greek in the West in the
Early Middle Ages, éd. M.W. Herren, Londres, 1988. Sur les langues vernaculaires,
voir B. Bischoff : « The Study of Foreign Languages in the Middle Ages »,
Speculum 36, 1961, pp. 209-224.
Histoire de l'éducation - n° 57, janvier 1993
Service d'histoire de l'éducation
I.N.R.P. - 29, rue d'Ulm - 75005 Paris 4 Gilbert DAHAN
mortes d'une certaine manière (1), l'arabe et le grec sont aussi, sous
des formes différentes, des langues vivantes, parlées par les locu
teurs dont elles sont la langue maternelle. En revanche, en Occident
(et sans doute même ailleurs) au Moyen Âge, l'hébreu n'est depuis
longtemps plus parlé par personne, bien qu'il continue à être une
langue liturgique et culturelle extrêmement utilisée (2) : les juifs
d'Occident parlent les langues des régions dans lesquelles ils se
trouvent (et on rappellera que les gloses bibliques du commentateur
champenois Salomon ben Isaac de Troyes, ou Rashi, fournissent un
riche lexique de termes français - dont il s'agit, pour beaucoup, de
la première attestation) (3) ; mais ils prient en hébreu (comprennent
leurs prières pour avoir appris l'hébreu à l'école) et écrivent leurs
livres en hébreu. Ce n'est cependant pas à l'enseignement de
l'hébreu aux juifs que nous nous intéresserons ici, mais à l'enseigne
ment de cette langue chez les chrétiens d'Occident, surtout du XIIe
au XIVe siècle ; l'hébreu leur apparaît, au même titre que le latin
pour eux-mêmes, comme une langue culturelle, celle d'un groupe
minoritaire qui vit parmi eux, mais aussi, puisque langue sacrée,
comme la langue d'une culture dont se réclame le christianisme. La
nécessité, pour une partie au moins des lettrés, d'apprendre l'hébreu
a été ressentie au XIIIe siècle, tant du fait du renouvellement des
études bibliques (4) qu'en fonction des exigences d'une mission et
(1) L'arabe du Coran (mais l'arabe littéraire, objet d'étude aussi des médiévaux,
est une langue culturelle vivante quoique seulement écrite), le grec d'Aristote.
(2) À la différence de ce qui s'est produit dans l'Egypte hellénisée, où l'hébreu
n'était même plus une langue culturelle (le grec jouait ce rôle pour les juifs) et ne gar
dait peut-être qu'une fonction liturgique.
(3) La bibliographie sur ce sujet est assez ancienne, mais toujours utile : A.
Darmesteter et L. Brandin : Les gloses françaises de Raschi dans la Bible, Paris,
1909 ; A. Darmesteter et D.S. Blondheim : Les gloses françaises dans les comment
aires talmudiques de Raschi. I. Textes des gloses, Paris, 1929 ; D.S. Blondheim : Les
gloses françaises dans les commentaires talmudiques de Raschi. Etudes lexicogra-
phiques, Baltimore, 1937. Plus récemment, et en attendant d'autres travaux du même
auteur, voir le court chapitre de M. Catane : « Les gloses en français », annexé à
l'ouvrage de S. Schwarzfuchs : Rachi, Paris, 1991, pp. 135-145. Les gloses vernacul
aires (laazim) continuent à accompagner la littérature rabbinique de la France du
nord pendant tout le XIIIe ; il est probable qu'une traduction française de l'Ancien
Testament circule au siècle chez les juifs en France du nord, pour qui elle a un
rôle essentiellement pédagogique ; voir les travaux de M. Banitt : « Les poterim »,
Revue des études juives 125, 1966, pp. 21-33 ; « Le renouvellement lexical de la
Version Vulgate des Juifs de France au Moyen Âge dans le Glossaire de Leipzig »,
Romania 102, 1981, pp. 433-455.
(4) Voir notamment B. Smalley : The Study of the Bible in the Middle Ages,
3e éd., Oxford, 1983 ; G. Dahan : « La connaissance de l'hébreu dans les correctoires
de la Bible du XIIIe siècle. Notes préliminaires », Revue théologique de Louvain 23,
1992, pp. 178-190. U enseignement de l'hébreu en Occident médiéval 5
d'une polémique également renouvelées (1). Laissant de côté ici les
aspects divers de la connaissance de l'hébreu en Occident chrétien,
pour lesquels on est mieux renseigné (2), nous tenterons d'examiner
les conditions concrètes de cet enseignement, non sans faire obser
ver que la paucité des documents interdira une description complète
et qui réponde à toutes les questions que le pédagogue ou l'historien
de l'éducation est tenté, au XXe siècle, de poser.
1. LIEUX D'ETUDES
On dispose de quelques éléments de réponse à la première ques
tion : où enseigne-t-on l'hébreu ? Il va de soi que le système scolaire
médiéval de l'Occident (3) n'intègre pas dans ses programmes
l'enseignement de cette langue (pas plus que celui du grec ou de
l'arabe) : ni les écoles élémentaires (écoles monastiques ou cathé
drales), ni l'équivalent de notre second cycle (à partir du XIIIe siècle
les facultés des arts) ni l'Université ne l'envisagent systématique
ment (on peut en dire autant de nos jours, sauf exceptions). Tout au
plus explique-t-on, dans les cours consacrés à la Scriptura sacra, les
quelques mots rencontrés en transcription ici ou là dans les textes
bibliques. Cependant, on constate, comme de nos jours, des excep
tions à cette règle et on trouve des exemples (si rares soient-ils) dans
chacun des cadres institutionnels existants.
(1) Voir G. Dahan : La polémique chrétienne contre le judaïsme au Moyen Âge,
Paris, 1991.
(2) Voir G. Dahan : Les intellectuels chrétiens et les juifs au Moyen Âge, Paris,
1990, pp. 239-270. Étant donné le point de vue de la présente recherche, on ne sera
pas étonné de ne pas trouver mentionnés divers hébraïsants du Moyen Âge, à propos
desquels on ne possède pas de données relatives à l'enseignement de la langue. Pour
la même raison, et du fait que la plupart d'entre eux ne sont

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