L exil des Algériens au Québec - article ; n°2 ; vol.13, pg 197-215
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L'exil des Algériens au Québec - article ; n°2 ; vol.13, pg 197-215

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Description

Revue européenne de migrations internationales - Année 1997 - Volume 13 - Numéro 2 - Pages 197-215
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 43
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Myriam Hachimi Alaoui
L'exil des Algériens au Québec
In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 13 N°2. pp. 197-215.
Citer ce document / Cite this document :
Hachimi Alaoui Myriam. L'exil des Algériens au Québec. In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 13 N°2. pp.
197-215.
doi : 10.3406/remi.1997.1558
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1997_num_13_2_1558Revue Européenne des Migrations Internationales, 1997 (13) 2 pp. 197-215 197
NOTE DE RECHERCHE
L'exil des Algériens au Québec
Myriam HACHIMI ALAOUI*
Depuis le début des années 1990, la guerre civile en Algérie qui oppose les
islamistes et le gouvernement dirigé par l'armée a contraint de nombreux Algériens à
s'exiler. Le Canada, plus spécifiquement le Québec, est devenu une destination
privilégiée par les Algériens en raison du resserrement des frontières européennes, et
plus particulièrement de celles de la France. Alors qu'on comptait un peu plus de deux
mille Algériens au Québec au recensement de 1986, dix ans plus tard, on en compte
plus de six mille. Parmi eux, beaucoup sont venus — selon le vocabulaire juridique
consacré au Québec — en tant que « revendicateur » de statut de réfugié.
Notre attention1 s'est portée sur l'expérience des premières années d'exil des
réfugiés algériens2. Soulignons toutefois que la catégorie « réfugié algérien » ne
désigne pas une population homogène mais un ensemble d'individus aux idéologies qui
s'affrontent. Dans le même statut de réfugié, sont subsumées des personnes menacées
par le gouvernement en raison de leur appartenance à des partis islamistes, et d'autres
dont la vie est mise en danger par les intégristes religieux. Cette ambiguïté souligne la
complexité de l'exil algérien dont la source se trouve dans la crise que traverse depuis
quelques années l'Algérie. Nous nous sommes plus particulièrement intéressée à une
population de « démocrates » algériens, réfugiés à Montréal en raison de leurs activités
militantes. L'appellation de « démocrate » en Algérie n'est pas — nous le verrons —
dénuée de complexité (Khelladi et Virolle, 1995 ; Gadant et Harbi, 1995). Sous ce
terme, nous désignons les personnes qui « font partie d'un courant qui se définit par
son opposition radicale aux islamistes au nom d'un « projet de société moderne »,
laïque » (Gadant et Harbi, 1995).
* Doctorante en sociologie à l'EHESS (Paris), Les Grands Mirebeaux, 36400 la Châtre.
1 Cette recherche est une partie d'une étude en cours comparant l'exil algérien au Québec et en
France. Les données présentées ici ont été recueillies à Montréal durant l'année 1995-1996.
Nous tenons tout particulièrement à remercier M. Denys Cuche et Mme Deirdre Meintel pour
leurs précieux conseils et leur disponibilité.
2 On trouvera en annexe les caractéristiques des personnes interviewées et la méthode de travail. 198 Myriam HACHIMI ALAOUI
L'exil, en tant que migration forcée, s'impose comme une rupture violente.
Brutalement, l'exilé se trouve coupé des repères autour desquels se constituait sa vie
quotidienne. Comme l'a justement souligné Ana Vasquez (1987), « Le départ
dépossède chacun de sa visibilité sociale, le statut d'exilé est porteur d'anonymat : on
devient « n'importe qui », le regard des autres glisse sans aucune connivence, le nom
n'évoque plus rien ». Quels sont les moyens mobilisables dont disposent les exilés
pour faire face à cette situation ? Notre propos est ici d'étudier les stratégies
identitaires mises en place par ces exilés, stratégies leur permettant de construire de
nouvelles formes de vie quotidienne. L'expérience accumulée dans le pays d'origine,
notamment celle du militantisme, peut-elle se révéler une ressource dans la société
d'installation ?
La notion de stratégie identitaire, centrale à notre réflexion, renvoie à un
aspect particulier de la notion d'identité. Dans cet article, l'approche du phénomène
identitaire s'inscrit dans une perspective aujourd'hui partagée par un grand nombre de
chercheurs. Le premier point d'accord réside dans la prise en compte du caractère
dynamique de l'identité. Ensuite, une place importante est accordée à l'interaction, car
il n'existe pas d'identité en dehors d'un rapport à « l'Autre ». Enfin, l'identité est
envisagée à travers son caractère multidimensionnel. Le concept de stratégie identitaire
permet de rendre compte de ces trois caractéristiques. Il permet aussi de définir
l'identité comme une construction sociale qui s'actualise en fonction des différentes
situations d'interaction. L'individu est alors considéré comme un acteur social qui n'est
pas dépourvu d'une certaine marge de manoeuvre. Comme le suggère pertinemment les
métaphores « d'outils » et de « boîte à outils » de George Devereux, l'individu peut
mettre en avant l'un ou l'autre de ses referents identitaires selon son appréciation de la
situation sociale dans laquelle il est engagé. Cependant, comme le remarque René
Gallissot, « soumise à des expressions dominantes, (...) la disponibilité référentielle de
l'identité n'est pas indéfinie » (1987). En effet, les stratégies identitaires dépendent des
rapports sociaux qui qualifient la situation d'interaction dans laquelle s'exprime
l'identité. Une des hypothèses des études sur les migrations porte sur le rôle
fondamental de l'attitude de la société d'exil sur les affirmations identitaires des
migrants. A partir de l'assignation du groupe majoritaire, les stratégies prennent des
formes différentes. Soulignons toutefois que ces stratégies, comme l'a montré Pierre
Bourdieu (1980), ne sont pas toujours le résultat de finalités conscientes clairement
définies et exprimées par les individus.
L'étude des stratégies identitaires des réfugiés algériens va permettre de rendre
compte de la mobilité de l'identité. La possibilité de son instrumentalisation constitue
une ressource pour les individus qui leur permet de s'ajuster à des situations
contraignantes.
LE CHOIX DU QUEBEC COMME TERRE D'EXIL
L'immigration algérienne vers le Canada est restée très marginale jusqu'au
début des années 1990, elle se compose de deux vagues distinctes. La première
REMI 1997 (13) 2 pp. 197-215 L'exil des Algériens au Québec 199
s'amorce après la Deuxième Guerre Mondiale mais ne prend de l'ampleur qu'à partir
des années soixante. Elle est composée d'une population urbaine, très scolarisée et
caractérisée par une forte proportion de professions libérales. Une très faible part
d'immigrants se retrouve dans la catégorie de réfugié. La deuxième vague
d'immigration prend date du début des années 1990, en raison de la crise politique et
sociale qui sévit en Algérie. Il y avait 3870 immigrants d'origine algérienne au
recensement de 1991 et le nombre de ressortissants algériens est passé de 470 en 1990
à 860 en 1991, les réfugiés représentant alors 8 % du total. Les chiffres officiels de
demandes d'immigration acceptées indiquent une augmentation de 54 % entre 1993 et
1994. A la suite de l'intensification de la crise algérienne, le nombre de demandeurs
d'asile n'a cessé de croître. Tandis que les demandes étaient au de 255 durant
l'année 1993, elles sont passées à celui de 737 en 1994 (Berger, 1995). Aussi, au cours
des deux premiers mois de l'année 1995, 195 réfugiés algériens sont entrés au Canada,
soit fois plus que précédente, la destination principale étant la ville de
Montréal. Depuis l'automne 1995, l'Algérie se place parmi les dix principaux pays
d'origine des immigrants et demandeurs d'asile qui arrivent chaque mois au Québec.
Un grand nombre de ces exilés algériens ont d'abord tenté de trouver asile en
France, en raison de la proximité géographique des deux pays, de l'histoire commune
qui les lie et d'u

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